Texte intégral
Michèle COTTA
Bonjour. La réduction du temps de travail. Pas un jour ne se passe sans la signature d'accord sur les 35 heures. Le mouvement a été long à amorcer, Pourtant, on a l'impression qu'aujourd'hui les choses se dégèlent mais pas toujours peut-être de la façon dont le gouvernement l'aurait souhaité. Beaucoup d'annualisation dans les protocoles signés, de la flexibilité, beaucoup de réflexions positives aussi sur l'organisation du travail, sur la nouvelle organisation du travail. Mais la lutte contre le chômage n'est pas forcement la préoccupation essentielle des signataires. Nous y reviendrons dans la deuxième partie de notre émission avec tous nos invités qui sont nombreux. Tout de suite, Martine AUBRY est notre invitée. Nous allons lui poser des questions avec Laurent MAUDUIT du MONDE. Martine AUBRY, le général PINOCHET – peut être deux questions d'actualité étrangère avant de passer à l'actualité sociale – le général PINOCHET, l'ancien dictateur chilien vient d'être arrêté à Londres. Et puis, d'un seul coup, on a l'impression que les gens ne savent plus quoi en faire. Alors est-ce que vraiment il faut se débarrasser du général PINOCHET et comment ?
Martine AUBRY (ministre de l'Emploi et de la Solidarité)
Ecoutez, je crois que le problème d'abord, c'est le rappel de ce qui s'est passé en 73, je crois pour une génération comme la mienne, la chute d'ALLENDE acculé au suicide, des morts, des arrestations, des personnes disparues que l'on recherche toujours… eh bien, pour tous ceux-là, pour les amis chiliens qu'on a reçus en France, je crois que c'est une bonne nouvelle de penser qu'un dictateur qui est responsable de beaucoup de morts, de beaucoup d'arrestations ne peut pas vivre en paix sa vieillesse et que l'impunité n'existe plus dans notre monde.
Michèle COTTA
Et qu'est-ce qui se passe si le gouvernement anglais le relâche comme il en est question ?
Martine AUBRY
Eh bien, on va le voir. C'est vrai qu'il y a aujourd'hui un problème juridique, la qualification juridique de " génocide " que le juge espagnol a retenu, la nécessité de la haute autorité judiciaire et du gouvernement espagnol de prendre parti et là, il est normal de faire en sorte que le droit prenne le pas sur ce que l'on peut véritablement souhaiter. Et je crois que c'est une action qui aura remis je dirais au niveau de l'actualité le fait que, de plus en plus, dans le monde actuel, on ne peut pas vivre en toute impunité quand on a commis des crimes. Et je crois que ce geste en tout état de cause aura fait avancer ces droits de l'homme qui sont si essentiels dans notre monde.
Laurent MAUDUIT (LE MONDE)
Martine AUBRY, avec les nombreux changements politiques survenus dans de nombreux pays en Europe notamment en Italie, en Allemagne, la gauche, la social-démocratie est très largement majoritaire en Europe. La plupart des gouvernements, une grande partie des gouvernements sont ancres à gauche. Est-ce que vous vous dites que pour vous, socialiste, c'est une chance historique pour infléchir la construction européenne ? Et sur quels points vous aimeriez cet infléchissement ?
Martine AUBRY
Je crois que c'est non seulement une chance mais c'est une responsabilité à ne pas laisser passer. Je crois que l'Europe aujourd'hui, et nous nous en réjouissons, c'est un marché unique, c'est demain, presque déjà, une monnaie unique. Mais je crois que, pour beaucoup d'Européens, ce n'est pas encore l'Europe dont ils rêvent, c'est-à-dire une Europe où chacun ait sa place, un emploi bien sûr mais aussi accès à l'éducation, accès aux soins, une Europe ou aussi on vit mieux ensemble peut-être avec moins de dureté, plus de solidarité, plus de compréhension les uns et les autres. Et je crois que la social-démocratie largement majoritaire aujourd'hui en Europe eh bien aura la responsabilité d'avancer. Nous savons tous aujourd'hui, nous croyons que le marché est important, qu'il a sa place, qu'il entraîne l'initiative, la compétition, une rentabilité à court terme qui est nécessaire. Mais je crois que nous savons aussi que le marché n'est pas le tout de l'économie, que les biens collectifs, la santé, l'éducation, l'aménagement du territoire doivent être faits par les États et l'Europe doit y contribuer, qu'aussi, et nous le savons, les valeurs du marché ne s'appliquent pas à toute la société, ne doivent pas s'y appliquer, que l'individualisme, ce qui est une bonne chose dans le marché, c'est la loi du plus fort lorsqu'on l'applique à la société ; que la rentabilité à court terme exclut le travail sur le long terme, la recherche, la nécessité d'avoir des biens collectifs qui préparent l'avenir qui feront que, demain, les gens seront plus heureux, mieux soignés, vivent mieux. Donc, ces réflexions-là, nous devons les avoir en Europe de même qu'à très court terme, nous devons avoir les réflexions qui ont eu lieu hier à Pörtschach en Autriche avec, pour la première fois, le nouveau, pas encore, mais le nouveau chancelier allemand, le Premier ministre italien pour savoir comment coordonner nos politiques économiques pour que l'emploi devienne une priorité non seulement de la France et de quelques autres pays mais de l'Europe tout entière.
Michèle COTTA
Alors on va peut-être rentrer dans le détail de la social-démocratie à la française. Les retraités ont manifesté jeudi dans toute la France. Alors ils protestent parce que ni la protection sociale, ni la fiscalité, ni leur indexation de leurs retraites au coût de la vie n'ont été acceptées par le gouvernement. Alors qu'est-ce que vous allez faire avec les retraités ?
Martine AUBRY
Alors ça, les retraités, il y a plusieurs problèmes de nature très différente. Il y a d'abord les retraités d'aujourd'hui. Eux, ils ne sont pas inquiets d'avoir une retraite. Ce qu'ils veulent, c'est plusieurs choses. La première, c'est, ils veulent participer aux fruits de la croissance. Ils ne veulent pas que les retraites restent en retard. Nous savons qu'aujourd'hui le niveau de vie des retraités est à peu près celui des salariés ce qui n'était pas le cas il y a vingt ans où ils étaient beaucoup plus pauvres. C'est déjà un plus. Mais dans un pays qui s'enrichit, ils veulent participer à cela. Et c'est pour ça que cette année dans la loi de financement de la Sécurité sociale que l'on va commencer à discuter dès mardi, le gouvernement a souhaité aller au-delà de la loi qui aurait imposé une augmentation de 0,7 % des retraites. Nous sommes allés jusqu'à 1,2 % et nous allons faire un peu plus pour…
Laurent MAUDUIT
Ce n'était pas tout à fait l'engagement des socialistes pendant la campagne…
Martine AUBRY
Oui, je vais y revenir tout de suite. Et nous allons faire un peu plus pour le minimum vieillesse par exemple. Deuxièmement, il y a la place des retraités dans notre société et je crois que c'est très important. Nous préparons actuellement l'année internationale de l'ONU en 1999 sur les retraités. Il faut qu'ils aient une plus grande place d'abord dans les instances où on parle du niveau de vie. Il faut qu'ils aient plus de place dans le traitement de la dépendance, dans l'accès à la culture, dans l'accès aux loisirs. Et nous avons mis en place avec eux des groupes de réflexion et nous travaillons avec eux aujourd'hui dans des commissions pour que les retraités qui font aujourd'hui 20 % de la population active, et il faudra le dire, qui en feront plus de 30 % au milieu du siècle prochain puissent avoir toute leur place. Sur tous ces sujets, nous avançons. Et puis, il y a le problème des retraites c'est-à-dire pour ceux qui ne sont pas encore en retraite. Ce n'est pas ceux-là qui manifestaient dans la rue. Eh bien pour ceux-là, vous le savez, le Premier ministre a décidé de confier au Commissariat au plan une phase de diagnostic qui a lieu actuellement, qui donne lieu à une concertation et qui doit nous amener courant 1999 à prendre des mesures pour éviter le choc démographique des années 2005.
Laurent MAUDUIT
Est-ce que, dans cette initiative, il n'y a pas une part d'hypocrisie parce que les rapports sur l'avenir du système de retraite, il y en a eu des dizaines en France. Il y en a eu encore en 95. Vous, vous connaissez toute la palette de solutions possibles.
Martine AUBRY
Justement, Laurent MAUDUIT, je crois qu'on connaît mal et je crois qu'on a tendance dans notre pays à montrer les choses très rapidement, à montrer du doigt telle et telle catégorie de fonctionnaires de service public sans regarder véritablement la réalité des choses. Il faut savoir que, dans certaines entreprises publiques, les salariés qui ont une retraite plus importante ont contribué en termes de cotisation pour cela, que ça faisait aussi partie du contrat qu'ils avaient avec leur entreprise. Des salaires moins élevés mais une contribution plus forte à la retraite.
Laurent MAUDUIT
Les choses sont différentes mais vous savez que la potion sera dure quand même au bout du compte, non ?
Martine AUBRY
Mais vous savez très bien aussi qu'on ne règle pas un problème comme ça. Et ceux qui ont voulu le régler dans un cabinet ministériel ou par coup de menton n'y ont pas réussi. On ne réglera le problème des retraites qu'avec un grand débat public avec les Français. Nous l'engagerons l'année prochaine. Pour cela, tout doit être sur la table, le niveau des retraites, combien ont contribué les gens, quel a été leur salaire, combien ont-ils véritablement… et les évolutions démographiques. Six mois pour faire ce travail-là et pour lancer un vrai débat démocratique, je ne crois pas que ça soit beaucoup et vous verrez que nous prendrons des décisions l'année prochaine pas brutales.
Michèle COTTA
Dès maintenant, vous pensez à éventuellement avoir des fonds de pension. Alors est-ce que c'est un grand tournant dans la politique du Parti socialiste qui s'est opposé il y a quelque temps aux amendements sur les fonds de pension ? Est-ce que c'est un tournant ?
Martine AUBRY
Je crois que ce qu'il faut dire, Michèle COTTA, c'est que la première chose qu'a faite le gouvernement, ç'a été cette année de créer un fonds de réserve pour les retraites pour consolider nos régimes par répartition. Donc, notre première réponse, c'est nous gardons les régimes par répartition. Je rappelle que ce sont les seuls régimes qui permettent une véritable solidarité entre les générations et entre les catégories. Mais au-delà de ce régime par répartition pour lequel nous venons de créer un fonds de retraite avec deux milliards…
Laurent MAUDUIT
Il n'y a pas grand-chose.
Martine AUBRY
Non.
Laurent MAUDUIT
À terme, il y aura combien ? Il y aura 100, 200, 500 milliards de francs ?
Martine AUBRY
Mais ça, c'est le débat que nous allons avoir avec les Français l'année prochaine. On a besoin de plusieurs dizaines de milliards de francs, c'est clair. Mais dès cette année, d'autres fonds vont alimenter ce fonds de réserve. Donc, pour le gouvernement, c'est un geste symbolique, c'est dire dès maintenant nous allons défendre et consolider les régimes par répartition. Ceci dit et ça, nous n'avons jamais dit le contraire, nous sommes favorables…
Michèle COTTA
Capitalisation, c'est possible.
Martine AUBRY
Nous sommes favorables à ce qu'il puisse y avoir une épargne collective…
Laurent MAUDUIT
Si, si, madame AUBRY, vous avez dit le contraire.
Martine AUBRY
Non, attendez. Une épargne collective pour l'avenir dès lors que – et cette condition n'était pas remplie par la loi THOMAS sur les fonds de pension – dès lors qu'on ne donne pas des avantages seulement à une catégorie et notamment, si je puis dire les choses très simplement, à ceux qui ont les moyens aujourd'hui d'épargner.
Laurent MAUDUIT
Si je puis me permettre, Lionel JOSPIN, lors de son face-à-face avec Jacques CHIRAC en 95, a pris une position de principe, de principe contre les fonds de pension.
Martine AUBRY
Contre les fonds de pension tels qu'ils étaient votés car les fonds de pension tels qu'ils étaient votés, on appelle ça comme on veut. Quelle est la réalité ? Les fonds de pension tels qu'ils étaient votés permettaient par exemple dans une entreprise à des cadres de mettre une partie de leur salaire et des entreprises d'abonder ces sommes sans qu'il y n'ait ni fiscalité, ni charges sociales. La Sécurité sociale y perdait. Une partie des salaires risquait de partir en capitalisation. Et les autres catégories ne pouvaient pas y avoir droit. Nous avons toujours dit que ces fonds de pension-là, nous étions contre. En revanche, mettre des sommes, négocier de manière collective en donnant les mêmes avantages à tous de côté pour mieux préparer notre retraite demain, bien sûr, oui et c'est là-dessus que nous travaillons.
Michèle COTTA
Alors avant de passer aux 35 heures, peut-être un mot sur votre situation de ministre de la Santé. Les méchants disent que vous n'êtes devenue ministre de la Santé qu'en juillet 98 face à la dérive des dépenses de santé. Qu'est-ce que vous pouvez répondre ?
Martine AUBRY
Qu'ils sont vraiment très méchants parce que ça fait un an que, sans bruit il est vrai mais vous avez pu remarquer que les années précédentes le bruit et les coups de menton amenaient les gens dans la rue et n'ont pas fait avancer les choses, que nous travaillons patiemment avec les médecins, avec l'hôpital, avec les internes, avec les pharmaciens. Les résultats, très vite, l'informatisation qui était complètement bloquée, la moitié des médecins aujourd'hui sont rentrés dans ce schéma. Ils vont avoir des meilleurs outils de diagnostic et de protocole. Ils ont accepté la formation. Nous traitons le problème de la démographie médicale. Nous avons signé un accord avec les internes…
Michèle COTTA
Tout va bien quoi ?
Martine AUBRY
Pas du tout. Nous avons signé un accord avec les internes pour que, enfin dans notre pays, on fabrique si je puis dire des anesthésistes parce qu'on n'en a pas assez et pas des catégories dont nous avons trop. Nous avons travaillé avec l'industrie pharmaceutique pour redonner une cohérence et pour faire en sorte que le prix du médicament soit lié à l'effet médical de ce médicament. Nous venons de signer avec l'ensemble des pharmaciens de nouvelles règles pour leur profession et pour qu'ils soient de véritables acteurs de santé. Nous sommes en train de faire avancer l'hôpital, de recomposer l'hôpital dans un souci de meilleure sécurité pour les Français, pour ouvrir l'hôpital à tous et en même temps pour dépenser moins. Voilà l'ensemble des éléments que nous avons réalisés pendant un an. Et j'espère que ces réformes structurelles, peu à peu – il nous faut deux, trois ans pour régler ce problème, c'est vrai – vont porter leurs fruits.
Michèle COTTA
Il y a des médecins très contre quand même. Les radiologues par exemple ont claqué la porte des négociations.
Martine AUBRY
Oui mais, Michèle COTTA, il y avait sept professions en cause. Il y en a une qui a claqué la porte.
Michèle COTTA
Et c'est de celle-là qu'on parle.
Martine AUBRY
Eh oui, et il y en a six autres qui ont accepté de venir autour de la table et avec lesquelles nous avons discuté ce qui montre que les choses avancent. Je crois que ce qui est important, c'est que les professions de santé savent qu'aujourd'hui nous faisons avec eux et pas contre eux, que nous ferons évoluer ce système avec eux mais que, néanmoins, nous ne laisserons pas déraper la Sécurité sociale parce que…
Michèle COTTA
C'est ce que disait Alain JUPPE.
Martine AUBRY
Oui mais je trouve dommage qu'il ait cru que ça soit uniquement par la coercition qu'on y arriverait et pas par un travail patient qui, certes, intéresse peu les médias parce qu'il n'est pas spectaculaire et parce qu'on ne s'est pas beaucoup engueulé cette année sur la Sécurité sociale. On a fait. On a travaillé avec les médecins, avec le monde hospitalier qui est un monde formidable de générosité et de technicité, avec les pharmaciens, avec les internes et ça, ça n'intéresse personne. S'ils étaient dans la rue, alors ça, on en parlerait. Eh bien, continuons notre travail, notre tracé. Vous savez, si on passe de 55 milliards de déficit en 96 à un équilibre l'année prochaine de la Sécurité sociale, je crois qu'il sera difficile de dire qu'on n'a rien fait.
Laurent MAUDUIT
Passons maintenant si vous le voulez bien aux 35 heures. Le débat évolue assez vite. Il y a quelques semaines, il y avait eu un projet d'accord qui concentrait toutes nos attentions, c'était dans la métallurgie, un accord que vous aviez condamné en disant qu'il était virtuel, qu'il était en dehors de la loi. Et maintenant, toutes les attentions se focalisent sur un autre projet d'accord, sur le textile. Et j'ai beaucoup de mal à comprendre, comment analyser cet accord ? II y a d'un côté le patronat qui dit que cet accord est le même que celui de la métallurgie et de l'autre, certains syndicats dont la CGT qui laissent entendre que c'est un bon accord.
Michèle COTTA
Nous allons en reparler tout à l'heure avec nos invités. Mais quelle est votre position ?
Martine AUBRY
D'abord, cet accord n'est pas encore signé. Donc, je me permettrais si vous le voulez bien de ne pas en donner un avis direct. Moi, je vais dire les choses telles que je les sens profondément. Et avec la métallurgie, moi, je ne suis pas en guerre avec la métallurgie, je ne suis pas en guerre avec ceux qui signent certains accords. Je dirais, les choses, c'est presque drôle. Vous savez que nous sommes en train de préparer une deuxième loi qui serait celle qui permettra véritablement de véritablement les données de passage aux 35 heures. Nous nous appuyons…
Laurent MAUDUIT
Vous allez pouvoir respecter les délais pour la deuxième loi ?
Martine AUBRY
Oui, nous allons pouvoir les respecter. Il y a d'ailleurs sur votre plateau à la fois le président du CJD avec lequel nous allons suivre 400 entreprises qui vont nous permettre d'alimenter le contenu de cette deuxième loi. Il y a le président de l'UPA, l'Union professionnelle artisanale. C'est très important de préparer une seconde loi qui soit adapté aux petites entreprises du commerce et de l'artisanat. Et puis, il y a tous les accords qui sont signés, 450 dans les entreprises aujourd'hui, 7 accords de branche. Tout cela va nous aider à alimenter les choses. Alors qu'est-ce qui s'est passé avec la métallurgie ? C'est très simple. Nous préparons une loi qui réduit la durée du travail. Ce n'est pas totalement étonnant qu'on ne prenne pas en compte dans la préparation de cette loi un accord qui ne réduit pas la durée du travail, qui la maintien ou qui même l'augmente pour certaines catégories. Nous préparons une loi pour le 1er janvier 2000. Nous la préparons pour 99. L'accord lui-même dit qu'il ne s'appliquera qu'au début de l'année 2000. C'est un accord donc virtuel. Ça n'a rien de désagréable en soi. Ils l'ont écrit. Eh bien, voilà, moi, je préfère la réalité de ceux qui font bouger le terrain. C'est sur eux que j'appuie et c'est avec eux que j'avancerai. À partir de là, j'ai dit très simplement les choses. Quels sont les accords qui vont être pris en compte dans notre réflexion ? Eh bien, tous ceux qui sont dans l'esprit de la loi, c'est-à-dire des accords qui sont – je voudrais le redire après ce que vous avez dit tout à l'heure, Michèle COTTA – des opportunités pour les entreprises pour repenser leur organisation du travail. J'ai toujours dit, les 35 heures ne se feront pas contre les entreprises. Et quand je vois chaque semaine des patrons qui me disent « eh bien, on a réussi à parler pour la première fois avec les salariés de la façon dont on pouvait mieux travailler dans l'entreprise ». Quand je vois à l'inverse des salariés qui disent « pour la première fois, on nous a écoutés, on a dit à notre patron qu'on voulait mieux travailler, être plus qualifié, avoir une plus grande autonomie dans notre travail mais aussi une meilleure adéquation à notre vie familiale et notre vie professionnelle. Et puis, ensemble, eh bien, on a la fierté de créer de l'emploi ». 8 % d'emplois créés dans les accords signés. Voilà ce que c'est la durée du travail. Donc, je sais qu'on préférerait en France pouvoir opposer ceux qui perdent et ceux qui gagnent. Et si, pour la première fois, tout le monde gagnait, que les entreprises étaient plus compétitives demain, que les salariés travaillaient mieux et vivaient mieux et que les chômeurs soient moins nombreux ? Eh bien, c'est ça, le pari des 35 heures. Et ce pari, je le dis comme je le pense, il est en train de devenir réalité, voilà.
Michèle COTTA
Martine AUBRY, merci.