Déclaration de Mme Martine Aubry, ministre de l'emploi et de la solidarité, sur les comptes de la sécurité sociale, Paris le 31 mai 1999.

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Circonstance : Réunion de la Commission des comptes de la Sécurité sociale à Paris le 31 mai 1999

Texte intégral

Je suis heureuse que nous puissions nous rencontrer aujourdhui, dans le respect du calendrier fixé pour la réunion de la Commission des Comptes de printemps.
Je souligne ce respect du calendrier, parce que jai entendu ici et là des doutes quant à notre volonté de respecter les règles. Jentends rester fidèle à la méthode de ce gouvernement : lavenir de la sécurité sociale se construit dans la transparence. Le respect du calendrier est à cet égard essentiel et cela quelles que soient les échéances qui peuvent mobiliser par ailleurs nos concitoyens. Permettez-moi de souligner, quencore récemment, je pense aux semaines qui ont précédé les élections législatives de 1997, il ny avait pas eu une telle volonté de transparence.
Je me bornerai à dégager les enseignements majeurs que nous devons en tirer de lévolution des comptes et à vous présenter la réforme du financement de la sécurité sociale que le Premier ministre vient dannoncer. Aussi je naborderai pas la situation de lensemble des branches.
En ce qui concerne la retraite nous sommes, pour beaucoup dentre vous, appelés à nous revoir sans tarder dans le cadre de la concertation que le Premier Ministre ma chargé de conduire à la suite du diagnostic concerté établi par le Commissariat Général au Plan.
Nous préparons actuellement la prochaine conférence de la famille. Cest dans ce cadre que seront examinées les perspectives de notre politique familiale. Le gouvernement souhaite prolonger laction de réformes engagées lors de la conférence du 12 juin 1998 autour de deux priorités : la conciliation vie familiale/vie professionnelle et la prise en charge de jeunes adultes.
I) Les enseignements de lévolution des comptes
Jen viens maintenant aux comptes.
Les soldes 1997-1998-1999
Nous avons eu des difficultés particulières à les établir du fait des erreurs daffectations des recettes entre branches et entre régimes et organismes constatées à lACOSS lors de la mise en place du système informatique Racine.
Nous avons toutes les raisons de penser que les comptes que nous vous proposons sont maintenant fondés sur une correcte appréciation des ressources de chaque branche et régime. Mais le souci de transparence que jévoquais il y a quelques instants ma conduit à demander à lIGAS denquêter immédiatement sur ces dysfonctionnements dont nous ne pouvons accepter quils se reproduisent.
Les soldes du régime général ont été gravement affectés par les erreurs que je viens dévoquer.
Ces erreurs aboutissent à majorer artificiellement le déficit 1998 comme la expliqué le secrétaire général.
Ainsi, le régime général a été crédité en 1997 de recettes supérieures à celles qui lui revenaient vraiment. Le déficit 1997 était donc sous estimé de 1,4 Mds et sétablissait en réalité à 34,7 Mds. Pour 600 Millions, il sagit dun double compte sur le produit des remboursements dexonération de charge liés à lemploi, pour 800 Millions, il sagit de laffectation indue au régime général de recettes qui relevait du versement transport.
La correction des erreurs de 1997 vient dégrader dans les résultats comptables, le solde de 1998. Le déficit réel 1998 est donc inférieur à celui que présentent les comptes. Il sétablit en fait à 15,8 Mds.
Lerreur évoquée précédemment a conduit par ailleurs à surestimer dans les prévisions les cotisations 1998 puisque nous nous étions fondés sur des chiffres 1997 trop élevés. Cette surestimation des recettes est toutefois largement compensée par un rendement meilleur que prévu de la contribution sociale généralisée notamment en ce qui concerne les revenus financiers. Jy vois une confirmation supplémentaire de la pertinence de la réforme engagée fin 1997.
La dégradation réelle du solde de 1998 est donc limitée à 2,5 Mds.
Les erreurs de répartition de 1997 ont également faussé dans des proportions importantes les soldes par branche. Bien quil soit très difficile de reconstituer des recettes hors erreur de répartition, on peut penser que les recettes de la branche maladie ont été surestimées de 2 à 3 MdsF, celles de la branche famille denviron
1 MdF, celles de la branche vieillesse sous-estimées de 3 à 4 MdsF.
Non seulement la situation du régime général dans son ensemble en 1997 était plus mauvaise que ce que nous pensions, mais la situation de la branche maladie létait donc également. La prévision pour 1998 a reproduit ces erreurs de niveaux : si le solde de la branche maladie apparaît si dégradé par rapport à la prévision, cest donc bien sûr du fait du dérapage des dépenses, mais aussi du fait de la correction de ces erreurs.
En ce qui concerne 1999, la prévision actuelle sétablit à 5,2 Mds. Elle est en retrait par rapport à lobjectif déquilibre que nous nous étions fixé pour 1999. Il faut toutefois prendre une juste mesure de cet écart qui représente moins de 0,4 % des dépenses du régime général.
Il est, par ailleurs, bien inférieur aux écarts entre prévision et réalisation que nous avons connus dans le passé. Je rappellerai quen novembre 1995, M. Juppé annonçait un excédent de 12 Mds en 1997 alors que nous constatons aujourdhui que le déficit sest élevé à 35 milliards soit un écart de 47 milliards entre prévision et réalisation.
Cette rectification de la prévision ne remet pas par ailleurs en cause le redressement du régime général. De 1993 à 1996, les déficits ont atteint 232 Mds soit environ 58 Mds par an en moyenne. Nous avons hérité dun déficit de 35 Mds en 1997. Réduit à
15,8 Mds en 1998, il sera limité à un peu plus de 5 Mds en 1999. Nous ne sommes pas loin de léquilibre prévu. Le redressement que nous avons engagé a porté ses fruits mais notre vigilance doit être maintenue.
Ce redressement, nous le devons aux mesures prises pour consolider notre système de protection sociale. Je rappellerai seulement la substitution CSG-cotisations maladie, la mise sous condition de ressources des allocations familiales, puis la réforme du quotient familial mais aussi les mesures structurelles dans le domaine de lassurance-maladie. Sans les mesures de redressement de la loi de financement 1998, le déficit 1998 aurait été plus élevé encore que celui de 1997, donc plus de 35 MdsF, malgré une croissance économique nettement plus forte. Sans dérapage des dépenses maladie, il aurait encore été de lordre de 27 MdsF. Certes, les dépenses de lassurance-maladie progressent encore beaucoup trop vite, mais les mesures que nous avons prises dans ce domaine rapportent en 1999, en recettes ou en économies, 2,5 MsdF.
Les écarts sur les prévisions 1999 tiennent en effet pour lessentiel aux dépenses maladie
Cet écart de 5 milliards est le résultat de multiples variations sur les lignes de dépenses et de recettes.
Je me limiterai aux évolutions les plus significatives. La révision à la baisse des prévisions de croissance de la masse salariale se traduit par de moindres recettes denviron 4,2 Mds. La prévision initiale de croissance de la masse salariale du secteur privé y compris les emplois jeune de 4,3 % a été rectifiée pour être portée à 3,8 % à la suite de la révision de la prévision générale de croissance économique.
Les meilleures rentrées que jévoquais précédemment pour 1998 notamment sur la CSG ont un effet base positif denviron 4 Mds.
Diverses révisions de recettes dont le versement en 1999 de la ristourne des labo pharmaceutiques ont un effet positif denviron 3 Mds.
Ainsi les prévisions 1999 seront, pour lessentiel modifiées du fait de la révision à la hausse des prévisions en matière de dépenses dassurance maladie.
La prévision que nous vous présentons aujourdhui prend en compte les résultats 1998 et transcrit lévaluation tendancielle des dépenses. Elle intègre donc un surcroît des prestations dassurance maladie de 9 Mds. Sur la base des tendances actuelles, cet excédent de dépenses correspond pour lessentiel au dépassement constaté en 1998, 8,4 Md.
Nous avons, en effet, constaté au premier semestre 1998 une forte croissance des dépenses, amorcée dès la fin de 1996, puis une stabilisation au second semestre. Les données dont nous disposons sur les derniers mois semblent indiquer une reprise de la hausse sans quil soit possible de lapprécier précisément du fait des épidémies de grippe de fin décembre et fin février.
Nous ne pouvons bien évidemment nous satisfaire de ces constats. Ils appellent une vigilance accrue et la poursuite des réformes structurelles que nous avons engagées.
Toutefois, cette forte évolution des dépenses ne doit pas accréditer lidée que lensemble du système serait en voie déclatement et, que le déficit serait une fatalité.
Il importe en effet de ne pas se tromper sur le diagnostic avant denvisager telle ou telle thérapeutique.
Les évolutions et la situation sont en effet très contrastées selon les secteurs.
Hôpital, cliniques, Médico-social. Une évolution contrôlée
Ainsi, pour lhôpital, les données dont nous disposons nous permettent dêtre confiant quant au respect des objectifs assignés pour 1999. Pour autant, cela ne nous autorise pas à ralentir les efforts que nous conduisons pour recomposer notre système hospitalier, ladapter aux besoins et réduire les inégalités entre régions et entre établissements. Nous pourrons approfondir cette politique puisque nous disposerons à partir de lété 1999 de schémas, construits à partir dune large concertation avec les professionnels, les usagers et les élus.
Les SROS qui sont en voie dachèvement fixeront des priorités claires. Dans de nombreuses régions, ils permettront de conduire la restructuration de loffre de soins dans des domaines comme la cardiologie, la cancérologie, la périnatalité, la chirurgie ou les urgences. Ils permettront également dorganiser la réponse aux grands problèmes de santé publique (conduites addictives, prise en charge de la douleur, prévention du suicide, prise en charge de la dépendance).
Les SROS permettront de définir de nouveaux principes dorganisation de loffre de soin et de poser les bases de réseaux visant à permettre des prises en charge graduées selon les états pathologiques.
Cest dans ce cadre, et non à partir de données comptables, sur la base de besoins de santé publique et dans le respect des hommes et des femmes qui travaillent à lhôpital que nous entendons poursuivre ladaptation de notre système hospitalier.
Ainsi la loi CMU dans son titre IV, après la première lecture à lAssemblée contient des mesures importantes pour faciliter cette adaptation :
- la possibilité, pour des établissements sociaux, dadhérer à des syndicats interhospitaliers,
- la création dune nouvelle catégorie juridique détablissement public de santé, létablissement public interhospitalier,
- la possibilité offerte aux établissements de santé de créer des fédérations médicales interhospitalières qui permettront une meilleure couverture médicale des populations.
De même nous savons quil faut rendre plus intelligentes nos procédures dallocations des ressources, quil faut médicaliser les budgets hospitaliers. Afin de disposer des éléments dappréciation qui sont nécessaires, la loi relative à la CMU ouvre, dans son titre IV, tel quil est issu de la première lecture à lAssemblée, la possibilité dexpérimenter la tarification à la pathologie. Nous pourrons ainsi, je lespère, mieux apprécier et valoriser lactivité médicale mais aussi les missions de service public. Cela rejoint en particulier les préoccupations de la Fédération hospitalière de France comme celles de la CNAMTS.
Pour les cliniques qui avaient dépassé de leur objectif 1998, nous avons appliqué le dispositif de régulation qui régit ce secteur. Ainsi, une baisse des tarifs de 1,43 % devrait nous permettre de respecter lobjectif de 1999. Je souligne que les cliniques devraient bénéficier en tout état de cause dune croissance de 4 % de leurs chiffres daffaires sur les deux années 1998 et 1999. Les relations entre les cliniques et notre système de sécurité sociale sinscrivent dans un contrat clair. La sécurité sociale solvabilise ce secteur et assure une croissance régulière de ses revenus. En contrepartie, les cliniques acceptent des efforts en cas dévolution trop rapide de leur chiffre daffaire. Cest ce contrat que nous faisons respecter. Pour autant, il nous faut rechercher de meilleurs modes de tarification. Lexpérimentation de la tarification à la pathologie que jévoquais précédemment ira dans ce sens également pour les cliniques.
Dans le secteur médico-social, les dépenses ont fortement augmenté en 1998 de
1,5 Mds au-delà des objectifs. Nous avons par prudence, après correction des effets de champs, reporté ce dépassement sur 1999 dans les prévisions.
Ce secteur était caractérisé jusquà présent par labsence de dispositif permettant dassurer le respect des objectifs de dépense. Trois dispositions, dans la loi de finances pour 1999, la loi de financement de la Sécurité Sociales pour 1999 mais aussi dans celle portant création de la couverture maladie universelle, permettent de rendre les enveloppes de dépense opposables aux établissements tant pour ce qui concerne lEtat, lassurance maladie que les départements.
Nous bénéficierons pleinement de leffet de ces dispositions en 2 000. Cette plus grande rigueur dans la gestion des crédits nempêchera pas, mais au contraire permettra denvisager sur des bases saines grâce notamment à lentrée en vigueur progressive de la réforme de la tarification des établissements accueillant des personnes âgées dépendantes, le développement dun secteur où les besoins non satisfaits sont importants que ce soit en matière daccueil des personnes âgées ou de personnes handicapées.
Une évolution préoccupante : les soins de ville ...
Lévolution la plus préoccupante concerne les soins de ville. Ils ont progressé de 6, 3 % en 1998. Ils sont en augmentation de 5,4 % au premier trimestre 1999 rapporté au premier trimestre 1998. Cette forte croissance est liée pour lessentiel aux prescriptions qui ont augmenté de 8,1 % en 1998. La croissance des honoraires est mieux contenue.
.... Un dérapage limité sur les honoraires, une régulation qui se met en place en accord avec les professionnels.
Les honoraires des médecins ont connu une croissance de 3,9 % en 1998. Cette croissance sexplique dailleurs, pour partie à hauteur de 0, 7 %, par la revalorisation de la consultation des généralistes rendue possible par le respect objectifs des généralistes en 1997. Les généralistes ont dailleurs à 50 MF près respecté leurs objectifs dhonoraires en 1998. Aussi, le dépassement en ce domaine reste limité dans son ampleur.
Le Gouvernement nen conduit pas moins comme il lavait annoncé des négociations avec certaines spécialités médicales qui ont connu une forte croissance dhonoraires. Ainsi, nous avons conclu un accord avec les radiologues qui leur offre ainsi quà lassurance maladie des garanties sur lévolution des honoraires : les radiologues sont assurés dune croissance de leur chiffre daffaires, lassurance maladie est protégée contre des croissances excessives. Cet accord ne se limite dailleurs pas à la régulation des honoraires mais ouvre la voie à un partenariat avec la profession pour améliorer la qualité des soins notamment en matière de dépistage.
Nous venons également de conclure un accord avec les cardiologues. Cet accord vise pour lessentiel à réguler lévolution des honoraires en réduisant les actes inutiles. Par cet accord, la profession sengage à développer en son sein les bonnes pratiques. Cette démarche de maîtrise médicalisée fondée sur la confiance dans la capacité de la profession à améliorer les pratiques me paraît exemplaire. Laccord comporte par ailleurs des garanties en ce qui concerne lévolution des dépenses de cardiologie si cette action était insuffisante.
Cest dans le même esprit que nous avons abordé les discussions avec les ophtalmologistes. Nous navons pas abouti à un accord et je le regrette. Aussi nous allons modifier la cotation de certains actes pour infléchir la tendance des dépenses.
En ce qui concerne la biologie, les remboursements du régime général ont progressé de 6, 9 % en 1998. Du fait de lampleur de ces dépassements, les discussions avec les représentants de la profession se sont avérées très délicates. Malgré une concertation longue et approfondie, nous serons contraints de prendre unilatéralement des mesures tant en ce qui concerne la cotation de certains actes que la valeur de la lettre clef B. Elles se traduiront pour une économie en année pleine de 800 millions. Ces mesures infléchiront une évolution trop rapide des dépenses, elles garantiront toutefois une progression globale du chiffre daffaire des laboratoires de plus de 4 % sur 1998 et 1999.
Une forte croissance des dépenses de médicaments, une politique structurelle engagée pour les réguler.
Mais plus que par les honoraires des professionnels, les dépenses sont tirées à la hausse par la croissance des prescriptions et notamment des remboursements de médicaments.
Ils ont progressé de 8,1 % en 1998 même si le CA de lindustrie pharmaceutique na augmenté que de 5 %, cet écart est dû, pour partie, à un meilleur niveau moyen de remboursement dont nous ne pouvons que nous réjouir.
Lassurance maladie est toutefois, aujourdhui, mieux armée pour faire face à ces évolutions du fait du dispositif de sauvegarde que nous avons mis en place.
Ainsi laccord conclu avec les laboratoires en 1998 se traduit par une recette de
1,3 Mds en 1999 qui vient atténuer leffet de la forte croissance de dépense sur ce poste. Nous avons mis en place par la loi fin 1998, une clause de sauvegarde, certes partielle mais dune efficacité plus grande que celle qui aurait pu concerner les médecins. Jajoute quelle demande un effort à ceux qui peuvent le consentir puisquils bénéficient des fortes croissances de Chiffres dAffaires financées par lAssurance Maladie.
Nous avons également mis en place un dispositif de suivi de dépenses en lien avec lindustrie pharmaceutique qui doit nous conduire à examiner autour du 15 juin, les mesures éventuellement nécessaires pour assurer le respect des objectifs.
Mais lessentiel nest pas là, lenjeu majeur est bien une meilleure utilisation du médicament dans notre pays.
On souligne souvent sur la croissance inéluctable des dépenses associées à la mise sur le marché de molécules nouvelles. Ces augmentations de dépenses sont bien évidemment légitimes même sil ne faut pas en majorer limpact. Ainsi, seulement trois molécules introduites sur la marché en 1998 ont apporté un progrès thérapeutique majeur au sens de la Commission de la Transparence.
De plus elles ne doivent pas faire oublier que des économies sont possibles sur le médicament sans réduire, voire en améliorant la santé de nos concitoyens. Les rapports que jai demandés à lObservatoire des prescriptions sur les antibiotiques, les antidépresseurs, les veinotoniques le démontrent amplement. Elles ne doivent pas faire oublier également que de nombreux brevets viennent progressivement à échéance et quil est possible dapporter les mêmes soins avec des génériques moins coûteux.
Cest à partir de ces constats que nous pouvons envisager une politique de maîtrise des dépenses structurelle et durable.
Ainsi, nous nous sommes donné les moyens de développer les génériques en instituant un droit de substitution et en signant un accord avec les pharmaciens qui reconnaît pleinement leur rôle dacteur de santé. Nous devrions constater les premiers effets de cette réforme fin 1999 et sa véritable montée en charge en 2000. Les économies potentielles sont majeures -4 Mds par an- et sont appelées à croître avec larrivée de nouveaux génériques
Les médecins disposent doutils nouveaux pour optimiser leurs prescriptions, je pense notamment au guide des équivalents thérapeutiques diffusé par la CNAMTS. Je pense également aux nouvelles possibilités que va leur ouvrir linformatisation des cabinets. Je ne peux que les appeler à sen saisir. Prendre en compte sans réduire lefficacité thérapeutique, le caractère économique de la prescription est leur devoir déontologique.
Je noublie pas quil nous appartient de les aider dans cette démarche en y associant les patients bien souvent à lorigine, par leurs demandes, de surprescription. Aussi je me réjouis quune campagne sur le bon usage du médicament ait été lancée par la CNAMTS.
Je noublie pas enfin la responsabilité de lEtat qui admet au remboursement, fixe les prix et les taux de remboursement. Nous avons entrepris une révision densemble par classe thérapeutique des conditions de prix et remboursement des médicaments. Nous attendons pour la fin juillet les premières évolutions de la Commission de la transparence qui concernent plus de 600 spécialités (les médicaments du systèmes cardio-vasculaire, certains médicaments du système nerveux, du métabolisme et de la nutrition et les médicaments de rhumatologie). A partir de cet avis, la discussion sengagera avec les laboratoires concernés.
Jai évoqué un peu longuement le médicament car cest le poste de dépense le plus dynamique. Cest aussi un domaine où nous avons engagé des réformes structurelles (mise en place dune clause de régulation, développement des génériques, réévaluation des médicaments) dont nous bénéficierons dès 1999 mais dont le plein effet se fera sentir en 2000.
Ce nest évidemment pas le seul où nous devons rechercher tout à la fois une amélioration de la qualité et une meilleure utilisation des ressources de lassurance maladie.
En effet, nous ne pouvons nous satisfaire de lévolution des dépenses que nous connaissons. Le rythme actuel dévolution de dépenses, bien au delà des objectifs fixés par le Parlement, même sil est concentré sur certains postes de dépenses, nest pas acceptable. Aucune raison sanitaire majeure ne le justifie. Nous savons que nous sommes un des pays qui dépense le plus pour la santé.
Cette situation nous impose dintervenir pour corriger les augmentations excessives en recherchant dans toute la mesure du possible les voies dun accord avec les professionnels concernés. Nous lavons fait en Juillet 1998 par la voie daccord avec les masseurs kinésithérapeutes, les orthophonistes, les biologistes, les industries du médicament et des biens médicaux. Nous sommes également intervenu pour modérer lévolution des dépenses des dentistes et des radiologues.
Comme annoncé en Février 1999, et ainsi je viens de nous lindiquer, nous nous sommes donnés les moyens dinfléchir les dépenses en cardiologie, en ophtalmologie et en biologie.
Le gouvernement est résolu à intervenir lorsquil apparaît des évolutions des dépenses non compatibles avec les objectifs fixés par le Parlement. Les acteurs de la santé voient leur activité solvabilisée par lassurance maladie. Celle-ci est en mesure de leur assurer une croissance régulière de leur revenu. Les pouvoirs publics sont fondés à intervenir lorsque des évolutions trop élevées des dépenses fragilisent notre système dassurance maladie.
Mais au-delà de ces interventions ponctuelles, nous entendons poursuivre la mise en oeuvre de politiques structurelles seules susceptibles dassurer une maîtrise durable des dépenses. Pour la définition de ces politiques, jai souhaité en Février que sengage une large concertation. Cette concertation est en cours. Elle a abouti pour ce qui concerne les pharmaciens. En accord avec la profession, nous mettons en oeuvre une réforme profonde de lexercice officinal. Cette concertation est en cours aussi sur lhôpital, elle na pas freiné mais au contraire permis dasseoir sur des base claires le mouvement de recomposition de notre tissu hospitalier.
Pour ce qui concerne la médecine de ville, la CNAMTS a formulé de nombreuses propositions dans le cadre dun plan global que nous lui avons demandé. Cest une contribution majeure à la concertation quappelait de ces voeux le gouvernement.
Je me réjouis que la CNAMTS se saisisse pleinement du rôle majeur qui lui est reconnu dans la régulation des soins de ville. Mais nous ne réformerons pas notre système de santé, je lai toujours dit, sans les professionnels. Et je me félicite que la CNAMTS ait engagé des concertations sur ses propositions.
Le gouvernement tiendra bien évidemment le plus grand compte du résultat de ces concertations pour établir le prochain projet de loi de financement pour 2 000. Aussi je souhaite que ces concertations soient riches et puissent déboucher sur des propositions communes entre Caisses et médecins. Il importe quelles aboutissent sans tarder au cours du moi de Juin pour que leurs résultats puissent être intégrés dans le projet de loi pour lan 2 000.
II) La réforme du financement de la sécurité sociale
Je voudrais évoquer maintenant la réforme des cotisations patronales de sécurité sociale que le premier ministre a récemment annoncée. Nous aurons à nous en entretenir plus longuement dans le cadre des rencontres qui sengagent sur la deuxième loi relative à la réduction du temps de travail.
Cette nouvelle étape majeure dans la modernisation des prélèvements fiscaux et sociaux, sinscrit dans la politique densemble du gouvernement qui a fait de lemploi sa priorité numéro un, en soutenant la croissance, en relançant le processus de réduction du temps de travail, en favorisant lémergence de nouvelles activités dans le domaines des hautes technologies comme dans celui des nouveaux services et en luttant contre les exclusions. La plupart de ces chantiers sont engagés et commencent à produire leurs fruits, la croissance est dynamique, les créations demplois nont jamais été aussi importantes depuis 30 ans et le chômage recule de façon quasi-continue depuis près de deux ans.
Le nouveau dispositif prévu par le gouvernement entraîne une baisse des cotisations sociales patronales de sécurité sociale sur les salaires dun montant inférieur à 1,8 fois le SMIC. Afin de favoriser au maximum les créations demploi, le bénéfice de cet allégement sera réservé aux entreprises ayant adopté les 35 heures. Il y aura donc des contreparties à la réduction des charges.
Tout emploi inscrit dans ce cadre donnera droit à partir de lan 2000, à un abattement de cotisations patronales qui, au total, sera compris entre 21 500 F par an au niveau du SMIC et 4000 F à 1,8 SMIC et au delà. Les entreprises qui ne sont pas éligibles au nouveau dispositif continueront de bénéficier des dispositions aujourdhui en vigueur.
Pour les salaires inférieurs à 1,8 SMIC, cet abattement représente un allégement supplémentaire de charges sur les bas salaires de 25 milliards de francs, au delà de la ristourne dégressive et de laide pérenne qui avait été décidée pour accompagner la réduction du temps de travail et qui sera confirmée dans la deuxième loi.
Léquilibrage de ces 25 milliards sera trouvé par un élargissement dassiette des cotisations patronales à dautres éléments que les salaires, pour moitié par une éco-taxe [ou pollu-taxe] et pour moitié dans une contribution assise sur les bénéfices des sociétés, dont les produits seront affectés aux comptes sociaux.
Ainsi, la taxe générale sur les activités polluantes (TGAP) acquittée par les entreprises spécialisées, sera affectée dès 2000 aux comptes sociaux. Son montant sera réajusté dès 2000 et son assiette sera élargie en 2001 aux consommations intermédiaires dénergie. Cette évolution, conforme aux principes adoptés par lAllemagne, le Royaume-Uni et lItalie sinscrira dans le programme national de lutte contre leffet de serre que la France sest engagée à mettre en uvre lors de la conférence de Kyoto.
La contribution sur les bénéfices des sociétés sera instituée dès 2000. Elle ne concernera pas les P.M.E. réalisant un chiffre daffaire inférieur à 50 millions de francs de chiffre daffaire. LEtat assurera une garantie aux régimes sociaux contre les fluctuations de cette contribution.
Comme vous le voyez, la réforme qui a été annoncée répond au double objectif sur lequel nous avions eu des échanges à lautomne dernier et qui avait été approuvé par le parlement lors des débats sur le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 1999, abaisser le coût du travail au niveau des bas salaires tout en corrigeant la " trappe à bas salaires ", et rééquilibrer les prélèvements sociaux au sein des entreprises.
Après le basculement des cotisations salariales sur la CSG en 1998, cette nouvelle répartition des cotisations patronales aboutit à un financement de la protection sociale plus favorable à lemploi et plus équitable. Avec les baisses de prélèvements fiscaux, notamment par la suppression progressive de lassiette salaire de la taxe professionnelle, les charges qui pèsent sur les entreprises et les emplois baisseront significativement au cours des prochaines années.
Cette politique active de lemploi constitue une contribution essentielle à léquilibre des comptes de la sécurité sociale.
Lécart de 5 Mds sur les prévisions que nous constatons aujourdhui ne nous fait pas diverger de la voie que nous avions tracée : le redressement des comptes du régime général.
Nous sommes déterminés à poursuivre les actions que nous avons engagées dans cette perspective. Je suis convaincue quelles porteront leurs fruits.
(Source http://www.social.gouv.fr, le 08 juin 1999)