Déclaration de M. François Lamy, ministre de la ville, sur la préparation de la future génération des contrats de ville dans le cadre de la réforme de la politique de la ville, à Paris le 18 juin 2013.

Prononcé le

Intervenant(s) : 

Circonstance : Lancement du Comité d'animation des sites préfigurateurs des contrats de ville, à Paris le 18 juin 2013

Texte intégral

Mesdames et Messieurs les préfets,
Mesdames et Messieurs les élus,
Madame la présidente de l'Acsé,
Mesdames et Messieurs,
Merci de votre présence nombreuse aujourd'hui qui témoigne tout autant de la mobilisation nationale autour de cette nouvelle étape de la politique de la ville, que de l'attente forte qui s'exprime localement dans nos territoires.
En clôturant le 31 janvier dernier la vaste concertation qui avait rassemblé pendant 3 mois quelques 200 acteurs de la politique de la ville, je l'avais assuré : "tout commence aujourd'hui".
Et ce matin, à travers le lancement de cette préfiguration des futurs contrats de ville dans vos territoires, il est important pour moi de vous réaffirmer, à vous ainsi qu'à l'ensemble des acteurs de la politique de la ville, que l'esprit dans lequel nous avons travaillé ensemble, l'esprit de la concertation « Quartiers, engageons le changement » ne se refermera pas.
Car la politique de la ville ne peut pas s'enfermer dans la seule logique étatique, qui viendrait d'en haut, et s'imposerait uniformément et inutilement sur l'ensemble du territoire national. La force de la politique de la ville, c'est au contraire sa capacité d'adaptation. La force de la politique de la ville, c'est sa capacité de mobilisation.
La dynamique partenariale mise en place doit en effet se poursuivre dans la mise en œuvre de cette nouvelle étape. C'est la condition essentielle de sa réussite.
Il y a bien entendu le projet de loi qui traduit les préconisations de la concertation et les décisions actées lors du Comité Interministériel des Villes du 19 février dernier. Ce projet a officiellement été déposé au conseil d'état en fin de semaine dernière et sera présenté en conseil des ministres au mois de juillet. Il constituera une étape de concertation indispensable avec les parlementaires à l'automne. Mais cette étape législative essentielle n'est qu'une des dimensions du processus de concertation.
Nous devons dès à présent préparer dans les territoires la future génération de contrats de ville, dont les principes simples et forts nécessitent une appropriation par les acteurs et une adaptation qualitative aux réalités de chacun : mobilisation large des partenaires, renforcement du couple intercommunalité/communes, levée effective du droit commun, capacité d'observation, de suivi et d'évaluation, ingénierie locale, sécurisation et visibilité accrue pour le tissu associatif…autant d'axes qu'ils nous faut approfondir pour donner toute leur ambition à ces contrats.
C'est pour cela que j'ai souhaité la mise en place d'un dispositif national pour garantir la cohérence globale et l'efficacité de cette politique publique singulière. Ce dispositif devra dégager les enjeux de la future contractualisation, assurer le suivi des préconisations de la concertation et la déclinaison des conventions signées, accompagner la formation des acteurs locaux. Dans ses différents groupes, il associera l'ensemble des acteurs de la politique de la ville, et notamment les administrations centrales, les agences et les opérateurs publics, les associations d'élus, les réseaux de professionnels, le monde HLM, le monde économique, les centres de ressources, le CNFPT.
Et si l'ensemble des acteurs de la politique de la ville dans leur diversité doit construire ce cadre national, l'ensemble des acteurs locaux dans leur complémentarité doit construire le projet de territoire et le contrat qui en traduira l'ambition. C'est pourquoi j'ai souhaité, au sein de ce dispositif national, une expérimentation grandeur nature dans 12 agglomérations : Amiens, Nîmes, Toulouse, Auch, Lille, Arras, Rennes, Dijon, Mulhouse, Evry, Plaine Commune et Fort-de-France.
L'État, les communes, leurs intercommunalités et leurs services respectifs sont évidemment au cœur de cette démarche. C'est le sens de votre présence aujourd'hui, en comité (pas totalement !) restreint. De nombreux autres acteurs sont appelés à travailler en complète synergie avec vous dans vos territoires, pour tout ou partie de la démarche :
- les collectivités bien entendu, et l'implication renforcée des régions et des départements sera un enjeu particulièrement important
- les opérateurs publics - Pôle Emploi, les CAF, les ARS –
- les offices HLM, avec l'USH qui sera associé nationalement à la démarche pour suivre les enjeux et accompagner localement les bailleurs
- le monde économique, institutionnel avec les consulaires, la CDC ou encore la BPI, mais aussi les entreprises, car le volet emploi/développement économique reste une pierre angulaire pour ces quartiers
- les centres de ressources présents dans chacun des 12 sites, sur lesquels vous êtes appelés à vous appuyer dans l'accompagnement indispensable et pertinent qu'ils font des acteurs, à la préparation de ces futurs contrats
- les associations et les habitants évidemment : le rapport Mechmache/Bacqué qui sera rendu à l'été fera des propositions concrètes que nous devrons expérimenter dans certains des sites. Mais comprenez bien mon intention : la participation des habitants n'est ni un axe, ni un volet ou un objectif imposé de la politique de la ville. Ce serait la sous-estimer. Elle est bien une méthode de construction inhérente de cette politique. L'ensemble des sites doit donc réinterroger ses propres pratiques, son fonctionnement et son organisation pour intégrer pleinement cette dimension de la gouvernance et du pilotage de la politique de la ville avec les habitants.
Cette mobilisation générale est essentielle. De votre capacité à pouvoir la convoquer dépend la réussite de ces nouveaux contrats. Pour que la politique de la ville redevienne cette politique publique d'alerte et de prévention territoriale collective.
L'enjeu de cette préfiguration est bien que vous puissiez aller le plus loin possible dans la démarche. Ne vous réfrénez pas : inventer, innover, expérimenter ! C'est le sens de cette réforme que de décloisonner et de réinterroger les pratiques, et d'ouvrir par là même de nouveaux horizons à l'action publique. Et sur ce point, je le redis : le projet de territoire ne se construit pas depuis Paris. L'Etat national ne doit pas faire pour les territoires, mais avec eux. Le ministère et ses agences, constitués dans chacun de vos 12 sites en cellules opérationnelles, seront un acteur parmi d'autres, non pas pour porter et diriger ce travail, mais bien pour observer et accompagner. Car il s'agit bien d'une part de respecter la philosophie même de la démarche contractuelle de la politique de la ville. Et de réaffirmer, d'autre part, que s'il peut y avoir un cadre et un objectif national pour la politique de la ville, il y a autant de manières et de chemins d'y parvenir qu'il y a de territoires pour la conduire. La co-construction suggère aussi bien de la transversalité, qu'un jeu de logiques descendante et ascendante. C'est aussi ça le sens de cette réforme.
Mais parce que j'en appelle à la transversalité, au décloisonnement, il vous faudra aussi ouvrir dans vos contrats de nouveaux fronts opérationnels et concrets : l'enjeu de la jeunesse, porté par le président de la République ; celui de l'égalité hommes/femmes ; et enfin la lutte contre les discriminations et les stigmatisations. Ces 3 axes transversaux devront nécessairement être interrogés dans vos objectifs.
Reste la question des futurs quartiers prioritaires de la politique de la ville. Une présentation de la méthodologie a été faite la semaine dernière, qui s'appuie d'ailleurs sur l'exemple d'Amiens. Les simulations sont toujours actuellement en cours et la liste provisoire devrait être rendue publique à la rentrée. Par provisoire, comprenez : « avant l'examen parlementaire du projet de loi ». Mais dores et déjà, avec les précautions que je viens d'évoquer, nous vous communiquerons dès juillet les quartiers prioritaires tels qu'ils ressortent en l'état pour chacun de vos sites, afin de vous permettre de construire votre diagnostic et votre projet de territoire de manière véritablement opérationnelle. Concernant la nouvelle génération de projets de renouvellement urbain, les quartiers éligibles seront nécessairement des quartiers prioritaires, mais la liste nationale ne sera connue qu'après adoption du projet de loi. Cela ne vous interdit pas d'interroger dès à présent les problématiques urbaines de vos quartiers, ici l'inscription du plan stratégique local dans le contrat de ville, ici des besoins de renouvellement urbain, là l'articulation entre les actions de cohésion et l'action sur le bâti et les espaces publics.
En tout état de cause, cette préfiguration constitue bien pour vous tous la préparation de vos futurs contrats, sur la base d'éléments probants et solides. L'enjeu est donc fort pour chacun de vos sites. Cette expérimentation grandeur nature n'a finalement le terme d'expérimentation que pour les autres territoires qui en attendront les conclusions.
Car dans la représentativité géographique de vos sites et des réalités sociales différentes auxquelles vous êtes confrontés, Dans vos appréhensions différenciées de la politique de la ville, Dans les obstacles rencontrés et les dysfonctionnements constatés aussi, Vous êtes représentatifs de la politique de la ville dans toute sa diversité et sa complexité. L'exercice pourrait n'être que de style. Il n'en est rien. En qualité de sites pilotes, vous allez impulser cette nouvelle génération de contrats, donner la mesure de l'ambition de cette réforme de la politique de la ville.
Je vous remercie d'avoir accepté cette responsabilité. Et je vous remercie pour votre implication collective dans cette démarche totalement inédite sur la forme comme sur le fond.
Nous nous retrouverons à l'automne et à la fin de l'année pour en discuter, afin de dessiner ensemble les contours de cette nouvelle étape.
Merci à tous.
Source http://www.ville.gouv.fr, le 21 juin 2013