Texte intégral
Mesdames et Messieurs,
C'est avec grand plaisir que j'ai accepté l'invitation de Raymond-Max Aubert à venir m'exprimer parmi vous aujourd'hui. Tout d'abord parce que la promotion de l'investissement étranger en France est un sujet qui me tient à cœur, mais également car cette invitation est aussi le témoignage de la coopération fructueuse qui a su s'instaurer ces derniers mois entre la DATAR et les services du ministère dont j'ai la charge. J'aurai l'occasion d'y revenir.
L'attraction des investissements étrangers est un enjeu majeur pour la France. C'est un enjeu en termes économiques bien sûr puisque ce sont chaque année près de 20 000 emplois directs qui sont ainsi créés ou maintenus sur notre territoire. C'est aussi un enjeu pour le rayonnement international de notre pays puisque les entreprises étrangères présentes en France sont autant de vecteurs de l'image de la France vis-à-vis de l'étranger.
La France s'est déjà largement ouverte sur l'extérieur au cours des dernières années. Les succès enregistrés par nos exportateurs sont là pour en témoigner. Quatrième pays exportateur dans le monde, la France est également depuis plusieurs années au troisième rang des pays de l'OCDE pour l'accueil des flux d'investissements étrangers. Pour la cinquième année consécutive, l'investissement étranger en France dépasse ainsi en 1995 les 60 MdsF.
Ces bons résultats sont encore insuffisants et la France doit continuer à se battre pour renforcer son attractivité face à des pays qui, faute de disposer des mêmes atouts naturels, s'en remettent à une politique de « dumping » fiscal et social. J'ai moi-même fait de cette bataille l'une de mes toutes premières priorités car vous savez combien je suis attaché à ce que la France tienne sa place au cœur d'une économie désormais mondialisée.
1. Ceci suppose tout d'abord la mise en œuvre d'une politique macro-économique favorable à l'investissement. C'est dans cette perspective que l'effort de modernisation et de réformes engagé par le Gouvernement depuis près d'un an trouve toute sa cohérence. Cette politique comporte trois volets : la remise en ordre de nos finances publiques et sociales, la réforme de notre système de prélèvements obligatoires et le passage à la monnaie unique.
Je n'insisterai pas sur la situation de nos finances publiques qui a fait l'objet de multiples exposés à l'occasion du débat d'orientation budgétaire. Le redressement de nos finances publiques constitue un objectif incontournable, indépendamment d'ailleurs du respect des critères de convergence. Cette politique, engagée dès 1995, va se poursuivre avec détermination pour préparer le projet de loi de finances pour 1997. Aucune piste d'économie ne sera taboue, afin d'assurer une stabilisation des dépenses budgétaires en francs courants. La politique budgétaire engagée est ainsi le pendant de la réforme en cours de la protection sociale qui vise à assurer une maîtrise durable des dépenses de santé.
Le deuxième volet de la politique économique du Gouvernement est la réforme des prélèvements obligatoires. Nos systèmes de prélèvements et de redistribution ne sont en effet plus adaptés à la mondialisation de l'économie que j'évoquais en introduction. Dans cette économie où le potentiel de production devient de plus en plus mobile et délocalisable, nous ne pouvons plus nous satisfaire d'un système de prélèvements qui repose très largement sur les facteurs de production. La politique d'allègement des charges sur les bas salaires engagée en 1993 et amplifiée en 1995 est un premier pas dans la direction que nous devons suivre. Les propositions du groupe de travail, présidé par M. de la Martinière, permettront au Gouvernement de soumettre dès cet automne au Parlement un projet de loi d'orientation fiscale à l'horizon de cinq ans.
Le troisième pilier essentiel de la politique économique du Gouvernement, c'est la perspective de la monnaie unique, qui constitue le complément naturel du marché unique. La monnaie unique mettra un terme aux fluctuations monétaires, qui sont autant de facteurs de délocalisations d'emplois, et donnera de la stabilité à l'environnement économique et de la perspective à l'investissement productif. Le Gouvernement est plus que jamais résolu à respecter l'échéance de 1999 et à placer ainsi la France à l'avant-garde de l'Europe. Cette perspective donne évidemment plus de poids aux pays européens au sein du G7 pour plaider pour une plus grande stabilité du système monétaire et financier international ; la hausse récente du dollar en est l'illustration.
Les entreprises qui décideront de s'implanter en France bénéficieront ainsi du cadre macroéconomique stable associé à la mise en place de l'union monétaire : des finances publiques assainies, un régime de prélèvements obligatoires rééquilibré, une stabilité monétaire.
La baisse des taux d'intérêts constatée ces derniers mois est un premier gage de succès de cette politique. Les taux d'intérêts réels à trois mois se situent aujourd'hui en France parmi les plus bas au sein des grands pays industrialisés. Les taux à 10 ans sont désormais au niveau des taux allemands, si ce n'est inférieur, confirmant notre crédibilité vis à vis des marchés. Cette baisse des taux, associée aux mesures d'activation de l'épargne et d'encouragement de la consommation décidées par le Gouvernement, devrait avoir des effets bénéfiques dès cette année et redonner ainsi du dynamisme au marché français.
Cela étant, bien qu'indispensable, la politique économique d'ensemble du Gouvernement ne serait pas à elle seule suffisante pour drainer de nouveaux investissements étrangers dans notre pays.
2. Il convient en effet également de veiller à lever tous les obstacles à l'investissement qui existent encore pour contribuer ainsi à donner de la France une image positive, ouverte et accueillante. C'est la raison pour laquelle le Gouvernement souhaite éliminer les contraintes administratives qui pèsent sur les investissements étrangers.
Une première étape a été franchie au début de cette année avec la suppression quasi-totale de tout contrôle des investissements étrangers. Le grand mérite du nouveau dispositif est de substituer sur le plan des principes un régime de liberté à un régime de déclaration préalable. Dorénavant, tous les investissements, sauf ceux touchant à la Défense Nationale et à l'ordre public, sont libres. La seule démarche encore demandée aux entreprises est une information de l'Administration sans aucune nécessité d'autorisation. La France est ainsi désormais dotée d'un des régimes parmi les plus libéraux des pays de l'OCDE.
Dans le même esprit, le champ de la procédure du « rescrit » a été élargi en imposant à l'administration fiscale de répondre dans un délai maximum de trois mois à toute demande tendant au bénéfice d'un régime d'amortissement exceptionnel ou du régime des entreprises nouvelles.
Cette nouvelle disposition vient compléter d'autres procédures existantes en matière d'information fiscale qui permettent déjà de simplifier les formalités des investisseurs et d'accroître leur sécurité juridique.
Je voudrais dire à ce sujet qu'il faut cesser de se livrer à cette mode d'auto-flagellation qui consiste à croire toujours que ce qui se fait à l'étranger est mieux que ce que nous faisons en France. Le « rescrit » français n'est pas que la traduction du « ruling » anglo-saxon : c'est tout un système fiscal qui supporte largement la comparaison avec les dispositifs des autres pays.
Plus généralement, je souhaite que l'administration fiscale et douanière soit plus encore qu'aujourd'hui à l'écoute et au service des entreprises et des investisseurs étrangers. J'ai donc donné des instructions très fermes pour que les procédures d'information et d'accueil soient améliorées. D'ores et déjà, plusieurs décisions très concrètes ont été prises en la matière ; plusieurs règles fiscales spécifiques aux investisseurs étrangers, telles que celles applicables aux quartiers généraux, feront en particulier l'objet d'une publication. J'ai par ailleurs souhaité qu'un cadre de la Direction Générale des Impôts soit désormais à la disposition permanente des investisseurs étrangers pour apporter une réponse plus rapide et plus efficace à leurs interrogations.
De nouvelles étapes seront franchies dans les toutes prochaines semaines. Une concertation interministérielle est en cours afin de simplifier la procédure d'octroi de la carte de commerçant dont le délai maximum de délivrance, qui pouvait atteindre six mois dans certains cas, sera réduit à 15 jours. Dans le même esprit, de nouvelles instructions seront données très prochainement pour la délivrance des titres de séjour et de travail aux cadres de direction étrangers mutés en France. La principale disposition consiste à ne plus assimiler à un recrutement extérieur la mutation en France d'un cadre issu d'un même groupe. L'obligation de consulter l'ANPE à cette occasion sera ainsi supprimée et les démarches personnelles du cadre étranger réduites à un seul déplacement à la Préfecture lors de la délivrance de la carte.
Avec ces différentes mesures, ce sont autant de simplifications qui visent à mettre en cohérence notre fonctionnement administratif avec la volonté politique du Gouvernement d'accueillir des investisseurs étrangers en France et de mieux répondre aux attentes des entreprises internationales.
3. Politique macro-économique favorable. Réglementation simplifiée. Le troisième volet de la politique d'encouragement de l'investissement étranger en France que je voudrais enfin évoquer relève du souci de disposer d'une fiscalité adaptée et incitative.
Une première mesure très significative a déjà été annoncée par le Gouvernement. Il s'agit d'une disposition d'une ampleur tout à fait exceptionnelle qui permet d'améliorer encore, pour les investissements réalisés d'ici février 1997, le régime de l'amortissement dégressif. A titre illustratif, un équipement d'une durée de vie de cinq ans pourra, dès la première année, ouvrir droit à un amortissement de 60 % de sa valeur, contre 40 % jusqu'à présent et 20 % dans l'hypothèse d'un amortissement linéaire.
Je souhaite rappeler par ailleurs qu'afin de favoriser les opérations internationales réalisées sur le territoire français, notamment dans les zones portuaires, un régime d'entrepôt fiscal a été mis en place qui permet aux transactions et prestations réalisées sur les biens placés sous ces entrepôts de bénéficier d'un régime suspensif de TVA jusqu'à la sortie du bien de ces régimes.
Je tiens enfin à rappeler plusieurs dispositions spécifiques à l'investissement étranger que j'ai annoncé il y a quelques semaines à peine.
En premier lieu, la limitation géographique imposée par le régime fiscal des quartiers généraux va être supprimée. La limitation stricte des compétences du quartier général qui prévalait jusqu'à présent était en effet source de rigidités de fonctionnement, puisque le quartier général ne pouvait intervenir hors d'une zone géographiquement délimitée et ne pouvait exercer une fonction donnée pour l'ensemble des implantations géographiques d'une entreprise.
Par ailleurs, en complément au régime des quartiers généraux, un mécanisme similaire de détermination forfaitaire du bénéfice sera mis en place au profit des centres de distribution spécialisés dans des fonctions de logistique exercées au bénéfice exclusif des entités d'un groupe.
Pour conclure cette présentation qui illustre toute l'importance que j'attache à l'investissement étranger en France, je voudrais insister sur le travail que les réseaux du ministère de l'Économie et des Finances, en liaison avec ceux de la DATAR, effectuent à l'étranger. La Délégation aux Investissements Étrangers, dirigée par Jean-Daniel Tordjman, multiplie les missions et les contacts à haut niveau pour vendre la France, terre d'accueil. Parallèlement, les Postes d'Expansion Économique, dans leurs contacts quotidiens avec les entreprises locales, sont attentifs aux projets d'investissements à l'étranger de ces entreprises et les signalent aux antennes locales de la DATAR ou aux services parisiens. Ce rôle me parait aujourd'hui essentiel et tout à fait complémentaire de la mission traditionnelle de promotion des exportations françaises.
Je souhaite donc, dans un souci d'efficacité et de bonne gestion des moyens de l'État, que le rapprochement des réseaux du ministère de l'Économie et des Finances et de la DATAR à l'étranger se poursuive. Sans attendre, ceci pourrait conduire en particulier à confier aux Postes d'Expansion Économique des missions de prospection des investisseurs dans certains pays où la DATAR ne dispose pas de représentation et à clarifier, en les marquant par des actions opérationnelles communes, les relations entre les postes et les bureaux DATAR dans les pays où ils existent.
Je tiens à nouveau à saluer à cet égard la coopération fructueuse qui a su s'instaurer entre mes services et ceux de Raymond-Max Aubert et je souhaite vivement que cette coopération se développe encore. C'est ensemble que nous gagnerons la bataille de l'investissement étranger.