Déclaration de Mme Catherine Trautmann, ministre de la culture et de la communication, sur le projet de loi sur l'archéologie préventive, Paris, le 5 mai 1999.

Prononcé le

Intervenant(s) : 

Texte intégral


Madame, Monsieur,
Depuis près de trente ans, l'archéologie préventive connaît un état de crise quasi-permanent en raison notamment de l'absence d'un cadre légal adapté à cette discipline scientifique née de l'essor des grands chantiers d'aménagement et des opérations de centre ville.
J'ai souhaité mettre un terme à cette situation et assurer à l'archéologie préventive une plus grande sécurité juridique.
A l'automne 1998, préoccupée par l'aggravation du contexte social, susceptible de mettre en cause la survie même de la discipline, j'ai confié à MM. Bernard Poignant, maire de Quimper, Bernard Pêcheur, conseiller d'Etat et Jean-Claude Demoule, archéologue et professeur d'université, une mission de propositions sur la réforme de l'archéologie préventive.
Ces trois experts m'ont remis leur rapport au début du mois de décembre. Ils préconisaient d'asseoir la réforme nécessaire sur l'affirmation de l'archéologie préventive comme activité de service public à caractère scientifique dont l'Etat est le garant.
J'ai proposé au gouvernement de retenir ces orientations. Mes services ont élaboré en concertation avec les autres ministères concernés, un projet de loi en ce sens que je présente au Conseil des Ministres du mercredi 5 mai et qui sera prochainement débattu au Parlement.
Aux termes de ce projet de loi, les services de l'Etat voient leurs missions confortées. Leur rôle de prescripteur des opérations d'archéologie préventive clairement énoncé confirme pleinement l'objectif de renforcement du service public.
La fonction confiée aux services du ministère de la Culture et de la Communication pour l'approbation du responsable scientifique et l'évaluation et le contrôle des opérations d'archéologie illustre mon souci de garantir la qualité scientifique des interventions archéologiques.
La réalisation des études préalables et des opérations archéologiques de terrain prescrites par l'Etat sera confiée à un établissement public placé sous la double tutelle des ministres chargés de la Culture et de la Recherche. Il appartiendra à cet établissement, doté de droits exclusifs, d'assurer sondages, diagnostics et fouilles préalables aux opérations d'aménagement, sans que la qualité de la prestation fournie soit subordonnée à la capacité financière de l'aménageur. Il s'appuiera sur le réseau institutionnel que constituent le CNRS et les universités, sur les services d'archéologie des collectivités territoriales et les associations et autres structures de droit privé qualifiées.
Les représentants des principales catégories d'acteurs concernés par l'archéologie préventive participeront à la gestion administrative et scientifique de l'établissement au travers de leur représentation au sein du conseil d'administration ou de son conseil scientifique.
Le financement de l'établissement sera principalement assuré par voie de redevance due par les personnes publiques ou privées projetant d'exécuter des travaux nécessitant des fouilles archéologiques. Le projet de loi en précisera l'assiette, le taux et les modalités de recouvrement. Un certain nombre d'exonérations au paiement de la redevance touchant notamment le secteur de la construction sociale sont prévues. Ces exonérations n'auront pas pour effet de libérer les aménageurs concernés des prescriptions archéologiques édictées par l'Etat.Enfin, les prérogatives confiées au nouvel établissement conduisent à la dissolution de l'Association pour les fouilles archéologiques nationales. A leur demande, les personnels de cette association seront intégrés au nouvel établissement.
Nous voilà donc au terme d'un long cheminement, marqué de nombreuses tentatives de refonte d'un cadre législatif défini par la loi du 27 septembre 1941 et aujourd'hui inadapté au développement de l'archéologie préventive. En dépit de son évidente nécessité, une telle réforme n'avait pu jusqu'à présent aboutir. Je suis convaincue que ce projet de loi est une des traductions les plus ambitieuses, à l'échelon européen, des mesures préconisées par la convention de Malte du 16 janvier 1992 et dont la France a été l'initiatrice. Notre pays met ainsi sa propre législation en conformité avec les objectifs politiques qu'il se donne en matière de protection du patrimoine archéologique, garant de sa mémoire collective.
(Source http://www.culture.gouv.fr, le 14 mai 1999)