Déclaration de M. Nicolas Sarkozy, candidat à l'élection présidentielle, sur les meurtres de Toulouse et Montauban, la lutte contre le terrorisme, la politique d'immigration, l'Union européenne et sur la politique sociale, à Reuil-Malmaison (Hauts-de-Seine) le 24 mars 2012.

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Circonstance : Meeting à l'occasion de la campagne pour l'élection présidentielle, à Reuil-Malmaison (Hauts-de-Seine) le 24 mars 2012

Texte intégral

Mes Chers amis, mes chers amis, mes chers amis,
Face aux événements tragiques de Montauban et de Toulouse, la France a été exemplaire.
Les Français ont été exemplaires.
Vous avez été exemplaires.
La France a su rester unie.
La France a su se rassembler.
La France, comme à chaque fois que le malheur frappe, a été solidaire et c’est tout le peuple français qui a partagé la souffrance inhumaine qu’un tueur, qu’un terroriste a voulu infliger, de sang-froid, à des familles, à des épouses, à des mères, à des enfants.
Devant ces actes monstrueux, la France a tenu bon, elle n’a cédé, la France, ni à la peur, ni à la colère, ni à la vengeance. Les Français ont refusé tout amalgame.
Et la France a montré le discernement des vieilles nations recrues d’épreuves, la France au fond, a refusé de tomber dans le piège qui lui était tendu par un tueur pervers.
Pendant ces quelques jours, notre pays a su rester digne. Notre pays a été rassemblé, toutes croyances confondues.
Et je veux remercier ce soir et de la façon la plus solennelle qui soit, les forces de l’ordre qui au cours de ces heures terribles ont montré leur sang-froid, leur courage et leur efficacité.
En dix jours, les forces de l’ordre coalisant leurs efforts ont identifié, localisé, assiégé et finalement mis hors d’état de nuire celui qui depuis le 11 mars semait la mort sur son passage.
Les Français doivent savoir que ce tueur avait prévu de tuer à nouveau le matin même du jour où il a été cerné et qu’il voulait encore tuer à l’instant même où il a dû être définitivement mis hors d’état de nuire. Il voulait tuer davantage de policiers et il voulait tuer davantage de militaires.
Je rencontrerai tous ceux qui ont participé à ces opérations pour leur dire la fierté et la gratitude du peuple français.
Mais permettez-moi de rendre un hommage particulier à notre ministre de l’intérieur, Claude GUEANT, qui a été à la hauteur de la confiance et des espoirs que les Français plaçaient en lui pendant ces journées d’angoisse. L’État s’honore d’avoir des serviteurs tels que Claude GUEANT.
Alors permettez-moi, chers amis, cher Patrick, à Rueil, d’ajouter à cet hommage l’expression de mon indignation. Indignation, qui est, je le sais, partagée par une écrasante majorité de Français. Dans une démocratie, chacun est libre. Chacun est libre de poser toutes les questions qu’il souhaite. Chacun peut légitimement interpeller à tout moment l’autorité et lui demander des comptes.
Le droit à la critique est l’esprit même de la démocratie, mais je veux que les choses soient claires, je ne laisserai personne, vous m’entendez bien, personne, remettre en cause l’honneur des hommes qui, depuis les services de renseignements jusqu’aux policiers du RAID, en passant par toutes les forces armées, ont mis fin, au risque de leur vie, à la trajectoire sanglante d’un terroriste monstrueux.
Ces hommes, comme les victimes du tueur, ont des familles, des femmes, des enfants. Ils auraient pu trouver la mort dans ces assauts - certains ont été blessés- nous aurions pu voir d’autres cercueils encore drapés du drapeau tricolore. Nous aurions pu entendre, encore, comme à Montauban jeudi dernier, retentir la sonnerie aux morts.
Je ne laisserai pas mettre en cause ces hommes qui veillent sur notre sécurité, sur nos droits et sur notre liberté, pas plus que je ne laisserai insulter la mémoire des victimes sur Internet où je ferai traquer tout appel à la haine et tous ceux qui chercheraient à faire d’un tueur monstrueux, un martyre.
Je ne laisserai pas davantage insulter la mémoire des victimes par le geste inadmissible d’une enseignante qui a osé demander à ses élèves d’observer une minute de silence en hommage au tueur. Saluons d’ailleurs le courage et le discernement des élèves de cette femme qui ont refusé ce qui leur était demandé et qui ont quitté la salle et qui ont prévenu le chef d’établissement de ce qui était en train de se passer. Hommage à ces lycéens, honte à cette enseignante !
Ce comportement indigne ne doit pas occulter le travail admirable de ces milliers d’enseignants qui ont su trouver les mots justes pour parler de cette tragédie aux enfants qui leur sont confiés.
Les polémiques qui ont commencé – je le dis comme je le pense - sont indignes. Pour les uns il fallait agir plus vite. Pour les autres, au contraire, qui savent tout, naturellement, il fallait attendre. Pour les uns, si spécialistes, il fallait parlementer. Pour les autres, au contraire, il fallait ruser. Pour les uns il fallait se garder de prendre des décisions hâtives. Pour les autres, il fallait au contraire arrêter l’assassin avant qu’il n’agisse. Pour les uns, c’est la France qui serait coupable. Pour les autres, c’est la société qui serait coupable. Pour d’autres encore, la faute en reviendrait au climat. Pire, c’est le débat lui-même, le débat démocratique qui encouragerait ces dérives.
La France et les Français seraient donc coupables d’avoir débattu de leur avenir et des problèmes qui les préoccupent. Coupables de débattre de l’immigration (on n’y aurait pas droit), coupables de débattre de nos frontières (ce serait scandaleux), coupables de débattre des valeurs de la République, parce qu’en débattant des valeurs de la République, on stigmatise ceux qui ne veulent pas respecter la République. Et c’est curieux, voyez-vous, aux yeux de certains toute critique, même la plus absurde, même la plus indigne, est légitime mais le débat, le débat démocratique, lui, n’est jamais légitime à leurs yeux. Seule est légitime leur critique, le débat est illégitime ; la vérité, c’est qu’aux yeux de ces observateurs attentifs, il ne faut débattre de rien, ne parler de rien, nier les faits, effacer les souffrances et si on les écoute, on va résoudre les problèmes en supprimant les mots qui gênent dès lors que ces mots ont le malheur de traduire une réalité que l’on est incapable de transformer car on refuse obstinément de regarder la réalité en face.
Je vais vous dire une chose à vous mes amis et je le dis à titre personnel, je n’ai rien oublié de ce que j’ai vu, je n’ai pas oublié la douleur et de l’effroi dans les yeux des familles des victimes, notamment de cette jeune mère qui a perdu à la même minute son mari et deux enfants. Je vous le dis comme je le pense, jusqu’à la fin de mes jours, ces images resteront présentes dans mon esprit. On ne peut pas s’habituer à une telle souffrance.
Alors j’assume la totalité des décisions qui ont conduit à la neutralisation définitive d’un tueur monstrueux. J’ai soutenu les forces de l’ordre et leur ministre car je sais d’expérience que c’est la condition de leur pleine efficacité. Si au sommet de l’Etat, les ordres ne sont pas clairs, si au sommet de l’Etat, la volonté n’est pas inébranlable, alors le résultat devient aléatoire. Souvenons-nous du temps qu’il a fallu pour trouver l’assassin d’un préfet de la République.
Avec le Premier ministre, nous avons décidé de tirer les premières conclusions de ce drame en prenant immédiatement les décisions suivantes : désormais, toute personne - toute personne – qui consultera de manière habituelle des sites internet qui font l’apologie du terrorisme ou qui appellent à la haine et à la violence, ces personnes seront punies pénalement, la prison sera la réponse. Et qu’on ne vienne pas me parler d’un délit d’opinion car le terrorisme, le Jihad, la violence à ce point monstrueuse, ce n’est pas une opinion, on doit convaincre… on doit combattre ces idées parce qu’elles sont interdites sur le territoire de la République française.
Toute personne qui se rendra à l’étranger pour y suivre des stages d’endoctrinement à des idéologies conduisant au terrorisme, sera punie pénalement. La réponse sera la prison. Nous ne voulons pas sur le sol de la République française que de jeunes Français puissent aller suivre des cours d’endoctrinement aux méthodes du terrorisme. Nous décidons hors-la-loi ces cours, ces pratiques et cette idéologie.
La propagation et l’apologie d’idéologies extrémistes seront réprimées par un délit figurant dans le code pénal avec les moyens qui sont déjà ceux de la lutte anti-terroriste.
Enfin, j’ai demandé au Garde des Sceaux de mener une action énergique, et des décisions seront prises dans les jours qui viennent, afin que nos prisons ne deviennent pas le terreau d’un endoctrinement à des idéologies de haine et de terrorisme.
Le candidat socialiste peut protester que les lois anti-terroristes ont été modifiées récemment et qu’elles n’ont pas besoin de l’être davantage. Il oublie juste de rappeler qu’il n’a voté aucune des lois antiterroristes derrière lesquelles il s’abrite aujourd’hui. Curieux que ces lois trouvent tant de crédit à ses yeux alors qu’au moment où elles ont été présentées, il a voté contre et s’y est opposé !
Il peut s’indigner, il peut tergiverser, il peut hésiter, il peut esquiver, il peut finasser, il peut refuser de voter les lois, ces lois que je propose pour protéger la France et les Français. C’est son droit. Mais je vous le dis, ces lois seront votées si les Français choisissent de me faire confiance.
Ainsi, la situation est claire. Je ferai donc voter ces lois car depuis dix ans je suis comptable de la sécurité des Français ; je n’ai jamais transigé avec elle.
Je voudrais d’ailleurs dire : comment le même homme peut laisser sa principale alliée politique, celle-là même à laquelle il a sacrifié l’indépendance énergétique de notre pays, s’égarer au point d’annoncer que la meilleure façon de lutter contre le trafic d’armes dans nos banlieues serait de dépénaliser l’usage du cannabis ?
On se dit : le Parti socialiste va s’indigner ! On se dit : le Parti socialiste va demander un démenti, on se dit : le Parti socialiste va dénoncer l’accord électoral indigne passé avec les Verts. On attend, on écoute, et bien non, rien ne se passe. Au fond, on en revient toujours à l’ambiguïté et à l’esquive. Les Français, eux, attendent des réponses claires sur des sujets aussi graves. Je pose donc la question à ceux qui ont sacrifié l’avenir du nucléaire et de l’indépendance énergétique de la France parce que leurs alliés politiques l’exigeaient. Qu’allez-vous donc sacrifier d’autre ? Que leur répondrez-vous, à vos alliés, quand ils vous demanderont d’encourager partout le communautarisme qu’ils ont toujours préféré au modèle républicain ? Cèderez-vous là aussi ou répondrez-vous non ?
Que leur répondrez-vous quand ils vous demanderont d’ouvrir en grand les vannes de l’immigration et de ne plus expulser les sans-papiers, les étrangers en situation irrégulière comme ils le réclament tous les jours ?
Que leur répondrez-vous quand ils exigeront l’abolition de toutes les lois qui protègent la sécurité des Français parce qu’ils détestent toute forme d’autorité ? Je propose d’ailleurs qu’après avoir supprimé le mot « race » et le mot « zone », on s’interroge longuement sur la pertinence du mot « autorité ».
Et que leur répondrez-vous, à vos alliés, quand ils vous demanderont la suppression du défilé du 14 juillet et celle de l’hommage aux morts pour la France le 11 novembre ?
Les Français ont le droit de connaître les réponses.
Mes chers amis, j’irai à cette campagne, en vérité, pour donner nos réponses. Nous n’avons pas à nous faire dicter ce de quoi nous avons le droit de parler et ce dont on n’aurait pas le droit d’évoquer même la question ; et nous n’avons pas à nous faire dicter nos réponses. Je fais cette campagne, non pas pour parler à la droite, à la gauche, au centre, non pas parce qu’il y aurait – quelle drôle d’expression – des territoires d’extrême-droite, comme si on abandonnait - ceux qui parlent de ça d’ailleurs, c’est très intéressant, ne se rendent pas compte qu’en parlant des territoires de l’extrême-droite, il en parle comme s’il y avait des territoires abandonnés comme ils avaient abandonné nos quartiers et nos banlieues à la fin des années 90 !
Moi je veux parler au peuple de France, je veux lui dire : il y a des grandes questions. Celle de notre politique d’immigration est une grande question. La France a toujours été un pays ouvert et elle le restera. La France s’est toujours enrichie de cette ouverture. Mais refuser de voir qu’une immigration non contrôlée pose une question essentielle quant à notre modèle d’intégration parce que si on ne contrôle pas les entrées, on ne pourra plus intégrer et c’est tout notre modèle d’intégration qui se trouve paralysé. Cette question-là n’est pas illégitime, c’est au contraire regarder la réalité.
Que diront-ils devant l’équilibre de nos comptes sociaux ? En tant que Président de la République, j’ai demandé des efforts aux Français pour qu’on rembourse nos dettes et nos déficits parce qu’un pays endetté est un pays qui perd une partie de sa souveraineté. Et comment pourrais-je dire aux Français : les efforts, c’est pour vous et nous allons continuer une immigration qui n’aurait pour seul objectif que de bénéficier de prestations sociales que nous ne pouvons plus financer et que nous ne pouvons plus supporter !
Dire cela, c’est être parfaitement républicain ! Ce qui n’est pas républicain, c’est refuser de voir le problème, c’est s’interdire de parler de ces questions et laisser tous ceux qui sont excessifs, qui ne connaissent pas la République, parler sur des sujets que les républicains auraient déserté par manque de courage, par manque de fermeté, par manque de lucidité. Voilà la réalité telle qu’elle se présente !
J’ai donc indiqué que désormais le regroupement familial se ferait sous la condition d’avoir un logement pour accueillir sa famille, d’avoir un revenu pour faire vivre sa famille, et que la famille qui vous rejoint ait pris le soin d’apprendre, avant de venir en France, le français et les valeurs de la République.
Et si quelqu'un ne partage pas cette opinion, qu’il l’explique aux Français, qu’il le dise !
J’ajoute : c’est notre honneur, lorsque quelqu'un est malade, blessé, souffrant, quelle que soit la couleur de sa peau, quel que soit son statut, légal ou illégal, on ne laisse pas quelqu'un à la porte de l’hôpital. On n’est pas en Amérique, ici, où on vous demande votre Carte Bleue avant de vous opérer. Ici, on soigne toute personne, légale ou illégale, parce que c’est un être humain. Mais je le dis avec la même force : la Carte Vitale, je demande qu’elle soit biométrique, parce que les fraudes sont inacceptables, dans un pays comme le nôtre.
Mes chers amis, toute ma vie j’ai été… toute ma vie j’ai été un européen convaincu. J’ai toujours fait le choix de l’Europe. Y compris lorsque dans ma famille politique nous étions divisés. Mais je le dis comme je le pense : nous avons fait l’Europe pour être plus forts, pas plus faibles. Nous avons fait l’Europe pour être mieux protégés, pas plus exposés. Nous avons fait l’Europe parce que nous croyions à un modèle de civilisation européen, pas parce que nous voulions le détruire. Nous avons fait l’Europe parce que l’Europe, c’est une tradition humaniste.
Combien de temps résistera l’Europe aux souffrances infligées au peuple grec, et aux autres peuples de notre continent ? Croyez-vous que lorsqu’il n’y aura plus une usine, on pourra dire aux ouvriers qui souffrent des délocalisations : Votez pour l’Europe, l’Europe vous protège ?
Croyez-vous vraiment que lorsque nous n’aurons plus contrôlé les flux migratoires, parce que Schengen aujourd'hui fait de l’Europe une passoire, croyez-vous vraiment qu’on pourra dire aux peuples d’Europe : Vous avez bien fait de confier la gestion de vos frontières à ceux qui ne s’en occupent pas ?
Et avons-nous créé l’Europe pour que la bureaucratie s’empare de l’Europe, multiplie les normes, définisse les trois tailles des oeufs que l’on a le droit de consommer, précise la température des cinq catégories de plats qui, dans nos restaurants, doivent être servis, ou interdisent à des vaches d’aller boire au ruisseau qui passe au milieu du champ depuis des siècles, parce que ça met en cause la biodiversité en-dessous ? Nous n’avons pas fait l’Europe pour cela ! Et je dis que c’est les Européens qui doivent défendre ce discours, parce que justement nous avons toujours cru en l’Europe.
Alors je dis simplement les choses telles qu’elles sont : si dans un délai d’un an, l’Europe ne se ressaisit pas sur Schengen, ne décide pas un gouvernement politique pour animer Schengen, avec un président politique de Schengen pour gérer Schengen et pour gérer les crises, ne décide pas d’une convergence du droit des étrangers à l’intérieur de Schengen, ne décide pas d’une sanction à l’endroit de pays membres de Schengen qui ne respecteraient pas les règles, je le dis comme je le pense, à ce moment-là, au bout d’un an d’inaction, la France prendra ses responsabilités et sortira de Schengen.
Je ne le souhaite pas, mais que les choses soient claires. Les leçons de la crise financière doivent servir. Parce qu’il y a eu la crise, l’Europe a bougé. L’Europe est sortie de son train-train. Et finalement, tous ceux qui ont leur bureau à Bruxelles ou ailleurs, se sont rendu compte que finalement, quand il y a une crise, il vaut mieux que ça soit les chefs d’Etat et de gouvernement démocratiquement élus qui s’occupent des choses. De ce côté-là, on n’a pas été gêné, ils nous ont laissé les manettes.
Mais je ne veux pas que, la crise passée, on revienne dans la même situation, celle d’avant. Il n’en est pas question. Ce qui a été fait pour l’euro, nous devons le faire pour Schengen.
J’ajoute, pour les chefs d’entreprises, que je ne peux pas accepter que tous les marchés publics soient ouverts en Europe, et qu’aucun marché public ne soit ouvert dans certains grands pays du monde. Je crois à la liberté des échanges. Je crois à l’économie de marché. Mais je crois à la concurrence loyale, pas à la concurrence déloyale.
Qu’on impose aux chefs d’entreprises des règles environnementales, c’est normal ; qu’on leur impose des règles sociales, c’est naturel ; qu’on impose aux éleveurs des règles de traçabilité ou de bien-être de la condition animale, naturellement.
Mais alors pourquoi importe-t-on en Europe des produits venant de pays qui ne font respecter aucune règle sociale, aucune règle environnementale, aucune règle sanitaire ? Là ce n’est pas normal, ce n’est pas acceptable.
Les choses sont claires : si dans un an nous avons obtenu la réciprocité, pas de problème ; si dans un an nous n’avons pas obtenu la réciprocité, la France appliquera un « European Buy Act » qui permettra de réserver nos marchés publics aux entreprises qui produisent et qui fabriquent sur le territoire du continent européen.
Et à ceux qui viendraient me dire que ce n’est pas libéral, je voudrais rappeler que la plus grande nation, le plus grand pays libéral au monde, les Etats-Unis d’Amérique, appliquent cette règle depuis 1933. Ce qui est permis aux Etats-Unis d’Amérique, je ne vois pas au nom de quoi on devrait l’interdire à l’Europe. Je dirais d’ailleurs la même chose pour les PME : je demande que dans nos marchés publics, 20 % au moins des commandes puissent être réservées aux PME.
Le processus est toujours le même, et les élus le savent bien : appel d’offres ; les plus grandes sociétés se précipitent, avec des prix défiant toute concurrence, qui cassent les reins des petites et moyennes entreprises ; ces petites et moyennes entreprises disparaissent ; et une fois disparues, selon un processus incroyable, les prix, dont on pensait qu’ils étaient à la baisse, reviennent à la hausse.
Je demande donc que dans un délai d’un an, nous puissions réserver 20 % de nos marchés publics aux PME. C’est la diversité, et c’est le tissu industriel de la France qui en a besoin.
La vérité, mes chers amis, de tout cela, c’est que l’Europe se trompe en ne pensant qu’aux consommateurs. Car le jour où le consommateur devient chômeur, qu’est-ce qu’il peut consommer ? L’Europe se trompe en parlant de la concurrence seulement, et en oubliant les travailleurs et les producteurs.
Nous devons construire l’Europe pour les travailleurs et pour les producteurs, avec une véritable politique industrielle, avec une politique de concurrence, fondée sur la réciprocité, et penser que le consommateur sera servi parce qu’on aura gardé les emplois et de la croissance en Europe. Le jour où on ne fait que l’Europe de la consommation, on aura l’Europe du chômage et de la décroissance, et cette Europe-là, nous n’en voulons pas.
On me disait : Mais c’est impossible ! Les mêmes m’expliquaient que le gouvernement économique, on n’arriverait pas à convaincre les Allemands. Les mêmes m’expliquaient que l’Europe ne pouvait avancer que par l’intermédiaire de la Commission, et que l’intergouvernemental c’était impossible. Les mêmes m’expliquaient que la convergence des politiques économiques et fiscales c’était impossible.
Lorsqu’il a fallu sauver un pays comme la Grèce, diviser par deux sa dette, convaincre les créanciers d’abandonner 105 milliards d’euros, de façon volontaire, sortir l’Europe d’une crise financière dont vous n’imaginez pas les conséquences que cette crise aurait pu avoir sur chacun d’entre vous, on me disait : C’est impossible.
Et puis, dos au mur, ce qui était impossible est devenu possible. Ce qui n’avait pas avancé pendant dix ans est devenu possible en six mois. Ce que nous avons fait pour l’économie et pour la finance, il faut que nous le fassions dans les mêmes conditions pour les frontières, pour la réciprocité, pour la politique commerciale.
Et pendant qu’on y est, d’ailleurs, je souhaite que les objectifs de politique commerciale de l’Europe soient fixés par les chefs d’Etat et de gouvernement, et que la Commission applique la politique définie par les chefs d’Etat et de gouvernement.
Mes chers amis, ce sont nos idées.
Je veux vous dire une chose grave : si nous ne réussissons pas, c’est toute l’Europe qui risquera l’implosion. Je vous le dis comme je le pense, l’Europe ne peut pas supporter qu’à chaque fois qu’on interroge un peuple, il réponde non. L’Europe ne peut pas supporter que son nom soit associé à la souffrance, à la désespérance, et à l’absence de protection.
L’enjeu est très clair : si nous faisons cela, nous réhabiliterons le projet humaniste de l’Europe aux yeux des Européens. Si nous ne le faisons pas, alors la plus belle construction imaginée par l’homme au service de la paix risquera l’implosion, et personne ne pourra résoudre les crises qui se produiraient dans l’avenir, si on ne change rien, parce que les mêmes causes produisent toujours les mêmes effets.
Voilà l’enjeu.
Je dirai, durant cette campagne, que la France c’est le pays le plus généreux du monde, et que nous en avons assez de la culpabilisation organisée par une petite partie des élites françaises, qui ne pensent qu’à leur image, et pas aux Français.
Qui sont-ils, ceux que je vise ? C’est tout simple : c’est ceux qui vont à la télévision avec un miroir, et qui s’y regardent avec attention. Ils ne vous parlent pas à vous, ils se parlent entre eux. Et ce n’est pas à eux que je veux m’adresser.
Je veux dire : refusez toute forme d’amalgame, tendez toujours la main aux autres. La France n’est pas un pays de haine. La France est un pays fort. La France n’a pas peur.
Je veux d’ailleurs le dire : deux de nos compatriotes musulmans ont perdu leur vie dans cet attentat monstrueux.
Cette ouverture, cette générosité, cette solidarité de la France, c’est ce qui fait le statut de notre pays. Mais dans le même temps, nous avons un mode de vie, des valeurs, des croyances, qui nous ont été enseignés par nos parents, par nos grands-parents. La France n’est pas une page blanche, nous avons une histoire.
Sur le territoire de la République française, nous ne voulons pas de la burqa. C’est la raison pour laquelle j’ai fait voter cette loi.
Sur le territoire de la République française, nous ne voulons pas que dans les piscines municipales il y ait des horaires pour les femmes et des horaires pour les hommes. Sur le territoire de la République française, nous voulons que dans les hôpitaux les femmes et les hommes aient affaire aux mêmes médecins, parce que nous croyons à l’égalité entre les femmes et les hommes. Et nous voulons que dans les cantines scolaires de nos écoles, les enfants aient le même menu, parce que la République est laïque !
Voilà ce que nous voulons !
Enfin, je voudrais vous dire un mot, ce mot dont on entend tellement parler, et tellement mal : le mot « juste ». Les Français ne supportent pas les injustices, et ils ont raison. Et ils ont été légitimement choqués par le comportement dévoyé, les salaires exorbitants d’une minorité dans la finance.
Mais en même temps, les Français ne pensent pas qu’être juste, c’est vouloir l’égalitarisme et le nivellement.
Les Français ne veulent pas vivre dans un pays où le talent serait puni, et non pas récompensé. Les Français ne veulent pas vivre dans un pays où la réussite serait suspecte, et non pas encouragée. Les Français ne veulent pas vivre dans un pays où celui qui ne travaille pas et ne paye pas ses cotisations, gagne davantage que celui qui travaille et qui paye ses cotisations !
Je n’ai pas peur d’ouvrir le dossier de la justice. Je n’ai pas peur de parler de ce qui est juste. Mais ayons le courage d’aller jusqu’au bout : ce qui est juste, c’est quand on a des droits, on ait également des devoirs.
Ce qui est juste, c’est qu’une femme ou un homme, quel que soit son âge, ait le droit d’apprendre un nouveau métier. Mais ce qui est injuste, c’est que celui qui est indemnisé parce qu’il est au chômage, puisse refuser une offre d’emploi qui lui est proposée.
Mes chers amis, tout finit et tout commence par le travail, sa récompense, sa considération, la façon dont on l’imagine, l’idéal que l’on propose à nos propres enfants.
Le travail est une valeur d’émancipation ; le travail n’est pas une aliénation. Quand on fait croire que le bonheur dans la vie, c’était de travailler 35 heures, on ignore et on passe à côté d’un sujet considérable qui est la qualité de vie au travail. Je connais des femmes et des hommes qui travaillent beaucoup plus que 35 heures et qui sont heureux parce qu’ils sont considérés, respectés dans leur travail ! Et je connais des femmes et des hommes qui travaillent 35 heures et qui sont malheureux dans leur travail !
Je le dis comme je le pense, les 35 heures ont été une erreur économique, on le sait, une erreur sociale mais surtout une erreur morale, en laissant à penser qu’en travaillant moins, notre pays pouvait se sortir d’affaire dans une compétition internationale de plus en plus rude. Et je le dis là encore comme je le pense, je n’accepterai pas de prendre des leçons de la part de ceux qui ont fait la retraite à 60 ans sans avoir un centime pour la financer et les 35 heures qui ont ruiné la compétitivité des entreprises françaises !
Alors mes chers amis, je me tourne vers vous, je me tourne vers le peuple de France, je me tourne vers vous pour qu’ensemble nous écrivions la plus formidable histoire de la vie politique récente ; dans un mois et demi, c’est vous qui choisirez, c’est vous qui direz la vérité ; vous ne vous laisserez dicter votre choix par personne !
Vous êtes la majorité, la majorité silencieuse que l’on va entendre pendant ce mois et demi, qui dira « voilà la France que nous voulons, voilà la République dans laquelle nous croyons, voilà les idées que nous voulons défendre avec vous » !
J’ai besoin de vous ! Aidez-moi ! Aidez notre pays, aidez la République !
C’est vous qui avez dans les mains les clefs de cette élection, ce tournant historique pour notre pays. Un mois et demi repose sur vous, sur votre engagement, sur votre force, sur votre idéal.
Oui, mes chers amis, aidez-moi ! Peuple de France !
Vive la République et vive la France !
Source http://www.lafranceforte.fr, le 26 mars 2012