Texte intégral
Je suis particulièrement heureux de pouvoir signer aujourd’hui avec Monsieur Louis Gallois, président de la SNCF, cet accord-cadre entre le ministère de l’intérieur et la Société nationale des chemins de fer français. Comme vous le verrez, l’attitude de la SNCF est, en effet, à bien des égards, exemplaire pour ce qui concerne la lutte contre l’insécurité des transports.
Quand le Premier ministre s’est engagé, dans son discours de politique générale en juin 1997, à faire de la sécurité un droit égal pour tous les Français, quand il a évoqué le programme « nouveaux services, nouveaux emplois » et l’embauche de 350 000 jeunes, Lionel Jospin a souhaité que 35 000 de ces emplois soient créés dans le domaine de la sécurité :
– 20 000 adjoints de sécurité qui viendraient renforcer les services de la police nationale et permettre le développement de la police de proximité ;
– 15 000 agents locaux de médiation sociale (ALMS) qui seraient proposés aux collectivités locales, aux bailleurs sociaux, aux transporteurs publics pour mener des actions de prévention et de sécurisation venant conforter l’activité de la police et de la gendarmerie.
La montée en puissance de ce dispositif est remarquable : en huit mois, depuis le colloque de Villepinte, la police nationale a procédé au recrutement, à la formation et à l’affectation de 5 375 jeunes adjoints de sécurité. Par ailleurs, 2 543 emplois d’ALMS sont prévus dans les 83 premiers contrats locaux de sécurité déjà signés et 1 126 recrutements ont été réalisés à la date d’aujourd’hui. C’est donc, depuis octobre 1997, 6 500 emplois qui ont été pourvus, et 1 500 de plus qui doivent l’être dans les toutes prochaines semaines.
Ces chiffres prennent une signification particulière, eu égard au nombre des CLS en cours d’élaboration (529 au total) et laissent augurer favorablement de la création des emplois préconisés, d’ici la fin 1999 ou le début de l’an 2000.
Vous avez devant vous les 18 premiers jeunes qui seront au service de la SNCF, ou pour certains de la RATP, dans le cadre de cette convention sur les agents locaux de médiation sociale, que l’on appelle familièrement « les ALMS ».
La création de ces « ALMS » s’inscrit dans un double cadre juridique :
– celui de la loi du 16 octobre 1997 relative au développement d’activités pour l’emploi des jeunes, car ces « ALMS » sont juridiquement des emplois-jeunes ;
– celui des contrats locaux de sécurité.
Cette création se situe au carrefour des politiques de l’emploi et de la sécurité.
Les missions qui vont leur être confiées ne peuvent comporter cependant aucun aspect répressif. Elles sont de trois ordres :
– l’animation préventive ;
– le dialogue et la médiation entre la population et les institutions ;
– la présence dissuasive.
Ces emplois d’ALMS doivent par ailleurs correspondre à des besoins d’utilité sociale tels qu’ils apparaissent dans les diagnostics locaux de sécurité.
Vous l’avez bien compris, être ALMS, c’est donc un « label de qualité », un label qui ne doit être délivré qu’aux emplois ayant un lien réel avec la sécurité et la tranquillité publiques.
Je me réjouis par conséquent que la grande entreprise publique qu’est la SNCF s’engage ainsi dans la démarche des contrats locaux de sécurité lancée par le ministère de l’intérieur. Elle montre là sa volonté de lutter contre le sentiment d’insécurité et de répondre à une des principales attentes des usagers.
C’est au niveau local, dans les relations entre les préfets, les procureurs de la République, les élus et le secteur associatif que s’établira ensuite la concertation qui est l’élément essentiel d’un bon diagnostic et partant, l’élément essentiel d’un bon contrat local de sécurité. C’est à ce niveau que se négocieront les embauches des 500 emplois à temps plein prévues par notre contrat-cadre.
La volonté de la SNCF de s’associer à la démarche du gouvernement permet le développement d’une idée nouvelle, celle des contrats locaux de sécurité « thématiques » et spécifiques aux transports publics. Le travail, actuellement en cours, dans la communauté urbaine de Lille est sur ce point encourageant, tout comme les autres contrats ayant pour thèmes les transports mis en œuvre à Dijon, à Thionville ou à Grenoble.
On m’a cité par ailleurs les actions de votre société pour améliorer la sécurité aux abords de la gare SNCF de Chartres, ou bien votre participation aux travaux de l’observatoire de la sécurité urbaine au Mans, ou encore votre action au sein du conseil communal de prévention de la délinquance de Tourcoing.
Les jeunes, qui sont ici avec nous, sont en train de recevoir une formation, préalablement à leur prise de fonction. Ils connaissent les missions délicates auxquelles ils sont destinés : concourir à une meilleure sécurité des transports, notamment dans les gares et aux abords de celles-ci : veiller à détecter les éventuels dysfonctionnements des équipements de la SNCF et les signaler ; favoriser enfin les déplacements et les demandes de la clientèle. D’un trait, assurer une relation de confiance entre votre société et sa clientèle en matière de sécurité. C’est aussi une bonne manière de revaloriser le ferroviaire et de donner toute sa priorité au transport par voie ferrée.
Une des conditions du succès professionnel de ces jeunes réside dans la formation et l’encadrement dont ils peuvent bénéficier. C’est pourquoi je crois utile de rappeler toute l’importance qu’il faut accorder à cette question.
L’expérience montre en effet qu’un encadrement fort et structuré, confié à des professionnels expérimentés, est un gage de réussite, et permet d’acquérir une véritable qualification professionnelle, seul gage d’une pérennisation ultérieure de l’emploi.
L’association « les compagnons du voyage » créée par la SNCF et la RATP (et qui est l’employeur de ces jeunes) a déjà mené bien des actions de formation ; elle a permis d’offrir de nouveaux services à la clientèle, en faveur notamment des usagers les plus fragiles.
Je sais par ailleurs combien les services de formation de la SNCF ont participé à l’élaboration de la formation initiale et continue des ALMS en y apportant toute leur connaissance et leur compétence et cela me paraît un élément de solidité du dispositif. J’ai souhaité que de son côté, le ministère de l’intérieur s’engage lui aussi à améliorer les modules de formation que suivent ces jeunes et participe activement à leur apprentissage.
J’ai enfin bien noté que la SNCF – même si elle n’est pas l’employeur direct – s’est engagée à permettre à ces jeunes l’accès à un emploi durable. Je ne doute pas en effet que nous allons faire émerger ensemble de nouveaux métiers, pérennes, utiles, voire indispensables dans les années qui viennent.
L’accès à un emploi-jeune, de type ALMS, permet généralement de concevoir l’avenir avec optimisme : cinq ans devant soi, cela permet de voir clair, cela permet de voir loin, cela donne une véritable chance d’insertion.
Pour ces jeunes qui sont en face de nous, il nous revient, Monsieur le président, de faire en sorte que cette chance devienne réalité. Vous en êtes aussi conscient que moi. Il est rassurant de savoir que ces jeunes ont déjà montré leur savoir-faire dans certaines activités comme les emplois-ville, et que l’association « les compagnons du voyage » leur a accordé, dès la fin de leur formation, un contrat de travail à durée indéterminée. J’espère qu’ils pourront mettre à profit cette expérience pour parvenir à la situation qu’ils désirent. Je leur dis « bonne chance » et leur souhaite plein succès dans leur vie professionnelle.
Certes, il y a des valeurs d’éducation civique : la sûreté, comme première des libertés publiques, comme l’avaient définie les rédacteurs de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen ; et l’existence d’un droit, égal pour tous, à cette sûreté ; ce droit qui justifie l’existence de la force publique, celle que la République a instituée pour que notre démocratie soit gouvernée par des lois et non pas par la loi des privilèges, par la loi des plus forts, par la loi de l’argent. (Car la République a pour devoir de veiller à ce que les plus fragiles, les plus démunis, ne soient pas à la merci des plus forts ou des plus fortunés ; mais que chacun respecte la loi commune.) Certes, il y a les agents de contrôle de la SNCF et les cheminots auxquels je veux rendre hommage, à travers la défense de service public.
Mais vous avez ici, Mesdames et Messieurs, l’exemple d’institutions ou de partenaires (la SNCF, l’État, la police, une association de formation) qui vont plus loin et qui s’engagent, avec les ALMS, à défendre les valeurs d’intégration sociale, les valeurs d’égalité devant le droit à la sûreté, bref, ces valeurs de la République, d’une manière à la fois simple, cohérente et pratique. Je souhaite que toutes les institutions de la République puissent agir dans le même sens. J’espère que les collectivités locales, que l’école, que la police, que les grandes entreprises de transports, que les bailleurs, que les associations, que les transporteurs publics seront nombreux à donner ensuite une véritable chance d’insertion professionnelle et sociale aux jeunes. Et que le chiffre de 15 000 recrutements d’ALMS envisagé par le Premier ministre sera rapidement atteint. Je vois bien, Monsieur le président, que la SNCF est prête à prendre sa part de l’effort collectif et je vous en remercie. Sachez que le gouvernement ne relâchera pas son effort, et qu’il souhaite aller le plus loin possible pour donner, ou redonner, à chaque jeune un avenir, c’est-à-dire d’abord un emploi.