Texte intégral
Messieurs les parlementaires,
Monsieur le Président du conseil général,
Monsieur le président de l'association des maires,
Monsieur le Maire,
Mesdames et Messieurs les élus,
Monsieur le Président du conseil économique et social,
Mesdames et Messieurs,
C'est un grand plaisir pour moi que de faire votre rencontre ici, à Mamoudzou, aux côtés de ma collègue et amie Mme George PAU-LANGEVIN, ministre des Outre-Mer. Je tiens à vous remercier chaleureusement, Monsieur le Maire, pour votre hospitalité.
Il s'agit de mon premier déplacement Outre-Mer depuis que j'ai pris mes fonctions en tant que ministre de l'Intérieur et je suis particulièrement heureux que l'occasion me soit donnée d'effectuer à Mayotte cette première visite, qui est aussi, je crois la première visite d'un ministère de l'Intérieur de la Vème République, dans l'île.
J'en suis heureux, je l'avoue, parce que ce voyage est pour moi l'occasion d'une belle découverte.
J'en suis heureux parce que je crois que chacun peut mesurer ici, peut-être plus qu'ailleurs, que la France ne se réduit pas au produit d'une géographie, ni d'un climat ; que les Français ne se définissent pas par une origine ou par l'exercice plus ou moins fréquent d'un culte. Non, la France, comme l'écrivait le grand historien Fernand Braudel, « se nomme diversité ». Elle est, selon l'expression de Julien Benda, « la revanche de l'abstrait sur le concret ». Elle est enfin l'expression d'un désir d'être ensemble, dont les Mahorais ont témoigné de façon éclatante, d'abord lors des consultations de 1974 et 1976, ensuite en faisant de façon continue le choix de la départementalisation.
J'en suis heureux parce que notre visite tombe donc, comme on dit, « à point nommé. » Alors que la réforme territoriale voulue par le président de la république engage les collectivités de métropole dans un mouvement de réforme d'une ampleur inédite, chacun des élus présents ici est déjà mobilisé pour contribuer à la réussite d'une autre évolution décisive.
L'année 2014 marque en effet l'ancrage irréversible du territoire dans son nouveau statut de Département d'Outre-mer, conformément aux souhaits formés de longue date par les Mahorais.
L'année 2014 marque également l'entrée de Mayotte dans le cercle des régions de l'Union Européenne. Il s'agit d'une opportunité historique pour ce département, qui doit s'en saisir et démontrer sa capacité à intégrer cet espace politique et économique d'ici 2020.
Sur ces sujets essentiels pour l'avenir de l'ile, je veux donc vous confirmer que l'Etat vous apportera un soutien résolu.
L'Etat continuera donc ainsi encore pendant un certain temps à accompagner ici la mise en place des investissements structurants au travers du CER sur lequel, Monsieur le président du conseil général, vous vous êtes accordé avec le préfet. L'Etat vous accompagnera également dans l'engagement des fonds européens pour la période 2014-2020. J'ai, comme vous le savez, participé à la négociation du budget européen pour cette période et, à ce titre, oeuvré à l'obtention d'une enveloppe spécifiquement dédiée à Mayotte. Je sais que vous auriez souhaité que son montant soit plus élevé. Mais je peux témoigner qu'obtenir cette enveloppe, dans un contexte de négociation extrêmement difficile, n'a été possible que grâce à l'implication de nos responsables, jusqu'au plus haut niveau de l'Etat. Il convient à présent de démontrer notre capacité à faire le meilleur usage de ces fonds, condition nécessaire pour demander la réévaluation de leur montant.
L'Etat est donc à vos côtés pour réussir ces mutations. Mais le contrat républicain n'est pas un engagement unilatéral. En renouvelant votre souhait de devenir un département de droit commun, vous avez accepté de vous aligner, de façon progressive, sur les pratiques et sur les normes des autres collectivités, dans tous les domaines. Cela ne signifie absolument pas qu'il vous faille renoncer à vos spécificités humaines ou culturelles. La République est attachée à préserver votre identité et la tient pour une richesse. Pour autant, vous devez exercer pleinement vos compétences.
Il ne s'agit pas là d'un débat purement institutionnel ou technique. C'est bien de la vie quotidienne et de l'avenir de tous les mahorais dont il s'agit.
Exercer pleinement vos compétences, c'est ce que vous avez fait en matière de gestion des risques et de sécurité civile en permettant la création d'un Service départemental d'incendie et de secours de plein exercice dès le 1er août prochain. Je veux saluer ici cette réussite et la détermination et l'engagement personnel du Président du conseil général et de l'association départementale des maires.
Un même engagement est indispensable dans tous les domaines pour faire face aux défis que doit affronter l'archipel.
A la veille du transfert de nouvelles compétences au conseil général, comme les routes nationales et la gestion des établissements scolaires du second degré, celles qui lui sont déjà dévolues doivent être pleinement assumées. Je pense en particulier au domaine social, compétence première de la collectivité qui ne représente aujourd'hui qu'une part marginale du budget. Les besoins sont pourtant considérables.
Les communes doivent également faire preuve de volontarisme. En matière d'urbanisme, vous devez ainsi accompagner vos concitoyens vers une occupation des sols responsable, durable et exempte de mise en danger. Dans le domaine de l'enseignement, l'accroissement du nombre de classes dans le premier degré, comme l'entretien du parc scolaire, constituent des objectifs cruciaux pour l'avenir de l'archipel.
C'est l'avenir des mahorais que vous avez entre vos mains.
Répondre aux attentes de la population en leur offrant un service public de qualité suppose pour les collectivités une assise financière solide et des choix budgétaires soutenables.
Il me semble important de le rappeler en cette année d'entrée dans le droit commun fiscal et budgétaire. Cet exercice complexe a nécessité de mobiliser vos équipes aux côtés de celles de la DRFIP et de la préfecture. Je veux saluer la réussite de cette première phase et le travail accompli par les agents de l'Etat qui vous accompagnent quotidiennement dans cette mutation.
L'impôt fait peur, qu'il soit local ou national. Il vous faudra convaincre les mahoraises et les mahorais de l'opportunité que constitue cette étape pour vos collectivités et pour eux. Il sera d'autant mieux accepté que les efforts de gestion et de rationalisation des moyens seront conduits.
Il s'agit là d'un enjeu majeur pour le conseil général, qui doit s'organiser pour apporter sa contrepartie aux investissements des communes ou à ceux qui sont programmés dans un cadre européen.
J'ai conscience de la situation budgétaire dégradée des communes. Le premier semestre s'achève sur le constat d'un décalage entre les moyens qui vous ont été dédiés et vos besoins de trésorerie. C'est un sujet complexe qui mérite la plus grande attention. Nous aurons l'occasion de l'approfondir lors de notre déjeuner à la case Rocher dans un moment.
Je voudrais encore souligner l'importance du développement de l'intercommunalité. Il s'agit d'un sujet qui concerne du reste autant la métropole que l'outre-mer. La mutualisation des moyens des communes est la clé d'un service public de qualité. Il vous revient de vous engager résolument sur ce chemin.
Il nous faut donc nous montrer à la fois ambitieux et réalistes. L'intégration pleine et entière du droit commun va encore prendre à Mayotte un certain temps. Il aura fallu aux 4 autres DOM pas moins de 66 ans depuis leur accession au statut départemental pour achever ce processus. Certes, nous irons plus vite à Mayotte ! Vous l'avez souhaité, nous vous avons entendus. Je salue la démarche engagée pour ce faire par ma collègue la ministre des outre-mer, qui vous en exposera la stratégie dans quelques instants. Mais cette route doit bénéficier à toute la société mahoraise. Votre rôle d'élus est d'y veiller, je vous le demande.
En effet, l'Etat n'est pas à Mayotte, pas plus qu'ailleurs sur le territoire de la République, décideur unique, ni responsable de tout. Il est à vos côtés et vous pouvez compter sur la détermination de l'ensemble des services de l'Etat pour vous accompagner dans cette aventure, que nous vivrons ensemble.
Avant de céder la parole à ma collègue George PAU-LANGEVIN, je voudrais encore vous dire quelques mots de deux sujets qui relèvent de la responsabilité du ministère de l'Intérieur et dont je sais qu'ils vous préoccupent à juste titre : la sécurité et la gestion des flux migratoires.
Vous attendez beaucoup à l'Etat dans les domaines de la sécurité, vous êtes exigeants et c'est bien normal.
Partout en métropole et outre-mer, chacun a un même droit à la sécurité.
Or Mayotte est confrontée, depuis plusieurs années, à une délinquance qui se distingue par la proportion élevée des atteintes aux biens, souvent commises par de jeunes mineurs. Je sais en particulier que les cambriolages sont ici commis dans les trois quart des cas par des adolescents âgés de 10 à 14 ans.
Depuis le mois de juin 2013, les forces de sécurité intérieure ont donc mis en oeuvre à Mayotte un plan de lutte contre les cambriolages assis sur la création d'une cellule associant policiers et gendarmes sous l'autorité du préfet. Parallèlement, des dispositifs préventifs ont été déployés avec l'implication précieuse de la population. Les effets de ce plan commencent à se ressentir puisqu'une diminution de -19% des cambriolages a été enregistrée au premier semestre 2014. Ces premiers résultats sont encourageants mais l'effort doit être poursuivi par les forces de sécurité et le concours de tous.
D'autre part, je sais que Mayotte est confrontée à une hausse des violences physiques aux abords des établissements scolaires et des terrains de sport. Or il n'est pas tolérable que les enfants se rendent dans leurs écoles, dans leurs gymnases, avec la peur d'être agressés. La police et la gendarmerie nationales ont organisés plus de 150 opérations d'escortes de bus scolaires en 2013. Une opération appelée « parents vigilants » permet d'assurer une permanence d'adultes aux abords des établissements. Parallèlement le nombre d'affrontements entre bandes, qui sont souvent ici, me dit-on, la conséquence des rivalités villageoises, est en diminution. Nos efforts commencent donc à porter leurs fruits.
Au-delà de l'action répressive, la délinquance constatée à Mayotte appelle des réponses au fond sur le terrain de la prévention et de l'éducation, compte tenu en particulier de la forte implication des mineurs, souvent privés de l'appui d'une famille. J'ai visité ce matin le centre d'accueil des mineurs isolés de l'AGEPAC et je veux rendre hommage à ses équipes pour le travail remarquable qu'elles effectuent dans des conditions difficiles.
Je me félicite également de la signature en 2013 d'une convention sur la parentalité à Mayotte. Il s'agit d'un premier pas important qui doit se traduire par des actions concrètes. A cet égard, je sais, Monsieur le Président du Conseil Général, et que vous souhaitez améliorer l'exercice de la compétence « Enfance en danger » pour votre collectif. Je suis heureux de constater que 15 CLSPD ont été créés à Mayotte. Il faut les faire vivre et s'appuyer sur ces instances pour envisager des réponses de proximité en lien avec le préfet et le procureur de la République.
Je n'ignore pas que la sécurité des populations, c'est également, à Mayotte comme ailleurs, la sécurité civile.
J'ai déjà mentionné la réussite que représentera la création le 1er août prochain du service départemental d'incendie et de secours. Je veux souligner à nouveau les efforts qui ont été consentis jusqu'à présent par le conseil général. Je sais qu'à l'avenir chacun saura prendre part à cet effort, de façon à permettre aux sapeurs-pompiers mahorais, qu'ils soient professionnels ou volontaires, d'intervenir dans les meilleures conditions.
Ces femmes et ces hommes ont su se former, s'exercer et relever le défi de bâtir un service performant pour assurer la sécurité de leurs concitoyens. Je souhaite souligner à cet égard le rôle des volontaires, qui sont au coeur de notre modèle de sécurité civile, que ce soit en métropole ou outre-mer. Leur engagement, permet d'assurer les missions du quotidien, mais aussi une réponse rapide lors des événements climatiques auxquels vous pouvez être confrontés, comme vous l'avez été au début de cette année. Il faut donc développer encore le volontariat à Mayotte. C'est une très belle école de solidarité !
.Je connais enfin les attentes légitimes des Mahorais en matière de lutte contre l'immigration irrégulière. Je sais que la pression migratoire à Mayotte est particulièrement forte. Chaque année se sont près de 16000 personnes qui sont reconduites à la frontière. Il s'agit d'un chiffre exceptionnellement élevé, puisque Mayotte assure, à elle seule, presque autant de retours contraints que la métropole.
Depuis le début de l'année 2014, le nombre d'interceptions en mer s'est encore accru de plus de 20%. Cette activité soutenue démontre l'implication de nos forces de sécurité. Mais elle démontre aussi que la pression migratoire demeure ici exceptionnelle et qu'elle appelle en retour une mobilisation sans faille de l'Etat.
L'efficacité des moyens déployés s'est accrue ces derniers mois. Je sais que les fonctionnaires de police ou les militaires de la gendarmerie affectés à ces missions font preuve de détermination, mais aussi d'une humanité qui honore la France. Je les en félicite.
Ici encore, la mutualisation des moyens entre la gendarmerie et la police permettra d'accroître l'efficacité de notre dispositif. La police et la gendarmerie nationales ont donc décidé de répartir différemment les missions de lutte contre l'immigration irrégulière. La gendarmerie prend en charge l'ensemble des interceptions en mer, avec le concours de la Marine nationale et des Douanes. La PAF assure désormais le traitement des étrangers en situation irrégulière interceptés en mer depuis leur débarquement jusqu'à leur placement en centre de rétention administrative.
En dépit d'un contexte budgétaire contraint, l'Etat s'est décidé à engager des moyens pour doter Mayotte d'un centre de rétention aux normes métropolitaines, qui sera opérationnel en 2015. Des travaux ont par ailleurs été entrepris au sein du centre actuel pour améliorer les conditions de rétention.
La politique migratoire de la France doit en effet s'exercer dans le cadre du contrat républicain qui comportent deux volets : l'éloignement d'une part pour celles et ceux qui n'ont pas vocation à se maintenir sur notre territoire ; l'accueil et l'intégration de ceux que nous devons accueillir parce qu'ils ont droit au séjour, que ce soit ou non au titre de l'asile.
Avec la départementalisation, Mayotte a accepté cet engagement. Comme les autres départements ultra-marins, Mayotte applique ainsi le code d'entrée et du séjour depuis le 26 mai dernier, avec toutefois quelques dérogations pour tenir compte de sa situation spécifique. De même, les réformes qui seront présentées en Conseil des Ministres au cours du mois de juillet en matière d'immigration et d'asile s'appliqueront dans l'archipel, avec, là encore, des dérogations strictement limitées à ce qu'exigent les spécificités mahoraises. Leurs grands objectifs répondront aux besoins de ce territoire. Réduire la pression aux guichets en préfecture par des titres pluriannuels, accélérer le traitement des demandes d'asile, favoriser les éloignements : ces réformes sont nécessaires sur l'ensemble du territoire de la République. Elles sont indispensables à Mayotte.
Cette politique globale ne sera cependant efficace à moyen terme que si les voisins immédiats de Mayotte accèdent eux aussi à un stade de développement suffisant pour que leurs propres ressortissants ne soient pas tentés par une aventure dangereuse et sans issue. L'Europe nous offre là encore l'opportunité de contribuer à stabiliser, grâce aux fonds du programme de coopération transfrontalier ces candidats à l'immigration.
Mesdames et Messieurs,
C'est une double révolution qui a commencé en 2014 à Mayotte. Il nous reste donc à beaucoup à accomplir ensemble pour faire face aux grands défis de demain et assurer à tous les Mahorais les conditions d'existence auxquels ils ont droit. Vous l'aurez compris, je m'y engage au nom du Gouvernement : l'Etat sera à vos côtés comme il l'a toujours été. Mais l'Etat, sans vous, sans votre engagement, sans vos talents, ne pourra rien.
Je vous encourage donc, Mesdames et Messieurs les élus, à contribuer le plus largement à cette grande aventure qui doit porter le département de Mayotte au même niveau que tous les départements du territoire national. Je vous encourage à faire rayonner plus largement encore la France dans l'Océan Indien.
C'est là votre responsabilité, c'est là notre responsabilité, devant les mahorais et les mahoraises.
Vive Mayotte ! Et vive la France !
Source http://www.mayotte.pref.gouv.fr, le 26 juin 2014
Monsieur le Président du conseil général,
Monsieur le président de l'association des maires,
Monsieur le Maire,
Mesdames et Messieurs les élus,
Monsieur le Président du conseil économique et social,
Mesdames et Messieurs,
C'est un grand plaisir pour moi que de faire votre rencontre ici, à Mamoudzou, aux côtés de ma collègue et amie Mme George PAU-LANGEVIN, ministre des Outre-Mer. Je tiens à vous remercier chaleureusement, Monsieur le Maire, pour votre hospitalité.
Il s'agit de mon premier déplacement Outre-Mer depuis que j'ai pris mes fonctions en tant que ministre de l'Intérieur et je suis particulièrement heureux que l'occasion me soit donnée d'effectuer à Mayotte cette première visite, qui est aussi, je crois la première visite d'un ministère de l'Intérieur de la Vème République, dans l'île.
J'en suis heureux, je l'avoue, parce que ce voyage est pour moi l'occasion d'une belle découverte.
J'en suis heureux parce que je crois que chacun peut mesurer ici, peut-être plus qu'ailleurs, que la France ne se réduit pas au produit d'une géographie, ni d'un climat ; que les Français ne se définissent pas par une origine ou par l'exercice plus ou moins fréquent d'un culte. Non, la France, comme l'écrivait le grand historien Fernand Braudel, « se nomme diversité ». Elle est, selon l'expression de Julien Benda, « la revanche de l'abstrait sur le concret ». Elle est enfin l'expression d'un désir d'être ensemble, dont les Mahorais ont témoigné de façon éclatante, d'abord lors des consultations de 1974 et 1976, ensuite en faisant de façon continue le choix de la départementalisation.
J'en suis heureux parce que notre visite tombe donc, comme on dit, « à point nommé. » Alors que la réforme territoriale voulue par le président de la république engage les collectivités de métropole dans un mouvement de réforme d'une ampleur inédite, chacun des élus présents ici est déjà mobilisé pour contribuer à la réussite d'une autre évolution décisive.
L'année 2014 marque en effet l'ancrage irréversible du territoire dans son nouveau statut de Département d'Outre-mer, conformément aux souhaits formés de longue date par les Mahorais.
L'année 2014 marque également l'entrée de Mayotte dans le cercle des régions de l'Union Européenne. Il s'agit d'une opportunité historique pour ce département, qui doit s'en saisir et démontrer sa capacité à intégrer cet espace politique et économique d'ici 2020.
Sur ces sujets essentiels pour l'avenir de l'ile, je veux donc vous confirmer que l'Etat vous apportera un soutien résolu.
L'Etat continuera donc ainsi encore pendant un certain temps à accompagner ici la mise en place des investissements structurants au travers du CER sur lequel, Monsieur le président du conseil général, vous vous êtes accordé avec le préfet. L'Etat vous accompagnera également dans l'engagement des fonds européens pour la période 2014-2020. J'ai, comme vous le savez, participé à la négociation du budget européen pour cette période et, à ce titre, oeuvré à l'obtention d'une enveloppe spécifiquement dédiée à Mayotte. Je sais que vous auriez souhaité que son montant soit plus élevé. Mais je peux témoigner qu'obtenir cette enveloppe, dans un contexte de négociation extrêmement difficile, n'a été possible que grâce à l'implication de nos responsables, jusqu'au plus haut niveau de l'Etat. Il convient à présent de démontrer notre capacité à faire le meilleur usage de ces fonds, condition nécessaire pour demander la réévaluation de leur montant.
L'Etat est donc à vos côtés pour réussir ces mutations. Mais le contrat républicain n'est pas un engagement unilatéral. En renouvelant votre souhait de devenir un département de droit commun, vous avez accepté de vous aligner, de façon progressive, sur les pratiques et sur les normes des autres collectivités, dans tous les domaines. Cela ne signifie absolument pas qu'il vous faille renoncer à vos spécificités humaines ou culturelles. La République est attachée à préserver votre identité et la tient pour une richesse. Pour autant, vous devez exercer pleinement vos compétences.
Il ne s'agit pas là d'un débat purement institutionnel ou technique. C'est bien de la vie quotidienne et de l'avenir de tous les mahorais dont il s'agit.
Exercer pleinement vos compétences, c'est ce que vous avez fait en matière de gestion des risques et de sécurité civile en permettant la création d'un Service départemental d'incendie et de secours de plein exercice dès le 1er août prochain. Je veux saluer ici cette réussite et la détermination et l'engagement personnel du Président du conseil général et de l'association départementale des maires.
Un même engagement est indispensable dans tous les domaines pour faire face aux défis que doit affronter l'archipel.
A la veille du transfert de nouvelles compétences au conseil général, comme les routes nationales et la gestion des établissements scolaires du second degré, celles qui lui sont déjà dévolues doivent être pleinement assumées. Je pense en particulier au domaine social, compétence première de la collectivité qui ne représente aujourd'hui qu'une part marginale du budget. Les besoins sont pourtant considérables.
Les communes doivent également faire preuve de volontarisme. En matière d'urbanisme, vous devez ainsi accompagner vos concitoyens vers une occupation des sols responsable, durable et exempte de mise en danger. Dans le domaine de l'enseignement, l'accroissement du nombre de classes dans le premier degré, comme l'entretien du parc scolaire, constituent des objectifs cruciaux pour l'avenir de l'archipel.
C'est l'avenir des mahorais que vous avez entre vos mains.
Répondre aux attentes de la population en leur offrant un service public de qualité suppose pour les collectivités une assise financière solide et des choix budgétaires soutenables.
Il me semble important de le rappeler en cette année d'entrée dans le droit commun fiscal et budgétaire. Cet exercice complexe a nécessité de mobiliser vos équipes aux côtés de celles de la DRFIP et de la préfecture. Je veux saluer la réussite de cette première phase et le travail accompli par les agents de l'Etat qui vous accompagnent quotidiennement dans cette mutation.
L'impôt fait peur, qu'il soit local ou national. Il vous faudra convaincre les mahoraises et les mahorais de l'opportunité que constitue cette étape pour vos collectivités et pour eux. Il sera d'autant mieux accepté que les efforts de gestion et de rationalisation des moyens seront conduits.
Il s'agit là d'un enjeu majeur pour le conseil général, qui doit s'organiser pour apporter sa contrepartie aux investissements des communes ou à ceux qui sont programmés dans un cadre européen.
J'ai conscience de la situation budgétaire dégradée des communes. Le premier semestre s'achève sur le constat d'un décalage entre les moyens qui vous ont été dédiés et vos besoins de trésorerie. C'est un sujet complexe qui mérite la plus grande attention. Nous aurons l'occasion de l'approfondir lors de notre déjeuner à la case Rocher dans un moment.
Je voudrais encore souligner l'importance du développement de l'intercommunalité. Il s'agit d'un sujet qui concerne du reste autant la métropole que l'outre-mer. La mutualisation des moyens des communes est la clé d'un service public de qualité. Il vous revient de vous engager résolument sur ce chemin.
Il nous faut donc nous montrer à la fois ambitieux et réalistes. L'intégration pleine et entière du droit commun va encore prendre à Mayotte un certain temps. Il aura fallu aux 4 autres DOM pas moins de 66 ans depuis leur accession au statut départemental pour achever ce processus. Certes, nous irons plus vite à Mayotte ! Vous l'avez souhaité, nous vous avons entendus. Je salue la démarche engagée pour ce faire par ma collègue la ministre des outre-mer, qui vous en exposera la stratégie dans quelques instants. Mais cette route doit bénéficier à toute la société mahoraise. Votre rôle d'élus est d'y veiller, je vous le demande.
En effet, l'Etat n'est pas à Mayotte, pas plus qu'ailleurs sur le territoire de la République, décideur unique, ni responsable de tout. Il est à vos côtés et vous pouvez compter sur la détermination de l'ensemble des services de l'Etat pour vous accompagner dans cette aventure, que nous vivrons ensemble.
Avant de céder la parole à ma collègue George PAU-LANGEVIN, je voudrais encore vous dire quelques mots de deux sujets qui relèvent de la responsabilité du ministère de l'Intérieur et dont je sais qu'ils vous préoccupent à juste titre : la sécurité et la gestion des flux migratoires.
Vous attendez beaucoup à l'Etat dans les domaines de la sécurité, vous êtes exigeants et c'est bien normal.
Partout en métropole et outre-mer, chacun a un même droit à la sécurité.
Or Mayotte est confrontée, depuis plusieurs années, à une délinquance qui se distingue par la proportion élevée des atteintes aux biens, souvent commises par de jeunes mineurs. Je sais en particulier que les cambriolages sont ici commis dans les trois quart des cas par des adolescents âgés de 10 à 14 ans.
Depuis le mois de juin 2013, les forces de sécurité intérieure ont donc mis en oeuvre à Mayotte un plan de lutte contre les cambriolages assis sur la création d'une cellule associant policiers et gendarmes sous l'autorité du préfet. Parallèlement, des dispositifs préventifs ont été déployés avec l'implication précieuse de la population. Les effets de ce plan commencent à se ressentir puisqu'une diminution de -19% des cambriolages a été enregistrée au premier semestre 2014. Ces premiers résultats sont encourageants mais l'effort doit être poursuivi par les forces de sécurité et le concours de tous.
D'autre part, je sais que Mayotte est confrontée à une hausse des violences physiques aux abords des établissements scolaires et des terrains de sport. Or il n'est pas tolérable que les enfants se rendent dans leurs écoles, dans leurs gymnases, avec la peur d'être agressés. La police et la gendarmerie nationales ont organisés plus de 150 opérations d'escortes de bus scolaires en 2013. Une opération appelée « parents vigilants » permet d'assurer une permanence d'adultes aux abords des établissements. Parallèlement le nombre d'affrontements entre bandes, qui sont souvent ici, me dit-on, la conséquence des rivalités villageoises, est en diminution. Nos efforts commencent donc à porter leurs fruits.
Au-delà de l'action répressive, la délinquance constatée à Mayotte appelle des réponses au fond sur le terrain de la prévention et de l'éducation, compte tenu en particulier de la forte implication des mineurs, souvent privés de l'appui d'une famille. J'ai visité ce matin le centre d'accueil des mineurs isolés de l'AGEPAC et je veux rendre hommage à ses équipes pour le travail remarquable qu'elles effectuent dans des conditions difficiles.
Je me félicite également de la signature en 2013 d'une convention sur la parentalité à Mayotte. Il s'agit d'un premier pas important qui doit se traduire par des actions concrètes. A cet égard, je sais, Monsieur le Président du Conseil Général, et que vous souhaitez améliorer l'exercice de la compétence « Enfance en danger » pour votre collectif. Je suis heureux de constater que 15 CLSPD ont été créés à Mayotte. Il faut les faire vivre et s'appuyer sur ces instances pour envisager des réponses de proximité en lien avec le préfet et le procureur de la République.
Je n'ignore pas que la sécurité des populations, c'est également, à Mayotte comme ailleurs, la sécurité civile.
J'ai déjà mentionné la réussite que représentera la création le 1er août prochain du service départemental d'incendie et de secours. Je veux souligner à nouveau les efforts qui ont été consentis jusqu'à présent par le conseil général. Je sais qu'à l'avenir chacun saura prendre part à cet effort, de façon à permettre aux sapeurs-pompiers mahorais, qu'ils soient professionnels ou volontaires, d'intervenir dans les meilleures conditions.
Ces femmes et ces hommes ont su se former, s'exercer et relever le défi de bâtir un service performant pour assurer la sécurité de leurs concitoyens. Je souhaite souligner à cet égard le rôle des volontaires, qui sont au coeur de notre modèle de sécurité civile, que ce soit en métropole ou outre-mer. Leur engagement, permet d'assurer les missions du quotidien, mais aussi une réponse rapide lors des événements climatiques auxquels vous pouvez être confrontés, comme vous l'avez été au début de cette année. Il faut donc développer encore le volontariat à Mayotte. C'est une très belle école de solidarité !
.Je connais enfin les attentes légitimes des Mahorais en matière de lutte contre l'immigration irrégulière. Je sais que la pression migratoire à Mayotte est particulièrement forte. Chaque année se sont près de 16000 personnes qui sont reconduites à la frontière. Il s'agit d'un chiffre exceptionnellement élevé, puisque Mayotte assure, à elle seule, presque autant de retours contraints que la métropole.
Depuis le début de l'année 2014, le nombre d'interceptions en mer s'est encore accru de plus de 20%. Cette activité soutenue démontre l'implication de nos forces de sécurité. Mais elle démontre aussi que la pression migratoire demeure ici exceptionnelle et qu'elle appelle en retour une mobilisation sans faille de l'Etat.
L'efficacité des moyens déployés s'est accrue ces derniers mois. Je sais que les fonctionnaires de police ou les militaires de la gendarmerie affectés à ces missions font preuve de détermination, mais aussi d'une humanité qui honore la France. Je les en félicite.
Ici encore, la mutualisation des moyens entre la gendarmerie et la police permettra d'accroître l'efficacité de notre dispositif. La police et la gendarmerie nationales ont donc décidé de répartir différemment les missions de lutte contre l'immigration irrégulière. La gendarmerie prend en charge l'ensemble des interceptions en mer, avec le concours de la Marine nationale et des Douanes. La PAF assure désormais le traitement des étrangers en situation irrégulière interceptés en mer depuis leur débarquement jusqu'à leur placement en centre de rétention administrative.
En dépit d'un contexte budgétaire contraint, l'Etat s'est décidé à engager des moyens pour doter Mayotte d'un centre de rétention aux normes métropolitaines, qui sera opérationnel en 2015. Des travaux ont par ailleurs été entrepris au sein du centre actuel pour améliorer les conditions de rétention.
La politique migratoire de la France doit en effet s'exercer dans le cadre du contrat républicain qui comportent deux volets : l'éloignement d'une part pour celles et ceux qui n'ont pas vocation à se maintenir sur notre territoire ; l'accueil et l'intégration de ceux que nous devons accueillir parce qu'ils ont droit au séjour, que ce soit ou non au titre de l'asile.
Avec la départementalisation, Mayotte a accepté cet engagement. Comme les autres départements ultra-marins, Mayotte applique ainsi le code d'entrée et du séjour depuis le 26 mai dernier, avec toutefois quelques dérogations pour tenir compte de sa situation spécifique. De même, les réformes qui seront présentées en Conseil des Ministres au cours du mois de juillet en matière d'immigration et d'asile s'appliqueront dans l'archipel, avec, là encore, des dérogations strictement limitées à ce qu'exigent les spécificités mahoraises. Leurs grands objectifs répondront aux besoins de ce territoire. Réduire la pression aux guichets en préfecture par des titres pluriannuels, accélérer le traitement des demandes d'asile, favoriser les éloignements : ces réformes sont nécessaires sur l'ensemble du territoire de la République. Elles sont indispensables à Mayotte.
Cette politique globale ne sera cependant efficace à moyen terme que si les voisins immédiats de Mayotte accèdent eux aussi à un stade de développement suffisant pour que leurs propres ressortissants ne soient pas tentés par une aventure dangereuse et sans issue. L'Europe nous offre là encore l'opportunité de contribuer à stabiliser, grâce aux fonds du programme de coopération transfrontalier ces candidats à l'immigration.
Mesdames et Messieurs,
C'est une double révolution qui a commencé en 2014 à Mayotte. Il nous reste donc à beaucoup à accomplir ensemble pour faire face aux grands défis de demain et assurer à tous les Mahorais les conditions d'existence auxquels ils ont droit. Vous l'aurez compris, je m'y engage au nom du Gouvernement : l'Etat sera à vos côtés comme il l'a toujours été. Mais l'Etat, sans vous, sans votre engagement, sans vos talents, ne pourra rien.
Je vous encourage donc, Mesdames et Messieurs les élus, à contribuer le plus largement à cette grande aventure qui doit porter le département de Mayotte au même niveau que tous les départements du territoire national. Je vous encourage à faire rayonner plus largement encore la France dans l'Océan Indien.
C'est là votre responsabilité, c'est là notre responsabilité, devant les mahorais et les mahoraises.
Vive Mayotte ! Et vive la France !
Source http://www.mayotte.pref.gouv.fr, le 26 juin 2014