Texte intégral
C’est avec plaisir que je vous retrouve, près d’un an après notre première rencontre.
Mes obligations m’ont contraint à intervenir devant vous plus tôt que prévu et à bouleverser quelque peu le programme de cette matinée. Elles m’obligent aussi à intervenir plus brièvement que je ne le souhaitais. Mais avant toutes choses, j’ai tenu à venir une nouvelle fois à votre rencontre.
Le secteur dans lequel vous œuvrez quotidiennement est au cœur de l’actualité, parce que sujet aux événements quotidiens incessants, mais aussi parce qu’il fait l’objet actuellement de textes législatifs importants.
Un grand hebdomadaire titrait jeudi dernier sur « la peur dans les assiettes ». Les principales craintes des Français concernent les antibiotiques, les anabolisants, les organismes génétiquement modifiés, les retombées radioactives.
Ces thèmes font votre métier au quotidien et le manque de confiance de nos concitoyens sur les contrôles alimentaires, que révèle le sondage, doit tous nous interpeller.
Mêmes si ces inquiétudes, j’en suis personnellement persuadé, ne sont pas fondées, il me semble nécessaire de les prendre en compte et d’éviter en particulier les situations qui peuvent être interprétées inévitablement comme un manque de transparence. J’estime donc nécessaire de préciser les missions de chacun dans le secteur de la sécurité des aliments.
La première des réponses, et je l’avais déjà évoquée lors de notre première rencontre, concerne l’Agence française de sécurité sanitaire des aliments.
La création de cette Agence est prévue par la proposition de loi relative au renforcement de la veille sanitaire et du contrôle de la sécurité sanitaire des produits destinés à l’homme.
Cette proposition de loi, après deux lectures au Parlement, a fait l’objet d’une commission mixte paritaire le 12 mai 1998 dont les conclusions ont été adoptées par le Sénat le 4 juin 1998. Elle devrait prochainement être soumise à l’Assemblée.
L’Agence française de sécurité sanitaire des aliments sera placée sous la triple tutelle des ministres chargés de la Santé, de l’Agriculture et de la Consommation et intégrera le Centre National d’Études Vétérinaires et Alimentaires dans toutes ses composantes. Les autres laboratoires de référence intervenant en matière de sécurité sanitaire des aliments seront mis å disposition de l’Agence en tant que de besoin.
L’agence sera chargée de missions d’alerte, de veille et de recommandations. À ce titre, elle pourra recommander aux ministres concernés, la mise en œuvre de contrôles spécifiques, mais n’aura pas de pouvoir hiérarchique direct sur les services déconcentrés.
Elle constituera un organisme qui a vocation à rassembler toutes les commissions d’expertises en matière de sécurité sanitaire des aliments. Elle donnera un avis sur les dispositions législatives et réglementaires dans ce domaine, y compris en matière de santé animale.
L’intégration de l’Agence nationale du médicament vétérinaire aboutit à transférer la délivrance des autorisations de mise sur le marché de médicaments vétérinaires au directeur de l’Agence française de sécurité sanitaire des aliments.
Les dispositions de la loi entreront en vigueur à la date de publication du décret nommant son directeur général ou au plus tard le 31 décembre de cette année. Par ailleurs, cette loi fera l’objet d’un réexamen par le Parlement dans un délai de 5 ans.
Je retiens parmi les éléments essentiels de cette proposition de loi que le Gouvernement, comme le Parlement se sont accordés à considérer que le secteur de l’alimentation méritait une agence de sécurité sanitaire différente de celle en charge des produits de santé. C’est la reconnaissance que la sécurité sanitaire des aliments nécessite une approche particulière de la fourche à la fourchette. Je retiens également, que le principe de la séparation entre l’évaluation et la gestion des risques a été globalement respecté et que cette agence, placée sous triple tutelle ministérielle, ne pourra qu’améliorer les synergies entre les différents services de l’État en charge de la sécurité sanitaire des aliments.
Enfin, elle pourra rendre publics ses avis, ce qui constitue une importante garantie de transparence largement souhaitée par les consommateurs.
Dans le même temps, le pouvoir de contrôle doit être renforcé dans certains domaines de votre compétence, contrôles en élevage, contrôles à l’importation, contrôles à l’égard des produits végétaux et de leurs intrants notamment dans le cadre de la biovigilance.
Le Gouvernement a décidé en novembre dernier d’autoriser la mise en culture de variétés de maïs O.G.M. Cette autorisation était accompagnée de la décision de mettre en place un système de biovigilance et de réaliser le contrôle des essais de recherche-développement.
Les dispositifs de biovigilance sont en place pour cette campagne. Les agents de la protection des végétaux, en assurant le secrétariat du Comité de pilotage, en réalisant des suivis sur le terrain en partenariat avec des Instituts techniques et en contrôlant les essais de recherche/développement, sont fortement impliqués. C’était, le vœu que vous aviez exprimé il y a un an lors de notre première rencontre.
Mais le dispositif actuel repose sur une base volontaire. Il convient de le consolider par une base réglementaire.
Notre législation doit intégrer les nouvelles directives communautaires et doit donc comprendre de nouvelles dispositions relatives à la biovigilance, à la traçabilité et à la sécurité des aliments. Je souhaite que le Parlement puisse s’en saisir avant la fin de l’année, bien que le calendrier législatif soit très chargé.
Je veux maintenant, avec vous, évoquer un sujet qui me tient particulièrement à cœur, à savoir le projet de loi d’orientation agricole et plus particulièrement les dispositions concernant le contrat territorial d’exploitation. Ce contrat n’est pas une nouvelle modalité technique de gestion de l’agriculture mais l’affirmation d’une autre politique agricole. Il doit permettre l’expression de la rencontre entre les objectifs poursuivis par l’État en matière agricole et les projets individuels et collectifs des agriculteurs et des citoyens. Il reconnaît la multifonctionnalité de l’agriculture.
Certains de ces objectifs visent à favoriser une meilleure prise en compte par les agriculteurs de la préservation et du renouvellement des ressources naturelles. Ceci peut se décliner notamment en programme d’actions sur la réduction des intrants ou la mise en place de systèmes de production intégrés ou des méthodes de production particulières pour un objectif de qualité spécifique. Pour l’élaboration de ces programmes, j’aurai besoin de vos compétences.
Je vais laisser là les préoccupations directement sanitaires pour aborder le projet de loi relatif aux animaux dangereux et errants et à la protection des animaux. Ce projet a été élaboré dans le souci de répondre, par un nouveau dispositif, à plusieurs préoccupations importantes surtout liées à la cohabitation de l’homme et de l’animal.
Il s’agissait, en premier lieu, de faire face à l’augmentation des chiens potentiellement dangereux, notamment en milieu urbain, avec les risques qu’ils représentent pour la sécurité publique et les élevages clandestins qu’ils supposent. L’engouement pour ces types de chiens peut contribuer à un climat d’insécurité et se solde, dans les faits, par un accroissement des accidents souvent graves. Le projet de loi propose donc des mesures qui permettent à la fois de rééquilibrer le rapport homme-chien et de sanctionner sévèrement la négligence ou l’utilisation délictuelle de certaines catégories de chiens dits d’attaque, comme les pit-bulls.
La deuxième préoccupation a été de réorganiser de façon plus rationnelle les fourrières et les refuges destinés à recueillir les animaux errants. Leur statut juridique a donc été défini de façon précise et les obligations des communes dans ce domaine sont ainsi confortées. En outre, les possibilités d’adoption rapide des chiens et des chats en refuge sont accrues par une réduction des délais de garde.
Cette loi qui a pour objectif principal de renforcer les prescriptions de protection animale, plus particulièrement dans un domaine qui touche à la vie quotidienne, celle de l’animal de compagnie, prévoit de conforter, parallèlement, les pouvoirs des services vétérinaires dans ce domaine. La loi retient donc une extension des possibilités d’accès des fonctionnaires aux locaux où se trouvent des animaux, et permet désormais une possibilité de retrait en cas de mauvais traitements, ce qui rendra globalement l’action des services vétérinaires beaucoup plus efficace qu’auparavant.
Le dernier objectif de ce texte consiste à fixer l’agrément des transporteurs en application de la directive communautaire de 1995.
Ainsi, cette loi redéfinit et accroît vos missions dans un secteur qui est de plus sensible et au cœur des préoccupations du grand public.
Comme vous l’aurez constaté, les chantiers ouverts, auxquels s’ajoute la gestion ordinaire des dossiers techniques, nous garantissent une activité plus que soutenue. Je vous remercie et, à travers vous, chacun des membres de vos équipes, du travail accompli jusqu’ici et je n’en doute pas, des efforts qui seront déployés à l’avenir au service des missions de ce ministère et, donc, de l’intérêt général.
Je sais que vous attendez mes premières réactions sur le rapport que j’avais confié aux quatre grands sages de ce Ministère animant le COPERCI, sur l’organisation des services déconcentrés du ministère au regard des missions de sécurité alimentaire.
Je dois le dire, la lecture du rapport qui m’a été remis me semble confirmer la pertinence du choix qui s’est porté sur les quatre sages, qui, grâce à une confrontation d’idées fructueuses, aboutissent à des propositions équilibrées permettant d’assurer, dans les services déconcentrés de ce ministère, l’impartialité et la lisibilité des fonctions de contrôle tout en développant la synergie des moyens, la coopération entre les services et le croisement des cultures et des métiers.
Sur le premier axe, il convient d’achever le fléchage des moyens dont sont dotés les services vétérinaires. Il l’est réellement depuis le début de cette année pour le budget de fonctionnement. Il reste à l’organiser pour la répartition des personnels administratifs. Je demanderai donc à la direction générale de l’administration et à la direction générale de l’alimentation de fixer, sur avis des IGIR et des CGIR, une répartition équilibrée des administratifs entre le secteur classique des DDAF et les services vétérinaires. L’alignement sur ces dotations d’objectifs pourrait s’inscrire dans une progressivité de l’ordre de trois ans.
Par ailleurs, l’affichage d’une relation technique directe entre les parties prenantes de la mission de contrôle (ministre, DGAL, préfet, DSV) sera réaffirmé.
Bien entendu, cette identification claire de la chaîne de contrôle a pour corollaire l’obligation d’une information constante des DDAF et des DRAF.
Le deuxième axe de progrès, celui des synergies, invite à améliorer l’approche complémentaire et pluridisciplinaire d’une série de sujets tenant notamment à la promotion de la qualité des produits alimentaires et au conseil sur les techniques de production et de conservation, l’identification du cheptel, la prophylaxie et l’attribution des aides à l’élevage, la protection de l’environnement, le dispositif national de sécurisation de l’équarrissage, la valorisation des filières agro-alimentaires dans la gestion des futurs contrats territoriaux d’exploitation.
Je demanderai aux DDAF et aux DSV, dans tous les départements, de formaliser des programmes d’action conjoints précisant l’organisation du travail en commun. Cette formalisation devrait être entreprise pour la première fois pour l’année 1999, en même temps que se mettrait en place la gestion identifiée des moyens.
En ce qui concerne le niveau régional, les rapporteurs recommandent le maintien au sein des DRAF du service de la protection des végétaux dont le rôle devrait s’accroître et suggèrent l’expérimentation d’un échelon régional vétérinaire sous la forme d’une responsabilité de coordination technique confiée au DSV du chef-lieu de région.
Je me réserve d’approfondir cette piste intéressante dès l’aboutissement de la discussion du projet de loi sur la biovigilance et la traçabilité des aliments, de façon à bien appréhender l’ensemble des missions nouvelles que ce texte devrait confier à nos services.
Pour revenir aux questions de gestion et d’administration, il y a lieu de réaffirmer et de concrétiser le principe d’un seul service d’administration générale, assurant le service commun d’ordonnancement du budget et correspondant unique pour la gestion du personnel avec l’administration centrale. Et les doublons pouvant exister doivent bien entendu être supprimés.
Cette organisation clarifiée nécessitera par ailleurs une gestion plus dynamique de la mobilité des agents visant à croiser les cultures et les métiers même s’il faut, pour y parvenir, progresser encore dans l’harmonisation des conditions de travail et de rémunération, afin de faciliter les choix d’affectation.
Je retiens également la proposition des rapporteurs concernant le développement d’une action de communication en profondeur pour mieux faire connaître les différents services et les différentes actions liés à la sécurité alimentaire.
Sur l’ensemble de ce dispositif, je demande au directeur général de l’administration d’organiser un comité technique paritaire qui me permettra de disposer de l’avis circonstancié des représentants des personnels, dans l’esprit de concertation que je privilégie depuis que je suis en charge de ce ministère. C’est en fonction des avis rendus par le comité technique paritaire que j’arrêterai les termes d’une circulaire ministérielle destinée à mettre en œuvre les orientations que je viens d’évoquer.
Cette clarification de l’organisation des services déconcentrés de mon ministère marque ma volonté de répondre aux attentes légitimes de ceux qui souhaitent une plus grande lisibilité de l’organisation des missions liées à la sécurité alimentaire mais, par son contenu, elle traduit également ma conviction que l’action de l’État au service du citoyen, du consommateur, de nous tous, donc, trouve sa pleine efficacité dans la complémentarité des missions. Cette position est celle que j’entends porter dans le cadre des travaux interministériels sur la réforme de l’État.
Ces travaux ont débuté depuis le mois de mai sous la houlette du Directeur de Cabinet du ministre chargé de la Fonction publique.
J’ai demandé que l’ensemble des directeurs d’administration centrale s’y impliquent personnellement.
Un groupe de travail traite en particulier du thème de la santé publique. Mme GUILLOU, Directrice Générale de l’Alimentation et M. DEHAUMONT, Président du groupement des directeurs des services vétérinaires, y représentent le ministère.
Il nous faut faire preuve d’une vigilance constante dans cet exercice afin de faire valoir, en toutes occasions, les positions légitimes de ce ministère, totalement confortées par la fiabilité avérée de ses services de contrôle.
Cependant, ces services sont parfois l’objet de critiques, mais infondées comme le relate le rapport du COPERCI, au motif que les liens existant avec les services chargés de l’économie des secteurs agricoles entraveraient leur action. Face à ces critiques, il faut opposer les arguments solides du schéma d’organisation que nous allons arrêter, de la compétence dont nous disposons, de la fiabilité et de l’impartialité des contrôles exercés par les services vétérinaires et de la protection des végétaux. Ce sont des valeurs très largement partagées au sein de ce ministère.
Je fais une totale confiance à nos représentants et à M. de LAVERNEE, chargé de la modernisation et de la déconcentration et qui, à ce titre, pilote ces travaux pour le ministère, pour faire utilement valoir nos positions au niveau interministériel.
Toutefois, il va de soi qu’il convient de rechercher la meilleure coordination possible, sous l’autorité des Préfets, entre tous les services qui, à l’échelon départemental et régional, sont chargés des contrôles de l’alimentation. C’est pourquoi l’élaboration de plans de contrôle concertés et une large diffusion de leurs résultats auprès du public, me paraissent notamment prioritaires.
Je ne doute pas que les travaux interministériels actuellement entrepris puissent, à leur terme envisagé pour la fin de l’année, aboutir à des propositions intéressantes qui, sans bouleverser l’organisation actuelle, pourraient créer les conditions de la coopération que nous souhaitons.
Je vais devoir terminer là mon intervention.
Mais avant cela, reprenant ce que j’ai dit devant le CTP Ministériel consacré au projet de budget 1999, je vous indique que la sécurité alimentaire est l’une de mes quatre grandes priorités dans le cadre des négociations budgétaires actuelles.
Et j’ai déjà eu l’occasion de défendre, devant mon collègue chargé du budget, les propositions faites à ce titre.
Je sais pourvoir compter sur la mobilisation de chacun de vous, au service d’une cause d’intérêt général, dans le cadre des missions que m’a confiées le Premier ministre.
Je sais pouvoir compter sur la mobilisation de chacun d’entre vous, au service d’une cause d’intérêt général, dans le cadre des missions que m’a confiées le Premier Ministre.