Texte intégral
Monsieur le Président,
Monsieur le Rapporteur,
Mesdames et Messieurs les députés,
Il y a quelques semaines, Paul BOUCHET, président dATD Quart Monde déclarait " la couverture maladie universelle est une avancée historique. Cela fait un demi-siècle que nous lattendons. Pour nous le droit à la santé est un des six droits fondamentaux, lun des plus évidents. Il ne souffre pas de contradiction théorique ".
Il faut en effet mettre fin à un demi siècle de résignation.
Car, quel domaine est plus personnel, plus intime que celui de la santé ? Et en même temps quel champ plus privilégié pour laction collective ?
Il y dans le combat en faveur du droit à la protection de la santé pour tous, du droit aux soins, une exigence profonde de justice sociale.
Car ce sont trop souvent les mêmes, que le mal frappe en premier et que le droit ne protège quen dernier : les petits, les faibles, ceux pour qui, la vie cest la survie, et le lendemain, une conquête.
A ceux-là, nous ajoutons aux blessures de la vie, les blessures du temps et de la maladie en ne les protégeant pas assez, en ne leur garantissant pas laccès et le droit aux soins.
Ceci est Inacceptable
- Pourquoi ? Parce que cela bat en brèche le principe de légalité républicaine, selon lequel tous les citoyens sont égaux devant les droits fondamentaux. Le droit aux soins en est un majeur.
- Pourquoi ? Parce que notre société est chaque jour plus riche. Que les fruits de la croissance doivent bénéficier en priorité aux plus démunis.
Or, que constate t-on en France ?
Que malgré un niveau de dépenses de santé très élevé, la réalité de laccès aux soins est marquée par linjustice. Tout simplement que dans notre pays, le niveau de revenu introduit une discrimination et quil gradue le niveau des soins.
Et les exemples sont nombreux
Il sagit de cette petite fille arrivée à lhôpital avec une septicémie pour un abcès dentaire que ses parents navaient pas eu les moyens de faire soigner.
Il sagit de ces femmes et de ces hommes qui se présentent au service des urgences dun hôpital, un cancer généralisé, à quelques jours de la mort, sans jamais avoir consulté un médecin.
Il sagit de ces parents obligés de choisir entre leurs enfants malades, celui dont létat est le plus grave, pour acheter les médicaments nécessaires pour le soigner.
Il sagit encore de cette famille contrainte de soigner ses enfants exclusivement grâce aux échantillons de médicaments délivrés par un médecin ou de choisir parmi les enfants malades, celui que lon peut faire soigner.
Les enquêtes les plus récentes menées par le CREDES (²) (Centre de Recherche, d'Etude et de Documentation en Economie de la Santé) et le Haut Comité de Santé Publique montrent qui si la France dispose d'un système de protection sociale et d'un dispositif de santé de qualité, des inégalités inacceptables demeurent :
a / Notre système de protection sociale ne permet pas d'éviter les renoncements aux soins.
Un français sur quatre, dit avoir un jour renoncé à se soigner pour de raisons financières. Cest considérable.
Et cette situation empire quand on regarde de plus près la situation des plus démunis.
Moins bien couverts par l'assurance maladie, subissant les contraintes du ticket modérateur et de l'avance de frais, les personnes aux revenus les plus faibles sont plus fréquemment amenées à renoncer à se faire soigner pour des raisons financières.
Les restrictions les plus fréquentes concernent les soins médicaux et examens, le domaine dentaire et les lunettes.
Près de trois quarts des personnes ayant renoncé à des soins pensent que ceux-ci sont seulement reportés et qu'ils auront lieu plus tard. Mais dans 19 % des cas, cependant, elles renoncent définitivement aux soins.
Les renoncements aux soins sont fortement déterminés par les situations sociales. Les inégalités sont criantes entre les plus qualifiés et les moins qualifiés. Jen veux pour preuve ces chiffres : plus de 29 % des employés et 31 % des ouvriers non qualifiés déclarent avoir déjà renoncé à des soins contre 13 % des cadres supérieurs.
Le niveau de revenu agit à la fois comme un déterminant de la fréquence du recours aux soins et de la nature de ce recours : les ménages à bas revenus consultent moins souvent un médecin et consomment moins de médicaments.
b / Enfin lespérance de vie est très inégale selon les catégories sociales.
La mortalité frappe différemment les milieux sociaux. A 35 ans, l'espérance de vie des professeurs est supérieure de 8 ans à celle des manuvres : 43 années pour les premiers, 35 années pour les seconds.
Surtout, loin de se réduire, les écarts de mortalité entre catégories socioprofessionnelles se sont même accrus. En effet, alors que la mortalité des ouvriers et employés entre 25 et 54 ans est restée stable entre 1980 et 1991, la mortalité des cadres supérieurs et professions libérales diminuait de près de 20 %.
Au total, vivant dans des conditions socio-économiques défavorables, plus difficilement accessibles à l'information et à la prévention, bénéficiant d'une protection sociale amoindrie et ayant recours de façon tardive et partielle aux soins, les catégories socioprofessionnelles les plus modestes apparaissent triplement frappées par une espérance de vie plus réduite, une inégalité face à la maladie et une inégalité encore plus nette face aux chances de guérison.
c / Ces différences dans lEtat de santé sexpliquent largement par le fait que les plus modestes ont un accès plus réduit à la couverture complémentaire.
Une étude du CREDES confirme que le statut socio-économique et le degré de précarité déterminent largement l'accès à la couverture complémentaire. Or cest celle ci qui pose problème. On ne se soigne pas, parce quon ne peut pas payer le ticket modérateur ou le forfait hospitalier.
En effet, 62 % des chômeurs contre 90 % des actifs bénéficient d'une couverture complémentaire.
66 % des personnes en intérim et 77 % des salariés ayant un contrat inférieur ou égal à 6 mois déclarent bénéficier d'une couverture complémentaire, alors que ce taux est de 93 % pour les personnes en CDI.
Le bénéfice d'une complémentaire a également un lien direct avec le revenu moyen par unité de consommation. Le taux de couverture est seulement de 51 % pour un revenu inférieur à 2.000 F., de 76 % pour un revenu compris entre 2.000 F. et 3.000 F. de 86 % pour un revenu compris entre 3.000 F. et 4.000 F. et de plus de 96 % pour un revenu supérieur à 8.000 F.
Plus on est modeste, plus on est précaire, plus le bénéfice dune garantie complémentaire est essentiel. La réalité est pourtant inverse : plus vous êtes exposé moins vous êtes protégé.
Prendre la mesure de cette réalité exigeait donc, dengager notre pays dans une réforme profonde de laccès aux soins, garantissant légalité effective devant le droit à la protection de la santé.
Cest donc de cela quil sagit aujourdhui : vaincre labsurde, vaincre linjustice et, garantir, grâce à la couverture maladie universelle, à chacun de nos concitoyens le droit réel aux soins, un droit jusquici bafoué quand on est gravement malade ou même que lon meurt, faute davoir les revenus suffisants pour être bien soigné.
La réforme était nécessaire.
Vu limportance de ce texte, la multiplicité des intervenants, le gouvernement a souhaité confier à un parlementaire, Jean Claude Boulard, une mission exploratoire qui a donné lieu à une concertation très approfondie. A la suite de la remise dun premier rapport, le gouvernement lui a demandé de poursuivre son travail pour parvenir à lélaboration du texte qui vous est présenté aujourdhui.
Je tiens à remercier votre rapporteur, du travail considérable réalisé, travail de concertation, dimagination au service des objectifs que nous nous étions fixés et des valeurs que nous partageons ensemble.
A. La NECESSITE de la REFORME
Historique
La création de la couverture maladie universelle prolonge leffort accompli depuis plus dun siècle pour venir en aide aux plus démunis.
Cest en 1893 que lassistance médicale gratuite a été créée.
Viendra ensuite en 1945 la création de la sécurité sociale puis la généralisation de lassurance maladie et la création de lassurance personnelle en 1978.
Puis les lois de décentralisation ont transféré les compétences dans le domaine de laide médicale aux départements.
En 1988 avec la création du RMI, un pas en avant considérable va être réalisé en faveur de la couverture maladie des personnes les plus défavorisées. En effet, le bénéfice du RMI ouvre le droit à une affiliation automatique à lassurance personnelle, cest à dire à la sécurité sociale de base, pour les allocataires non couverts par un régime obligatoire dassurance maladie.
Enfin en 1992 une réforme profonde de laide médicale est engagée, qui protège davantage les allocataires du RMI en prenant en charge à 100%, leurs dépenses maladies, cest à dire en couvrant la part complémentaire.
La CMU naît enfin aujourdhui et va bien au-delà du projet du précédent gouvernement dinstaurer lAssurance Maladie Universelle. LAMU allait dans le bon sens mais ne proposait quun seul étage de la réforme que nous vous proposons aujourdhui. LAMU se limitait à réintégrer dans le champ de la sécurité sociale de base, les 150 000 personnes qui en étaient exclues.
Nous faisons cette réforme dans le projet actuel, mais cest insuffisant et nous allons donc beaucoup plus loin, puisque nous permettrons grâce à la CMU, à 6 millions de français de bénéficier de la couverture maladie complète dont ils ne bénéficiaient jusquici pas.
Ce que le gouvernement vous propose aujourdhui, cest de franchir ensemble une étape supplémentaire et décisive en faveur dun accès effectif aux soins pour tous.
La CMU nest pas seulement destinée aux plus exclus. Elle permet à ceux dont laccès aux soins est particulièrement restreint pour des raisons de revenu de bénéficier dune couverture complémentaire complète. Il y aura parmi ces bénéficiaires, des exclus et des chômeurs, mais pas seulement. Il y aura aussi des salariés modestes, des smicards, des commerçants et artisans, des femmes, des hommes, des familles qui se soignent mal, faute dune couverture maladie complète. Cest une des différences majeures avec le précédent projet.
La loi se décompose donc en deux étages.
Le premier étage consiste à garantir, laccès effectif à lassurance maladie de base, la garantie de droits ouverts pour tous à la sécurité sociale.
Le second étage de la loi permettra laccès à une couverture complémentaire maladie aux 10% de français les plus modestes, cest à dire à 6 millions de personnes.
Je ne vous parlerai pas maintenant du titre IV du projet de loi, sur lequel Bernard Kouchner interviendra au début de la discussion.
B. Garantir à tous, les droits à lassurance maladie de base
Aujourdhui 550 000 personnes ont recours aujourdhui à lassurance personnelle et on estime à environ 150 000 personnes, ceux qui en France ne bénéficient daucune couverture maladie. Ils sont donc 700 000 à être très concrètement concernés par ce progrès considérable qui consiste à leur garantir laccès à une couverture maladie de base grâce à la CMU.
La loi permettra donc à tous de bénéficier de la protection dun régime dassurance maladie. En effet, tout résident stable et régulier qui naurait pas de droits ouverts auprès dun régime de sécurité sociale pourra, sur seule justification de sa résidence régulière, bénéficier des prestations du régime général.
Demain, on sera assuré davoir une couverture maladie de base. Cest le droit élémentaire de celui qui vit ici, droit dêtre protégé des risques du lendemain.
Un dispositif simple. Cest notre volonté.
Avec la CMU nous avons voulu que ce soient les droits qui viennent aux plus démunis et ne plus contraindre les plus exclus à un parcours du combattant harassant avant de pouvoir accéder à leurs droits fondamentaux.
Laffiliation sera immédiate dès le dépôt de la demande.
Ce nest que par la suite que la caisse daffiliation recherchera si la personne na pas de droits ouverts à un titre quelconque. Si elle ne relève daucun des critères traditionnels socioprofessionnels, elle sera maintenue au régime général au seul titre de sa résidence.
Laffiliation sera automatique : le demandeur devra uniquement fournir sa carte didentité ou, sil sagit dun étranger, sa carte de séjour.
Les droits aux prestations en nature seront ouverts dès le dépôt de la demande justifié, et leur continuité sera garantie : le paiement des cotisations ne sera plus une condition préalable au bénéfice des prestations en nature.
Nous avons voulu la simplicité.
Ainsi le régime de lassurance personnelle, facultatif et complexe sera-t-il supprimé et laccès au droit sera facilité pour les 550 000 personnes qui y ont recours.
Parmi ceux là, 500 000 personnes ont leur cotisation aujourdhui prises en charge par les départements au titre de laide médicale ou les Caisses dallocation familiale, tandis que 50 000 la paient.
Avec la CMU, ils ne paient pas de cotisation, en dessous de 3 500 francs. Pour ceux qui sont au-dessus de ce seuil, la cotisation sera calculée proportionnellement à la part de revenu excédant le seuil de contributivité, ce qui rend le système plus progressif et donc plus juste.
Cest un progrès considérable.
La réforme devra également permettre dassurer la couverture des 150 000 personnes qui nont aujourdhui aucun droit.
Pour ceux là, laccès à la couverture sociale signifiera le retour au sein de la collectivité, une chance pour eux de retrouver une place dans la société.
Pour réaliser cette réforme, la sécurité sociale se verra transférer les sommes qui sont actuellement consacrées par les départements, les caisses dallocations familiales, le FSV et lEtat à la prise en charge des cotisations dassurance personnelle de ceux qui nont aucun droit à une couverture maladie obligatoire.
C. Ouvrir un droit à la couverture complémentaire pour les 10 % les plus modestes de la population
Mais il ne suffit pas de donner une carte dassuré social à chacun. Se limiter à garantir laffiliation à un régime de sécurité sociale, ne permettrait pas de garantir laccès aux soins.
En effet, le principal obstacle à laccès aux soins est dordre financier : lassurance maladie laisse près de 25 % des dépenses de santé à la charge des ménages.
Cette charge atteint dabord les ménages en difficulté pour lesquels le forfait hospitalier et le ticket modérateur représentent des montants trop élevés avec leurs ressources. Elle contraint les plus défavorisés à rester dominés par langoisse de la maladie.
Je rencontrais récemment une femme en Meurthe et Moselle qui bénéficiait de la carte santé mise en place par le conseil général. Ce dispositif qui anticipait sur la CMU lui a permis de mieux soigner ses enfants. Elle me disait simplement ce quavait été sa situation jusquà présent : une course contre la montre avec la maladie, une course durant laquelle on observe la maladie se développer chez lenfant, retardant le moment de consulter parce quon n'a pas dargent et espérant que le mal se résorbe de lui-même.
Cette course contre la montre est parfois une course qui conduit directement à la mort.
Aucun dispositif nest parvenu jusquici à briser cette spirale de lexclusion.
Malgré des expériences utiles, laide médicale reste insuffisante.
Laide médicale organisée au niveau des départements na pas permis de résoudre partout ces problèmes daccès aux soins. Trois types de difficultés sont rencontrés.
Les départements dans le cadre de lobligation légale doivent prendre en charge au minimum les allocataires du RMI. Mais dans plusieurs départements, les obstacles à la reconnaissance des droits persistent. Il faut pour les demandeurs, remplir dans le temps et lespace tant de conditions, que laccès aux droits sapparente à un véritable parcours du combattant et conduit trop souvent au renoncement. Cest la première difficulté.
La seconde, cest que le barème de lobligation légale arrêté au niveau du RMI, ne permet pas de prendre en charge réellement tous ceux qui en ont véritablement besoin.
Et bien que certains départements soient allés au-delà du minimum légal, pour grand nombre dentre eux, lampleur des problèmes de pauvreté et de précarité rencontrés et la faiblesse des moyens mobilisables, ont rendu impossible une telle avancée.
Nous nous trouvons donc devant une rupture dégalité face à laccès aux soins.
Bien sûr, et je men réjouis, certains départements ont eu dans le domaine de laide médicale, une action exemplaire dans ce domaine.
Je veux, très brièvement signaler quelques expériences dans le domaine de laide médicale qui rejoignent par lesprit et la méthode, les objectifs poursuivis par le gouvernement avec la mise en place de la CMU.
Dans plusieurs départements en effet, la mise en place dune carte santé sest accompagnée dune volonté de simplifier et rationaliser laide médicale et de renforcer laccès effectif des plus défavorisés aux soins, grâce à des procédures innovantes facilitant louverture immédiate des droits, la simplification des demandes daide médicale et la sollicitation du service social le plus proche du demandeur.
Ces expériences son particulièrement intéressantes et ont éclairé lélaboration de ce projet de loi. Il nen reste pas moins que laide médicale ne garantit pas légalité de traitement sur lensemble du territoire.
En effet, laccès à laide médicale reste difficile dans de nombreux départements en labsence de barème complémentaire dadmission.
Par ailleurs, lorsquon change de département il faut recommencer toutes les démarches sans être sûr que sa situation corresponde aux conditions de laide médicale du département dans lequel on arrive.
Il nous faut donc garantir légalité des droits sur le territoire.
Alors, on reproche au gouvernement de faire avec la CMU de létatisation.
A ceux qui pensent cela, je veux répondre directement et simplement.
Je tiens à vous rappeler que cette exigence est portée par lassociation des Présidents des Conseils Généraux, qui a été un de nos principaux interlocuteurs dans lélaboration de ce texte. Le président de lAPCG a dailleurs confirmé son accord sur le principe et les modalités du texte dans une lettre quil ma adressé le 3 février 1999.
Nous ne voulons plus laisser perdurer un système inégalitaire où les gens sont traités différemment selon lendroit où ils habitent.
Nous ne voulons plus dun système de type " féodal ", comme les associations appellent laide médicale.
Nous voulons donner un droit pour tous à se faire soigner et le même droit sur lensemble du territoire.
Le gouvernement entend être intransigeant sur légalité de traitement que les Français sont en droit de revendiquer concernant laccès aux soins.
Le projet de couverture maladie universelle permettra à 10 % de la population, soit 6 millions de personnes de bénéficier dune couverture complémentaire complète.
La loi CMU ouvrira donc un droit, sur lensemble du territoire, à une couverture complémentaire sous condition de ressources.
Les soins seront pris en charge à 100 % ainsi que le forfait hospitalier. Des remboursements adaptés seront mis en place pour les prothèses dentaires et loptique au-delà même de ce qui est réalisé pour lensemble des assurés. Les bénéficiaires auront, en outre, la garantie quaucun dépassement ne leur sera facturé par les médecins qui, dans le cadre de la convention médicale, bénéficient de la liberté des tarifs.
Mais, si elles sont certaines dêtre remboursées, les familles aux revenus les plus modestes doivent trop souvent renoncer aux soins parce quelles rencontrent des difficultés pour faire lavance des frais.
Avec la CMU, elles bénéficieront donc systématiquement du tiers payant, tant sur les prestations des régimes obligatoires quau titre de la couverture complémentaire.
Cest un progrès que je crois très important.
Le seuil
Ce droit sera ouvert aux foyers dont le revenu par unité de consommation est inférieur à 3 500F.
Le barème qui variera en fonction de la composition du foyer sétablira de la manière suivante :
- pour une personne isolée : 3 500F
- pour 2 personnes : 5 250F
- pour 3 personnes : 6 300F
- pour 4 personnes : 7 700F
- au-delà : toute personne supplémentaire au foyer : 1 400F.
Ce dispositif permettra ainsi de couvrir les personnes dont la situation est la plus précaire mais également les salariés, les commerçants et artisans, aux revenus les plus modestes. Ainsi, un couple avec un salaire au SMIC et un enfant bénéficiera-t-il de la couverture maladie universelle.
Jentends depuis quelques semaines certaines voix sinquiéter des effets de seuil.
Les effets de seuil
Je veux clarifier le débat tout de suite sur ce sujet.
1. Les barèmes et les seuils existent partout. Le minimum légal fixe le seuil au niveau du RMI. Une trentaine de départements ont fixé des seuils supérieurs. Mais ce sont toujours des seuils.
Ainsi pour prendre un exemple dans le département de mon prédécesseur, Jacques Barrot, en Haute Loire, on peut avoir accès à laide médicale si on a moins de 3 392 F de ressources.
2. La mise en place de la CMU augmente le montant du seuil et le porte à 3 500 F. Il faut le reconnaître, tout seuil, peut prêter, par définition, à discussion. Nous avons considéré que le seuil de 3 500 francs était juste et correspondait aux besoins.
La définition différente du seuil de pauvreté selon lorganisme auquel on sadresse ne nous donne pas de réponse satisfaisante. La variété des pratiques constatées dans ce domaine dans les différents départements le démontre abondamment.
Avant de le remettre en cause, il faut dabord considérer laugmentation considérable du nombre de bénéficiaires grâce à la CMU. Nous passons de 2,6 millions de personnes à 6 millions. Aucun pays nest jusquici allé aussi loin.
3. Certains proposent des avantages différents en fonction dun barème de revenu. Je remarque dabord quaucun département na choisi ce système. Même si le débat existe, sur la volonté de faire contribuer les personnes les plus proches du plafond, le gouvernement na pas retenu ce système parce quil est très difficile à appliquer.
Accepte ton de refuser des soins à une famille qui naurait pas payé les 30 à 40 francs par mois requis.
Enverra ton alors un huissier chez eux pour leur soustraire cette contribution ? Evidemment non, car tout ceci nest pas à la hauteur de lenjeu.
4. Cest sans doute aussi la raison pour laquelle les mesures pour les plus démunis comportent toutes, des seuils. Nous avons choisi den limiter limpact et les conséquences de plusieurs manières :
- les droits à la complémentaire sont ouverts pendant un an, quelle que soit lévolution du revenu des bénéficiaires pendant la période ;
- les bénéficiaires de la CMU qui viendraient à dépasser le seuil de revenus et qui auront choisi une mutuelle ou une assurance, verront leurs droits à la complémentaire prolongés dun an à un tarif préférentiel ;
- les fonds daction sociale des caisses, soulagés par la mise en place de la CMU, notamment ceux des CPAM, pourront intervenir pour les personnes dont les ressources sont supérieures au barème, mais qui rencontreraient des problèmes particuliers. Jai saisi les directeurs des caisses pour leur faire part de mon souci dune prise en charge des cas particuliers ayant des difficultés. Jai dores et déjà obtenu une réponse positive du président de la CNAM ;
- les départements pourront par ailleurs consacrer plus de moyens à laction sociale et à linsertion grâce aux 5 % des sommes consacrées en 1997 à laide médicale quils conserveront ;
- par ailleurs votre rapporteur, propose de compléter ces dispositifs par linstitution dun fond qui pourrait être alimenté par les caisses et les organismes complémentaires ( mutuelles, assurances). Cest une idée intéressante sur laquelle nous pourrons revenir lors de la discussion.
Jen viens maintenant au financement de la CMU.
Quel financement ?
Quelles que soient les modalités choisies par lintéressé, la couverture complémentaire sera une prestation relevant de la solidarité nationale et distincte des remboursements de sécurité sociale.
La couverture maladie universelle nintroduit aucune modulation de ces remboursements en fonction des revenus.
Cette prestation de solidarité sera financée par un fonds dEtat. Son coût est évalué à 9 milliards de francs environ. Le financement du fonds est assuré par :
- une contribution des organismes de protection complémentaire (mutuelles, institutions de prévoyance, entreprises dassurance) au taux de 1,75 % de leur chiffre daffaire santé. Cette contribution de lordre de 1,75 milliards de francs représentera donc environ 20 % du montant total.
- une dotation de lEtat pour le solde. Les sommes actuellement consacrées par les départements à laide médicale complémentaire (soit 5 milliards de francs environ) seront transférées à lEtat.
Un financement indolore pour la sécurité sociale.
Contrairement à ce qui a pu être avancé ici ou là, la CMU sera donc indolore pour la sécurité sociale.
Le coût de la couverture complémentaire au titre de la CMU est donc pris en charge par un fond dEtat auquel contribuent les organismes complémentaires.
Cela amènera les bénéficiaires de la CMU à mieux se soigner et cest bien lobjectif recherché.
Cet objectif social est le plus important, mais nous savons bien aussi quune prise en charge plus précoce et une meilleure prévention des maladies seront susceptibles de réduire les coûts des soins des personnes défavorisées. La CMU na donc pas deffet, si ce nest peut être positif, sur les dépenses de la sécurité sociale, dossier sur lequel nous travaillons par ailleurs.
Jusquà présent, sans la CMU, lorsque les plus démunis finissent par être prise en charge par notre système de soins, cest en urgence et le coût des soins est alors beaucoup plus élevé que si ces personnes avaient été médicalement prises en charge à temps.
Cest par dautres mesures que le déficit de lassurance maladie doit être traité et certainement pas en privant les plus démunis des soins auxquels ils ont droit.
Ceux qui défendent cet argument pour retarder cette réforme fondamentale confondent la maîtrise des dépenses de santé avec le rationnement des soins pour les plus pauvres.
Le gouvernement ne se résoudra jamais à un tel choix. Jentends bien que ceux qui sy résolvent aujourdhui le disent franchement et pas de manière déguisée. Ainsi notre débat sera t-il plus clair.
Jen viens maintenant aux modalités de gestion de la prestation, qui ont tant défrayé la chronique, dans un milieu -il faut bien le dire- très restreint.
Un accès à la CMU garantissant laccès effectif aux droits.
Les bénéficiaires auront droit à une prestation de solidarité qui sera servie à leur choix soit par les caisses dassurance maladie soit par une mutuelle à laquelle ils auront adhéré ou une institution de prévoyance ou une société dassurance avec laquelle ils seront liés par contrat. Cette disposition a été retenue en partant d'une seule considération : l'intérêt des bénéficiaires, leur possibilité d'accéder au droit.
Il est hautement souhaitable que les bénéficiaires de la CMU puissent dans toute la mesure du possible bénéficier dune prise en charge selon le droit commun.
Mais, pour respecter la diversité des situations, tenir compte des personnes qui ne peuvent faire un choix entre les organismes complémentaires, et, face à des offres qui peuvent être limitées dans la phase de mise en place, il convenait quun accès à la couverture maladie universelle soit possible auprès des caisses des régimes obligatoires dassurance maladie.
Ce système na donc rien à voir, comme jai pu lentendre avec le système américain de couverture maladie. En effet malgré les programmes de couverture maladie " Medicare " et " Medicaid ", ouverts sous conditions, aux pauvres (Medicaid) et aux personnes âgées (Medicare), 11,2 millions de pauvres restent aux Etats unis sans la moindre couverture maladie. Nous sommes donc loin de la CMU, où la totalité de la population sera couverte par une couverture de base et la quasi-totalité bénéficiera dune prise en charge à 100 %.
Par ailleurs les bénéficiaires de la CMU en France, bénéficieront de la même médecine que les autres et non pas dune médecine de second ordre comme aux Etats Unis.
Alors en écho, jai entendu dire quavec la CMU le gouvernement faisait de lassistance : pour nous, ne pas mener à bien ce projet serait plutôt de la non-assistance à personne en danger.
La CMU est une réforme fondamentale. Sans doute en ce qui me concerne, une des plus indispensables et essentielles parmi toutes celles dont jai eu à débattre avec vous dans cet hémicycle depuis bientôt deux ans.
Mais nous le savons, une fois cette loi votée, un effort dinformation des bénéficiaires sera nécessaire. Et nous comptons beaucoup sur les associations, les centres communaux daction sociale, les bureaux daide sociale des départements, pour nous aider dans cette mobilisation. Elles seront des relais et des conseils indispensables dans la mise en uvre de cette réforme essentielle.
Chacune des lois que jai portées devant vous repose sur la mise en mouvement de la société. Elles sont complémentaires. Cest ainsi que dés la loi de prévention et de lutte contre lexclusion, nous avons agi en faveur de laccès aux soins des personnes les plus défavorisées avec la mise en place des programmes régionaux daccès à la prévention aux soins (PRAPS) et les permanences daccès aux soins (PAS).
Le projet de loi qui vous est soumis aujourdhui ne fait pas exception à la règle.
Nous pouvons tous nous retrouver autour dun texte comme celui ci. Chacun peut y prendre sa part, chacun même doit y prendre sa part. Sachez que le gouvernement entend être ouvert à toutes les propositions des parlementaires pour améliorer ce texte.
Je crois que nous aurions tort, sur un sujet comme celui là, de ne pas nous attacher à lessentiel, cest à dire la manière la plus simple et la plus efficace de permettre à tous les Français dêtre égaux devant les soins
" La grandeur de lhomme est dans sa décision dêtre plus fort que sa condition " écrivait Camus. Cest de cela quil sagit dans ce projet de loi instaurant une couverture maladie universelle comme ce létait déjà dans le programme de prévention et de lutte contre les exclusions.
Il ne sagit pas seulement daider les plus défavorisés de nos concitoyens à accéder aux soins dont ils ont besoin, il sagit de rétablir six millions de femmes et dhommes dans leur droit à la protection de la santé, leur droit aux soins, donc dans leur droit à lavenir. Cest tout simplement cela, la République.
En soignant le corps on libère un peu lesprit. Pour prolonger Camus, on rend à chacun la capacité dêtre grand.
Cette liberté à laquelle chacun aspire, celle de pouvoir préparer son avenir, je vous propose aujourdhui que grâce à la CMU nous la garantissions à tous.
Je vous remercie.
(http://www.social.gouv.fr, le 25 mai 1999)
Monsieur le Rapporteur,
Mesdames et Messieurs les députés,
Il y a quelques semaines, Paul BOUCHET, président dATD Quart Monde déclarait " la couverture maladie universelle est une avancée historique. Cela fait un demi-siècle que nous lattendons. Pour nous le droit à la santé est un des six droits fondamentaux, lun des plus évidents. Il ne souffre pas de contradiction théorique ".
Il faut en effet mettre fin à un demi siècle de résignation.
Car, quel domaine est plus personnel, plus intime que celui de la santé ? Et en même temps quel champ plus privilégié pour laction collective ?
Il y dans le combat en faveur du droit à la protection de la santé pour tous, du droit aux soins, une exigence profonde de justice sociale.
Car ce sont trop souvent les mêmes, que le mal frappe en premier et que le droit ne protège quen dernier : les petits, les faibles, ceux pour qui, la vie cest la survie, et le lendemain, une conquête.
A ceux-là, nous ajoutons aux blessures de la vie, les blessures du temps et de la maladie en ne les protégeant pas assez, en ne leur garantissant pas laccès et le droit aux soins.
Ceci est Inacceptable
- Pourquoi ? Parce que cela bat en brèche le principe de légalité républicaine, selon lequel tous les citoyens sont égaux devant les droits fondamentaux. Le droit aux soins en est un majeur.
- Pourquoi ? Parce que notre société est chaque jour plus riche. Que les fruits de la croissance doivent bénéficier en priorité aux plus démunis.
Or, que constate t-on en France ?
Que malgré un niveau de dépenses de santé très élevé, la réalité de laccès aux soins est marquée par linjustice. Tout simplement que dans notre pays, le niveau de revenu introduit une discrimination et quil gradue le niveau des soins.
Et les exemples sont nombreux
Il sagit de cette petite fille arrivée à lhôpital avec une septicémie pour un abcès dentaire que ses parents navaient pas eu les moyens de faire soigner.
Il sagit de ces femmes et de ces hommes qui se présentent au service des urgences dun hôpital, un cancer généralisé, à quelques jours de la mort, sans jamais avoir consulté un médecin.
Il sagit de ces parents obligés de choisir entre leurs enfants malades, celui dont létat est le plus grave, pour acheter les médicaments nécessaires pour le soigner.
Il sagit encore de cette famille contrainte de soigner ses enfants exclusivement grâce aux échantillons de médicaments délivrés par un médecin ou de choisir parmi les enfants malades, celui que lon peut faire soigner.
Les enquêtes les plus récentes menées par le CREDES (²) (Centre de Recherche, d'Etude et de Documentation en Economie de la Santé) et le Haut Comité de Santé Publique montrent qui si la France dispose d'un système de protection sociale et d'un dispositif de santé de qualité, des inégalités inacceptables demeurent :
a / Notre système de protection sociale ne permet pas d'éviter les renoncements aux soins.
Un français sur quatre, dit avoir un jour renoncé à se soigner pour de raisons financières. Cest considérable.
Et cette situation empire quand on regarde de plus près la situation des plus démunis.
Moins bien couverts par l'assurance maladie, subissant les contraintes du ticket modérateur et de l'avance de frais, les personnes aux revenus les plus faibles sont plus fréquemment amenées à renoncer à se faire soigner pour des raisons financières.
Les restrictions les plus fréquentes concernent les soins médicaux et examens, le domaine dentaire et les lunettes.
Près de trois quarts des personnes ayant renoncé à des soins pensent que ceux-ci sont seulement reportés et qu'ils auront lieu plus tard. Mais dans 19 % des cas, cependant, elles renoncent définitivement aux soins.
Les renoncements aux soins sont fortement déterminés par les situations sociales. Les inégalités sont criantes entre les plus qualifiés et les moins qualifiés. Jen veux pour preuve ces chiffres : plus de 29 % des employés et 31 % des ouvriers non qualifiés déclarent avoir déjà renoncé à des soins contre 13 % des cadres supérieurs.
Le niveau de revenu agit à la fois comme un déterminant de la fréquence du recours aux soins et de la nature de ce recours : les ménages à bas revenus consultent moins souvent un médecin et consomment moins de médicaments.
b / Enfin lespérance de vie est très inégale selon les catégories sociales.
La mortalité frappe différemment les milieux sociaux. A 35 ans, l'espérance de vie des professeurs est supérieure de 8 ans à celle des manuvres : 43 années pour les premiers, 35 années pour les seconds.
Surtout, loin de se réduire, les écarts de mortalité entre catégories socioprofessionnelles se sont même accrus. En effet, alors que la mortalité des ouvriers et employés entre 25 et 54 ans est restée stable entre 1980 et 1991, la mortalité des cadres supérieurs et professions libérales diminuait de près de 20 %.
Au total, vivant dans des conditions socio-économiques défavorables, plus difficilement accessibles à l'information et à la prévention, bénéficiant d'une protection sociale amoindrie et ayant recours de façon tardive et partielle aux soins, les catégories socioprofessionnelles les plus modestes apparaissent triplement frappées par une espérance de vie plus réduite, une inégalité face à la maladie et une inégalité encore plus nette face aux chances de guérison.
c / Ces différences dans lEtat de santé sexpliquent largement par le fait que les plus modestes ont un accès plus réduit à la couverture complémentaire.
Une étude du CREDES confirme que le statut socio-économique et le degré de précarité déterminent largement l'accès à la couverture complémentaire. Or cest celle ci qui pose problème. On ne se soigne pas, parce quon ne peut pas payer le ticket modérateur ou le forfait hospitalier.
En effet, 62 % des chômeurs contre 90 % des actifs bénéficient d'une couverture complémentaire.
66 % des personnes en intérim et 77 % des salariés ayant un contrat inférieur ou égal à 6 mois déclarent bénéficier d'une couverture complémentaire, alors que ce taux est de 93 % pour les personnes en CDI.
Le bénéfice d'une complémentaire a également un lien direct avec le revenu moyen par unité de consommation. Le taux de couverture est seulement de 51 % pour un revenu inférieur à 2.000 F., de 76 % pour un revenu compris entre 2.000 F. et 3.000 F. de 86 % pour un revenu compris entre 3.000 F. et 4.000 F. et de plus de 96 % pour un revenu supérieur à 8.000 F.
Plus on est modeste, plus on est précaire, plus le bénéfice dune garantie complémentaire est essentiel. La réalité est pourtant inverse : plus vous êtes exposé moins vous êtes protégé.
Prendre la mesure de cette réalité exigeait donc, dengager notre pays dans une réforme profonde de laccès aux soins, garantissant légalité effective devant le droit à la protection de la santé.
Cest donc de cela quil sagit aujourdhui : vaincre labsurde, vaincre linjustice et, garantir, grâce à la couverture maladie universelle, à chacun de nos concitoyens le droit réel aux soins, un droit jusquici bafoué quand on est gravement malade ou même que lon meurt, faute davoir les revenus suffisants pour être bien soigné.
La réforme était nécessaire.
Vu limportance de ce texte, la multiplicité des intervenants, le gouvernement a souhaité confier à un parlementaire, Jean Claude Boulard, une mission exploratoire qui a donné lieu à une concertation très approfondie. A la suite de la remise dun premier rapport, le gouvernement lui a demandé de poursuivre son travail pour parvenir à lélaboration du texte qui vous est présenté aujourdhui.
Je tiens à remercier votre rapporteur, du travail considérable réalisé, travail de concertation, dimagination au service des objectifs que nous nous étions fixés et des valeurs que nous partageons ensemble.
A. La NECESSITE de la REFORME
Historique
La création de la couverture maladie universelle prolonge leffort accompli depuis plus dun siècle pour venir en aide aux plus démunis.
Cest en 1893 que lassistance médicale gratuite a été créée.
Viendra ensuite en 1945 la création de la sécurité sociale puis la généralisation de lassurance maladie et la création de lassurance personnelle en 1978.
Puis les lois de décentralisation ont transféré les compétences dans le domaine de laide médicale aux départements.
En 1988 avec la création du RMI, un pas en avant considérable va être réalisé en faveur de la couverture maladie des personnes les plus défavorisées. En effet, le bénéfice du RMI ouvre le droit à une affiliation automatique à lassurance personnelle, cest à dire à la sécurité sociale de base, pour les allocataires non couverts par un régime obligatoire dassurance maladie.
Enfin en 1992 une réforme profonde de laide médicale est engagée, qui protège davantage les allocataires du RMI en prenant en charge à 100%, leurs dépenses maladies, cest à dire en couvrant la part complémentaire.
La CMU naît enfin aujourdhui et va bien au-delà du projet du précédent gouvernement dinstaurer lAssurance Maladie Universelle. LAMU allait dans le bon sens mais ne proposait quun seul étage de la réforme que nous vous proposons aujourdhui. LAMU se limitait à réintégrer dans le champ de la sécurité sociale de base, les 150 000 personnes qui en étaient exclues.
Nous faisons cette réforme dans le projet actuel, mais cest insuffisant et nous allons donc beaucoup plus loin, puisque nous permettrons grâce à la CMU, à 6 millions de français de bénéficier de la couverture maladie complète dont ils ne bénéficiaient jusquici pas.
Ce que le gouvernement vous propose aujourdhui, cest de franchir ensemble une étape supplémentaire et décisive en faveur dun accès effectif aux soins pour tous.
La CMU nest pas seulement destinée aux plus exclus. Elle permet à ceux dont laccès aux soins est particulièrement restreint pour des raisons de revenu de bénéficier dune couverture complémentaire complète. Il y aura parmi ces bénéficiaires, des exclus et des chômeurs, mais pas seulement. Il y aura aussi des salariés modestes, des smicards, des commerçants et artisans, des femmes, des hommes, des familles qui se soignent mal, faute dune couverture maladie complète. Cest une des différences majeures avec le précédent projet.
La loi se décompose donc en deux étages.
Le premier étage consiste à garantir, laccès effectif à lassurance maladie de base, la garantie de droits ouverts pour tous à la sécurité sociale.
Le second étage de la loi permettra laccès à une couverture complémentaire maladie aux 10% de français les plus modestes, cest à dire à 6 millions de personnes.
Je ne vous parlerai pas maintenant du titre IV du projet de loi, sur lequel Bernard Kouchner interviendra au début de la discussion.
B. Garantir à tous, les droits à lassurance maladie de base
Aujourdhui 550 000 personnes ont recours aujourdhui à lassurance personnelle et on estime à environ 150 000 personnes, ceux qui en France ne bénéficient daucune couverture maladie. Ils sont donc 700 000 à être très concrètement concernés par ce progrès considérable qui consiste à leur garantir laccès à une couverture maladie de base grâce à la CMU.
La loi permettra donc à tous de bénéficier de la protection dun régime dassurance maladie. En effet, tout résident stable et régulier qui naurait pas de droits ouverts auprès dun régime de sécurité sociale pourra, sur seule justification de sa résidence régulière, bénéficier des prestations du régime général.
Demain, on sera assuré davoir une couverture maladie de base. Cest le droit élémentaire de celui qui vit ici, droit dêtre protégé des risques du lendemain.
Un dispositif simple. Cest notre volonté.
Avec la CMU nous avons voulu que ce soient les droits qui viennent aux plus démunis et ne plus contraindre les plus exclus à un parcours du combattant harassant avant de pouvoir accéder à leurs droits fondamentaux.
Laffiliation sera immédiate dès le dépôt de la demande.
Ce nest que par la suite que la caisse daffiliation recherchera si la personne na pas de droits ouverts à un titre quelconque. Si elle ne relève daucun des critères traditionnels socioprofessionnels, elle sera maintenue au régime général au seul titre de sa résidence.
Laffiliation sera automatique : le demandeur devra uniquement fournir sa carte didentité ou, sil sagit dun étranger, sa carte de séjour.
Les droits aux prestations en nature seront ouverts dès le dépôt de la demande justifié, et leur continuité sera garantie : le paiement des cotisations ne sera plus une condition préalable au bénéfice des prestations en nature.
Nous avons voulu la simplicité.
Ainsi le régime de lassurance personnelle, facultatif et complexe sera-t-il supprimé et laccès au droit sera facilité pour les 550 000 personnes qui y ont recours.
Parmi ceux là, 500 000 personnes ont leur cotisation aujourdhui prises en charge par les départements au titre de laide médicale ou les Caisses dallocation familiale, tandis que 50 000 la paient.
Avec la CMU, ils ne paient pas de cotisation, en dessous de 3 500 francs. Pour ceux qui sont au-dessus de ce seuil, la cotisation sera calculée proportionnellement à la part de revenu excédant le seuil de contributivité, ce qui rend le système plus progressif et donc plus juste.
Cest un progrès considérable.
La réforme devra également permettre dassurer la couverture des 150 000 personnes qui nont aujourdhui aucun droit.
Pour ceux là, laccès à la couverture sociale signifiera le retour au sein de la collectivité, une chance pour eux de retrouver une place dans la société.
Pour réaliser cette réforme, la sécurité sociale se verra transférer les sommes qui sont actuellement consacrées par les départements, les caisses dallocations familiales, le FSV et lEtat à la prise en charge des cotisations dassurance personnelle de ceux qui nont aucun droit à une couverture maladie obligatoire.
C. Ouvrir un droit à la couverture complémentaire pour les 10 % les plus modestes de la population
Mais il ne suffit pas de donner une carte dassuré social à chacun. Se limiter à garantir laffiliation à un régime de sécurité sociale, ne permettrait pas de garantir laccès aux soins.
En effet, le principal obstacle à laccès aux soins est dordre financier : lassurance maladie laisse près de 25 % des dépenses de santé à la charge des ménages.
Cette charge atteint dabord les ménages en difficulté pour lesquels le forfait hospitalier et le ticket modérateur représentent des montants trop élevés avec leurs ressources. Elle contraint les plus défavorisés à rester dominés par langoisse de la maladie.
Je rencontrais récemment une femme en Meurthe et Moselle qui bénéficiait de la carte santé mise en place par le conseil général. Ce dispositif qui anticipait sur la CMU lui a permis de mieux soigner ses enfants. Elle me disait simplement ce quavait été sa situation jusquà présent : une course contre la montre avec la maladie, une course durant laquelle on observe la maladie se développer chez lenfant, retardant le moment de consulter parce quon n'a pas dargent et espérant que le mal se résorbe de lui-même.
Cette course contre la montre est parfois une course qui conduit directement à la mort.
Aucun dispositif nest parvenu jusquici à briser cette spirale de lexclusion.
Malgré des expériences utiles, laide médicale reste insuffisante.
Laide médicale organisée au niveau des départements na pas permis de résoudre partout ces problèmes daccès aux soins. Trois types de difficultés sont rencontrés.
Les départements dans le cadre de lobligation légale doivent prendre en charge au minimum les allocataires du RMI. Mais dans plusieurs départements, les obstacles à la reconnaissance des droits persistent. Il faut pour les demandeurs, remplir dans le temps et lespace tant de conditions, que laccès aux droits sapparente à un véritable parcours du combattant et conduit trop souvent au renoncement. Cest la première difficulté.
La seconde, cest que le barème de lobligation légale arrêté au niveau du RMI, ne permet pas de prendre en charge réellement tous ceux qui en ont véritablement besoin.
Et bien que certains départements soient allés au-delà du minimum légal, pour grand nombre dentre eux, lampleur des problèmes de pauvreté et de précarité rencontrés et la faiblesse des moyens mobilisables, ont rendu impossible une telle avancée.
Nous nous trouvons donc devant une rupture dégalité face à laccès aux soins.
Bien sûr, et je men réjouis, certains départements ont eu dans le domaine de laide médicale, une action exemplaire dans ce domaine.
Je veux, très brièvement signaler quelques expériences dans le domaine de laide médicale qui rejoignent par lesprit et la méthode, les objectifs poursuivis par le gouvernement avec la mise en place de la CMU.
Dans plusieurs départements en effet, la mise en place dune carte santé sest accompagnée dune volonté de simplifier et rationaliser laide médicale et de renforcer laccès effectif des plus défavorisés aux soins, grâce à des procédures innovantes facilitant louverture immédiate des droits, la simplification des demandes daide médicale et la sollicitation du service social le plus proche du demandeur.
Ces expériences son particulièrement intéressantes et ont éclairé lélaboration de ce projet de loi. Il nen reste pas moins que laide médicale ne garantit pas légalité de traitement sur lensemble du territoire.
En effet, laccès à laide médicale reste difficile dans de nombreux départements en labsence de barème complémentaire dadmission.
Par ailleurs, lorsquon change de département il faut recommencer toutes les démarches sans être sûr que sa situation corresponde aux conditions de laide médicale du département dans lequel on arrive.
Il nous faut donc garantir légalité des droits sur le territoire.
Alors, on reproche au gouvernement de faire avec la CMU de létatisation.
A ceux qui pensent cela, je veux répondre directement et simplement.
Je tiens à vous rappeler que cette exigence est portée par lassociation des Présidents des Conseils Généraux, qui a été un de nos principaux interlocuteurs dans lélaboration de ce texte. Le président de lAPCG a dailleurs confirmé son accord sur le principe et les modalités du texte dans une lettre quil ma adressé le 3 février 1999.
Nous ne voulons plus laisser perdurer un système inégalitaire où les gens sont traités différemment selon lendroit où ils habitent.
Nous ne voulons plus dun système de type " féodal ", comme les associations appellent laide médicale.
Nous voulons donner un droit pour tous à se faire soigner et le même droit sur lensemble du territoire.
Le gouvernement entend être intransigeant sur légalité de traitement que les Français sont en droit de revendiquer concernant laccès aux soins.
Le projet de couverture maladie universelle permettra à 10 % de la population, soit 6 millions de personnes de bénéficier dune couverture complémentaire complète.
La loi CMU ouvrira donc un droit, sur lensemble du territoire, à une couverture complémentaire sous condition de ressources.
Les soins seront pris en charge à 100 % ainsi que le forfait hospitalier. Des remboursements adaptés seront mis en place pour les prothèses dentaires et loptique au-delà même de ce qui est réalisé pour lensemble des assurés. Les bénéficiaires auront, en outre, la garantie quaucun dépassement ne leur sera facturé par les médecins qui, dans le cadre de la convention médicale, bénéficient de la liberté des tarifs.
Mais, si elles sont certaines dêtre remboursées, les familles aux revenus les plus modestes doivent trop souvent renoncer aux soins parce quelles rencontrent des difficultés pour faire lavance des frais.
Avec la CMU, elles bénéficieront donc systématiquement du tiers payant, tant sur les prestations des régimes obligatoires quau titre de la couverture complémentaire.
Cest un progrès que je crois très important.
Le seuil
Ce droit sera ouvert aux foyers dont le revenu par unité de consommation est inférieur à 3 500F.
Le barème qui variera en fonction de la composition du foyer sétablira de la manière suivante :
- pour une personne isolée : 3 500F
- pour 2 personnes : 5 250F
- pour 3 personnes : 6 300F
- pour 4 personnes : 7 700F
- au-delà : toute personne supplémentaire au foyer : 1 400F.
Ce dispositif permettra ainsi de couvrir les personnes dont la situation est la plus précaire mais également les salariés, les commerçants et artisans, aux revenus les plus modestes. Ainsi, un couple avec un salaire au SMIC et un enfant bénéficiera-t-il de la couverture maladie universelle.
Jentends depuis quelques semaines certaines voix sinquiéter des effets de seuil.
Les effets de seuil
Je veux clarifier le débat tout de suite sur ce sujet.
1. Les barèmes et les seuils existent partout. Le minimum légal fixe le seuil au niveau du RMI. Une trentaine de départements ont fixé des seuils supérieurs. Mais ce sont toujours des seuils.
Ainsi pour prendre un exemple dans le département de mon prédécesseur, Jacques Barrot, en Haute Loire, on peut avoir accès à laide médicale si on a moins de 3 392 F de ressources.
2. La mise en place de la CMU augmente le montant du seuil et le porte à 3 500 F. Il faut le reconnaître, tout seuil, peut prêter, par définition, à discussion. Nous avons considéré que le seuil de 3 500 francs était juste et correspondait aux besoins.
La définition différente du seuil de pauvreté selon lorganisme auquel on sadresse ne nous donne pas de réponse satisfaisante. La variété des pratiques constatées dans ce domaine dans les différents départements le démontre abondamment.
Avant de le remettre en cause, il faut dabord considérer laugmentation considérable du nombre de bénéficiaires grâce à la CMU. Nous passons de 2,6 millions de personnes à 6 millions. Aucun pays nest jusquici allé aussi loin.
3. Certains proposent des avantages différents en fonction dun barème de revenu. Je remarque dabord quaucun département na choisi ce système. Même si le débat existe, sur la volonté de faire contribuer les personnes les plus proches du plafond, le gouvernement na pas retenu ce système parce quil est très difficile à appliquer.
Accepte ton de refuser des soins à une famille qui naurait pas payé les 30 à 40 francs par mois requis.
Enverra ton alors un huissier chez eux pour leur soustraire cette contribution ? Evidemment non, car tout ceci nest pas à la hauteur de lenjeu.
4. Cest sans doute aussi la raison pour laquelle les mesures pour les plus démunis comportent toutes, des seuils. Nous avons choisi den limiter limpact et les conséquences de plusieurs manières :
- les droits à la complémentaire sont ouverts pendant un an, quelle que soit lévolution du revenu des bénéficiaires pendant la période ;
- les bénéficiaires de la CMU qui viendraient à dépasser le seuil de revenus et qui auront choisi une mutuelle ou une assurance, verront leurs droits à la complémentaire prolongés dun an à un tarif préférentiel ;
- les fonds daction sociale des caisses, soulagés par la mise en place de la CMU, notamment ceux des CPAM, pourront intervenir pour les personnes dont les ressources sont supérieures au barème, mais qui rencontreraient des problèmes particuliers. Jai saisi les directeurs des caisses pour leur faire part de mon souci dune prise en charge des cas particuliers ayant des difficultés. Jai dores et déjà obtenu une réponse positive du président de la CNAM ;
- les départements pourront par ailleurs consacrer plus de moyens à laction sociale et à linsertion grâce aux 5 % des sommes consacrées en 1997 à laide médicale quils conserveront ;
- par ailleurs votre rapporteur, propose de compléter ces dispositifs par linstitution dun fond qui pourrait être alimenté par les caisses et les organismes complémentaires ( mutuelles, assurances). Cest une idée intéressante sur laquelle nous pourrons revenir lors de la discussion.
Jen viens maintenant au financement de la CMU.
Quel financement ?
Quelles que soient les modalités choisies par lintéressé, la couverture complémentaire sera une prestation relevant de la solidarité nationale et distincte des remboursements de sécurité sociale.
La couverture maladie universelle nintroduit aucune modulation de ces remboursements en fonction des revenus.
Cette prestation de solidarité sera financée par un fonds dEtat. Son coût est évalué à 9 milliards de francs environ. Le financement du fonds est assuré par :
- une contribution des organismes de protection complémentaire (mutuelles, institutions de prévoyance, entreprises dassurance) au taux de 1,75 % de leur chiffre daffaire santé. Cette contribution de lordre de 1,75 milliards de francs représentera donc environ 20 % du montant total.
- une dotation de lEtat pour le solde. Les sommes actuellement consacrées par les départements à laide médicale complémentaire (soit 5 milliards de francs environ) seront transférées à lEtat.
Un financement indolore pour la sécurité sociale.
Contrairement à ce qui a pu être avancé ici ou là, la CMU sera donc indolore pour la sécurité sociale.
Le coût de la couverture complémentaire au titre de la CMU est donc pris en charge par un fond dEtat auquel contribuent les organismes complémentaires.
Cela amènera les bénéficiaires de la CMU à mieux se soigner et cest bien lobjectif recherché.
Cet objectif social est le plus important, mais nous savons bien aussi quune prise en charge plus précoce et une meilleure prévention des maladies seront susceptibles de réduire les coûts des soins des personnes défavorisées. La CMU na donc pas deffet, si ce nest peut être positif, sur les dépenses de la sécurité sociale, dossier sur lequel nous travaillons par ailleurs.
Jusquà présent, sans la CMU, lorsque les plus démunis finissent par être prise en charge par notre système de soins, cest en urgence et le coût des soins est alors beaucoup plus élevé que si ces personnes avaient été médicalement prises en charge à temps.
Cest par dautres mesures que le déficit de lassurance maladie doit être traité et certainement pas en privant les plus démunis des soins auxquels ils ont droit.
Ceux qui défendent cet argument pour retarder cette réforme fondamentale confondent la maîtrise des dépenses de santé avec le rationnement des soins pour les plus pauvres.
Le gouvernement ne se résoudra jamais à un tel choix. Jentends bien que ceux qui sy résolvent aujourdhui le disent franchement et pas de manière déguisée. Ainsi notre débat sera t-il plus clair.
Jen viens maintenant aux modalités de gestion de la prestation, qui ont tant défrayé la chronique, dans un milieu -il faut bien le dire- très restreint.
Un accès à la CMU garantissant laccès effectif aux droits.
Les bénéficiaires auront droit à une prestation de solidarité qui sera servie à leur choix soit par les caisses dassurance maladie soit par une mutuelle à laquelle ils auront adhéré ou une institution de prévoyance ou une société dassurance avec laquelle ils seront liés par contrat. Cette disposition a été retenue en partant d'une seule considération : l'intérêt des bénéficiaires, leur possibilité d'accéder au droit.
Il est hautement souhaitable que les bénéficiaires de la CMU puissent dans toute la mesure du possible bénéficier dune prise en charge selon le droit commun.
Mais, pour respecter la diversité des situations, tenir compte des personnes qui ne peuvent faire un choix entre les organismes complémentaires, et, face à des offres qui peuvent être limitées dans la phase de mise en place, il convenait quun accès à la couverture maladie universelle soit possible auprès des caisses des régimes obligatoires dassurance maladie.
Ce système na donc rien à voir, comme jai pu lentendre avec le système américain de couverture maladie. En effet malgré les programmes de couverture maladie " Medicare " et " Medicaid ", ouverts sous conditions, aux pauvres (Medicaid) et aux personnes âgées (Medicare), 11,2 millions de pauvres restent aux Etats unis sans la moindre couverture maladie. Nous sommes donc loin de la CMU, où la totalité de la population sera couverte par une couverture de base et la quasi-totalité bénéficiera dune prise en charge à 100 %.
Par ailleurs les bénéficiaires de la CMU en France, bénéficieront de la même médecine que les autres et non pas dune médecine de second ordre comme aux Etats Unis.
Alors en écho, jai entendu dire quavec la CMU le gouvernement faisait de lassistance : pour nous, ne pas mener à bien ce projet serait plutôt de la non-assistance à personne en danger.
La CMU est une réforme fondamentale. Sans doute en ce qui me concerne, une des plus indispensables et essentielles parmi toutes celles dont jai eu à débattre avec vous dans cet hémicycle depuis bientôt deux ans.
Mais nous le savons, une fois cette loi votée, un effort dinformation des bénéficiaires sera nécessaire. Et nous comptons beaucoup sur les associations, les centres communaux daction sociale, les bureaux daide sociale des départements, pour nous aider dans cette mobilisation. Elles seront des relais et des conseils indispensables dans la mise en uvre de cette réforme essentielle.
Chacune des lois que jai portées devant vous repose sur la mise en mouvement de la société. Elles sont complémentaires. Cest ainsi que dés la loi de prévention et de lutte contre lexclusion, nous avons agi en faveur de laccès aux soins des personnes les plus défavorisées avec la mise en place des programmes régionaux daccès à la prévention aux soins (PRAPS) et les permanences daccès aux soins (PAS).
Le projet de loi qui vous est soumis aujourdhui ne fait pas exception à la règle.
Nous pouvons tous nous retrouver autour dun texte comme celui ci. Chacun peut y prendre sa part, chacun même doit y prendre sa part. Sachez que le gouvernement entend être ouvert à toutes les propositions des parlementaires pour améliorer ce texte.
Je crois que nous aurions tort, sur un sujet comme celui là, de ne pas nous attacher à lessentiel, cest à dire la manière la plus simple et la plus efficace de permettre à tous les Français dêtre égaux devant les soins
" La grandeur de lhomme est dans sa décision dêtre plus fort que sa condition " écrivait Camus. Cest de cela quil sagit dans ce projet de loi instaurant une couverture maladie universelle comme ce létait déjà dans le programme de prévention et de lutte contre les exclusions.
Il ne sagit pas seulement daider les plus défavorisés de nos concitoyens à accéder aux soins dont ils ont besoin, il sagit de rétablir six millions de femmes et dhommes dans leur droit à la protection de la santé, leur droit aux soins, donc dans leur droit à lavenir. Cest tout simplement cela, la République.
En soignant le corps on libère un peu lesprit. Pour prolonger Camus, on rend à chacun la capacité dêtre grand.
Cette liberté à laquelle chacun aspire, celle de pouvoir préparer son avenir, je vous propose aujourdhui que grâce à la CMU nous la garantissions à tous.
Je vous remercie.
(http://www.social.gouv.fr, le 25 mai 1999)