Déclaration de M. Thierry Mariani, secrétaire d'Etat chargé des transports, sur la politique de développement de modes de transport alternatifs au transport routier de marchandises, à Paris le 20 décembre 2011.

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Circonstance : Lancement officiel de The European TK'Blue Agency, première agence de notation extra-financière relative à l'empreinte environnementale des choix logistiques, au Sénat le 20 décembre 2011

Texte intégral

Messieurs les Présidents,
Madame et Messieurs les Sénateurs,
Mesdames et Messieurs les Directeurs,
Messieurs les Délégués Généraux,
Messieurs les Secrétaires Généraux,
Mesdames et Messieurs,
Je suis très heureux d’être parmi vous aujourd’hui, au Sénat, pour célébrer le lancement de l’European TK’Blue Agency, créée par Philippe Mangeard, également Président du Cercle pour l’Optimodalité en Europe et Vice-Président d’Ubifrance. Je remercie le Sénateur Louis Nègre de nous accueillir aujourd’hui.
TK’Blue sera en effet la première agence de notation extra-financière à ambition européenne relative à l’empreinte environnementale des choix logistiques. En ce sens, elle incitera les chargeurs à transporter une partie de leurs marchandises (en pourcentage de leurs tonnes/kilomètres-TK) par des solutions de transport « optimodales » (routier économe, fluvial, maritime, ferroviaire).
Si la demande mondiale croissante en matière de transport est le reflet d’une économie qui se rassérène, elle ne doit pas pour autant se faire au détriment de l’environnement. Les enjeux du développement durable impliquent de privilégier, pour le transport de marchandises, des transports performants et plus écologiques.
Les progrès accomplis, depuis une vingtaine d’années, en matière de réduction de l’impact des transports sur la santé et sur l’environnement sont indéniables. Le rapport sur l’état de l’environnement en France de 2010 met ainsi en évidence entre 1990 et 2007 une réduction, pour le transport routier, de 23 % des émissions de particules en suspension, de 38 % des émissions d’oxydes d’azote, de 83 % pour le monoxyde d’azote.
Néanmoins, l’impact sur la santé et l’environnement reste un enjeu majeur d’amélioration pour le secteur des transports et une préoccupation essentielle pour mon Ministère.
En vous adressant à M. MANGEARD
Aussi, je tiens avant tout à saluer votre initiative, Monsieur le Président, car elle vient conforter la politique déterminée que conduit le Gouvernement depuis trois ans en matière de développement durable et de report modal.
Le gouvernement s’est en effet engagé, sous l’impulsion du Président de la République en 2007, dans une politique ambitieuse visant à réduire les émissions de CO2. Conformément aux engagements du Grenelle de l’environnement, je rappelle que notre objectif est de faire évoluer, d'ici 2022, la part modale du non-routier et du non-aérien de 14 à 25 %.
L’élaboration du schéma national des infrastructures de transport (SNIT), le développement des autoroutes ferroviaires et des autoroutes de la mer, le soutien du Gouvernement à la voie fluviale, le développement des offres de transports routiers éco-responsables (engagements volontaires, éco-conduite, camion électrique, voiture hybride) ont déjà permis de développer l’offre de transport « multimodale » sur notre territoire.
Je tiens, en premier lieu, à saluer les efforts entrepris par les acteurs du transport routier afin d’améliorer la performance écologique de ce dernier.
En effet, si le Grenelle de l’environnement a mis en évidence la nécessité d’un rééquilibrage vers les modes alternatifs à la route, le transport routier de marchandises reste le mode prédominant en France, compte tenu de sa fiabilité, de sa flexibilité et de sa capacité à irriguer l’ensemble des territoires. 85 % des marchandises transitent actuellement par la route et le Grenelle de l’Environnement prévoit un objectif de 75 % en 2022.
C’est pourquoi, je me réjouis que les chartes de bonnes pratiques « objectif CO2, les transporteurs s'engagent » aient d’ores et déjà été conclues par plus de 180 entreprises à ce jour, soit près de 42 000 conducteurs. J’y vois un signe positif de la prise de conscience et du volontarisme du secteur à poursuivre les efforts en ce sens.
Par ailleurs, la mise en place d'une fiscalité écologique avec l’éco-redevance poids lourds, l'objectif d'améliorer la performance environnementale du transport routier de marchandises fixé par la loi Grenelle 1, l'affichage des émissions de CO2 dans le transport défini par la loi Grenelle 2 ou encore les travaux des constructeurs pour diminuer les émissions et les consommations sont autant de preuves de l’engagement du secteur routier, aux côté du Gouvernement, pour orienter l'évolution du secteur vers le développement durable.
Afin d’encourager le report modal de la route vers le fleuve et de désengorger ainsi les grands carrefours d’échange, le Gouvernement a également visé l'efficacité verte pour le fret.
En septembre 2009, nous avons donc engagé un programme d'actions dans le cadre de l’Engagement National pour le Fret Ferroviaire. Ce programme touche à la fois à l'amélioration de l'infrastructure, par la définition d'un réseau orienté fret, et à des secteurs de développement porteurs, comme les autoroutes ferroviaires et le transport combiné. Le premier bilan que l’on peut en dresser est satisfaisant, même s'il faut admettre que le fret reste, à court terme, pénalisé par les problèmes de qualité des sillons, dans un contexte de forte augmentation des travaux sur les infrastructures.
Plusieurs autoroutes ferroviaires ont déjà vu le jour. Ainsi, l'autoroute ferroviaire Perpignan-Bettembourg, née d'une initiative privée, à laquelle vous n’êtes pas étranger, M. Mangeard, et exploitée par Lorry-Rail, connaît aujourd’hui une belle progression. En effet, le trafic qui était de l’ordre de 7.500 unités transportées en 2008, a plus que doublé en 2009 (près de 16.000 unités), et en 2010 (près de 32.000 unités). Cette tendance se poursuit puisque sur les onze premiers mois de 2011, le trafic approche les 45.000 unités.
Toujours sous l’impulsion du Grenelle de l’Environnement, nous avons également oeuvré au développement des autoroutes maritimes.
En septembre 2010, nous avons ainsi inauguré l'autoroute de la mer entre Nantes et Gijón. Ce service, exploité par GLD Atlantique, s’adresse directement aux transporteurs routiers. Les premiers résultats de fréquentation sont un encouragement à poursuivre dans cette voie puisque le trafic a triplé en moins d’une année. Une seconde autoroute devrait voir le jour prochainement. Elle reliera Nantes et Le Havre à Vigo (nord-ouest de l'Espagne) puis à Algesiras (sud). À terme, ces deux autoroutes de la mer devraient permettre le report modal de 100.000 poids lourds par an sur les trois millions qui traverse les Pyrénées chaque année.
A la différence du cabotage ou des liaisons maritimes classiques, les autoroutes de la mer visent la performance sur l’ensemble de la chaîne de transport. Le service proposé y est en effet fréquent, régulier et cadencé selon des horaires fixes. Il est ainsi à la fois rapide et fiable. Par ailleurs, son prix est attractif par rapport à une prestation équivalente par la voie routière. Il est donc primordial de préserver sa compétitivité.
Le Grenelle de l'environnement a également donné un caractère prioritaire au transport fluvial. Afin de mieux répondre aux besoins des professionnels français et européens et leur permettre de gagner en productivité, nous avons notamment engagé un important programme d'investissements de 840 millions d'euros sur la période 2010-2013, afin de restaurer, sécuriser et moderniser le réseau de la voie d’eau.
Le soutien à l’activité du fret fluvial passe également par la mise en place d’un cadre moderne et compétitif. C’est l’objet même du projet de loi relatif à Voies Navigables de France que j’ai défendu le 15 décembre dernier à l’Assemblée nationale.
Enfin, sept arrêtés ont été signés par l’Etat afin d'élargir le nombre d'opérations de transports éligibles aux certificats d’économie d’énergie (CEE) et proposant une alternative à la route. En effet, sur l’ensemble des certificats d'économie d'énergie inscrits sur le registre national au 8 janvier 2010, les transports ne représentaient que 0,3 % des économies d’énergie réalisées. Et les actions promues concernent principalement l’application de bonnes pratiques dans le champ du transport routier ! (éco-conduite, pneus, lubrifiants, etc.)
Sous l’impulsion du Gouvernement, le monde des transports s’est par conséquent mobilisé autour de l’Association Technique Energie Environnement (ATEE) afin de renforcer le recours à ce dispositif. Les certificats d'économie d'énergie constituent en effet une expérience à grande échelle de valorisation des économies d’émission de CO2. Leur application au domaine des transports ne peut donc que progresser et la création de l’agence TK Blue va dans le même sens.
Au-delà du développement de nouvelles infrastructures et de nouveaux services, il est essentiel de développer la connaissance et l’information sur les impacts environnementaux et de santé. En ce sens, disposer de méthodes d'évaluation solides est devenu une priorité.
C’est pourquoi, dès 2008, l’Etat s’est engagé très activement dans cette voie en s’appuyant sur l'Observatoire énergie et environnement des transports (OEET), présidé par le Professeur Yves Crozet, que je tiens à saluer.
Ces travaux ont notamment permis de mettre en place l’obligation d’information sur les quantités de CO2 émises pour les prestations de transport, une méthodologie coordonnée avec la rédaction de la prochaine norme européenne sur le même sujet. Le décret mettant en oeuvre cette disposition, inscrite dans la loi Grenelle de juillet 2010, a été publié en octobre dernier.
L’accès à cette information permettra de sensibiliser l’ensemble des intervenants de la chaîne de transport sur les émissions de CO2 et d’orienter, à terme, le choix des particuliers et des professionnels vers les solutions les plus économes sur les plans énergétique et climatique.
Mon ministère est également très favorable au développement de démarches volontaires permettant de faire progresser l’évaluation et la valorisation des services de transport les plus économes en énergie et minimisant les impacts.
En vous adressant à M. MANGEARD
C’est pourquoi, je tiens à saluer la démarche que vous avez engagée, Monsieur le Président. Je souhaite vivement que l’action de "The European TK’Blue Agency" puisse contribuer au développement de méthodes d’évaluation harmonisées.
La quantification des efforts entrepris ou non par les acteurs de la chaine logistique que vous proposez permettra indéniablement de mesurer l'efficacité environnementale, énergétique et sanitaire des services de transport et ainsi d’orienter les choix de mobilité vers les solutions les plus vertueuses.
Je forme donc le voeu que ce nouveau dispositif saura séduire le plus grand nombre de professionnels afin d’encourager, aux côtés du Gouvernement, le développement des transports verts.
Je suis par ailleurs convaincu que vous pourrez faire bénéficier l'Observatoire Energie Environnement Transports (OETT) de vos expertises sur ce sujet primordial. Il me paraitrait à ce titre tout à fait opportun que vous engagiez notamment un dialogue avec l'OEET sur les méthodes d'évaluation des « TK'Blues ».
La détermination et l’implication du Gouvernement sont entières pour poursuivre l’engagement de la France sur la voie du développement des transports verts et actifs. Mais construire une mobilité durable est un objectif ambitieux qui ne peut être atteint que si les efforts de tous les acteurs concernés sont réunis.
Je souhaite donc un plein succès à votre agence, Monsieur le Président. Ce nouvel outil ne manquera pas de contribuer à établir un cercle vertueux qui renforcera la demande des donneurs d’ordres pour des offres de transports performantes et à faible impact environnemental.
Je vous remercie de votre attention.
Source http://www.france-mobilite-electrique.org, le 26 décembre 2011