Déclaration de M. Victorin Lurel, ministre des outre-mer, sur la politique du logement social en Polynésie française, à Punaauia le 27 novembre 2013.

Prononcé le

Intervenant(s) : 

Circonstance : Visite du chantier de construction de logements sociaux Nina Peata, à Punaauia (Polynésie française) le 27 novembre 2013

Texte intégral

Monsieur le Président du gouvernement de Polynésie,
Monsieur le Député,
Monsieur le Maire de Punaauia, Ronald Tumahai,
Mesdames et messieurs,
Je voudrais commencer en vous faisant une confidence.
Je suis ministre depuis un peu plus de dix-huit mois et, avant cela, j'ai été un élu local. En presque 20 ans de vie politique, je peux vous dire que j'ai effectué un très grand nombre de visites de chantier.
Je suis donc un peu rôdé à cet exercice.
Mais il est deux types de construction qui, à chaque fois, me procurent une vraie satisfaction et, j'ose le dire, une réelle fierté : les bâtiments où est dispensé le savoir – une école, un lycée, une université ou encore une bibliothèque – et, je dois le dire, les logements.
Les logements, parce que je sais qu'il s'agit là d'un des besoins fondamentaux des citoyens aujourd'hui.
Disposer d'un toit pour y loger sa famille, c'est un besoin fondamental et je n'ai pas attendu d'être ministre des Outre-mer pour savoir qu'il y a dans les outre-mer - ayons conscience du chiffre ! – pas moins de 100.000 demandes de logements non satisfaites.
Ici, c'est 4.200 demandes, me dit-on, qui sont à satisfaire.
Au rythme actuel de construction et en admettant que les besoins restent les mêmes, il faudrait plus de 22 ans pour satisfaire les demandes en instance !
C'est dire si le défi que nous avons à relever est immense.
C'est dire, aussi, l'importance du chantier que nous allons ouvrir ici.
Importance, d'abord, au regard de la relance de la commande publique que nous devons initier.
Cette commande publique est en effet une façon de générer de l'activité et donc des emplois alors que ce territoire traverse depuis de très longs mois une crise économique aux effets très dommageables pour les familles.
Je le sais, le logement social était la première priorité du contrat de projet et sa mise en oeuvre s'est avérée difficile, entraînant un redéploiement de crédits vers d'autres volets en novembre 2011.
Redéploiement qui s'est néanmoins traduit par une amélioration de la gouvernance de ce volet qui a permis de programmer 1,42 milliards de francs pacifique lors du comité de pilotage du 21 novembre 2012, il y a tout juste un an.
Depuis cette date, les opérations « Motio » (80 logements - 2,136 milliards Fcfp) à Faa'a et « Outumaoro Nina Peata » (24 logements - 668 millions de Fcfp) à Punaauia ont pu être engagées.
Ce chantier de « Nina Peata » est donc emblématique à plus d'un titre :
- la commande publique, je l'ai dit
- mais aussi la traduction de la coopération étroite entre l'Etat et le Pays pour relancer efficacement le volet « logement social ».
L'Etat a pris toute sa part de ce projet : 40 % du financement, soit autant que le Pays, les 20 % restant étant financés par l'Office polynésien de l'habitat.
Là encore, c'est un travail en partenariat qui doit nous garantir de pouvoir agir efficacement.
Je l'ai dit, nous faisons face à une crise du logement qui est un risque pour la cohésion du territoire, ni la collectivité de Polynésie française, ni l'Etat ne peuvent rester indifférents.
J'ai noté avec intérêt le volontarisme affiché par la nouvelle majorité locale sur ce sujet.
Et c'est un volontarisme qu'il faudra concrétiser par des actes forts.
Si j'insiste à ce point sur ces enjeux, c'est parce que le logement en général, et le logement social en particulier, est une priorité pour ce gouvernement.
Et compte tenu des besoins considérables outre-mer, le logement est une priorité absolue pour mon ministère.
C'est pourquoi je me suis attaché, au terme d'un exercice de concertation inédit par sa portée, sa durée et son ouverture, à maintenir la défiscalisation dans le logement social et intermédiaire outre-mer.
Ces mécanismes doivent profiter à la Polynésie française comme elle profite aux DOM ou aux autres COM comme la Nouvelle-Calédonie.
Certes la Ligne budgétaire unique, la LBU, qui est redevenu sous notre impulsion le socle budgétaire de la politique du logement dans les outre-mer, n'existe pas dans les COM.
Mais dans ces territoires, ce sont les contrats de développement qui portent cette aide financière et celle-ci est importante : 42 % de l'enveloppe, c'est-à-dire un volume théorique de 166 millions d'euros sur la période du contrat commencée en 2007 et qui doit s'achever en cette année.
Les outils sont là. Et pourtant les résultats ne sont pas à la hauteur des espérances légitimes des citoyens.
Ici, l'OPH gère un parc encore trop limité (2 800 logements) et la production actuelle, inférieure à 100 logements par an et même de seulement 50 unités en 2012, est trop faible pour répondre aux besoins.
Il y a à cela de multiples raisons :
- la complexité des opérations,
- le manque de documents de référence en matière d'urbanisme
- et bien sûr la disponibilité des financements.
Mais, je le redis, face à cela, nous ne pouvons nous résoudre au découragement.
Il n'y a ici aucune fatalité et nous devons travailler ensemble à donner un nouvel élan, une nouvelle impulsion au logement social en Polynésie Française !
Ce matin, nous avons signé la prolongation d'un an du contrat de développement afin de permettre qu'en 2014, trois quarts des crédits à engager le soient pour des opérations dans le logement social.
Mais, au-delà de cette signature, je souhaite que nous nous donnions les moyens d'aller plus vite et plus loin encore.
Cela suppose un cadre partenarial, associant l'Etat, la collectivité, bien entendu l'Agence française de développement, partenaire financier historique de l'OPH, mais aussi, demain, des acteurs tels que la Caisse des dépôts et consignations.
Je me suis entretenu avec Jean-Pierre JOUYET, le directeur général de la CDC, afin que nous trouvions ensemble, pour la Polynésie en particulier, des solutions efficaces, pratiques et rapides.
Je peux aujourd'hui vous confirmer que la Polynésie française sera éligible à l'enveloppe de 20 milliards d'euros de prêts aux collectivités territoriales au titre des aides à la pierre qu'elle consent et auxquelles s'apparente la part de 40 % des opérations qu'elle finance aujourd'hui.
C'est très important, car ces prêts sont consentis à des conditions extrêmement favorables, sur une période de 20 à 40 ans, à un taux de 2,25 %, voire peut-être moins encore demain…
Nous savons tous à quel point il est indispensable que non seulement l'Etat, mais aussi la collectivité disposent des liquidités nécessaires pour engager les opérations.
Pour autant, nous le savons tous : les conditions d'un nouvel élan ne sont pas de nature exclusivement financière.
C'est ici que se pose la question de créer un nouvel opérateur d'aménagement et de construction, comme l'envisage la collectivité qui a, dans ce but, sollicité l'appui de la Caisse des dépôts.
Je veux vous dire que l'Etat y est favorable et cela peut avancer très rapidement, dès 2014.
Mais je veux être clair : il ne s'agit en aucune manière de créer un concurrent à l'OPH.
Non, il s'agit de doter le Pays, à sa demande, d'une structure complémentaire oeuvrant, pour le compte de l'OPH, aux opérations de construction et d'aménagement.
Pour son compte et sous son mandat. Je crois que nous serons tous d'accord sur ce schéma qui doit permettre au logement social d'être un facteur structurant du développement des archipels de Polynésie française.
Le retard de ce territoire en la matière n'est plus soutenable et il n'est plus temps de s'interroger sur qui doit être blâmé pour cela.
Nous devons nous retrousser les manches et nous saisir des moyens à notre disposition.
Il y a des réponses concrètes de l'Etat. Je viens de vous les détailler.
Il y a un volontarisme du gouvernement auquel nous sommes attentifs.
C'est dans un cadre partenarial, adapté aux contraintes propres de votre territoire, que les investisseurs pourront retrouver la confiance.
Ainsi, donnerons-nous corps à ce nouvel élan que nous souhaitons pour le logement en Polynésie, mais aussi, plus largement, pour toute l'économie polynésienne.
Je vous remercie.
Source http://www.polynesie-francaise.pref.gouv.fr, le 2 décembre 2013