Texte intégral
Monsieur le Président,
Monsieur le Rapporteur,
Mesdames et Messieurs les Députés,
Chers Amis,
Permettez-moi d'intervenir à mon tour et de manière complémentaire par rapport aux propos d'Hubert Védrine, qui a retracé l'historique de la Conférence intergouvernementale qui a conduit au Traité de Nice et rappelé le contexte dans lequel ce traité s'est élaboré, avec son lot habituel d'attentes, de tensions, de frustrations, mais aussi de soulagements, voire, sur certains points, - je n'hésite pas à le dire - de satisfactions.
Je souhaiterais pour ma part donner quelques éclairages sur les aspects du traité qui me paraissent les plus importants et qui continueront de nous occuper dans la suite de notre réflexion sur l'avenir de l'Europe.
Un mot, d'abord, si vous le voulez bien, sur le contexte dans lequel se situe ce débat. L'Union européenne fait face aujourd'hui, nous le savons bien, à une crise de ses institutions. Aucune ne fonctionne vraiment de manière satisfaisante. D'abord, parce que certaines réformes n'ont pu être faites plus tôt, alors même qu'elles avaient été jugées indispensables dès le précédent élargissement à l'Autriche, la Suède et la Finlande. Ensuite, parce que l'Union doit faire face à un nouvel élargissement, d'une ampleur sans précédent.
Il a toujours été clair pour nous qu'il ne saurait y avoir de "grand soir institutionnel". Non par manque d'ambition, contrairement à ce que disent certains soi-disants "euro-enthousiastes" autoproclamés. L'enthousiasme ne nous fait pas défaut, mais il ne saurait remplacer la recherche de solutions réalistes, praticables dans le contexte d'une Europe de plus en plus large, où la synthèse entre élargissement et approfondissement ne sera réussie que si elle permet de préserver ce qui fait l'essence du projet européen.
Or, l'essence du projet européen, ce sont d'abord les politiques que nous menons ensemble et les moyens que nous voulons nous donner pour les développer, non des théories institutionnelles.
Nous avons donc décidé de procéder par étapes :
- première étape : le Traité de Nice dont l'objectif est de régler enfin les questions restées en suspens, en 1997, à Amsterdam. De ce point de vue-là, Nice a été un succès, même si les solutions retenues ne sont pas toutes à la hauteur de nos attentes. Je n'y reviendrai que très brièvement.
- deuxième étape, le débat sur l'avenir de l'Europe dont le principe a été acté à Nice, à travers une déclaration annexée au traité et qui a d'ores et déjà donné lieu à plusieurs contributions très importantes, dont la dernière en date est celle qu'a apportée le Premier Ministre, le 28 mai.
I. La genèse du Traité de Nice
Comme je l'ai dit, les questions qui figuraient à l'ordre du jour à Nice, - à savoir : le format de la Commission ; le champ de la majorité qualifiée ; la repondération - avaient déjà été débattues à Amsterdam, mais les chefs d'Etat et de gouvernement n'avaient pas été en mesure, alors, d'aboutir à un accord. Ceci montre bien, que non seulement ces questions étaient déjà bien identifiées, mais que chacun en connaissait parfaitement la très grande difficulté. Laisser penser que Nice a péché par excès de modestie, et que ces questions auraient pu être évacuées en un tour de main relève de l'ignorance ou de la désinformation. Pourquoi, si tel était le cas, le succès n'a-t-il pas été au rendez-vous à Amsterdam?
Nous avions, en ce qui nous concerne, bien mesuré, dès Amsterdam, le problème majeur que poserait, dans la perspective de l'élargissement, l'existence de tels "reliquats". D'où l'idée de la déclaration franco-belgo-italienne, qui a permis d'inscrire de façon solennelle, dans un texte annexé au traité d'Amsterdam, la nécessité de résoudre ces trois questions avant le prochain élargissement, qui est notre devoir historique et notre priorité politique.
L'Assemblée nationale, elle-même, - votre assemblée - a ardemment plaidé, lors du débat de ratification, pour que cette préoccupation soit clairement inscrite dans le projet de loi de ratification, ce qui était juste et légitime. Le gouvernement en a pleinement tenu compte et a choisi de recourir à la solution, tout à fait exceptionnelle, on se souvient, sur ces bancs, de ce débat, de l'ajout d'un article 2 au projet de loi de ratification du Traité d'Amsterdam.
C'est ainsi qu'aux Conseils européens d'Helsinki, en décembre 1999, puis de Feira, en juin 2000, nous avons plaidé, avec d'autres, pour que soit fixé - mais aussi limité - l'ordre du jour de la CIG de 2000, en concentrant les négociations sur les trois questions restées sans réponse à Amsterdam. Parce que nous voulions éviter un piège : nous lancer dans une hypothétique refondation d'ensemble de l'Union eût été une tentative séduisante, mais cela n'aurait pu que retarder l'élargissement, en multipliant les raisons offertes aux uns et aux autres de refuser un accord à Nice.
Nous n'avons donc pas souhaité ajouter à l'ordre du jour de la CIG d'autres sujets lourds, hormis, bien entendu, les coopérations renforcées, pour lesquelles nous nous sommes battus, car il était évident pour nous qu'elles allaient constituer l'outil indispensable à la gestion de la transition vers une Europe élargie, nécessairement plus hétérogène, au moins pendant les premières années.
Par ailleurs, nous avons eu l'intuition et la volonté de retenir une procédure spécifique et totalement nouvelle pour élaborer la Charte des droits fondamentaux, dont l'importance majeure pourrait d'ailleurs, dans une prochaine étape, être consacrée à travers son intégration dans une Constitution européenne. J'y reviendrai dans un instant.
II. Les acquis de Nice
S'agissant du Traité lui-même, je me limiterai, si vous le voulez bien, à quelques remarques sur les acquis les plus saillants. Globalement, les objectifs fixés ont été à peu près atteints, le contrat a été rempli.
Sur la repondération des voix et les coopérations renforcées, nous avons quasiment atteint l'objectif fixé. Sans changement, le système de repondération existant aurait conduit l'Union à l'enlisement. Le rééquilibrage auquel nous avons procédé est important, puisqu'il permet aux grands Etats membres de retrouver une place plus conforme à leur poids démographique et politique au sein de l'Union, sans rompre la parité entre eux. Quant aux coopérations renforcées, elles seront plus faciles à mettre en uvre, et permettront aux pays qui le souhaitent d'avancer ensemble, à quelques-uns, sur des terrains nouveaux.
S'agissant de la Commission, il est évident que nous aurions voulu et dû faire mieux. La position française, vous le savez, était très claire : nous considérions que la Commission, clé de voûte de la méthode communautaire, devait être renforcée. Malheureusement, plusieurs de nos partenaires, y compris certains parmi ceux qui sont d'ordinaire les plus fervents défenseurs de la tradition communautaire, ne nous ont pas beaucoup aidés. La Commission elle-même, je dois le dire, n'a pas pris un parti aussi net que nous l'aurions souhaité et ne s'est pas suffisamment montrée soucieuse, en la circonstance, de l'intérêt supérieur européen.
Enfin, sur la majorité qualifiée, les résultats sont insuffisants, je l'avoue sans détour. Encore faut-il, pour être honnête, dire pourquoi. Quantitativement, un nombre assez grand d'articles est passé à la majorité qualifiée. Une approche qualitative, en revanche, met en lumière une certaine médiocrité des résultats. Nous n'avons pas été en mesure d'avancer sur quelques domaines pourtant essentiels comme la fiscalité ou le social. Beaucoup d'Etats membres qui avaient, comme la France avec l'article 133, des difficultés, n'ont pas fait autant d'efforts que nous, loin de là, pour bouger. Et aucun de nos grands partenaires - je dis bien aucun - n'a particulièrement montré l'exemple.
Mais au total le résultat de la négociation n'est pas mauvais, surtout si l'on considère le rapport de forces qui existait à ce moment-là.
Je suis certain que nous allons avoir, tout à l'heure, un débat très riche sur ce traité. Il nous permettra, je l'espère, de lever les éventuelles incertitudes qui pourraient subsister sur telle ou telle disposition. En tout cas, je m'y emploierai, car je pense que notre intérêt est de ratifier au plus vite ce texte - comme nos amis danois l'ont, à une très large majorité, déjà fait la semaine dernière - pour nous consacrer tous ensemble à l'étape suivante, le débat sur l'avenir de l'Europe, dont je veux maintenant dire quelques mots.
III. Après Nice, le débat sur l'avenir de l'Europe
Lancé, formellement, en France, le 11 avril dernier, par le président de la République et le Premier ministre, ce débat s'achèvera, en 2004, par une nouvelle Conférence intergouvernementale.
Les Parlementaires - vous-mêmes Mesdames et Messieurs les Députés - ont, dans ce débat, un rôle essentiel à jouer et j'espère que vous y prendrez tous largement part, que ce soit au sein des travaux au niveau national - que vous prendrez l'initiative d'organiser - ou dans le cadre des forums qui se tiendront systématiquement, dans chacune de nos régions d'ici novembre. D'ores et déjà, je tiens à saluer l'intention de la Délégation aux affaires européennes de préparer pour l'automne des rapports sur chacune des grandes questions identifiées par la déclaration annexée au Traité de Nice.
Nous accordons à la phase nationale de ce débat une attention particulière, car elle doit être l'occasion de faire aussi parler sur l'Europe ceux qui d'ordinaire ne s'expriment pas volontiers ou facilement sur ce sujet. Ce qui importe, ce sont les attentes concrètes de nos concitoyens, à partir desquelles nous pourrons orienter, améliorer, compléter les politiques communes existantes.
Il ne s'agit pas de dessiner une nouvelle architecture institutionnelle de manière abstraite, satisfaisante pour l'esprit mais déconnectée des réalités politiques et humaines de l'Union européenne, qui est bien - qu'on le veuille ou non- un ensemble d'Etats aux identités fortes. Il s'agit avant tout de permettre à l'Europe élargie de demain de bien fonctionner. Ne sacrifions pas aux délices un peu ésotériques d'un "concours de beauté" institutionnel qui serait coupé du réel.
Il ne sert à rien d'avoir de bonnes institutions, si nous n'avons pas de politiques fortes. Nous ne faisons pas l'Europe pour les institutions mais parce que nous avons un projet, au sens le plus large et le plus noble, un véritable projet de société, un modèle de civilisation, original, fondé sur un socle solide et vivant de valeurs communes. Mais, bien sûr, pour conduire de bonnes politiques, il faut des institutions fortes, efficaces, démocratiques, légitimes.
A l'origine de notre Europe il y a la volonté de bâtir, pour toujours, la paix sur notre continent. Il y a aussi celle d'uvrer au bien-être de nos concitoyens au sein d'un espace prospère, dynamique et toujours plus respectueux des droits sociaux, soucieux de garantir la sécurité au quotidien, plus attentif que jamais au respect des droits fondamentaux, qui sont désormais inscrits dans la Charte et qui devront, je l'ai dit, un jour être scellés dans les fondements mêmes de l'Europe élargie, en devenant la partie la plus solennelle d'une future Constitution. Les institutions doivent être là pour porter ce projet.
Mais, si les institutions sont en crise, le projet européen, lui, est en question. L'avenir de l'Europe soulève chez nos concitoyens des interrogations légitimes du point de vue de son contenu. Il est donc essentiel que nous soyons en mesure d'affirmer d'abord le projet que nous voulons pour l'Europe de demain en cherchant à consolider et à développer ce que nous avons commencé à construire.
Dans le domaine économique, dans le domaine social, mais aussi dans celui de la recherche, de l'industrie, de la santé, de l'environnement ou de la sécurité, nous devons poursuivre nos efforts pour définir les politiques qui conduiront l'Europe vers une solidarité plus forte, plus étroite. Je pense à la mise en place d'un gouvernement économique, avec la nécessité, en parallèle, d'ouvrir la perspective d'un véritable traité social ; je pense aussi à la réalisation d'un espace judiciaire commun, à la création d'une police européenne intégrée ; je pense aussi, bien sûr, à la préservation, que nous devons mener en commun, de nos spécificités et de nos richesses culturelles ; je pense encore à l'affirmation d'une stratégie européenne de défense ; je pense enfin à la promotion du respect de l'environnement et du développement durable.
C'est de tout cela que la réflexion institutionnelle doit s'inspirer pour élaborer les axes d'une nouvelle réforme. La Déclaration de Nice sur l'avenir de l'Union énonce, il est vrai, quatre questions : la répartition des compétences, la constitutionnalisation des traités, le rôle des Parlements nationaux et le statut de la Charte des droits fondamentaux. Rien n'empêche d'aller plus loin. Mais il est évident aussi que cette réflexion doit tenir compte de ce qui existe, et en conserver le meilleur. Aussi l'on aurait tort, je crois, de considérer a priori que seule la mise en place d'un schéma strictement fédéral constituerait une réforme digne de ce nom. Je note que des Européens aussi convaincus que Jacques Delors, Joschka Fischer ou Romano Prodi partagent cette analyse.
Certes, il existe dans l'Union européenne, et nous le savons bien, des éléments caractéristiques d'un système fédéral. Ils sont même des rouages essentiels de cette construction originale : je pense à la Commission, bien sûr, expression de l'intérêt général communautaire, je pense au Parlement européen, en quelque sorte embryon de la représentation d'un peuple européen, je pense à la Cour de Justice, je pense à l'euro. Mais il existe aussi d'autres réalités, celle des Etats, dont nous devons, dont nous voulons tenir compte, parce qu'elles sont effectives, parce qu'elles sont des sources de légitimité essentielles. Le triangle institutionnel - Commission, Conseil, Parlement européen -, tel qu'il a été progressivement mis en place est certainement le mieux à même de faire vivre ce que Lionel Jospin a appelé la "tension constitutive" de l'Union, entre ce qui relève du fédéralisme et ce qui traduit la permanence et l'identité des Etats-nations. Je pense qu'il ne s'agit pas d'un oxymore mais bien d'une dialéctique profonde.
Les trois composantes du triangle institutionnel doivent se voir conférer un poids politique plus fort, tout en maintenant l'équilibre entre elles. C'est l'ensemble de cet édifice qu'il faut rehausser politiquement.
La Commission, je l'ai dit, est la garante de l'intérêt général européen, la pièce maîtresse de la méthode communautaire. Elle doit voir sa légitimité politique renforcée. Avec le Traité de Nice, la désignation de son Président se fera à la majorité qualifiée et son autorité sur le collège sera accrue. Il faut aller plus loin et faire qu'il soit directement issu de la formation politique européenne victorieuse aux élections au Parlement européen. La Commission gagnerait ainsi en force et si, en plus, nous parvenions enfin à réformer le mode de scrutin actuel, alors l'intérêt des citoyens pour les élections européennes serait naturellement revivifié. Ceci est indispensable si nous voulons faire émerger progressivement un véritable espace politique européen, une vie démocratique européenne, dont les élections au Parlement européen constitueraient le temps fort.
Cette même approche - celle du renforcement de la légitimité démocratique - doit prévaloir pour le Parlement européen, qui a vu, à Nice, ses prérogatives étendues avec l'extension du champ de la majorité qualifiée. Pour cela, une profonde réforme du mode de scrutin pour les élections européennes, combinant le maintien de la proportionnelle et la régionalisation, est indispensable. Mais pour conférer à l'Assemblée de Strasbourg un rôle comparable à celui des parlements des démocraties modernes, il faut aussi la rendre plus responsable. C'est dans cet esprit que le Premier ministre a proposé l'introduction d'un droit de dissolution qui irait incontestablement dans ce sens et serait cohérente avec le pouvoir dont le Parlement dispose vis-à-vis de la Commission. Il ne s'agirait pas, bien au contraire, d'un affaiblissement du Parlement européen, mais d'une consécration de la démocratie parlementaire, qui doit prévaloir aussi à l'échelle de l'Union.
Quant au Conseil, troisième sommet du triangle, on voit mal comment il pourrait ne pas conserver sa double nature - exécutive et législative -, dès lors que le traité confère explicitement des pouvoirs aux Etats membres et que certaines politiques relèvent clairement et continueront de relever de la méthode intergouvernementale. Loin d'un retour en arrière vers l'intergouvernemental, la réforme du Conseil doit au contraire lui permettre de mieux jouer son double rôle dans un contexte où la méthode communautaire serait pleinement restaurée.
On pourrait naturellement imaginer, comme le font certains, que les Etats n'aient plus qu'un pouvoir législatif et encore, secondaire par rapport à celui du Parlement européen. Je crois, comme l'a sagement indiqué le président de la République fédérale d'Allemagne, M. Rau, que nos peuples n'y sont pas encore prêts. Et je vois mal comment nous pourrions ne pas tenir compte de cette donnée politique majeure. Encore une fois, nous faisons l'Europe pour les citoyens, non pour le plaisir intellectuel de réaliser une construction institutionnelle qui serait - en tout cas pour certains - idéale. Gardons nous de confondre notre Europe avec les cités imaginaires rêvées par Italo Calvino.
Il faut partir de l'existant. Cela veut dire, en l'occurrence, réorganiser les méthodes de travail du Conseil, pour mieux assurer les fonctions d'impulsion, de préparation et de coordination du travail européen, en amont du Conseil européen des chefs d'Etat et de gouvernement. Cela devrait se faire en créant un Conseil permanent de ministres, composé de "sortes de vice-Premiers ministres", qui coordonneraient les questions européennes dans leur propre gouvernement national. Cela veut dire aussi faciliter la prise de décision grâce à la généralisation du système de vote à la majorité qualifiée - c'est-à-dire en incluant enfin des secteurs majeurs tels que le social ou la fiscalité. Ceci constituerait une vraie réforme sur la voie de l'intégration. Voilà bien un terrain sur lequel les dispositions du Traité de Nice doivent être puissamment complétées.
Et que l'on ne s'y trompe pas ! Ce ne sont pas des réformes a minima. Si tel était le cas, nous n'aurions pas rencontré tant de résistances, à Nice, y compris, je le redis avec insistance, de la part de ceux qui prétendent aujourd'hui proposer, avec le modèle fédéral, une réforme plus ambitieuse.
Ne nous payons pas de mots. Ne nous laissons pas aveugler par les formules toutes faites. Regardons la réalité des institutions de l'Union et encore une fois, soyons au clair sur l'objectif à atteindre, c'est-à-dire sur le contenu du projet, car c'est bien là que pourront se mesurer la nature et le degré de notre ambition pour l'Europe.
Notre ambition, vous l'avez compris, Mesdames et Messieurs les Députés, et que nous partageons sans aucun doute, c'est une très haute ambition : c'est celle, comme l'a dit le Premier ministre, de construire une Europe forte, consciente de son identité politique et porteuse de ses valeurs de paix, de solidarité et de pluralisme.
Mais pour cela, et pour permettre d'aller plus loin sur la voie de l'élargissement, nous devons d'abord ratifier le Traité de Nice, et c'est donc volontiers que je laisse maintenant place au débat parlementaire.
(source http://www.doc.diplomatie.gouv.fr, le 11 juin 2001)
Monsieur le Rapporteur,
Mesdames et Messieurs les Députés,
Chers Amis,
Permettez-moi d'intervenir à mon tour et de manière complémentaire par rapport aux propos d'Hubert Védrine, qui a retracé l'historique de la Conférence intergouvernementale qui a conduit au Traité de Nice et rappelé le contexte dans lequel ce traité s'est élaboré, avec son lot habituel d'attentes, de tensions, de frustrations, mais aussi de soulagements, voire, sur certains points, - je n'hésite pas à le dire - de satisfactions.
Je souhaiterais pour ma part donner quelques éclairages sur les aspects du traité qui me paraissent les plus importants et qui continueront de nous occuper dans la suite de notre réflexion sur l'avenir de l'Europe.
Un mot, d'abord, si vous le voulez bien, sur le contexte dans lequel se situe ce débat. L'Union européenne fait face aujourd'hui, nous le savons bien, à une crise de ses institutions. Aucune ne fonctionne vraiment de manière satisfaisante. D'abord, parce que certaines réformes n'ont pu être faites plus tôt, alors même qu'elles avaient été jugées indispensables dès le précédent élargissement à l'Autriche, la Suède et la Finlande. Ensuite, parce que l'Union doit faire face à un nouvel élargissement, d'une ampleur sans précédent.
Il a toujours été clair pour nous qu'il ne saurait y avoir de "grand soir institutionnel". Non par manque d'ambition, contrairement à ce que disent certains soi-disants "euro-enthousiastes" autoproclamés. L'enthousiasme ne nous fait pas défaut, mais il ne saurait remplacer la recherche de solutions réalistes, praticables dans le contexte d'une Europe de plus en plus large, où la synthèse entre élargissement et approfondissement ne sera réussie que si elle permet de préserver ce qui fait l'essence du projet européen.
Or, l'essence du projet européen, ce sont d'abord les politiques que nous menons ensemble et les moyens que nous voulons nous donner pour les développer, non des théories institutionnelles.
Nous avons donc décidé de procéder par étapes :
- première étape : le Traité de Nice dont l'objectif est de régler enfin les questions restées en suspens, en 1997, à Amsterdam. De ce point de vue-là, Nice a été un succès, même si les solutions retenues ne sont pas toutes à la hauteur de nos attentes. Je n'y reviendrai que très brièvement.
- deuxième étape, le débat sur l'avenir de l'Europe dont le principe a été acté à Nice, à travers une déclaration annexée au traité et qui a d'ores et déjà donné lieu à plusieurs contributions très importantes, dont la dernière en date est celle qu'a apportée le Premier Ministre, le 28 mai.
I. La genèse du Traité de Nice
Comme je l'ai dit, les questions qui figuraient à l'ordre du jour à Nice, - à savoir : le format de la Commission ; le champ de la majorité qualifiée ; la repondération - avaient déjà été débattues à Amsterdam, mais les chefs d'Etat et de gouvernement n'avaient pas été en mesure, alors, d'aboutir à un accord. Ceci montre bien, que non seulement ces questions étaient déjà bien identifiées, mais que chacun en connaissait parfaitement la très grande difficulté. Laisser penser que Nice a péché par excès de modestie, et que ces questions auraient pu être évacuées en un tour de main relève de l'ignorance ou de la désinformation. Pourquoi, si tel était le cas, le succès n'a-t-il pas été au rendez-vous à Amsterdam?
Nous avions, en ce qui nous concerne, bien mesuré, dès Amsterdam, le problème majeur que poserait, dans la perspective de l'élargissement, l'existence de tels "reliquats". D'où l'idée de la déclaration franco-belgo-italienne, qui a permis d'inscrire de façon solennelle, dans un texte annexé au traité d'Amsterdam, la nécessité de résoudre ces trois questions avant le prochain élargissement, qui est notre devoir historique et notre priorité politique.
L'Assemblée nationale, elle-même, - votre assemblée - a ardemment plaidé, lors du débat de ratification, pour que cette préoccupation soit clairement inscrite dans le projet de loi de ratification, ce qui était juste et légitime. Le gouvernement en a pleinement tenu compte et a choisi de recourir à la solution, tout à fait exceptionnelle, on se souvient, sur ces bancs, de ce débat, de l'ajout d'un article 2 au projet de loi de ratification du Traité d'Amsterdam.
C'est ainsi qu'aux Conseils européens d'Helsinki, en décembre 1999, puis de Feira, en juin 2000, nous avons plaidé, avec d'autres, pour que soit fixé - mais aussi limité - l'ordre du jour de la CIG de 2000, en concentrant les négociations sur les trois questions restées sans réponse à Amsterdam. Parce que nous voulions éviter un piège : nous lancer dans une hypothétique refondation d'ensemble de l'Union eût été une tentative séduisante, mais cela n'aurait pu que retarder l'élargissement, en multipliant les raisons offertes aux uns et aux autres de refuser un accord à Nice.
Nous n'avons donc pas souhaité ajouter à l'ordre du jour de la CIG d'autres sujets lourds, hormis, bien entendu, les coopérations renforcées, pour lesquelles nous nous sommes battus, car il était évident pour nous qu'elles allaient constituer l'outil indispensable à la gestion de la transition vers une Europe élargie, nécessairement plus hétérogène, au moins pendant les premières années.
Par ailleurs, nous avons eu l'intuition et la volonté de retenir une procédure spécifique et totalement nouvelle pour élaborer la Charte des droits fondamentaux, dont l'importance majeure pourrait d'ailleurs, dans une prochaine étape, être consacrée à travers son intégration dans une Constitution européenne. J'y reviendrai dans un instant.
II. Les acquis de Nice
S'agissant du Traité lui-même, je me limiterai, si vous le voulez bien, à quelques remarques sur les acquis les plus saillants. Globalement, les objectifs fixés ont été à peu près atteints, le contrat a été rempli.
Sur la repondération des voix et les coopérations renforcées, nous avons quasiment atteint l'objectif fixé. Sans changement, le système de repondération existant aurait conduit l'Union à l'enlisement. Le rééquilibrage auquel nous avons procédé est important, puisqu'il permet aux grands Etats membres de retrouver une place plus conforme à leur poids démographique et politique au sein de l'Union, sans rompre la parité entre eux. Quant aux coopérations renforcées, elles seront plus faciles à mettre en uvre, et permettront aux pays qui le souhaitent d'avancer ensemble, à quelques-uns, sur des terrains nouveaux.
S'agissant de la Commission, il est évident que nous aurions voulu et dû faire mieux. La position française, vous le savez, était très claire : nous considérions que la Commission, clé de voûte de la méthode communautaire, devait être renforcée. Malheureusement, plusieurs de nos partenaires, y compris certains parmi ceux qui sont d'ordinaire les plus fervents défenseurs de la tradition communautaire, ne nous ont pas beaucoup aidés. La Commission elle-même, je dois le dire, n'a pas pris un parti aussi net que nous l'aurions souhaité et ne s'est pas suffisamment montrée soucieuse, en la circonstance, de l'intérêt supérieur européen.
Enfin, sur la majorité qualifiée, les résultats sont insuffisants, je l'avoue sans détour. Encore faut-il, pour être honnête, dire pourquoi. Quantitativement, un nombre assez grand d'articles est passé à la majorité qualifiée. Une approche qualitative, en revanche, met en lumière une certaine médiocrité des résultats. Nous n'avons pas été en mesure d'avancer sur quelques domaines pourtant essentiels comme la fiscalité ou le social. Beaucoup d'Etats membres qui avaient, comme la France avec l'article 133, des difficultés, n'ont pas fait autant d'efforts que nous, loin de là, pour bouger. Et aucun de nos grands partenaires - je dis bien aucun - n'a particulièrement montré l'exemple.
Mais au total le résultat de la négociation n'est pas mauvais, surtout si l'on considère le rapport de forces qui existait à ce moment-là.
Je suis certain que nous allons avoir, tout à l'heure, un débat très riche sur ce traité. Il nous permettra, je l'espère, de lever les éventuelles incertitudes qui pourraient subsister sur telle ou telle disposition. En tout cas, je m'y emploierai, car je pense que notre intérêt est de ratifier au plus vite ce texte - comme nos amis danois l'ont, à une très large majorité, déjà fait la semaine dernière - pour nous consacrer tous ensemble à l'étape suivante, le débat sur l'avenir de l'Europe, dont je veux maintenant dire quelques mots.
III. Après Nice, le débat sur l'avenir de l'Europe
Lancé, formellement, en France, le 11 avril dernier, par le président de la République et le Premier ministre, ce débat s'achèvera, en 2004, par une nouvelle Conférence intergouvernementale.
Les Parlementaires - vous-mêmes Mesdames et Messieurs les Députés - ont, dans ce débat, un rôle essentiel à jouer et j'espère que vous y prendrez tous largement part, que ce soit au sein des travaux au niveau national - que vous prendrez l'initiative d'organiser - ou dans le cadre des forums qui se tiendront systématiquement, dans chacune de nos régions d'ici novembre. D'ores et déjà, je tiens à saluer l'intention de la Délégation aux affaires européennes de préparer pour l'automne des rapports sur chacune des grandes questions identifiées par la déclaration annexée au Traité de Nice.
Nous accordons à la phase nationale de ce débat une attention particulière, car elle doit être l'occasion de faire aussi parler sur l'Europe ceux qui d'ordinaire ne s'expriment pas volontiers ou facilement sur ce sujet. Ce qui importe, ce sont les attentes concrètes de nos concitoyens, à partir desquelles nous pourrons orienter, améliorer, compléter les politiques communes existantes.
Il ne s'agit pas de dessiner une nouvelle architecture institutionnelle de manière abstraite, satisfaisante pour l'esprit mais déconnectée des réalités politiques et humaines de l'Union européenne, qui est bien - qu'on le veuille ou non- un ensemble d'Etats aux identités fortes. Il s'agit avant tout de permettre à l'Europe élargie de demain de bien fonctionner. Ne sacrifions pas aux délices un peu ésotériques d'un "concours de beauté" institutionnel qui serait coupé du réel.
Il ne sert à rien d'avoir de bonnes institutions, si nous n'avons pas de politiques fortes. Nous ne faisons pas l'Europe pour les institutions mais parce que nous avons un projet, au sens le plus large et le plus noble, un véritable projet de société, un modèle de civilisation, original, fondé sur un socle solide et vivant de valeurs communes. Mais, bien sûr, pour conduire de bonnes politiques, il faut des institutions fortes, efficaces, démocratiques, légitimes.
A l'origine de notre Europe il y a la volonté de bâtir, pour toujours, la paix sur notre continent. Il y a aussi celle d'uvrer au bien-être de nos concitoyens au sein d'un espace prospère, dynamique et toujours plus respectueux des droits sociaux, soucieux de garantir la sécurité au quotidien, plus attentif que jamais au respect des droits fondamentaux, qui sont désormais inscrits dans la Charte et qui devront, je l'ai dit, un jour être scellés dans les fondements mêmes de l'Europe élargie, en devenant la partie la plus solennelle d'une future Constitution. Les institutions doivent être là pour porter ce projet.
Mais, si les institutions sont en crise, le projet européen, lui, est en question. L'avenir de l'Europe soulève chez nos concitoyens des interrogations légitimes du point de vue de son contenu. Il est donc essentiel que nous soyons en mesure d'affirmer d'abord le projet que nous voulons pour l'Europe de demain en cherchant à consolider et à développer ce que nous avons commencé à construire.
Dans le domaine économique, dans le domaine social, mais aussi dans celui de la recherche, de l'industrie, de la santé, de l'environnement ou de la sécurité, nous devons poursuivre nos efforts pour définir les politiques qui conduiront l'Europe vers une solidarité plus forte, plus étroite. Je pense à la mise en place d'un gouvernement économique, avec la nécessité, en parallèle, d'ouvrir la perspective d'un véritable traité social ; je pense aussi à la réalisation d'un espace judiciaire commun, à la création d'une police européenne intégrée ; je pense aussi, bien sûr, à la préservation, que nous devons mener en commun, de nos spécificités et de nos richesses culturelles ; je pense encore à l'affirmation d'une stratégie européenne de défense ; je pense enfin à la promotion du respect de l'environnement et du développement durable.
C'est de tout cela que la réflexion institutionnelle doit s'inspirer pour élaborer les axes d'une nouvelle réforme. La Déclaration de Nice sur l'avenir de l'Union énonce, il est vrai, quatre questions : la répartition des compétences, la constitutionnalisation des traités, le rôle des Parlements nationaux et le statut de la Charte des droits fondamentaux. Rien n'empêche d'aller plus loin. Mais il est évident aussi que cette réflexion doit tenir compte de ce qui existe, et en conserver le meilleur. Aussi l'on aurait tort, je crois, de considérer a priori que seule la mise en place d'un schéma strictement fédéral constituerait une réforme digne de ce nom. Je note que des Européens aussi convaincus que Jacques Delors, Joschka Fischer ou Romano Prodi partagent cette analyse.
Certes, il existe dans l'Union européenne, et nous le savons bien, des éléments caractéristiques d'un système fédéral. Ils sont même des rouages essentiels de cette construction originale : je pense à la Commission, bien sûr, expression de l'intérêt général communautaire, je pense au Parlement européen, en quelque sorte embryon de la représentation d'un peuple européen, je pense à la Cour de Justice, je pense à l'euro. Mais il existe aussi d'autres réalités, celle des Etats, dont nous devons, dont nous voulons tenir compte, parce qu'elles sont effectives, parce qu'elles sont des sources de légitimité essentielles. Le triangle institutionnel - Commission, Conseil, Parlement européen -, tel qu'il a été progressivement mis en place est certainement le mieux à même de faire vivre ce que Lionel Jospin a appelé la "tension constitutive" de l'Union, entre ce qui relève du fédéralisme et ce qui traduit la permanence et l'identité des Etats-nations. Je pense qu'il ne s'agit pas d'un oxymore mais bien d'une dialéctique profonde.
Les trois composantes du triangle institutionnel doivent se voir conférer un poids politique plus fort, tout en maintenant l'équilibre entre elles. C'est l'ensemble de cet édifice qu'il faut rehausser politiquement.
La Commission, je l'ai dit, est la garante de l'intérêt général européen, la pièce maîtresse de la méthode communautaire. Elle doit voir sa légitimité politique renforcée. Avec le Traité de Nice, la désignation de son Président se fera à la majorité qualifiée et son autorité sur le collège sera accrue. Il faut aller plus loin et faire qu'il soit directement issu de la formation politique européenne victorieuse aux élections au Parlement européen. La Commission gagnerait ainsi en force et si, en plus, nous parvenions enfin à réformer le mode de scrutin actuel, alors l'intérêt des citoyens pour les élections européennes serait naturellement revivifié. Ceci est indispensable si nous voulons faire émerger progressivement un véritable espace politique européen, une vie démocratique européenne, dont les élections au Parlement européen constitueraient le temps fort.
Cette même approche - celle du renforcement de la légitimité démocratique - doit prévaloir pour le Parlement européen, qui a vu, à Nice, ses prérogatives étendues avec l'extension du champ de la majorité qualifiée. Pour cela, une profonde réforme du mode de scrutin pour les élections européennes, combinant le maintien de la proportionnelle et la régionalisation, est indispensable. Mais pour conférer à l'Assemblée de Strasbourg un rôle comparable à celui des parlements des démocraties modernes, il faut aussi la rendre plus responsable. C'est dans cet esprit que le Premier ministre a proposé l'introduction d'un droit de dissolution qui irait incontestablement dans ce sens et serait cohérente avec le pouvoir dont le Parlement dispose vis-à-vis de la Commission. Il ne s'agirait pas, bien au contraire, d'un affaiblissement du Parlement européen, mais d'une consécration de la démocratie parlementaire, qui doit prévaloir aussi à l'échelle de l'Union.
Quant au Conseil, troisième sommet du triangle, on voit mal comment il pourrait ne pas conserver sa double nature - exécutive et législative -, dès lors que le traité confère explicitement des pouvoirs aux Etats membres et que certaines politiques relèvent clairement et continueront de relever de la méthode intergouvernementale. Loin d'un retour en arrière vers l'intergouvernemental, la réforme du Conseil doit au contraire lui permettre de mieux jouer son double rôle dans un contexte où la méthode communautaire serait pleinement restaurée.
On pourrait naturellement imaginer, comme le font certains, que les Etats n'aient plus qu'un pouvoir législatif et encore, secondaire par rapport à celui du Parlement européen. Je crois, comme l'a sagement indiqué le président de la République fédérale d'Allemagne, M. Rau, que nos peuples n'y sont pas encore prêts. Et je vois mal comment nous pourrions ne pas tenir compte de cette donnée politique majeure. Encore une fois, nous faisons l'Europe pour les citoyens, non pour le plaisir intellectuel de réaliser une construction institutionnelle qui serait - en tout cas pour certains - idéale. Gardons nous de confondre notre Europe avec les cités imaginaires rêvées par Italo Calvino.
Il faut partir de l'existant. Cela veut dire, en l'occurrence, réorganiser les méthodes de travail du Conseil, pour mieux assurer les fonctions d'impulsion, de préparation et de coordination du travail européen, en amont du Conseil européen des chefs d'Etat et de gouvernement. Cela devrait se faire en créant un Conseil permanent de ministres, composé de "sortes de vice-Premiers ministres", qui coordonneraient les questions européennes dans leur propre gouvernement national. Cela veut dire aussi faciliter la prise de décision grâce à la généralisation du système de vote à la majorité qualifiée - c'est-à-dire en incluant enfin des secteurs majeurs tels que le social ou la fiscalité. Ceci constituerait une vraie réforme sur la voie de l'intégration. Voilà bien un terrain sur lequel les dispositions du Traité de Nice doivent être puissamment complétées.
Et que l'on ne s'y trompe pas ! Ce ne sont pas des réformes a minima. Si tel était le cas, nous n'aurions pas rencontré tant de résistances, à Nice, y compris, je le redis avec insistance, de la part de ceux qui prétendent aujourd'hui proposer, avec le modèle fédéral, une réforme plus ambitieuse.
Ne nous payons pas de mots. Ne nous laissons pas aveugler par les formules toutes faites. Regardons la réalité des institutions de l'Union et encore une fois, soyons au clair sur l'objectif à atteindre, c'est-à-dire sur le contenu du projet, car c'est bien là que pourront se mesurer la nature et le degré de notre ambition pour l'Europe.
Notre ambition, vous l'avez compris, Mesdames et Messieurs les Députés, et que nous partageons sans aucun doute, c'est une très haute ambition : c'est celle, comme l'a dit le Premier ministre, de construire une Europe forte, consciente de son identité politique et porteuse de ses valeurs de paix, de solidarité et de pluralisme.
Mais pour cela, et pour permettre d'aller plus loin sur la voie de l'élargissement, nous devons d'abord ratifier le Traité de Nice, et c'est donc volontiers que je laisse maintenant place au débat parlementaire.
(source http://www.doc.diplomatie.gouv.fr, le 11 juin 2001)