Interview de M. Thierry Mariani, secrétaire d'Etat chargé des transports, à France Inter le 25 novembre 2011, sur le droit de vote des étrangers aux élections locales.

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Média : France Inter

Texte intégral

PASCALE CLARK Combien de signatures à la pétition de la droite populaire contre le droit de vote des étrangers aux élections locales ?
 
THIERRY MARIANI Plusieurs dizaines de milliers, mais on est… on est un peu en dessous de ce qu’on espérait, il faut être honnête, parce qu’on n’est pas encore très bien référencés sur GOOGLE, voilà. On est en train de régler quelques problèmes techniques…
 
PASCALE CLARK Ah ! C’est la seule raison ?
 
THIERRY MARIANI Je pense, parce que faites l’expérience vous-même et vous verrez, on est en 2ème ou 3ème page.
 
PASCALE CLARK Plusieurs dizaines de milliers plus une de signature, celle de Nicolas SARKOZY. A votre avis, pourquoi le président de la République a-t-il changé d’avis, alors que ça fait 10 ans qu’il se dit favorable au vote des étrangers ?
 
THIERRY MARIANI Il n’a pas changé d’avis, je crois qu’il ne faut pas caricaturer. Il…
 
PASCALE CLARK Ah ben ! Il disait oui pendant 10 ans et il a dit non…
 
THIERRY MARIANI Il disait oui sous certaines conditions, il disait oui par exemple sous réserve de réciprocité, c’est ce qui existe par exemple au niveau européen. Un Espagnol peut voter en France, un Français peut voter en Espagne. Là, il s’agit d’étrangers non-communautaires, et depuis ces 5 années où il est… enfin bientôt 5 années où il est président de la République, il n’a jamais été question de mettre cette réforme à l’ordre du jour. Vous savez cette réforme…
 
PASCALE CLARK Alors des étrangers non-communautaires, c’est danger ?
 
THIERRY MARIANI Les étrangers non-communautaires ce n’est pas le même projet, ce n’est pas la même citoyenneté, ce n’est pas la même communauté. Les étrangers non-communautaires, s’ils sont en France depuis 5 ans, ils peuvent devenir Français. S’ils ne veulent pas devenir Français – ce qui est un choix qui est tout à fait respectable – dans ce cas-là ils n’ont pas le droit de vote. Je crois que Nicolas SARKOZY l’a dit et répété, le droit de vote doit demeurer un droit attaché à la nationalité.
 
PASCALE CLARK Alors quand il était pour, c’est-à-dire il y a encore peu de temps, Nicolas SARKOZY employait cet argument : un étranger en situation régulière, qui travaille, paie des impôts depuis au moins 10 ans, il peut peut-être élire son maire, non, sans qu’il y ait drame !
 
THIERRY MARIANI Ecoutez, qu’est-ce qui…
 
PASCALE CLARK C’était son argument !
 
THIERRY MARIANI Qu’est-ce qui fait la nation, qu’est-ce qui fait la citoyenneté ? Ce n’est pas le fait d’être présent et de payer des impôts, c’est le fait de partager des valeurs, de partager un projet, de partager une langue, voilà. On peut tout à fait être en France depuis 10 ans et ne pas parler un mot de français. On peut tout à fait être en France depuis 10 ans et ne pas à partager les valeurs (j’allais dire) qui font notre République, voilà. Quand on partage ces valeurs, eh bien ! Tout simplement, je le répète, on peut devenir Français. Ce qu’a dit Nicolas SARKOZY il y a 48 h 00, c’est que cette réforme était hasardeuse, sincèrement ce n’est pas l’actualité la plus brûlante et la plus grande nécessité pour ce pays. Et deuxièmement effectivement, que la France c’était un pays ouvert, on le montre par tous ceux qui, chaque année, acquièrent notre nationalité. Simplement, je le répète, quand on devient Français ça veut dire qu’on parle le français et qu’on respecte certaines valeurs.
 
PASCALE CLARK Alors il se trouve Thierry MARIANI que ce combat, votre combat, non au vote des étrangers, vous l’avez d’abord développé dans MINUTE, hebdomadaire d’extrême-droite. Alors forcément vous savez ce que c’est, il y a soupçon !
 
THIERRY MARIANI Ecoutez…
 
PASCALE CLARK L’UMP bichonne le FN à quelques mois de la présidentielle !
 
THIERRY MARIANI D’abord… non, non, pas du tout, attendez, je… quand je fais une interview dans LIBERATION, on ne me dit pas que je passe à l’extrême-gauche…
 
PASCALE CLARK LIBERATION est un journal d’extrême-gauche donc !
 
THIERRY MARIANI Non, non mais… ou à gauche, ou à gauche, voilà. Bon écoutez, il est quand même plus à gauche que Le FIGARO, voilà, donc tout simplement…
 
PASCALE CLARK Ça je vous l’accorde mais enfin MINUTE, MINUTE, vous ne regrettez pas d’avoir parlé dans MINUTE ?
 
THIERRY MARIANI Pas du tout, pas du tout, je crois d’abord – excusez-moi – que quand on veut viser une cible, on prend le journal qui est lu par cette cible. Si je veux parler aux chasseurs…
 
PASCALE CLARK Ah ! Bon, d’accord, donc vous admettez de viser la cible Front National !
 
THIERRY MARIANI Pourquoi ? Parce que vous, vous avez… votre rêve c’est que 15 % des électeurs continuent à voter dans une impasse, c’est-à-dire Front National ?
 
PASCALE CLARK Non mais c'est pour les cibles dont vous parliez à l’instant là !
 
THIERRY MARIANI La cible c’est tous les Français qui, aujourd’hui, sont par moment désespérés et réservent leur vote au Front National. C'est leur dire : ce vote du Front National n’apporte aucune solution, Madame le PEN exploite la désespérance, exploite effectivement des formules mais n’apporte aucune solution. Deux exemples, sur le burqa c’est Nicolas SARKOZY qui justement a proposé des solutions, vous voyez la loi qu’on a votée, Marine le PEN était contre. Sur les prières de rue, quand Claude GUEANT trouve une solution, Marine le PEN est contre. Et donc je m’adresse dans MINUTE aux électeurs du Front National ou à tous ceux qui ont une certaine idée de la nation, pour leur dire « vous faites fausse route ».
 
PASCALE CLARK En tout cas, les tracts que vous distribuez actuellement, c’est du pur FN dans la terminologie : « je ne veux pas que les Algériens et les Marocains…
 
THIERRY MARIANI Ce n’est pas marqué ça sur le tract, je suis désolé !
 
 PASCALE CLARK Ah si, c’est écrit, et c'est écrit…
 
THIERRY MARIANI Ah non, non, j’ai écrit… tout ça, c’est des tracts…
 
PASCALE CLARK En 2014, souhaitez-vous que 4 millions d’étrangers choisissent les 36.000 maires de France ?
 
THIERRY MARIANI Ça oui, ça oui. Non mais attendez…
 
PASCALE CLARK Et il n’y a pas le logo UMP d’ailleurs sur vos tracts.
 
THIERRY MARIANI C’est possible.
 
PASCALE CLARK Ah ! C'est sûr même, c’est certain.
 
THIERRY MARIANI Attendez, on parle d’étrangers, on ne parle pas de nationalité, le tract je le tiens à votre disposition, on ne cite aucune nationalité. Simplement c’était le dernier congrès des maires avant l’élection présidentielle…
 
PASCALE CLARK « Je ne veux pas que les Algériens ou les Marocains fassent la loi dans mon pays ».
 
THIERRY MARIANI Non, je suis désolé, vous savez ce tract, je pense que vous vous trompez complètement, vous l’avez repris… vous l’avez vu ce tract Madame CLARK ?
 
PASCALE CLARK Oui, je l’ai vu oui.
 
THIERRY MARIANI Sortez-le, il n’y a pas cette phrase…
 
PASCALE CLARK Je ne l’ai pas sur moi, excusez-moi je ne le porte pas…
 
THIERRY MARIANI Non mais il n’y a pas cette phrase. Si vous voulez on fait l’expérience, il n’y a pas cette phrase, donc n’inventez pas ou…
 
PASCALE CLARK Donc vous la reniez cette phrase ?
 
THIERRY MARIANI Je ne renie pas cette phrase puisque je ne l’ai pas écrite, je voudrais quand même qu’on arrête de déformer tout ce qu’on dit. Qu’est-ce qu’on dit ? On dit : 4 millions d’étrangers ne doivent pas participer aux élections locales, mais je n’ai jamais écrit cette phrase, et franchement ce n’est pas honnête de sortir ça, voilà. Deuxièmement, je dis simplement qu’aux élections municipales, 4 millions d’étrangers qui votent dans certaines villes, ça fait des pourcentages énormes et ça peut changer les résultats, voilà, c’est tout. Et c’est ce que pense, excusez-moi, aussi beaucoup de Français…
 
PASCALE CLARK Non mais vous terminez votre phrase ou…
 
THIERRY MARIANI C’est ce que pensent aussi beaucoup de Français.
 
PASCALE CLARK Ah ! D’accord. Autre chose, est-ce que vous confirmez qu’aux législatives vous serez candidat sur la circonscription Asie-Océanie des Français de l’étranger ? C’est fait ?
 
THIERRY MARIANI Ce n’est pas une surprise, j’ai été investi le 11 avril et je m’occupe des Français de l’étranger à l’UMP depuis 11 ans.
 
PASCALE CLARK Mais la zone est la bonne, Asie-Océanie ?
 
THIERRY MARIANI Absolument, Asie-Océanie.
 
PASCALE CLARK Donc vous parlez chinois, vous allez apprendre le chinois ?
 
THIERRY MARIANI Je ne parle pas… Je m’adresse aux Français, c’est les Français qui m’intéressent en priorité, pas les Chinois. Et donc les Français expatriés, c’est aussi 2 millions de nos compatriotes qui contribuent à prendre des contrats à l’export, qui contribuent à créer de l’emploi en France. Là aussi, le premier à s’y être vraiment intéressé, ça a été Nicolas SARKOZY.
 
PASCALE CLARK Dernière chose car vous êtes également ministre des Transports. Les porteurs du projet de SCOP des salariés de SEA FRANCE sont reçus cet après-midi dans votre ministère. Est-ce que l’Etat va les aider ?
 
THIERRY MARIANI On va explorer cette piste avec eux, je crois qu’il faut explorer toutes les pistes pour sauver l’emploi. C'est une région qui est déjà, vous le savez, extrêmement sinistrée, il y a 800 emplois en cause. Je ne suis pas persuadé que ce projet peut déboucher, mais je suis persuadé qu’on doit tout essayer pour voir si cette piste est crédible. Donc ils seront reçus et on va essayer de voir avec eux comment on peut avancer dans ce projet.
 
PASCALE CLARK Donc ce n’est pas certain ?
 
THIERRY MARIANI Ce projet est une piste, voilà, c’est tout, et ce n'est pas certain parce qu’il y a des problèmes de financement.
 Source : Premier ministre, Service d’Information du Gouvernement, le 25 novembre 2011