Déclarations de M. Edouard Balladur, Premier ministre, sur la situation en Martinique, les mesures pour le développement économique et social de l'outre-mer, le marché de la banane et les contrat de plan en Martinique, Fort-de-France le 20 mai 1994.

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Circonstance : Déplacement d'Edouard Balladur aux Antilles et en Guyane du 19 au 21 mai 1994. Visite à la Martinique le 20 mai

Texte intégral

- POINT DE PRESSE -
1- Mesures prises en faveur de l'enseignement.
1.1. Hors contrat de plan.
- Sécurité des établissements : sur l'enveloppe de 4 Mds F de prêts bonifiés, 300 MF sont réservés aux DOM. La commission Schleret se livrera à un examen particulier de la situation de l'académie Antilles-Guyane.
- Attribution de 10 postes supplémentaires pour le second degré en sus des 90 déjà attribués.
- Soutien de l'Etat à l'éventuelle initiative du conseil général de la Guadeloupe de créer un lycée hôtelier.
- Accélération de la négociation du contrat d'établissement qui liera l'Etat à l'université des Antilles et de la Guyane avec d'ores et déjà l'octroi d'une avance de 1 MF.
1.2. Troisième contrat de plan Etat-région (1994-1998).
Un effort spécifique est réalisé en faveur de l'enseignement supérieur.
- En Martinique :
* Financement à 100 % (13 MF) de l'unité de formation et de recherche de science médicale.
* Création d'un 2ème pôle universitaire sur la côte atlantique.
* Extension de l'institut universitaire de formation des maîtres.
- En Guadeloupe :
* Agrandissement du Campus.
* Extension de l'institut universitaire de formation des Maîtres.
* Création d'un département d'I.U.T. (agro-alimentaire).
- En Guyane :
* Effort exceptionnel de l'enseignement secondaire avec notamment la participation de l'Etat à la construction d'écoles primaires qui, partout en France, relève de la compétence municipale.
* Construction de la 2ème tranche de la faculté de technologie.
* Construction de 120 logements d'étudiants à Cayenne.
2- Agriculture.
2.1. Les importations illicites de bananes ont été endiguées. Le marché européen de la banane est soumis à une nouvelle organisation communautaire depuis le 1er juillet 1993.
2.2. Le Gouvernement est très attentif aux négociations pour l'ouverture du marché européen au Rhum des pays "Afrique-Caraibes-Pacifique", prévue pour 1996.
Le Gouvernement est très attentif à préserver l'équilibre financier de la filière canne-sucre-rhum.
2.3. Les crédits prévus par les contrats de plan ainsi que les fonds communautaires permettront une modernisation de plusieurs filières.
Notamment 40 MF sont prévus pour un programme de développement régional de la banane.
2.4. Extension de la carte nationale des zones rurales fragiles à plusieurs zones Antilles-Guyane.
3- Le contrat de plan en Martinique.
Le 3ème contrat de plan est en augmentation de 51 % par rapport au second contrat de plan.
En apportant 843 MF, l'Etat permet la mobilisation de plus de 1,7 Mds F d'investissement public : 276 MF pour l'équipement, 235 MF pour le développement économique, 108 MF pour l'environnement, 107 MF pour la cohésion sociale, 159 MF pour la politique de la ville.
4- Divers.
En application de la politique d'aménagement du territoire, la création d'une sous-préfecture à Saint-Pierre est mise à l'étude pour renforcer la présence des services publics dans la région Nord-Caraïbes.
5- Rappels.
- Avant projet de loi pour le développement économique de l'Outre-Mer.
- Apurement des finances publiques locales.
- Soutien au développement économique : plan de relance du bâtiment et des travaux publics, politique de défiscalisation, doublement des fonds européens.
- DISCOURS DE MONSIEUR LE PREMIER MINISTRE A L'AEROPORT DE FORT DE FRANCE -
Messieurs les Parlementaires,
Messieurs les Présidents,
Mesdames et Messieurs,
La Martinique est ma deuxième étape dans ce déplacement que j'effectue, comme Premier Ministre, dans les Antilles françaises. Je vous remercie de l'accueil chaleureux que vous me réservez. J'y suis d'autant plus sensible que j'attache à ma visite en Martinique une importance toute particulière.
Au-delà des responsables politiques et économiques auxquels je tiens à dire mon estime et ma confiance, je suis heureux de pouvoir témoigner de mon attachement personnel à la Martinique et à ses habitants.
Ma visite est aussi une visite de travail que je souhaite fructueuse pour votre département. J'ai donc tenu au cours de ce voyage à aller à la rencontre des réalités et des différents aspects de la vie économique et sociale, de l'agriculture, du logement ou de l'éducation, enjeu essentiel dans un département où la jeunesse est si nombreuse !
Enfin, je voudrais faire partager à la population martiniquaise la ferme volonté qui est celle du Gouvernement de voir les départements d'Outre-mer solidement engagés sur la voie d'un développement économique et social durable et équilibré.
Nous devons en effet tous nous mobiliser pour la réussite de cet objectif. La Martinique a de nombreux atouts, de nombreuses raisons d'espérer : sa jeunesse, sa richesse culturelle, son dynamisme. Elle doit se fier à notre détermination, tout comme nous avons confiance en elle.
- PREFECTURE DE LA MARTINIQUE -
Messieurs les Parlementaires, Monsieur le Président du Conseil Régional, Monsieur le Président du Conseil Général, Mesdames et Messieurs les élus, Mesdames et Messieurs,
C'est un grand plaisir de me trouver à nouveau sur le sol de Martinique en ce premier déplacement de Premier Ministre en Outre-mer français.
C'est avec un vif intérêt que je rencontre la plupart des responsables de ce département.
Cette réunion nous donne l'occasion de faire un premier bilan et d'esquisser nos projets.
Je sais les difficultés économiques et sociales de votre département. La situation actuelle est toutefois meilleure qu'il y a un an, même si elle est moins bonne encore que celle de demain.
Depuis un an, le Gouvernement s'est montré solidaire de l'Outremer français tout en l'encourageant à prendre ses responsabilités locales.
Dès le mois d'avril 1993, un ensemble de mesures a été décidé dans le cadre de plans d'urgence. Au titre de la relance du bâtiment et des travaux publics et de la politique de la ville, ces plans ont fait bénéficier la Martinique de 100 MF de crédits d'investissement nouveaux, permettant d'engager plus de 200 MF de travaux, apportant ainsi aux entreprises du secteur du bâtiment et des travaux publics le regain d'activité qu'il leur fallait.
Le Gouvernement a dû également secourir les principaux établissements hospitaliers en leur accordant une aide exceptionnelle de plus de 62 MF.
Mais surtout, le Gouvernement s'est efforcé de donner à la Région Martinique les moyens de rétablir sa situation financière. L'Etat ne peut, ni ne doit, combler les dettes des collectivités locales.
A la demande de Monsieur Dominique PERBEN, ministre des départements et territoires d'outre-mer, le Gouvernement, puis le Parlement, ont permis à la région d'accroître ses recettes. Le Gouvernement a encouragé l'effort d'assainissement qui s'est traduit récemment par la négociation d'un emprunt de plus de 530 MF. La Région Martinique réglant ses dettes et retrouvant la faculté de participer raisonnablement au financement de l'investissement public peut regarder l'avenir avec plus de sérénité.
Préparer l'avenir, tel est bien l'objectif de notre action. Planifier les investissements publics, concrétiser le partenariat entre l'Etat, l'Europe et les collectivités locales, stabiliser la situation des principales filières agricoles, dessiner un cadre clair à l'action des décideurs et des responsables économiques.
J'ai ainsi décidé de fixer à 51 %, dans le cadre du XIème plan, le taux d'augmentation des crédits contractualisés de l'Etat, soit un taux d'évolution bien supérieur à celui de la métropole.
J'ajoute que la situation de la Martinique est plus favorable encore. Dans votre département, la dotation de l'Etat au titre du contrat de plan et de la politique de la ville s'élève à 843 MF. Si l'on compare ce qui est comparable, ce montant marque en réalité, une progression de plus de 80 % par rapport à la période contractuelle précédente.
Je sais que les négociations entre l'Etat et les collectivités régionales ou départementales sont très avancées. Elles devraient se conclure par la signature d'un contrat de plan dans les prochains jours.
Quelles sont nos intentions ?
L'Etat consacrera 276 MF de crédits aux équipements routiers, à la poursuite de la modernisation de l'aéroport du Lamentin, à l'aménagement du port de Fort-de-France où un nouveau terminal spécialisé devra être installé. En outre, un effort important sera fait pour les équipements publics éducatifs. Avec en particulier, la création d'un deuxième pôle universitaire sur la côte Atlantique, à dominante scientifique et gestionnaire. Avec la construction d'un nouveau lycée polyvalent dans le Nord Caraïbes. Deux investissements en faveur de la jeunesse, qui de plus, rééquilibreront, le développement du territoire au profit du nord de l'île.
Bien entendu, l'Etat concourra encore au développement des filières économiques et des entreprises, à la modernisation des grandes cultures agricoles, au développement de la pêche artisanale. Des aides diverses seront apportées à l'artisanat, au commerce, au tourisme et à l'industrie. Soit sur les 5 ans qui viennent, plus de 235 MF de crédits d'Etat affectés à ces actions de développement économique.
Troisième objectif de cet engagement de l'Etat : l'environnement. Il nous faut améliorer l'alimentation et le traitement de l'eau potable des communes rurales. Il faut dans les zones urbaines en particulier, moderniser le traitement des déchets ménagers et des eaux usées. D'autre part, un important programme de travaux protègera les populations exposées aux inondations. Le contrat de plan réserve 108 MF de crédits d'Etat à ces actions.
Enfin, dans le domaine sanitaire et social, pour lutter contre l'exclusion, et mieux accueillir les personnes âgées, les handicapés, pour moderniser le secteur hospitalier psychiatrique, 107 MF de crédits d'Etat seront débloqués.
Ajoutons à tout cela les efforts de la politique de la ville : l'Etat verse jusqu'à 159 MF, dont 74 MF seront exclusivement consacrés à la résorption de l'habitat insalubre.
Je sais que le contrat de ville avec le Lamentin est prêt et doit être signé dans les prochains jours.
J'espère que celui de Fort-de-France suivra rapidement.
Cinq communes de Martinique ont pu bénéficier de ce nouvel instrument qu'est la convention locale de développement social urbain.
Les contrats de plan comme la politique de la ville, doivent être mis en place avant l'été afin que l'activité économique soit relancée dans le bâtiment et les travaux publics.
La même logique, les mêmes priorités guideront la répartition des fonds communautaires consacrés à la Martinique. Sous réserve des derniers ajustements, la Martinique devrait bénéficier d'environ 2,6 milliards de Francs pour les six ans à venir, soit un quasi-doublement du programme précédent.
Là encore, la priorité que nous accordons aux départements d'outre-mer est visible. La solidarité européenne n'existerait pas sans la solidarité nationale. Les difficiles négociations que la France a conduites pour obtenir le doublement des fonds structurels consacrés aux départements d'Outre-mer le montrent bien. Ces fonds, dits européens sont d'ailleurs alimentés par des contributions nationales. La France est l'un des principaux payeurs à ce titre.
La nouvelle génération de programmes européens ancre davantage la Martinique dans la construction communautaire. Bien entendu, la vigilance s'impose pour que soient toujours reconnus, à l'intérieur du cadre européen, les intérêts et les spécificités de nos départements d'Outremer. Je pense que, depuis un an, nous avons suffisamment montré notre détermination. L'organisation communautaire du marché de la banane en est un bon exemple.
Vous pouvez être assuré, que je veillerai personnellement avec l'aide du ministre des DOM-TOM à la nouvelle négociation de l'organisation communautaire du marché du sucre.
Les difficultés, toujours présentes, ne sauraient dissimuler, derrière cette organisation des marchés, la garantie essentielle d'un débouché rémunérateur pour les producteurs de grandes filières traditionnelles.
Mais la préparation de l'avenir ne peut se résumer à la programmation des investissements. Le Gouvernement a engagé les départements d'Outre-mer sur la voie d'une réflexion approfondie quant aux réformes économiques et sociales à mener.
L'avant-projet de loi sur le développement économique et social des DOM a récemment fait l'objet de consultations très larges.
Notre premier effort doit porter sur les problèmes de l'insertion, et de la lutte pour l'emploi. L'ampleur de l'exclusion sociale, du chômage et du chômage des jeunes, requièrent des mesures fortes et spécifiques.
Sans revenir sur l'économie générale de ce projet, je vous en rappellerai l'ambition.
La création de l'agence départementale d'insertion, signe de la collaboration de l'Etat et du département, vise à mettre les bénéficiaires du RMI en activité. Le contrat d'insertion par l'activité permet d'asseoir cette politique sur un instrument qui dote ses titulaires d'un véritable contrat de travail et d'une rémunération égale au SMIC.
Enfin le contrat d'accès à l'emploi complète cet arsenal nouveau qui, en deux ou trois ans devrait permettre d'augmenter de 60 % les possibilités d'insertion offertes aux personnes sans emploi.
Les mesures que nous avons arrêtées pour l'emploi sont audacieuses. Pour la première fois les secteurs de l'industrie, de l'hôtellerie et de l'agriculture bénéficient d'une exonération des cotisations sociales.
Les entreprises dont les activités sont tournées vers les marchés extérieurs peuvent cumuler ces mesures, avec des aides puissantes à la création d'emplois nouveaux.
L'élargissement des mesures d'aide à l'embauche des deuxième et troisième salariés aidera sensiblement les toutes petites entreprises du secteur commercial et artisanal en particulier.
C'est l'ambition même de ce dispositif qui pose le problème de son financement.
Si le Gouvernement assure le financement de la réforme de l'insertion, il ne peut assumer aujourd'hui, sans recette nouvelle, la totalité du coût du plan pour l'emploi, supérieur à 1 milliard de francs par an.
C'est la raison pour laquelle, plutôt que de renoncer à l'ambition du projet, le Gouvernement a choisi d'en trouver un financement partiel dans un relèvement limité de la fiscalité indirecte de l'Etat.
Ce relèvement ne signifie pas un appauvrissement de l'économie martiniquaise. Son produit servira à abaisser le coût du travail et à encourager la création d'emplois.
En outre, le Gouvernement a veillé à exonérer de toute augmentation de taxes la plupart des produits qui entrent dans la consommation des personnes les plus défavorisées.
Le ministre des départements d'Outre-mer me tient régulièrement informé des progrès des discussions menées avec l'ensemble des forces vives de votre département, comme avec celles des trois autres départements d'Outre-mer. Cette concertation se poursuivra jusqu'au vote définitif de la loi par le Parlement, qui doit intervenir avant la fin de la session de printemps. Elle pourra infléchir le dispositif initial présenté par le Gouvernement.
Ces modifications devraient apaiser les craintes perçues, ici ou là, quant à l'équilibre des pouvoirs entre l'Etat et le département dans la gestion de l'agence départementale d'insertion.
J'ai décidé, de compléter le dispositif actuel en affectant, sur les cinq ans futurs, un total de 500 MF de crédits supplémentaires au financement du logement social dans les DOM.
Une mesure avait été envisagée par le Gouvernement : elle facilitait l'embauche de jeunes en finançant un dispositif exceptionnel de préretraites. Elle avait dû être écartée à cause de son coût trop important pour les finances publiques. Elle sera réintroduite dans le dispositif final, sous la forme d'une extension dans les DOM du système de préretraite progressive auquel l'Etat consacrera 100 MF par an pendant 10 ans.
Chacun doit désormais prendre ses responsabilités. Le Gouvernement a pris les siennes : il a choisi d'encourager un développement plus autonome de l'économie des DOM, qui se fonde sur la croissance de la production locale et la recherche d'une plus grande équité sociale. Il a, enfin, montré toute l'attention qu'il prête à ses divers partenaires.
Passons maintenant à l'action, à cette réforme essentielle, pour affronter ensemble, avec ambition, responsabilité et rigueur, le défi que constitue, pour chacun d'entre nous, la poursuite du développement économique et social de la Martinique et des départements d'Outre-mer au sein de la République Française.
- INTERVENTION DU PREMIER MINISTRE A LA RESIDENCE DU PREFET DE FORT-DE FRANCE -
Messieurs les Parlementaires,
Messieurs les Présidents,
Mesdames, Messieurs,
Après cette journée passée dans votre région, je souhaite vous dire très simplement le plaisir que j'ai pris à cette visite qui m'a permis de nouer de nombreux contacts, d'apprécier de nombreuses réalisations, de préciser le sens de l'action gouvernementale à l'égard des départements d'Outre-Mer.
Le Gouvernement que j'ai l'honneur de diriger, a pleinement conscience de la place éminente qu'occupent les départements d'Outre-Mer, et tout particulièrement la Martinique, au sein de l'ensemble national. L'Outre-Mer apporte en effet à la France une dimension et une ouverture dans le monde qui est sans équivalent parmi les autres Etats européens, notamment du fait de sa richesse culturelle et humaine. Aussi ai-je confiance dans l'avenir de votre département.
J'ai eu l'occasion aujourd'hui au cours de mes interventions de souligner deux importants volets de l'action gouvernementale, dont les effets seront - je l'espère - bientôt ressentis dans la réalité économique et sociale de la Martinique.
Le premier volet concerne l'avenir des investissements publics. Grâce au doublement des fonds structurels communautaires qui a été obtenu par le Gouvernement à Bruxelles, grâce à l'augmentation considérable de la participation de l'Etat au contrat de plan qui sera signé dans les prochains jours, grâce à l'action conduite pour faciliter l'assainissement financier de la collectivité régionale, la Martinique voit ses perspectives de développement pour les cinq ans à venir s'accroître très considérablement.
Le second axe de notre politique se traduit dans l'avant projet de loi pour le développement économique et social des départements d'Outre-Mer, que prépare M. PERBEN et qui forme un ensemble de mesures cohérentes et fortes. Ce texte, en effet, met en oeuvre des instruments nouveaux, pour mieux lutter contre l'exclusion sociale et oeuvrer en faveur de plus d'emplois, notamment pour les jeunes. Qu'il me soit permis de dire ici qu'il n'existe pas à mes yeux de priorité plus importante que la lutte contre le chômage.
Avec ce projet, le Gouvernement a souhaité l'ouverture d'un large débat. Il s'agit bien sûr de recueillir les observations, les propositions, voire d'examiner les critiques qui seraient formulées. Mais tout n'est pas possible immédiatement. Compte tenu de la situation économique et financière très difficile dans laquelle se trouvait notre pays et dont le redressement ne sera que progressif, nous ne pouvons nous dispenser de rechercher tous ensemble le maximum d'efficacité économique et sociale dans les mécanismes de la solidarité nationale.
En outre, au cours de ce déplacement, j'ai eu l'occasion d'annoncer trois décisions très significatives en faveur des départements d'Outre-Mer qui complètent les dispositions initiales contenues dans l'avant-projet de loi :
- La première porte sur le logement social. Dans les 5 ans à venir, I'Etat affectera un demi milliard de francs supplémentaires à cette action que je juge extrêmement importante. Ceci créera de nouveaux emplois et apportera une activité supplémentaire aux entreprises.
- La seconde vise l'emploi des jeunes. Pour accélérer leur embauche, j'ai décidé d'affecter 100 MF pendant 10 ans - soit 1 milliard de Francs au total - au financement de préretraites progressives pour les salariés âgés de plus de 55 ans à condition que ceci bénéficie à des recrutements nouveaux.
- La troisième concerne l'éducation. J'ai décidé de réserver au bénéfice des quatre départements d'Outre-Mer une enveloppe de 300 MF de prêts bonifiés pour la réalisation de travaux de sécurité sur les établissements scolaires. Les critères nationaux d'accès à cette enveloppe de crédits bonifiés seront adaptés à la situation particulière des départements d'Outre-Mer, dans le sens d'une plus grande souplesse.
Ces trois décisions, qui complètent ce qui avait déjà été annoncé, témoignent de mon engagement personnel en faveur de l'Outre-Mer et de la Martinique.
Vous pouvez être assurés que l'Etat est à vos côtés, pour conduire avec dynamisme et enthousiasme, votre société dans le sens d'une plus grande cohésion afin d'offrir à la jeunesse martiniquaise une réelle égalité des chances dans la République.
Voici le message que je souhaitais vous adresser pour conclure ma visite.
Vous l'avez bien compris, c'est un message d'ambition, de confiance et d'espoir pour la Martinique qui trouvera - j'en suis persuadé une place de choix dans l'autre Société que j'appelle de mes voeux.
- REUNION AVEC LES SOCIAUX PROFESSIONNELS DU MONDE AGRICOLE GROS MORNE-MARTINIQUE -
J'ai souhaité vous rencontrer, vous les responsables du monde agricole de la Martinique pour que vous sachiez combien défendre l'agriculture de l'Outre-mer est un souci majeur du gouvernement.
Cette réunion est l'occasion pour moi de dresser un premier bilan de l'action conduite. J'en profiterai pour vous faire part des réflexions que m'inspirent l'agriculture des départements d'Outre-mer et de la Martinique notamment, ainsi que les perspectives qu'il nous faut tracer ensemble.
Cela fait plus d'un an maintenant que le Ministre des départements et territoires d'Outre-mer, m'alerte chaque fois que le gouvernement doit montrer, comme il l'a déjà fait avec succès, sa détermination pour sauvegarder les intérêts vitaux de votre activité et de vos grandes filières de productions.
Parmi elles, la production bananière, la filière canne-sucre-rhum, la production d'ananas et pour d'autres départements, la riziculture ou la pêche crevettière, sont nécessaires à votre activité économique, à vos emplois et à vos recettes d'exportation. Elles sont, par ailleurs, essentielles à l'aménagement du territoire. Vous, les agriculteurs devez poursuivre vos objectifs à long terme et disposer, comme le prévoit explicitement le Traité de Rome, tant d'un accès au marché européen que d'une juste rémunération de vos activités. Ces principes de la construction européenne sont, plus que jamais, d'actualité. L'action conduite avec le Ministre des DOM-TOM va dans ce sens. J'ajoute que la construction de l'Europe ne peut se concevoir si elle ne signifie pas, pour vos départements, une intégration réussie dans ce processus et une aide réelle de la communauté à leur développement économique et social.
J'en prendrai pour preuve quelques exemples significatifs :
- Comme vous le savez, surtout ici, en Martinique, une nouvelle organisation du marché européen de la banane a été mise en place le 1er juillet 1993. Elle inaugure un dispositif satisfaisant de soutien de cette production.
Pourtant cette organisation de marché, qui est un succès important dans l'histoire économique des Antilles, fait l'objet de contestations dans certaines instances internationales. Cette opposition s'est, depuis un an, manifestée à diverses reprises, et tout récemment encore, lors de la signature des accords de l'Uruguay Round à Marrakech le 15 avril dernier. La France doit ainsi revenir très fréquemment auprès de ses partenaires et de la Commission sur le caractère vital de cette production pour la stabilité économique et sociale des Antilles françaises.
J'ai donné des instructions précises aux ministres de mon Gouvernement : la France ne laissera pas remettre en cause cette organisation de marché par certains de nos partenaires peu soucieux de l'avenir des DOM, pourtant parties intégrantes de l'Union Européenne.
Le Gouvernement, soyez-en sûrs, oeuvrera pour que cette organisation de marché garantisse aux producteurs antillais la stabilité à long terme dont ils ont besoin.
- Autre exemple que je souhaite évoquer, sur cette terre d'élection du rhum agricole, celui des conditions de l'ouverture du marché européen, prévue en 1996, aux rhums originaires des pays d'Afrique, des Caraïbes et du Pacifique.
Dès l'été 1993, le Ministre des DOM-TOM a appelé mon attention sur le danger d'une telle mesure mise en place sans précaution particulière. Il s'en est directement entretenu, au plus haut niveau, avec les responsables de la Commission européenne pour leur faire prendre conscience de l'enjeu et de la nécessité qu'il y a à préserver les équilibres de cette filière.
Aussi ai-je, au début de l'année 1994, remis personnellement, au président de la Commission Européenne un mémorandum expliquant la position de la France sur ce sujet. Je suis prêt à examiner toutes les solutions que la Commission pourra proposer. Mais je n'accepterai pas la remise en cause de l'accès au marché européen, et métropolitain en particulier, pour le rhum traditionnel des DOM.
Enfin, je voudrais évoquer la prochaine renégociation de l'organisation du marché du sucre. Elle préoccupe de nombreux professionnels. Modèle d'organisation, celle-ci se doit de rendre la production et les marchés plus stables. Les autorités françaises feront savoir, le moment venu, aux autorités communautaires, le prix qu'elles attachent à la préservation des équilibres financiers de la filière canne-sucre-rhum.
Ces négociations exigent toujours la plus grande détermination et une persévérance sans faille du Gouvernement. Je m'y emploie avec l'aide résolue du Ministre des DOM-TOM. Cette action s'appuie sur des relations de confiance, étroitement nouées avec vos professions, dont l'incontestable dynamisme est un profond encouragement pour le Gouvernement.
L'Etat, par l'élaboration des contrats de plan, par la préparation des programmes de développement régionaux, a mis en place, avec la collaboration des collectivités locales,les moyens financiers nécessaires à la modernisation de vos activités.
Ainsi, le Gouvernement a récemment négocié le doublement des fonds structurels européens qui sont attribués aux départements d'Outremer.
Grâce aux contrats de plan et aux fonds communautaires, les moyens financiers sont donc prévus pour aider tant les grandes filières traditionnelles que la diversification agricole.
A titre d'exemple, j'ai décidé d'accroître de 40 MF la part des financements de l'Etat qui seront mobilisés dans le cadre du Programme de Développement Régional "Banane" et équilibreront, sur les six prochaines années, les contributions des différents partenaires. Ainsi le très ambitieux programme de modernisation de la bananeraie antillaise pourra-t-il être poursuivi.
Depuis un an, sans relâche, la nation a montré sa solidarité à l'endroit d'un Outre-mer durement frappé : je pense notamment aux graves intempéries que vous avez subies l'été dernier. Je peux vous annoncer, aujourd'hui, que l'ensemble des crédits destinés aux agriculteurs les plus touchés sont à la disposition du Préfet qui doit effectuer les attributions correspondantes.
Enfin, la réflexion que le grand débat a suscité dans le domaine de l'aménagement du territoire nous invite à nous projeter dans un avenir plus lointain. Je crois qu'il faut veiller à la solidarité nationale. Elle doit s'exprimer davantage encore en faveur des communes rurales les plus fragiles de nos départements. C'est la raison pour laquelle, à la demande de Monsieur PERBEN, j'ai décidé de classer certaines communes rurales de Martinique et de Guadeloupe parmi les zones d'intervention prioritaire. Elles pourront de ce fait bénéficier du fonds interministériel de développement et d'aménagement rural. Ainsi les départements antillais se trouveront-ils dans la situation que connaît, depuis plus de quinze ans, le département de la Réunion qui a mis en oeuvre une politique originale d'aménagement des Hauts.
Préserver l'équilibre des grandes filières agricoles et leur accès au marché européen, développer la diversification agricole, en fonction des opportunités commerciales, reconnaître dans l'agriculture un élément essentiel au développement du territoire, renforcer la cohésion sociale, tels sont les principes qui guident l'action du gouvernement à votre égard.
- DISCOURS DE MONSIEUR LE PREMIER MINISTRE A MORNE-ROUGE -
Monsieur le Député-Maire,
Madame le Conseiller Général,
Mesdames et Messieurs les Adjoints et Conseillers Municipaux,
Mesdames, Messieurs,
Cher Pierre PETIT, je tiens à vous remercier, vous et vos collègues du conseil municipal de Morne-Rouge, ainsi que la population de cette si belle commune, pour la cordialité de votre accueil.
Je me réjouis que mon voyage en Martinique commence par une étape au coeur de la région Nord-Caraïbe, ici à Morne-Rouge.
Je tenais tout particulièrement à saluer dans sa mairie un élu dont la fidélité et le dévouement sont bien connus. Vous défendez ardemment la Martinique à Paris. Parlementaire exigeant, vous veillez aux intérêts des départements d'Outre-mer.
Ici, vous soutenez notre politique et je tenais à vous dire la valeur que nous accordons à votre appui.
Ce n'est pas seulement au parlementaire que je viens rendre hommage, c'est aussi au maire. Je sais à quelles contraintes les élus municipaux sont confrontés dans la gestion de leurs communes.
Conscient de ces difficultés, vous vous êtes attaché à développer Morne-Rouge, et sa vocation touristique, dans un environnement de grande beauté, appuyé sur les flancs de la Montagne Pelée. Vous avez aussi l'intention de mettre son potentiel agricole en valeur. Les premiers résultats sont favorables : à Morne-Rouge, on exporte des fleurs coupées, on fabrique du jus de fruits et des conserves de fruits. Il faut continuer dans cette voie qui permet d'utiliser au mieux l'ensemble de vos ressources naturelles.
Enfin, je n'ignore pas, Monsieur le Député, que nous sommes ici dans le Nord-Caraïbe. Je sais les efforts que vous menez inlassablement pour que cette région surmonte ses retards : Dominique PERBEN m'a dit quel a été votre rôle au cours du grand débat sur l'aménagement du territoire. J'ai souhaité que les départements d'Outre-mer aient toute leur place dans la loi d'orientation et dans le schéma national qui vont être soumis à l'examen du Parlement.
Pour répondre à l'une de vos préoccupations, j'ai demandé à Dominique PERBEN d'étudier les moyens de rendre les services de l'Etat plus présents dans cette partie du département.
J'ai notamment décidé que les ministres concernés, Monsieur Charles PASQUA, Ministre d'Etat, Ministre de l'Intérieur et de l'Aménagement du Territoire et Monsieur Dominique PERBEN, Ministre des Départements et Territoires d'Outre-Mer examineront la possibilité de créer à Saint-Pierre une nouvelle sous-préfecture. Le débat sur l'aménagement du territoire doit permettre d'apprécier, en associant toutes les collectivités locales concernés, l'opportunité de cette décision qui à priori, recueille mon assentiment.
En outre, conformément à vos voeux le Gouvernement apportera les postes d'enseignants nécessaires pour ouvrir un nouveau lycée polyvalent dans le Nord Caraïbes, que la région s'apprête à construire.
Vous m'avez posé de nombreuses questions auxquelles je répondrai par écrit rapidement.
Néanmoins qu'il me soit permis de préciser que le Gouvernement entend mettre fin à la situation de précarité juridique et parfois physique qui résulte des incertitudes sur le régime de la propriété dans la zone des "cinquante pas géométriques". Je charge Monsieur Dominique PERBEN de préparer une mesure législative à cet effet, qui permettra notamment de régler le problème de l'attribution des aides de l'Agence Nationale d'Amélioration de l'Habitat aux riverains des "cinquante pas".
S'agissant de la situation des personnels communaux non titulaires, le préfet examinera avec bienveillance les spécificités des conditions d'emploi dans le respect d'un équilibre avec le statut de la fonction publique.
Vous avez souligné l'importance du logement social. Le Gouvernement en est parfaitement convaincu, d'où ma décision d'octroyer 500 MF supplémentaires sur les cinq prochaines années pour accroître l'offre de logements et de modifier à cette occasion leurs règles d'attribution dans les Départements et Territoires d'Outre-Mer.Mes chers amis, cette visite en Martinique est pour moi l'occasion de vous redire la confiance qu'ensemble, le Gouvernement et sa majorité, portent aux départements d'Outre-mer, la place éminente qu'ils occupent au sein de la Nation. Je vous demande, à mon tour, de vous fier à ma détermination : sachez combien le développement de la Martinique me tient à coeur et je suis convaincu qu'avec votre aide, ensemble, nous le mèneront à bien.