Déclaration de Mme Nathalie Kosciusko-Morizet, ministre de l'écologie, du développement durable, des transports et du logement, sur le bilan du Grenelle de l'environnement, à Paris le 15 février 2012.
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Circonstance : Audition devant le Conseil économique, social et environnemental, au palais d'Iéna à Paris le 15 février 2012
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Texte intégral
Mme Kosciusko-Morizet. Monsieur le Président, merci pour votre accueil chaleureux !Monsieur le Président de la commission, Cher Bernard Guirkinger, Madame la rapporteure, Chère Pierrette Crosemarie, Mesdames, Messieurs, Chers amis, je viens toujours avec plaisir au CESE mais cette occasion-là me tient particulièrement à coeur !
Dabord, parce que le Grenelle est lune des grandes réformes du quinquennat. Le gouvernement a voulu, alors que le Grenelle de lenvironnement arrivait en quelque sorte dans sa phase de maturité, bénéficier dun avis et prendre la mesure exacte des changements irréversibles qui sont en train de se produire et peut-être sinterroger sur les points sur lesquels une nouvelle impulsion était utile.
Le Président de la République, pas plus tard que lundi, faisait un point sur le même sujet avec les associations environnementales issues du Grenelle de lenvironnement, dont je salue quelques éminents représentants sur ces bancs, et faisait alors la même analyse et la même proposition.
Je suis heureuse aussi, car ça nest pas un traditionnel bilan, me semble-t-il, avec son volet de critiques, de satisfecit, dexhortations, mais cest le signe quun pas est en train dêtre franchi dans lappropriation du Grenelle puisquil est aujourdhui à lordre du jour de linstitution qui réunit les représentants de la société civile.
Il est même, dune certaine manière, un premier aboutissement. Il est en même temps une veille opératoire qui va nous permettre daffiner nos stratégies de déploiement du Grenelle alors que lon est en cours de finalisation de la quasi-totalité des décrets issus du Grenelle - 90 % environ - et que tous les outils juridiques sont maintenant à la disposition des acteurs.
Cest bien, enfin, que le Conseil économique, social et environnemental, qui doit son nouveau périmètre au Grenelle de lenvironnement, puisse sen saisir à son tour comme objet et contribuer par ce projet davis à apporter des solutions, des propositions opérationnelles sur le mouvement qui a initié sa transformation.
Cela dit, le Conseil économique, social et environnemental na pas attendu cet avis pour marquer sa filiation ou sa fidélité à lesprit du Grenelle de lenvironnement. Récemment, on a eu des événements ici même, dans cet hémicycle, qui en ont témoigné, sur la biodiversité, sur le schéma national des infrastructures de transports ou encore lors de la grande conférence accueillie à la fin janvier - pour laquelle je voudrais encore vous remercier, Monsieur le Président, pour votre hospitalité - sur le sommet Rio + 20 qui, je crois, a permis de donner une nouvelle impulsion au processus auquel nous tenons beaucoup et qui navance pas aussi bien que nous le souhaiterions.
Cela étant dit, je ne partage pas tout dans votre projet davis. Notamment, je ne partage pas le terme - qui, je crois, apparaît jusque sur la quatrième de couverture - « dessoufflement ». Il me semble que lon peut parler détape et, surtout, de changement de mode. Le Grenelle a été un sprint, il est aujourdhui un marathon, mais ça nest pas parce que lon passe en mode marathon que lon est essoufflé ; on a même besoin plus que jamais de son souffle.
On a changé de constante de temps, comme on le dit en physique, mais cest normal. À lautomne 2007, il y avait eu ces quatre mois qui ont abouti aux 268 engagements du Grenelle de lenvironnement. Aujourdhui, on est sur lhorizon de la mise en oeuvre concrète. Bon nombre des objectifs du Grenelle de lenvironnement sont fichés à moyen terme, après dix ans en 2020, et cest pour cela quil est raisonnable de changer de rythme, au risque de donner limpression dun ralentissement alors quen réalité, il sagit tout simplement dun autre type de course. Nous avons besoin de ce nouveau rythme pour tenir la distance, comme nous avons besoin de renforcer, de diversifier la mobilisation pour pouvoir atteindre nos objectifs. Si je voulais continuer à faire de la métaphore sportive, sur certains sujets, il y a besoin de pouvoir de temps en temps passer les relais.
Dans ce contexte dun horizon 2020, il nest pas si dramatique que lon ne soit pas parfois exactement dans les temps, à la seconde près. Ce qui me semble plus important, essentiel, cest que tous les acteurs soient bien impliqués dans le processus, non seulement lÉtat et les politiques - cest leur première responsabilité -, mais aussi tous les autres.
Dis-je cela pour dédouaner ? Non, tout nest pas parfait. La question du changement de rythme népuise pas tous les sujets et dailleurs, ne répond pas à toutes les critiques que vous formulez, pour certaines, je le crois, justement. Par exemple - un exemple qui me mobilise beaucoup et sur lequel jéprouve aujourdhui de très grandes insatisfactions - cest le report modal vers le fret ferroviaire. Il prendra plus de temps que prévu. Il passe par une transformation complète de notre système ; ça nest pas simple de caler les choses et cest un sujet sur lequel jéprouve aujourdhui une grande insatisfaction.
Jéprouve également, pour dautres raisons, une insatisfaction à légard du rythme de conversion à lagriculture biologique, même si le mouvement est fortement engagé et même sil faut bien tenir compte de la durée de transition incompressible quimplique la conversion à lagriculture biologique. Il faut aussi faire la part de tout ce que la mise en oeuvre, la mise en pratique recèle toujours danicroches, de blocages, de lenteurs. Cela fait partie des résistances du réel ; on est en phase de réalisation du Grenelle, il est normal que ce soit plut rude, plus rugueux que la phase initiale de conception qui, il faut le dire, sest faite dans un grand enthousiasme. Et puis, il faut prendre le temps daccomplir ce que lon a rêvé, accepter lépreuve du réel, seul moyen de changer vraiment la vie, comme on dit. Finalement, cest là-dessus que nous sommes attendus par les Français dans notre capacité à métamorphoser la vie quotidienne.
Sil y a une expression que jaurais voulu voir dans la quatrième de couverture - et que je vous propose peut-être pour une nouvelle édition ! - cest celle de « rupture positive ». Jutilisais le joli mot de « métamorphose » repris par Edgar Morin ici même, à loccasion de son discours introductif à la conférence Rio + 20. Je pense quil pourrait revendiquer celui de rupture positive également.
Je vous donne quelques exemples de ces sujets sur lesquels je néprouve pas les mêmes insatisfactions que ceux que jai cités. Entre 2005 et 2010, la part des énergies renouvelables dans le mix énergétique est passée de 9 % et quelques à presque 13 %. Nous sommes sur le bon chemin et au bon rythme pour atteindre lobjectif ambitieux de 23 % en 2020. Nous sommes sur le bon chemin et au bon rythme si lon veut considérer - ce qui est la vérité - que cette part de 9 % et quelques était absolument stable depuis des années, depuis lentrée en fonction du dernier grand barrage hydroélectrique. Nous navons donc pas augmenté notre part de 30 % en lespace de quelques années, nous avons fait beaucoup plus : nous avons initié toutes sortes de nouvelles filières qui, aujourdhui, sont en train de prendre leur essor.
Dans le domaine des transports, autre exemple, le bonus malus a véritablement favorisé la baisse des consommations dhydrocarbures importés, accéléré fortement le rythme de transformation de notre parc automobile. On est passé de 149 grammes de CO2 par kilomètre à 130 grammes en lespace de trois ans. Avec le bonus malus, la France est la premi??re en termes démissions moyennes par véhicule en 2010 en Europe.
Du côté de la programmation des infrastructures, le Grenelle a tenu ses promesses avec un changement de paradigme. Par le passé, 2/3 des financements dÉtat allaient à la route et 1/3 allait aux alternatifs à la route. Aujourdhui, cest le contraire, 1/3 va à la route - oui, il y a de lentretien, quelques nouveaux projets sur lequel lÉtat a pris des engagements - mais 2/3 vont sur les alternatifs à la route. Bien sûr, les lignes à grande vitesse dont on parle beaucoup, de 1 000 kilomètres dici à 2020, mais aussi - on en parle moins et cest dommage le renouveau de la voie fluviale avec la refonte de voies navigables de France et plusieurs centaines de millions deuros dinvestissements nouveaux dans lentretien, dans lordinaire, car ces centaines de millions deuros - 850 de mémoire - sentendent hors gros investissements comme celui du canal Seine Nord Europe, qui est de plusieurs milliards.
La politique du logement a été soulevée par les uns ou les autres à propos des professions, notamment, qui oeuvrent dans le bâtiment. En matière de logement, nous avons dépassé nos objectifs parce que les professionnels les ont anticipés, tout simplement. Au premier semestre 2011, le label BBC - bâtiment basse consommation énergétique - a déjà été demandé pour 100 000 logements neufs énergétiquement performants ; ils étaient 1 000 en 2007. Cest vraiment la profession qui a anticipé les engagements du Grenelle de lenvironnement, qui sest transformée plus vite que prévu.
Dernier exemple, la préservation de la biodiversité, dont on parle trop peu en ce moment, reste une préoccupation majeure. Elle était au coeur du Grenelle de lenvironnement. Ce sont bien treize nouvelles réserves naturelles nationales, couvrant presque 17 000 hectares, qui ont été créées depuis. Les chiffres pourraient ainsi être multipliés.
Votre projet davis souligne bien que le Grenelle est un projet de transformation de la société. Ce nest pas seulement une liste dobjectifs, de cibles à atteindre. Cest un modèle de transformation de la société vers le développement durable. Nous sommes dans des changements en profondeur. Cest la raison pour laquelle, aussi, les réussites et les déceptions se mélangent et font écho lune à lautre.
Vous souhaitez que le plus grand nombre soit associé au processus dans les écoles, dans les familles. Jen suis tout à fait daccord. LÉducation nationale a bien bougé ; il sy est fait des choses remarquables. Par exemple, une part non négligeable des programmes de géographie en classe de cinquième est consacrée aux problématiques environnementales. Cest un mouvement à poursuivre. On le poursuivra dans les écoles, mais aussi dans la formation des maîtres, puisque ce sont des générations entières quil faut sensibiliser et former.
À côté de lélève et du professeur, la transformation passe aussi par la mobilisation du consommateur. Nous sommes dans une société de consommation. Je crois beaucoup, non seulement au pouvoir dachat, mais au pouvoir de lachat pour transformer nos modèles, et pour cela à la nécessité dapporter une information pour que le consommateur puisse mettre son acte dachat en accord avec son éthique ou les principes quil revendique par ailleurs.
Nous le testons en ce moment même. Cétait un des objectifs du Grenelle de lenvironnement, avec 168 entreprises, un millier de références. Lobjectif est ici dêtre pilote, pilote en vue dune extension du dispositif en France, pilote au niveau européen en vue dun étiquetage un jour généralisé, qui nous permettra finalement de mettre en pratique un certain nombre des paroles et des déclarations qui sont parfois faites sur ces questions.
Vous avez parlé des lanceurs dalerte. Cest un sujet dune grande difficulté. Eux- mêmes sont confrontés à une incompréhension, parfois une inadaptation des structures de la société, des entreprises, des institutions, pour faire le juste écho à leur appel.
Les lanceurs dalerte tiennent particulièrement au coeur de quelquun qui a défendu le principe de précaution, Monsieur le Président vous vous en souvenez bien. Il faut imaginer une manière de protéger ceux qui sont des vigiles, des vigiles parfois vulnérables, des vigiles très souvent isolés de ce que lon pourrait appeler la conscience environnementale.
Cest une question de nature sociale. Lidée dun agenda social patronat/syndicats est une excellente idée. Je serais heureuse que le CESE sen saisisse et puisse aller plus loin sur ces questions.
Lappropriation se fera par la démocratie, par la collégialité. Vous souhaitez développer la gouvernance à cinq. Je partage ce souhait. Lesprit du Grenelle doit souffler dans les territoires. En ce moment, je travaille à la réforme, à la refonte de la gouvernance de la biodiversité. Les choses se passent très bien, même mieux que je laurais cru moi-même. Le préfet Schmitt ma rendu un rapport dune grande qualité. Nous réussissons, en ce moment, à avancer de manière presque consensuelle. Cest un exemple parmi dautres, mais je voulais aussi le souligner.
Le Grenelle est une opportunité. Il est même lopportunité de faire enfin comprendre que lenvironnement nest pas avant tout une contrainte, nest pas seulement une contrainte, nest pas par essence une contrainte. Le Grenelle est une opportunité pour tous, en particulier pour nos entreprises et nos industries. Encore faut-il que nous le démontrions.
On lillustre dans lordre de linnovation. Plus du tiers des projets qui ont été labellisés dans les pôles de compétitivité sont relatifs à des enjeux de développement durable. Cest trop peu connu.
On lillustre en renforçant les PME, notre industrie et les entreprises de taille intermédiaire performantes. Jai de beaux exemples en tête. Je visitais, pour le quatrième anniversaire du Grenelle, à Lyon, lentreprise ALDES, leader européen dans les techniques de la ventilation mécanique, des choses assez simples techniquement. Il y a quarante ans, cétait un sous-traitant régional spécialisé dans lemboutissage. Aujourdhui, ils font les VMC nouvelle génération pour tous les logements aux normes Grenelle. Ils emploient 1 300 personnes, dont la plupart sont des emplois créés par le Grenelle de lenvironnement.
Dans un contexte économique que vous connaissez, les chiffres viennent confirmer cette idée que le Grenelle peut être une opportunité, y compris une opportunité pour les industries, lemploi, la croissance.
Il y a quelques mois, on a arrêté les comptes 2009 de lenvironnement. Même au plus fort de la crise économique et financière en 2009, léconomie verte est restée valeur sûre, presque la seule valeur sûre. Elle résistait mieux que le PIB, elle continuait à créer de lemploi, elle affichait un excédent commercial de 750 millions deuros. Ce que lon pressent des chiffres 2010, pourrait venir confirmer cette tendance. En période de crise, lon na pas besoin de moins denvironnement ou de moins de Grenelle ; on a besoin de plus de Grenelle pour préparer le rebond et passer mieux la crise.
Jai entendu les commentaires qui ont été faits ici, à cette tribune, tout à lheure, et les réticences de certains ; je lavais entendu dire par ailleurs. Il ne faut pas oublier les filières agricoles et la tension qui existe autour de la place de lagriculture dans le Grenelle de lenvironnement et dans la mise en oeuvre du Grenelle de lenvironnement.
Dans le Grenelle de lenvironnement, il y a beaucoup dobjectifs en terme agricole, dont certains sont extrêmement ambitieux : agriculture raisonnée, haute valeur environnementale, un système de certification qui va avec, le plan Ecophyto, avec la réduction des apports de pesticides... Je parlais de l??enthousiasme qui a accompagné le sprint, les quatre mois du Grenelle de lenvironnement. Il y avait quelques sujets de tension vive, à loccasion même du Grenelle de lenvironnement. Le plan Ecophyto a été lun deux, comme par ailleurs la question des déchets dincinération et de la mise en décharge dans un autre groupe.
Tout cela ne doit pas être vu comme des sanctions. Sans doute nous appartient-il de mieux le partager, parce que ce sont des dynamiques de changement et des opportunités, pour peu quon les présente bien. Cest sans aucun doute un des enjeux qui reste, un des enjeux sur lequel le CESE peut aussi, Monsieur le Président, nous aider pour la suite, que de réussir à la fois à valoriser ce qui a été fait par les uns et les autres dans le cadre du Grenelle de lenvironnement - puisquil y a chez certains un sentiment dinjustice, un sentiment que lon demande toujours plus et quil nest pas porté de reconnaissance sur ce qui a été fait - et de trouver ensemble les moyens de réengager le dialogue et de décrisper les situations.
Il reste le nerf de la guerre - je lai gardé pour la fin, je nallais pas parler dargent au début - : la question du financement.
Je parlais tout à lheure des projets labellisés dans le cadre des pôles de compétitivité. Je disais quil y en avait un tiers dans le domaine du développement durable. Savez-vous quelle est la part des investissements davenir - 35 milliards en tout - consacrée à la conversion écologique ? Cette part ne reflète pas la réalité, puisquune grosse part des investissements davenir est consacrée aux campus, à la recherche. Cest 10 milliards sur 35 milliards. Pour moi, les 10 milliards représentent plus de 10 sur 35 compte tenu de ce qui a été réservé par ailleurs pour le secteur de la recherche et pour les campus.
Dix milliards consacrés à la conversion écologique dans les investissements davenir, cest la reconnaissance par les choix financiers de cette réalité que je martelais tout à lheure, quen période de crise lon na pas besoin de moins de Grenelle mais de plus de Grenelle.
Vous le suggérez, tout comme la Cour des comptes - vous la rejoignez sur ces sujets - la question de la fiscalité et notamment des dépenses fiscales défavorables à lenvironnement doit continuer à être posée. Il y a des choses à faire.
Cest un sujet sur lequel nous avançons. Par exemple, concernant la mise en place au taux normal dune TVA sur la vente de produits phytosanitaires aux particuliers, nous en avons fait partie. Il nétait pas raisonnable - et jai fortement milité pour cela - que les produits phytosanitaires aux particuliers soient vendus à taux réduit comme sils étaient des produits de première nécessité. Des produits par ailleurs tout à fait inoffensifs.
Dans tous les cas, nous ne devons pas perdre de vue que les moyens de lÉtat ne sont pas infinis et quils ont même tendance à être plutôt plus réduits en cette période de crise. En toute matière, et notamment dans ces matières de conversion écologique qui sont très consommatrices, nous devons chercher à mobiliser les financements privés. Il y a toutes sortes doutils ; certains sont déjà utilisés, dautres très insuffisamment. Nous pouvons progresser en la matière. Je pense à la prise en compte de lenvironnement comme critère favorable daffectation des ressources de lépargne. Cest tout le sens de linvestissement socialement responsable, que je soutiens et que nous développons avec le Grenelle.
Vous lavez compris, je voudrais vous convaincre que le Grenelle ne sest pas essoufflé !
Vous êtes le témoignage que le Grenelle ne sest pas essoufflé. Donc, vous ne pouvez pas laisser passer cela. La photo, que je regardais tout à lheure, est la preuve quautour du Grenelle, lon peut encore passer de bons moments et se dire des choses ; lon peut créer du dialogue et de la dynamique. Le Grenelle de lenvironnement est un projet perpétuellement en devenir, il est en train dentrer dans nos moeurs.
La vraie transformation du Grenelle de lenvironnement seffectue maintenant. En 2007, il y a eu le temps de lenthousiasme pour tous les acteurs du Grenelle. Puis, un enthousiasme médiatique est venu se greffer sur le Grenelle. Mais la vraie transformation se fait aujourdhui, alors que nous sommes en train de sortir les derniers décrets issus du Grenelle de lenvironnement.
Il faut maintenant que ces outils soient repris et quils se propagent par capillarité dans la société civile. La société civile, vous en êtes lillustration, les garants et les référents, vous avez donc un rôle à jouer dans cette nouvelle étape.
Je me félicite beaucoup aussi que le Grenelle essaime comme méthode de gouvernement. Au début, lorsque lon a vu naître, ici ou là, tous ces projets - chacun voulait son Grenelle ! - ceux qui y avaient participé se sont un peu énervés, se disant : « On aurait dû breveter ! ». Tout le monde voulait son Grenelle... Cest une bonne nouvelle que tout le monde veuille un Grenelle, parce que cest le signal que lon a fait de linnovation politique, que lon a créé une méthode « unité de temps, unité de lieu, unité daction », avec la pluralité des expériences et des opinions. Voilà quelle est la recette du Grenelle de lenvironnement et ça marche. Je lai appliquée récemment aux Assises du ferroviaire, qui nous ont aidés et qui nous aident encore aujourdhui à avancer. Je dis « qui nous aident encore aujourdhui » car nous navons pas fini den moissonner les fruits. Cela fût également le cas à loccasion de la Table ronde sur lefficacité énergétique. On peut poursuivre sur dautres sujets.
Pourquoi ne pas utiliser demain cette méthode, par exemple sur la question du financement de la conversion écologique ? Y a-t-il un Grenelle du financement à imaginer ? Pourquoi pas. En tout cas, cette méthode bénéficiera des retours dexpérience que vous nous ferez. À côté de la fixation des objectifs, sans doute nous poserons-nous davantage que par le passé la question des modalités de réalisation, afin déviter les biais et les travers qui ont existé dans le Grenelle de lenvironnement. Sur ce sujet, je suis prête à prendre toutes les critiques par exemple sur la façon dont ont été menées nos politiques en matière de photovoltaïque. Critiques quil faut tempérer par le fait que tous les pays dEurope ont subi les mêmes problèmes ; ce nétait pas seulement de notre faute. Cest vrai quil a été compliqué pour les professionnels de voir les tarifs changer à de multiples reprises et de voir un dispositif, qui était fondé seulement sur les puissances, être calé (comme en ont témoigné encore, mardi, les annonces du Président de la République devant les salariés de Photowatt) sur la création de filières industrielles.
Jattache une grande attention au rôle joué par le Comité national de développement durable et du Grenelle de lenvironnement (CNDDGE), qui est une instance stratégique de débats et de suivi du Grenelle. Il se réunit régulièrement, sous ma présidence. Je serai très heureuse, Madame la rapporteure, si vous acceptiez de participer à une réunion technique du CNDDGE.
Le Grenelle nest pas seulement un enjeu écologique - même si un enjeu écologique, cest déjà énorme - cest aussi un enjeu démocratique. Cest une métamorphose de notre société, elle est à ce prix. Je constate que le Conseil économique, social et environnemental, Monsieur le Président, Mesdames et Messieurs les membres, y prend toute sa place. Et cest bien son rôle !
Je vous remercie de votre attention.
Source http://www.lecese.fr, le 22 février 2012
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