Texte intégral
Monsieur le Président du Conseil Régional,
Madame et Messieurs les Présidents des Conseils Généraux,
Messieurs les Députés,
Messieurs les Sénateurs,
Mesdames, Messieurs les Directeurs,
Mes chers confrères,
Mesdames et Messieurs,
C'est avec grand plaisir que je participe à cette réunion que j'ai tenue à organiser, ici à Perpignan, pour faire un premier bilan de l'expérience qui a débuté en décembre dernier sur la modernisation du financement et de la tarification des établissements de santé.
J'ai souhaité, en effet, prendre personnellement la parole devant vous, pour vous dire combien je suis attaché à cette démarche lancée dans votre région, car elle est déterminante pour l'évolution de l'ensemble de l'hospitalisation.
La décision d'engager cette expérimentation est d'abord le fruit d'un constat, celui de mutations et contraintes considérables auxquelles nous sommes confrontés depuis ces dernières années.
Ces mutations, dues autant à l'évolution des comportements sociaux et des tendances démographiques, qu'au formidable progrès des méthodes diagnostiques et thérapeutiques, permis notamment par la mise en œuvre des nouvelles techniques de l'imagerie et de la biologie, ont modifié profondément le visage de l'hôpital.
Jamais les préoccupations de notre société face au développement de la science n'ont été aussi fortes, comme en témoigne la loi sur la bioéthique que le Parlement vient d'adopter.
Jamais les risques d'exclusion sanitaire et sociale liés à l'apparition de nouveaux fléaux, comme le SIDA, et à la situation économique n'ont été aussi grands, conduisant l'hôpital à réaffirmer sa dimension sociale.
Toutes ces mutations surviennent dans un contexte où la sécurité sociale traverse une crise financière profonde accentuée, lors des derniers exercices, par la situation économique générale.
Notre système de protection sociale est en effet aujourd'hui menacé, et avec lui un facteur de cohésion social essentiel.
C'est pour préserver les conditions du progrès social que le Gouvernement a adopté, peu de temps après son installation, une série de mesures, pour enrayer la dégradation financière de la sécurité sociale, réparties équitablement entre les assurés, la médecine de ville et les établissements de soins.
Plus récemment, un pas nouveau vient d'être franchi avec l'adoption par le Parlement de la loi sur la sécurité sociale qui vise à conforter la pérennité de cette institution grâce à une clarification des responsabilités entre ses différents composantes et ses partenaires.
Cet effort de redressement doit aujourd'hui s‘accompagner de la définition par le Gouvernement d'un programme ambitieux d'adaptation de notre dispositif hospitalier et de modernisation de sa gestion.
Pour tenir compte des progrès de la médecine, de l'évolution des besoins de la population, des exigences de notre société en matière d'accès aux équipements de santé et de sécurité des soins, l'adaptation de nos établissements de santé, publics comme privés, à laquelle je suis très attaché, est devenue indispensable.
Dans cette perspective, il est indispensable de poursuivre la reconversion de nos structures de soins, notamment de court séjour vers de nouvelles formes de prise en charge comme les alternatives à l'hospitalisation, ou vers les soins de suite ou de longue durée.
De même, le renforcement de la sécurité des soins, en particulier dans le domaine de l'accueil des urgences, de la périnatalité et des activités anesthésiques, ainsi que le développement de l'évaluation de la qualité des soins, sont des objectifs prioritaires, si nous voulons offrir à nos concitoyens toutes les garanties nécessaires au bon déroulement de leur hospitalisation.
C'est dans cette perspective, enfin, que doivent être recherchées une plus grande cohérence entre les acteurs publics et privés, et une plus juste répartition des équipements favorisant l'accessibilité aux soins.
Mais cette politique d'adaptation ne peut aboutir que si elle s'accompagne d'une évolution des règles de notre système de santé, afin d'accélérer ce mouvement de rénovation tout en responsabilisant davantage les professionnels de santé.
C'est pourquoi, peu de temps après mon installation, j'ai décidé d'engager très rapidement une réflexion sur la modernisation de la gestion dans les hôpitaux publics. Elle a donné lieu a un rapport que m'a remis Mme Esper.
La mise en œuvre des conclusions qui en découlent, va permettre effectivement, au sein des établissements, de responsabiliser davantage les acteurs, de décloisonner le fonctionnement des différentes instances entre-elles, et d'accroître l'efficacité de la gestion des ressources budgétaires.
Je viens, à cet effet, de solliciter la Fédération Hospitalière de France et les conférences hospitalières pour lancer plusieurs initiatives À la suite de ce rapport. Une commission d'experts va être constituée pour assurer la coordination et le suivi des travaux qui seront menés.
Le financement des établissements de soins ne pouvait être tenu à l'écart de ce souci de modernisation.
Vous le savez, celui-ci fait l'objet de sévères critiques. Il présente l'inconvénient majeur de pénaliser les établissements les plus dynamiques, de laisser perdurer les rentes de situation, d'encourager la production d'actes, et de susciter une concurrence inutile.
Il n'est plus possible de maintenir en l'état des règles qui ne permettent pas de s‘assurer d'une juste et d'une bonne utilisation des ressources distribuées, alors que la réorganisation de l'offre de soins impose des choix et une plus grande rationalisation.
C'est pourquoi, le lancement de cette expérience sur la modernisation du financement et de la tarification des établissements de santé constitue un enjeu majeur.
Cette expérience est d'abord un aboutissement.
Aboutissement d'une formidable expérience acquise par notre administration et nos établissements, depuis la réforme du financement des hôpitaux intervenus au début des années 80, dans le domaine du financement des prestations de soins.
C'est ainsi qu'à ce jour, tous les établissements de court séjour de plus de 100 lits, c'est à dire plus de 500 établissements publics, sont dotés d'un département d'information médicale chargé de collecter les informations médicales relatives aux séjours des patients.
Malgré les efforts importants restant à faire pour assurer l'exhaustivité et la qualité des données médicales recueillies, la mise en place de ces départements constitue une avancée très significative, car elle a permis la reconnaissance de la place primordiale de l'information médicale, dans les hôpitaux, pour opérer des choix, et asseoir un nouveau mode de financement.
De même, 84 établissements de soins privés participent activement à l'expérimentation initiée par la loi de juillet 1991 qui préconisait la tarification à la pathologie, et possèdent, aujourd'hui, une véritable expertise dans ce domaine.
Aboutissement, aussi, d'un travail méthodologique très important fourni par de nombreux chercheurs et professionnels de la santé, et qui a porté, pour l'essentiel, sur les classifications médico-économiques, les techniques de calcul des coûts, les méthodes de répartition des ressources.
Aboutissement, enfin, de la prise de conscience que notre pays ne peut plus différer cette démarche, sauf à envisager, compte tenu des déficits sociaux, des mesures plus brutales de régulation comptable.
Ce serait, en outre, prendre du retard par rapport à ceux qui, comme l'Allemagne et le Royaume-Uni, tentent actuellement de définir un nouveau mode de financement s'inspirant des méthodes de classification des malades et de leurs pathologies.
L'expérience qui a débuté dans cette région au début de cette année, doit nous permettre de franchir une nouvelle étape capitale avec la mise en place d'un mode de financement plus transparent, plus juste, plus efficace.
Ses objectifs sont simples : comparer les coûts des soins des établissements, et répartir les moyens en tenant compte de l'activité médicale, dans le respect d'une enveloppe déterminée.
Ce projet – notre projet – est ambitieux.
Jamais une expérience n'a été aussi loin, car pour la première fois, cette démarche concerne l'ensemble des établissements de soins qu'ils soient publics ou privés.
Pour la première fois, aussi, une expérience tente de définir une méthode de répartition des ressources s'appuyant sur des informations qui font référence à l'activité médicale.
De même, pour la première fois une expérience s'efforce de concilier une approche en termes de sécurité et de qualité des soins, avec une approche économique.
Pour la première fois, enfin, une expérience est faite à l'échelle d'une région dont le rôle, nous le savons bien, est aujourd'hui fondamental dans de domaine de l'organisation des soins et de la gestion des enveloppes.
Je me réjouis que, depuis le lancement de cette expérience, plusieurs étapes significatives et déterminantes pour son bon déroulement aient, d'ores et déjà, été franchies.
Vous avez réussi, tout d'abord, à mettre en place un cadre institutionnel – commission nationale et commission régionale – permettant de fédérer et d'associer, effectivement, l'ensemble des acteurs au déroulement de cette expérience.
J'ai pu constater que ce cadre de travail était devenu rapidement un lieu d'échanges et de réflexions, témoignant ainsi de votre souci à tous de participer pleinement à cette expérience.
Vous avez ensuite su rassembler dans une charte, acceptée par chacun d'entre vous, les objectifs, les modalités et le calendrier de cette opération.
À l'évidence, une expérience de cette ampleur ne peut réussir que si, au départ, les axes sont non seulement clairement définis mais aussi partagés et acceptés. Vous avez réussi ce pari.
Vous avez su, en troisième lieu, agir avec souplesse en prenant en compte les évolutions méthodologiques intervenus, et en mettant en place des dispositifs permettant la poursuite de l'enrichissement de l'expérience.
Je pense notamment aux modifications que vous avez dû faire pour intégrer la dernière version du catalogue des actes médicaux, ce qui était souhaité, en particulier, par les médecins afin d'obtenir une description plus fine de l'activité médicale.
Je pense aussi à la procédure de validation des données médicales et de contrôle de la qualité des Résumés de Sortie Standardisés (RSS) que vous venez de mettre en application, et qui est indispensable pour pouvoir disposer à terme d'un système d'allocation des ressources reposant sur des données fiables.
Vous avez, enfin, franchi la quatrième étape en engageant parallèlement à la collecte des données médicales, les réflexions nécessaires pour répondre aux questions qui se posent, et conforter ainsi l'expérience.
Je fais allusion au groupe de travail chargé d'élaborer un guide méthodologique sur le traitement des données comptables qui permettra d'isoler les moyens budgétaires des seules activités médicales entrant dans le champ de l'expérimentation, et d'ajuster les budgets sur la base de ces dernières.
Je fais également allusion aux premières réflexions menées sur l'identification des charges qui relèvent des obligations du service public hospitalier comme l'enseignement, la recherche ou bien encore les urgences.
Cette question est, j'en suis conscient, délicate. Mais il est indispensable de la traiter non seulement pour pouvoir comparer les établissements entre eux, mais aussi pour mieux apprécier les moyens alloués aux différentes missions qui incombent aux établissements de soins.
Que chacun soit rassuré, il ne s'agit pas au travers de cette clarification de remettre en cause des activités au cœur même de l'hôpital, et qui en ont fait sa grandeur.
Il s'agit, en réalité, de mieux cerner la nature des efforts accomplis, afin de renforcer, en toute clarté, les missions propres aux établissements de santé.
Le franchissement dans un contexte parfois difficile, je le sais, de ces différentes étapes, et le bilan qui peut en être fait dès aujourd'hui montrent à l'évidence que les conditions sont réunies pour poursuivre avec efficacité le travail entrepris.
Je profite de cette occasion pour remercier tous ceux qui par leurs efforts, leurs réflexions, leur souci de rigueur, leur sens du dialogue et de l'animation, ont contribué à ces premières étapes décisives.
Je voudrais en particulier m'adresser aux représentants des différentes conférences et syndicats, à la Fédération Hospitalière de France, aux Fédérations des établissements privés lucratifs et non lucratifs, aux organismes d'assurance maladie, ainsi qu'aux services de l'État, pour leur témoigner ma satisfaction face à leur adhésion et leur volonté commune d'aboutir.
Je n'oublie pas non plus tous ceux qui dans votre région, responsables d'établissements, médecins, personnels et leurs organisations syndicales, services déconcentrés et de l'assurance maladie œuvrent à la réussite de cette entreprise.
Je profite de cette circonstance pour manifester, une nouvelle fois, tout mon appui à la mission ministérielle qui me rend compte fréquemment de l'avancée de vos travaux.
Votre tâche n'est pas facile; mais l'approche pragmatique des problèmes, et le souci de conciliation doivent à tout prix être préservés pour assurer la bonne marche de cette expérience.
La diversité des points de vue que vous représentez et les débats qui en découlent ne doivent pas être regardés comme des freins, mais plutôt comme des atouts et un enrichissement pour construire la réalité de demain.
Il est fondamental que cette expérience débouche, et je souhaite que tout soit mis en œuvre pour que le calendrier défini puisse être respecté.
Il est fondamental aussi que cette expérience débouche très rapidement sur des mesures pratiques, afin que dès le prochain exercice budgétaire puissent être tirés les premiers enseignements de l'expérience.
Nous avons en ce domaine le devoir d'aboutir rapidement. Nous ne pouvons plus attendre, si nous voulons éviter une dégradation irréversible de notre système de soins.
Personne ne comprendrait que le souci de maîtrise des comptes sociaux ne s'accompagne pas d'une réflexion sur les conséquences du budget global et de la tarification des établissements privés, ainsi que sur une plus juste répartition des moyens des établissements de santé.
Il n'est plus acceptable en effet que les règles de financement ne viennent pas accompagner une organisation des soins plus cohérente, et la mise en place d'un réseau de soins coordonné évitant les doubles emplois dispendieux.
Il n'est plus acceptable non plus que nos règles de financement ne prennent pas en compte la nature et le volume des pathologiques traitées par les établissements de santé, et ne favorisent pas la recherche d'une plus grande efficience.
Soyez assurés que les résultats obtenus au travers de cette expérience seront analysés et discutés. Il n'est certes pas question à partir, des observations faites, d'en tirer mécaniquement les conséquences. Il conviendra le moment venu de prévoir les modalités d'accompagnement et de mise en œuvre des résultats afin qu'aucun intérêt ne soit lésé.
Je suis convaincu d'ailleurs que la gestion médicalisée des ressources permettra d'établir de nouvelles relations entre les établissements, leur tutelle et l'assurance maladie. Je suis persuadé aussi que cette approche aura pour conséquence de favoriser le développement de relations plus contractuelles et performantes au sein des établissements.
Une entreprise de cette ambition suppose des objectifs clairs, et une approche pragmatique pour régler au fur et à mesure les questions qui se posent. Seule cette démarche peut nous permettre d'aboutir et être couronnée de succès.
Je sais que les difficultés sont encore nombreuses. C'est pourquoi, je compte sur vous et votre engagement. En retour, et je le répète, soyez assurés du mien.
Je vous remercie de votre attention.