Texte intégral
Mesdames et Messieurs les Maires,
Vous venez d'avoir quelques heures de débat autour des dispositions de la loi du 13 décembre 2000 relative à la solidarité et au renouvellement urbain (SRU).
Permettez-moi tout d'abord de vous rappeler les principes fondamentaux qui ont guidé l'élaboration de cette loi et ses objectifs majeurs.
Je reviendrai ensuite sur les dispositions de la loi qui soulèvent le plus de questions parmi vous, si j'en juge par le nombreux courrier qui nous parvient à Jean-Claude GAYSSOT et moi-même.
La loi SRU a profondément renouvelé le Code de l'urbanisme et a apporté des avancées décisives dans le domaine de l'habitat.
Son objectif principal est de promouvoir un aménagement plus cohérent, plus solidaire et plus soucieux du développement durable.
Sa mise en oeuvre nécessite une véritable "révolution culturelle" de la part de tous les acteurs de l'aménagement, au premier rang desquels se trouvent les maires et leurs services.
Depuis plusieurs décennies, l'Etat a développé des politiques sectorielles, qui avaient toutes leur cohérence interne :
- une politique de l'urbanisme, fondée sur la loi d'orientation foncière de 1967, qui a fourni le cadre des documents d'urbanisme largement présents aujourd'hui (schémas directeurs, POS, ZAC),
- une politique de l'habitat, qui s'est développée à travers la programmation du logement social, les opérations programmées de l'habitat (OPAH) et les programmes locaux de l'habitat,
une politique de transports, fondée sur la loi d'orientation sur les transports intérieurs (LOTI) de 1982, instituant notamment les plans de déplacement urbains (PDU).
Chacune de ces politiques s'est développée selon sa propre logique.
C'est bien la loi SRU qui a, pour la première fois, considéré l'aménagement des villes dans son ensemble, en traitant simultanément de l'urbanisme, de l'habitat et des transports, en donnant une véritable cohérence à l'ensemble des politiques.
I- La loi s'appuie sur trois principes fondamentaux :
1- L'exigence de solidarité :
- pour assurer le développement cohérent des territoires urbains, péri-urbains et ruraux qui forment ensemble un même bassin de vie, d'habitat et d'emploi,
- pour engager, dans les quartiers anciens et dégradés, des actions fortes de renouvellement urbain,
- pour assurer la mixité sociale dans des villes plus équilibrées, par une plus grande diversité de l'habitat à l'échelle des quartiers, communes et agglomérations, dont l'Etat doit être le garant.
2- Le développement durable et la qualité de la vie :
- pour que le développement des villes soit respectueux des territoires qui les entourent, dans un souci d'économie de l'espace,
- pour intégrer dans le développement économique et les choix d'urbanisation, des enjeux de qualité urbaine et de protection de l'environnement,
- pour donner une priorité aux autres modes de déplacement que l'automobile.
3- L'exigence de démocratie, dans le respect de la décentralisation :
- le droit doit être lisible : les règles doivent donc être simplifiées et rendues accessibles à chacun, en privilégiant le dialogue et le débat public sur la procédure,
- les responsabilités respectives de l'Etat et des collectivités locales dans l'application des orientations nouvelles données aux politiques urbaines doivent être claires, avec la responsabilité première donnée aux collectivités territoriales dans la mise en oeuvre, à la bonne échelle.
II- La loi SRU s'articule autour de trois objectifs majeurs :
1- Définir un meilleur équilibre des agglomérations :
Les politiques de l'habitat, des transports, d'aménagement doivent être conçues à la même échelle, de façon cohérente par rapport à un véritable projet d'agglomération, attentif aux équilibres sociaux et territoriaux.
Le schéma de cohérence territorial (SCOT) est le nouvel outil qui sera porteur de la stratégie globale d'agglomération et qui fédérera les autres documents sectoriels de la politique urbaine.
Cette recherche de cohérence dans les politiques urbaines intègre la mise en uvre d'une politique des déplacements au niveau de l'agglomération, au service du développement durable. Le plan de déplacements urbains doit concerner à la fois les politiques de transports collectifs, de partage de la voirie et de stationnement.
De même, le plan local d'urbanisme (PLU) doit traduire le projet urbain local, appelé le projet d'aménagement et de développement durable, intégrant les actions relatives à l'aménagement des quartiers, au traitement de l'espace public ou à l'environnement, au-delà d'un simple corpus de règles relatives à l'occupation du sol.
2- Réussir la mixité urbaine :
Il n'y aura pas de mixité urbaine et sociale et d'équilibre social de l'habitat sans réalisation de logements sociaux dans les communes où il y en a peu, voire pas du tout. Certaines communes ne peuvent continuer à refuser la construction de logements sociaux. Dans un horizon de 20 ans, chaque commune devrait posséder sur son territoire au moins 20 % de logements sociaux parmi les résidences principales.
3- Assurer une offre d'habitat diversifiée et de qualité :
La loi conforte le statut des logements sociaux, renforce la solidarité entre bailleurs sociaux (financement de la CGLLS), et crée les conditions d'un dialogue régulier entre organismes HLM et locataires (plans de concertation locative).
La qualité de l'habitat privé, essentielle pour le développement d'une offre de logement diversifiée, nécessite d'être souvent améliorée pour répondre pleinement à cet objectif. La loi a réformé les procédures de lutte contre l'insalubrité et le péril, renforcé les capacités d'intervention dans les copropriétés dégradées et unifié les modes d'interventions publiques en faveur de l'habitat privé (grande ANAH).
III- Je souhaiterai maintenant aborder les principales questions que vous vous posez.
1- Sur les schémas de cohérence territoriale (SCOT)
La cohérence affichée par la présente loi entre les politiques d'urbanisme, d'habitat et de transport doit d'abord se manifester dans les agglomérations, où vivent 80 % de nos concitoyens.
Pour respecter cette cohérence, il est indispensable que la discussion sur les projets importants (centre commercial, grand équipement, nouvelle zone d'habitat ou d'activités) ait lieu à l'échelle de l'agglomération, et non au niveau de la seule commune qui accueille le projet.
C'est pourquoi la loi a voulu inciter fortement les communes des agglomérations et de leur proche périphérie à participer à un SCOT. C'est la distance de 15 km qui a été retenue pour qualifier la proche périphérie de l'agglomération.
D'autre part, un an a été laissé aux communes, après la publication de la loi, pour délimiter un périmètre et constituer un EPCI compétent, d'où la date de 1er janvier 2002, tant contestée.
Mais cette date ne constitue en aucune façon un couperet, au-delà duquel plus rien n'est possible si un SCOT n'a pas été approuvé.
Comme vous avez dû l'évoquer en début de matinée, les zones constructibles au 1er janvier le demeurent après cette date.
C'est seulement dans l'hypothèse où vous souhaitez ouvrir à l'urbanisation un nouveau secteur, en l'absence de SCOT, qu'il vous faudra au préalable recueillir l'avis de l'EPCI compétent pour élaborer le SCOT ou l'accord du Préfet, si l'EPCI n'est pas encore constitué.
Les Préfets et les DDE ont reçu des instructions pour s'assurer de l'opportunité de l'urbanisation envisagée au regard de l'équilibre du développement de l'agglomération et ne pas bloquer les projets qui répondent aux seuls besoins de la commune.
Je voudrais également souligner que la délimitation d'un périmètre de SCOT avant le 1er janvier 2002 n'est pas une obligation, pas plus que la constitution de l'EPCI.
Mieux vaut prendre le temps nécessaire pour déboucher sur une coopération intercommunale fructueuse, plutôt que conclure à la va-vite les négociations sur un EPCI pour respecter la date fatidique du 1er janvier 2002, qui, je le répète, n'est pas synonyme de "fin de l'urbanisation".
C'est bien aux communes ou aux intercommunalités compétentes qu'il appartient de prendre l'initiative de proposer un périmètre qu'elles jugent adapté. Celui-ci sera arrêté par le Préfet, dès lors que les règles de majorité requise seront atteintes.
2- Sur les plans locaux d'urbanisme (PLU)
Le passage du POS au PLU a aussi suscité beaucoup de questions.
La différence principale entre les deux documents réside dans le plan d'aménagement et de développement durable, qui expose les intentions de la commune pour les années à venir. Il est le document de référence de la commune en matière d'aménagement.
S'il peut être relativement complexe à élaborer pour une grande commune, il peut être simple pour une petite commune. La nécessité de produire ce plan d'aménagement et de développement durable, si une commune révise son POS, ne doit pas constituer un frein à la révision.
Ce PADD doit être un document destiné à l'ensemble des citoyens. Il répond à une exigence accrue de démocratie dans les politiques d'urbanisme.
Je voudrais sur ce thème mettre fin à quelques idées répandues à tort :
- il n'est pas nécessaire d'attendre l'approbation d'un SCOT pour mettre en oeuvre la révision d'un PLU dans le périmètre du SCOT.
- pendant la révision d'un PLU, des modifications ponctuelles du document ancien demeurent possibles.
- dans la plupart des cas, on peut modifier une ZAC sans entraîner la révision du PLU.
Le champ d'application de la modification du POS ou du PLU a toutefois été réduit sur un point : il n'est plus possible d'ouvrir à l'urbanisation des terrains, même de faible superficie, situés en zones naturelles protégées, au titre de l'agriculture ou des paysages, par une procédure de modification : une révision est désormais nécessaire.
Il s'agit là d'une mesure de renforcement de la protection des zones naturelles, qui va de pair avec une délimitation judicieuse de celles-ci, à l'occasion de l'élaboration ou de la révision d'un PLU.
De même, la loi SRU a supprimé la possibilité d'appliquer par anticipation les dispositions d'un POS en cours de révision. Ce dispositif , reconduit plusieurs années, pouvait conduire à une instabilité juridique et à des documents d'urbanisme jamais finalisés, qui nuisaient à la transparence des décisions sur les actes de construire.
La procédure de révision d'urgence, instituée par la loi SRU, permet de répondre à un besoin parfois rapide d'évolution des règles d'urbanisme, tout en respectant la transparence, puisqu'une enquête publique est nécessaire.
3- Sur les cartes communales
La loi a donné aux cartes communales un véritable statut de document d'urbanisme. Elles sont conjointement approuvées par le conseil municipal et le Préfet, après enquête publique.
Document très simple à élaborer, il peut parfaitement convenir à de nombreuses petites communes. Il permet également aux communes qui le souhaitent de devenir compétentes pour délivrer les permis de construire, comme les communes dotées d'un POS ou d'un PLU.
Mais le maintien de la compétence de l'Etat en matière de permis de construire est également possible.
4- Sur la participation pour voie nouvelle et réseaux (PVNR)
Je voudrai insister sur le fait que le nouveau dispositif de financement de l'aménagement avantage les communes.
Avant la loi SRU, seule la première personne qui demandait un permis de construire nécessitant l'extension de réseaux pouvait se voir imposer une participation à leur réalisation.
Pour les voies, aucune participation ne pouvait être légalement exigée en dehors des ZAC ou des plans d'aménagement d'ensemble.
Des participations illégales ont souvent été demandées et plusieurs communes ont été parfois contraintes de rembourser des sommes indûment perçues.
Le nouveau système instauré par le loi apporte la sécurité juridique et là encore une nécessaire transparence dans le financement de l'aménagement.
Je vous engage donc vivement à engager une réflexion sur les secteurs de votre commune que vous souhaitez développer et à prendre la délibération permettant l'institution de la PVNR.
(source http://www.logement.equipement.gouv.fr, le 14 février 2002)