Déclaration de M. François Patriat, secrétaire d'Etat aux PME, au commerce, à l'artisanat et à la consommation, sur les professions libérales, la réforme des baux libéraux, la recherche d'un statut du collaborateur libéral, Paris le 6 juin 2001.

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Circonstance : Clôture des travaux de la Commission permanente de concertation des professions liberales, à Paris le 6 juin 2001

Texte intégral

Intervention de François Patriat, secrétaire d'Etat aux PME, au Commerce à l'Artisanat et à la Consommation
Clôture des travaux de la Commission permanente
de concertation des professions libérales
6 juin 2001
En février dernier, devant le congrès de l'UNAPL, je m'étais engagé à participer à la tenue de deux réunions annuelles de la Commission permanente de concertation des professions libérales qu'animent, avec le talent que vous savez, le délégué interministériel aux professions libérales Maître Edouard DE LAMAZE et son adjoint Patrick SAMUEL.
Ma présence parmi vous aujourd'hui est donc, tout d'abord, le respect d'une parole donnée. N'y voyiez surtout pas, de ma part, une quelconque figure de style imposée. Je souhaite simplement, à cette occasion, mieux comprendre vos préoccupations, pour tenter d'y apporter quelques réponses. Elu de la République, ma conception de la politique me porte en effet à privilégier avant tout le contact direct et permanent avec l'ensemble de nos concitoyens, d'être à leur écoute. Le dialogue que j'ai engagé avec vous aujourd'hui en est, me semble-t-il, un exemple privilégié. Ayant moi-même été confronté aux réalités du monde libéral, à ses satisfactions comme à ses difficultés, je suis, à ce titre, doublement heureux d'avoir pu échanger avec vous ces quelques réflexions. Mon soucis est de comprendre vos problèmes et vos difficultés pour tenter d'y apporter des réponses adaptées.
C'est donc avec un grand plaisir et un réel intérêt que j'ai participé à ces deux heures de débats. Je vous remercie bien sincèrement pour la qualité de vos réflexions. Elles m'ont beaucoup appris.
Je compte sur les réflexions de la CPC pour faire des propositions de réforme et d'amélioration de votre statut.
Mesdames messieurs, la CPC représente, à mes yeux, les forces vives des professions libérales. L'assemblée aujourd'hui représentée en est le témoignage. Exemple d'une concertation sociale encore insuffisamment ancrée dans les mentalités de notre pays, elle doit être un " laboratoire d'idée " pour vos professions.
Reflet de la diversité des grandes familles libérales (professions de la santé, du droit, du chiffre et des professions techniques), comme de leur statut multiples (professions réglementées et non réglementées), la CPC intègre les organisations syndicales représentatives de vos professions et en premier lieu l'UNAPL. Les ordres professionnels, dont je salue la présence aujourd'hui prennent également, je le sais, une part active à ses travaux. Les différentes administrations, aujourd'hui représentées dans leur diversité (Chancellerie, Ministères de l'emploi et de la solidarité, de l'Education, de la Culture, de l'intérieur, mais aussi plusieurs directions du MINEFI) témoignent, s'il en était besoin, de l'aspect interministériel de la politique des pouvoirs publics à direction des professions libérales. La diversité des questions abordées par la CPC, comme leur technicité, rend indispensable cette présence administrative plurielle et j'insiste sur ce point. Elle seule permet aux débats d'idées de se canaliser en propositions concrètes, pour éventuellement déboucher sur des réformes.
Instance de concertation entre les pouvoirs publics en la personne de votre délégué interministériel, Edouard DE LAMAZE, et les différentes composantes des professions libérales, la CPC est présidée et voit son secrétariat assuré par la DIPL. Administration de mission, à l'écoute de toutes les professions libérales, la DIPL doit certainement beaucoup à la CPC. Elle est sa "boîte à idées ". A cet égard, Mesdames et messieurs les membres des différents groupes de travail de la CPC, je compte pleinement sur votre capacité de proposition. La DIPL saura, avec l'appui des différentes administrations, transformer vos réflexions en propositions concrètes, que je me ferai fort de défendre chaque fois qu'elles m'apparaîtront justifiées.
Pour m'en tenir à quelques une des récentes mesures prises en faveur des libéraux, les travaux de la CPC ont joué un rôle d'aiguillon dans notre action.
Je pense, tout d'abord, à la réforme des baux libéraux. Vous le savez, elle fait partie intégrante du projet de loi DDOEF, soumis à l'examen du Conseil des Ministres le 30 mai dernier. En dépit d'un calendrier parlementaire, très chargé en cette fin de législature, je vous confirme que cette réforme sera examinée en première lecture par l'assemblée nationale à l'automne.
Par ailleurs, la question du trimestre d'accouchement ainsi que celle des conjoints collaborateurs de professionnels libéraux ont déjà fait l'objet d'un premier examen par l'assemblée nationale, après que nous les ayons introduites sous forme d'amendement gouvernemental au projet de loi de modernisation sociale.
Comme je m'y suis engagé en février dernier, la question des pensions de réversions sera rapidement traitée. J'en examine actuellement les modalités technique de mise en uvre. Nous nous efforcerons, à cet égard, de trouver un véhicule législatif adapté.
J'entends, par ailleurs, faire évoluer le dispositif législatif relatif aux locaux professionnels. Il est aujourd'hui inadapté et constitue, dans les grandes agglomérations, une entrave à la première installation des libéraux.
Comme vous le savez, l'épineuse question de la taxe professionnelle n'est pas encore réglée. Différentes pistes qui permettraient de limiter les inconvénients de cette réforme sont actuellement à l'étude. Je reste persuadé qu'une suppression graduelle de ce régime spécifique s'appliquant aux professions libérales serait une mesure de justice fiscale. Je m'en suis ouvert, encore récemment, au Ministre de l'économie et de finances. Je défendrai ce point de vue dans le cadre des arbitrages préparatoires de la loi de finances 2002.
Mais venons en maintenant aux travaux de ces douze derniers mois.
Voici maintenant un an que les sous-commissions de la CPC se sont mises au travail. Nous avons entendu, avec le plus grand intérêt, leur "rapport d'étape ". Je salue et remercie chaleureusement leurs Présidents respectifs : Guy ROBERT, Béchir CHEBBAH, Christian RONDEAU et Edouard SALUSTRO. Mesdames, messieurs les membres de la CPC, je tenais également à saluer les efforts déployés par chacune et chacun d'entre vous au sein de ces différents groupes de travail. Je sais ce que coûte une journée d'absence de son cabinet. Cet effort de votre part est méritoire et méritait d'être souligné. Soyez-en chaleureusement remerciés. La DIPL me tient d'ailleurs régulièrement informé de l'état d'avancement, comme du degré de mobilisation de chacun de ces groupes. Je lance, à cet égard, un appel à l'assiduité pour chacun d'entre vous. Il en va de la crédibilité même de cette forme de concertation sociale, à laquelle je suis attaché. Elle est tout à fait indispensable au plein succès de vos travaux.
Messieurs les Présidents, vous avez, ce matin, présenté un rapport d'étape de votre travail. Vos différents travaux sont prometteurs. Il serait cependant, à ce stade, un peu prématuré d'en tirer des conclusions définitives. Dans mon esprit, la réunion d'aujourd'hui est destinée à faire le point de vos travaux, pour éventuellement vous permettre de "rectifier le tir ", avant que vous ne me remettiez, en fin d'année vos rapports définitifs.
Voici, à cet égard, quelques réflexions, encore provisoires, sur certains des thèmes que nous avons abordé ensemble.
Tout d'abord, concernant vos travaux sur l'amélioration de l'image des professions libérales, j'adhère pleinement à l'idée selon laquelle il convient de sensibiliser les jeunes lycéens et étudiants aux professions libérales. Vous soulignez le déficit d'information de l'enseignement secondaire et supérieur sur les réalités de l'exercice libéral contemporain. Je partage la plupart de vos propositions. Elles permettront, j'en suis sûr, de dégager des pistes concrètes d'amélioration de l'existant. Nous nous efforcerons de les finaliser avec le Ministère de l'éducation nationale (je pense à la mission d'orientation du Ministère de l'éducation, à l'ONISEP), en liaison avec toutes les parties intéressées.
Concernant la recherche d'un statut du collaborateur libéral, vous avez bien noté qu'il s'agit d'une question complexe. Je compte, avec l'appui de la DIPL, relancer ce dossier. A cet égard, vous soulignez que les voies offertes par le salariat ne constituent pas une réponse adéquate à une bonne insertion des jeunes dans les professions libérales. Je suis sensible à cet argument. Cette réforme devrait permettre aux jeunes diplômés de trouver un cadre leur ménageant suffisamment d'indépendance, tout en n'induisant pas des coûts sociaux qui ne correspondent pas à l'économie même de l'exercice libéral. Alors que certaines professions disposent déjà d'un tel statut (avocats), d'autres en auraient un grand besoin (architectes, vétérinaires). Il conviendra d'analyser les différentes formes possibles que peut revêtir la " collaboration libérale ". Pour traiter cette question, il convient, j'en suis persuadé, de tenir compte de la spécificité de l'exercice libéral. Or sa définition, indispensable pour mener à bien cet exercice, vous l'avez souligné, n'est pas chose facile.
Sur la question de l'interprofessionnalité. Au terme du rapport de Maître Pierre BERGER, j'ai noté, et c'est un fait nouveau, qu'il n'existe actuellement pas de véritable inquiétude, ni d'attente forte sur cette question de la part de vos professions. Ce constat contraste avec la vivacité de certaines prises de position passées, notamment quant à la concurrence des " big five ". Nous en mesurerons les implications et la réalité. En la matière, votre souhait est, avant tout, de voir respectées les règles de concurrence loyale. Par ailleurs, vous constatez les difficultés, au regard des règles de déontologie professionnelle (secret professionnel, publicité). J'attends des propositions opérationnelles de votre part à cet égard. J'ai pris note avec intérêt de la typologie que vous avez dégagé en ce qui concerne les différentes formes d'exercice multidisciplinaire. Ici aussi, je vous invite à préciser les différents points sur lesquels une réflexion pourrait continuer à être développée et des réformes introduites.
Concernant les statistiques, et pour m'en être entretenu avec Béchir CHEBBAH, le Président de l'UNASA, je suis conscient du manque d'informations sur les libéraux. Un document, préparé par la DEcas, en liaison avec la DIPL et la CPC, qui a pour titre " les chiffres clés des professions libérales " comblera ce vide en améliorant l'existant. par ailleurs, la DIPL achève la mise eu point d'une maquette établie de façon expérimentale, en liaison avec l'URSAFF de Seine et Marne et l'UNAPL. Elle permettra de suivre la démographie des entreprises libérales. Continuons ensemble nos efforts pour améliorer ces outils.
S'agissant du traitement des entreprises en difficulté, je connais l'intérêt qu'attache Maître SOCQUET-CLERC-LAFONT à cette question. Comme votre commission, je constate le vide juridique sur cette question. Il concerne les libéraux, plus particulièrement ceux exerçant à titre individuel. Je partage donc les conclusions de votre commission. Il convient, me semble-t-il, de réserver un régime spécifique de prévention et de règlement amiable des difficultés qui serait inspiré de celui qui existe pour les agriculteurs. Nous travaillerons en ce sens avec la Chancellerie dans le cadre de la finalisation du projet de loi sur les entreprises en difficultés.
Concernant l'impact positif des nouvelles technologies de l'information sur les professions libérales, il m'apparaît que la question des différents supports de publicité sur le WEB devrait être approfondie au regard des règles de déontologie professionnelle, en liaison notamment avec la pratique décisionnelle de la Commission européenne en la matière. Je partage votre approche de la nécessité d'améliorer la formation initiale et continue des professions libérales en matière d'utilisation des outils informatiques en utilisant de manière plus volontariste les outils de collecte de formation professionnelle à cette fin.
Concernant la signature électronique, un décret du 30 mars dernier, pris en application de la loi du 13 mars 2000, permet aux professions libérales de rentrer de plein pied dans l'aire de dématérialisation des documents. Il s'agit d'un enjeu de première importance pour vos professions. Nous veillerons à ce que des normes standards de qualité, de nature à améliorer les systèmes et leur interopérabilité, soient mis en place en tenant compte des intérêts des différents intervenants dans la "chaîne de confiance " et qu'ils répondent bien aux attentes des professions libérales (notaires, huissiers, greffiers des tribunaux de commerce).
Un mot enfin des aspects internationaux de l'entreprise libérale. A cet égard, il me semble que nous devrions nous efforcer, au plan communautaire comme au niveau des règles de l'OMC, de préserver ce qui fait la spécificité des entreprises libérales. Le danger que certaines de vos organisations syndicales représentatives se plaisent à dénoncer pourrait bien venir de cette approche non homogène des professions réglementées au plan international. Cette question doit continuer à nous mobiliser. Appuyez vous sur les administrations compétentes en la matière (je pense notamment la Direction des relations économiques extérieures du MINEFI), mais surtout développez et renforcez votre réseau d'influence tant à Bruxelles, qu'à Genève au travers du CEPLIS.
Voilà, Mesdames, messieurs, les quelques réflexions dont je voulais vous faire part sur le bilan d'étape des travaux de votre Commission. Avec votre aide, il m'incombe de veiller à ce que la spécificité, comme l'existence des professions libérales, soit correctement prise en compte. J'y veillerai chaque fois que des dispositions touchant à l'environnement réglementaire de vos entreprises sont crées ou modifiées. Ce n'est pas une tâche facile. J'en veux pour preuve, la complexité et la diversité des questions que vous avez évoquées devant moi ce matin.
Je me félicite des débats d'aujourd'hui. Ils m'ont, je pense, permis de mieux appréhender vos préoccupations, vos interrogations, voir les revendications qui animent vos professions prises dans leur ensemble. Soyez-en remerciés.
Je salue votre dévouement à "la cause libérale ".
Je resterai à votre écoute, tout comme mes collaborateurs et la DIPL. A cet égard, ils me proposeront les amendements destinés à améliorer le "statut " d'entreprise libérale, chaque fois que votre environnement compétitif pourra s'en trouver amélioré. J'en apprécierai l'opportunité et m'efforcerai d'en mesurer la pertinence pour préparer mon programme de travail de l'année 2002 pour les professions libérales. Comme je l'ai publiquement fait observer lors du Congrès de l'UNAPL, mon action s'inscrit dans la durée. Vous pourrez compter sur ma détermination pour faire avancer les choses.
A cet égard, cette réunion sera suivie, en fin d'année, par la remise de vos rapports définitifs. J'en attends beaucoup. Ensemble, nous tirerons alors les conclusions de vos travaux. D'ici là, je compte sur votre travail et votre mobilisation pour affiner et encore améliorer ce qui doit encore l'être dans vos rapports respectifs.
Je vous remercie chaleureusement pour votre participation et l'échange de vues fructueux auquel elle a donné lieu.

(Source http://www.pme-commerce-artisanat.gouv.fr, le 11 juin 2001)