Texte intégral
Introduction – Remerciements divers – Volonté d’être présent pour ce congrès, comme l’an dernier à Brest et quelle que soit l’actualité.
1. Les établissements de la FEHAP doivent prendre toute leur place dans la mise en œuvre de la réforme de l’hospitalisation.
En ce jour d’anniversaire de l’ordonnance du 24 avril 1996, il est bien naturel de tirer un premier bilan de la réforme de l’hospitalisation pour tous les établissements de santé, et en particulier pour ceux dont vous avez la charge.
Le bilan juridique et administratif est bon : l’essentiel des textes d’application de l’ordonnance ont été publiés après une concertation souvent fructueuse avec l’ensemble de la communauté hospitalière (16 décrets et arrêtés, 14 circulaires ou documents contractuels). Une dizaine de textes sont à boucler d’ici la fin de l’année 1997 mais portent sur des sujets moins importants de l’ordonnance. Mais l’essentiel n’est pas là, même si la lenteur des textes d’application a pu, dans le passé, affaiblir considérablement certaines réformes. Je pense en particulier à la loi de 1991.
L’important, c’est qu’un an après l’ordonnance du 24 avril, après de nombreux textes et de nombreuses concertations, la réforme est bien perceptible dans les régions et dans les établissements.
Cette réforme, vous le savez, repose sur trois piliers : régionalisation, complémentarité, et qualité des soins.
Tout d’abord, la régionalisation du traitement des questions hospitalières est bien avancée. Les agences de l’hospitalisation se sont toutes vu transférer leurs compétences deux mois et demi avant l’échéance. Le traitement local des affaires hospitalières, c’est l’assurance que chacun de vos établissements sera traité en fonction de ses spécificités par des professionnels totalement concernés. Les agences sont désormais vos partenaires dans chaque région.
Je souligne que le travail des agences ne doit pas se résumer au pouvoir d’un seul homme. Les agences fédèrent le travail d’une équipe, pluridisciplinaire et rassemblée dans une commission exécutive. Elles s’appuieront sur un CROSS rénové, qui comprendra, pour la première fois, un président de CME d’établissements PSPH.
Je réunis tous les mois les directeurs d’agence pour leur rappeler la nécessité d’un dialogue approfondi avec chaque établissement, et notamment les vôtres. Il n’est pas question de « restructurer à l’aveugle » nos établissements, ni de diminuer leurs moyens de manière systématique. C’est seulement à l’issue d’un dialogue sur l’activité et les missions de chaque établissement que les objectifs et les moyens devront être contractés. L’agence est aussi à votre service et doit nouer avec chacun de vos établissements des relations de confiance et de transparence.
Le deuxième pilier de la réforme, c’est la complémentarité entre établissements pour mieux répondre aux besoins de la population. Je me félicite des expériences qui se multiplient sur le terrain. Vos établissements sont déjà partis prenantes dans des opérations exemplaires : dans mon département, le CH du Puy et l’établissement PSPH de Sainte Marie ont signé une convention de partenariat pour la prise en charge psychiatrique des malades admis au service des urgences : à Metz, trois établissements PSPH se sont réorganisés pour mieux répondre aux besoins des patients. Tout le monde ne peut pas tout faire. L’agence régionale est là pour aider et inciter les établissements à mieux formaliser des partenariats équilibrés au sein, du secteur sanitaire ou entre le sanitaire et le médico-social : c’est tout notre système hospitalier qui doit travailler en réseau pour mieux répondre aux besoins des malades. Pour développer ces nouvelles solidarités, je compte sur le savoir-faire de vos établissements qui ont déjà développé avec succès des alternatives à l’hospitalisation en liaison avec les hôpitaux publics.
La réforme des urgences, dont les décrets seront publiés dans les prochaines semaines, vise précisément à organiser ces réseaux de prise en charge sur l’ensemble du territoire. Vos établissements y tiendront toute leur place.
Le troisième pilier, c’est la qualité des soins. Oui, le fondement de la réforme, c’est la santé et non la comptabilité ! L’accréditation conduite par les experts indépendants de l’ANAES ne doit pas être vécue comme une contrainte pour vos établissements.
C’est bien au contraire une chance à saisir et l’occasion d’une mobilisation de l’ensemble des personnels pour améliorer la qualité des soins et le service rendu aux patients. Cette démarche participe à la volonté de mettre le malade au cœur de la réforme, avec ses attentes et ses droits. Comme j’ai déjà eu l’occasion de le préciser, il ne s’agit pas de justifier des mesures de restrictions budgétaires mais de mettre en place un système d’accréditation à la française, respectueux de nos traditions hospitalières. Je connais votre adhésion à cette démarche, c’est pourquoi, avec Hervé Gaymard, nous avons tenu à ce que la FEHAP soit représentée au conseil d’administration de l’ANAES.
Nous ne moderniserons pas nos établissements de santé sous la seule contrainte financière. Nous le ferons grâce à une véritable politique de santé publique correspondant aux besoins de santé de la population. C’est pourquoi j’ai tenu à participer à la première conférence régionale qui s’est tenue tout à l’heure à Lille, un an après les ordonnances réformant notre système de protection sociale. Je sais que la FEHAP participe actuellement à la préparation de ces conférences ainsi qu’à la conférence nationale, et je m’en félicite. Nous le ferons également dans un cadre contractuel, avec les contrats pluriannuels d’objectifs et de moyens, qui seront librement négociés entre chacun de vos établissements et leur agence régionale : c’est un nouveau type de régulation, dont nous n’avons pas toujours l’habitude dans notre pays, mais c’est la seule façon de donner de la visibilité aux gestionnaires et de responsabiliser les acteurs.
La réforme se fait d’abord grâce aux hommes, en ville comme en établissement, et je sais que je peux compter sur le dynamisme de votre tissu associatif pour fédérer les bonnes volontés.
2. Permettez-moi maintenant de vous rassurer sur la prise en compte des spécificités de vos établissements dans les arbitrages budgétaires.
J’ai conscience de l’effort qui est demandé cette année à vos établissements, et je sais que certains se demandent si nous n’avons pas mis « la charrue avant les bœufs ». Bien au contraire, il nous faut mener simultanément une plus grande rigueur dans l’évolution des dépenses et l’amélioration de la qualité des soins.
Il est normal que les dotations de chaque établissement ne progressent pas à l’identique puisque le Gouvernement a souhaité corriger des inégalités entre régions, et entre établissements d’une même région. Toutes les études le montrent, ces inégalités ne sont plus tolérables. Il faut désormais répartir les moyens en fonction des besoins et de l’activité de chaque établissement.
Je note d’ailleurs que sur les trois dernières années, la progression de la dotation des établissements PSPH n’a pas été défavorable à vos établissements par rapport aux reste des établissements sous dotation globale. Elle a même été supérieure si l’on tient compte des « effets de champ » liés au changement de statut de certains établissements et au coût pour l’assurance maladie de l’ajustement budgétaire lié à la reprise des déficits. Pour 1997, je tiens à souligner que la progression de + 1,25 % en moyenne est plus de deux fois supérieure à celle que les cliniques privées ont acceptée.
C’est vrai que vos établissements d’Île-de-France vont particulièrement contribuer à cet effort national, comme l’ensemble des établissements de la région. Mais il faut être prudent sur les chiffrages de suppression d’emplois. Comme je l’ai déjà indiqué, il faudra utiliser toutes les marges de manœuvre offertes par les départs naturels des personnels. Si cela ne suffit pas, je vous confirme qu’un accompagnement particulier sera mis en œuvre. Des contacts ont déjà eu lieu entre l’agence de l’hospitalisation d’Île-de-France, la délégation à l’emploi à la formation professionnelle, et votre fédération. Je tiens à réaffirmer que le Gouvernement est d’accord pour mobiliser le fonds national pour l’emploi autant qu’il le faudra, dans le cas où la situation de certains de vos établissements l’exigeait. Mais il faut surtout que vous nous aidiez à évaluer les besoins, et à voir si des redéploiements entre vos établissements ne sont pas possibles sur un même bassin d’emploi.
Je connais votre déception sur la position du Gouvernement quant à l’application de la loi Robien dans le secteur sanitaire. Mais, contrairement à certaines rumeurs, je peux vous affirmer qu’elle vaut également pour le secteur à but lucratif. Néanmoins, rien n’empêche d’explorer toutes les pistes en matière d’aménagement du temps de travail. Et je demande à la direction des hôpitaux et à la direction des relations du travail de voir avec vous comment favoriser les modes d’organisation les plus riches en emplois.
Je connais les charges spécifiques qui pèsent sur vos établissements, notamment au titre des charges sociales. Elies devront être prises en compte par les agences régionales pour garantir une répartition équitable des ressources entre établissements. Je souhaite que le travail qui est en cours entre mes services et votre fédération depuis le mois de novembre débouche sur des propositions concrètes pour la prochaine campagne budgétaire. Pour nous aider à résoudre vos difficultés, je souhaite que nous disposions d’un échantillon d’établissements le plus pertinent possible, notamment du point de vue géographique.
Vos charges tiennent aussi à la transposition du protocole Durafour. Je me félicite de la volonté de la FEHAP de poursuivre la transposition des mesures de revalorisation qui ont déjà bénéficié à la fonction publique hospitalière. Mais l’affectation à d’autres dépenses des moyens qui avaient été prévus en 1996 pour financer ces mesures est contestable. Pour 1997, je souhaite qu’un accord soit trouvé avec le ministère des finances pour financer la transposition des mesures sur l’enveloppe nationale qui a été prévue à cet effet. Plus généralement, je souhaite que la FEHAP s’engage courageusement dans la modernisation de sa convention collective, à l’instar de ce qui a été entrepris par la Fédération nationale des centres de lutte contre le cancer.
3. Je voudrais maintenant aborder la prise en charge des personnes âgées dépendantes.
Je sais que plusieurs organisations comme la vôtre se sont prononcées pour la reconnaissance d’un cinquième risque dont la couverture devrait incomber à la Sécurité sociale. Une telle suggestion est certes très séduisante. Mais je crains qu’elle ne se heurte à des difficultés de mise en œuvre insurmontables.
Comme vous le savez, les départements ont une compétence générale sur tout ce qui concerne l’aide sociale aux personne âgées. Ainsi, au titre de la prise en charge des personnes dépendantes, ils consentent déjà un effort important. Par ailleurs, il faut maintenant apprécier les besoins au plus près des personnes. Ce constat a justifié le choix du Gouvernement d’une prestation en nature gérée par les départements. Au demeurant, la gestion de cette prestation fera appel aussi aux caisses de retraite dans le cadre de conventions qui auront pour but de coordonner les actions des différents participants pour assurer la meilleure efficacité de leurs interventions.
La nouvelle prestation sera versée à domicile comme en établissement. Dorénavant les incertitudes qui ont entouré le versement de l’allocation compensatrice pour tierce personne (ACTP) sont levées. Les personnes les plus lourdement dépendantes seront bien prises en charge par la PSD lorsqu’elles seront hébergées dans un établissement.
Vous êtes naturellement sensibles aux modalités de calcul de la prestation. Je partage votre souci de garantir un traitement homogène des dossiers de demande d’attribution d’une PSD quel que soit le lieu où cette demande sera déposée. Comme vous le savez, l’aide sera attribuée par le président du conseil général au vu de l’instruction menée par une équipe médicosociale qui remplit une grille d’évaluation unique au plan national. Pour le versement en établissement, je sais que vous auriez souhaité une référence à des minimas. Il m’a semblé qu’il fallait tenir compte de la grande différence qui peut exister d’un établissement à un autre au sein d’un même département. Et nous avons donc préféré lancer un grand chantier : celui de la réforme de la tarification des établissements qui hébergent des personnes âgées.
Actuellement la prise en charge de la personne âgée est fonction de la nature juridique de l’établissement qui l’héberge et ne dépend pas de sa perte d’autonomie. La nouvelle tarification doit permettre de sortir de ce mauvais système. Une concertation poussée a déjà permis aux principaux acteurs de cerner les problèmes à surmonter. Vous avez notamment évoqué le caractère éventuellement limitatif des prises en charge. Il s’agit là à l’évidence d’un problème de fond. C’est pourquoi, il est nécessaire que la concertation se poursuive dans les prochains mois.
Sans doute devrons nous aussi procéder à des expérimentations qui nous permettront de tester les dispositifs que nous aurons conçus. C’est dans ce cadre que devra être traité le problème spécifique du long séjour hospitalier. En toute hypothèse, je prends note de votre souhait d’ouvrir l’hôpital et de l’engager dans des coopérations avec les services de soins infirmiers à domicile et les maisons de retraite. Nous devons effectivement sortir des logiques d’isolement et promouvoir au contraire, chaque fois que cela est possible, les coopérations dans le cadre de réseaux.
4. Au-delà de la loi instituant la PSD, je voudrais également revenir devant vous sur les autres éléments de la politique sociale cohérente que le Gouvernement entend promouvoir.
Le projet de loi sur le renforcement de la cohésion sociale a permis des avancées importantes sur la base d’une concertation très approfondie. Ces avancées ont obtenu l’aval de l’Assemblée nationale qui a enrichi le texte d’une manière substantielle. Ce travail n’est pas perdu, loin de là. Le Premier ministre a indiqué très clairement que la nouvelle Assemblée serait saisie du texte dès sa constitution.
Nous avons également mis sur le métier la réforme de la loi de 1975 sur les institutions sociales et médico-sociales. Depuis l’annonce de ce chantier, que j’ai ouvert devant le CNOSS en octobre dernier, une concertation exemplaire et fructueuse a pu avoir lieu, et votre fédération a notamment apporté beaucoup dans ces travaux.
Nous entrons dans la dernière phase d’élaboration de ce projet de loi. Celui-ci permettra en particulier de mieux affirmer la place des usagers et de leurs familles par un projet d’établissement, l’instauration d’un règlement intérieur et d’un contrat de séjour. II permettra aussi de dépasser la stricte notion d’établissement en reconnaissant toutes les initiatives locales qui font la richesse et l’identité du secteur social et médico-social.
Le développement de relations contractuelles entre les institutions médicosociales et les pouvoirs publics devront par ailleurs permettre de mieux cerner les objectifs et les moyens de chaque structure. Il faut rénover la planification dans ce secteur, pour mieux répondre aux besoins de la population en développant notamment la coopération entre les établissements médico-sociaux, et en adoptant, tout en l’assouplissant, la technique des schémas qui existent dans le secteur sanitaire.
La FEHAP a un rôle particulier à jouer dans ces adaptations. Regroupant des établissements sanitaires et médico-sociaux, vous pouvez apporter beaucoup dans ce partage d’expériences, tout en préservant l’identité propre de chacun des secteurs. Il n’est pas question d’appliquer au secteur médico-social toutes les règles du secteur sanitaire.
Les besoins des personnes âgées, des enfants, et des personnes handicapées que vous accueillez, doivent être prise en charge d’une manière parfaitement adaptée. Pour autant, aucun secteur ne peut rester en marge des améliorations nécessaires. Je sais que nous pouvons à la FEHAP sur des interlocuteurs conscients de cette nécessité et fidèles à leurs valeurs.
Date : 7 mai 1997
Source : Le Parisien
Le Parisien : Combien de personnes toucheront-elles cette allocation ?
Jacques Barrot : Environ 300 000 sur les 700 000 bénéficiaires potentiels. Concrètement, la prestation sera versée en nature à toutes les personnes dépendantes âgées de 60 ans et plus, dont les revenus n’excèdent pas 10 470 francs par mois. Elles ne toucheront pas d’argent, la prestation servira à rémunérer les salariés employés à domicile par la personne âgée.
Le Parisien : Quel en sera le montant ?
Jacques Barrot : 5 600 francs mensuels au maximum pour les demandeurs fortement dépendants dont les revenus n’excèdent pas 4 800 francs mensuels. Cela ne concerne pas conséquent une grande partie des Français qui perçoivent la retraite moyenne de la Sécurité sociale, soit 5 000 francs environ. Pour ceux qui gagnent plus, l’allocation décroît progressivement.
Le Parisien : Quel en sera le coût annuel pour le budget de l’État ?
Jacques Barrot : Plus de huit milliards de francs.
Le Parisien : Les familles peuvent-elles déjà faire les demandes ?
Jacques Barrot : Oui, elles doivent être présentées dans le département d’origine. Les conseils généraux seront, je le pense, en mesure de payer l’allocation dépendance à partir de juin. Je précise que la procédure sera très simple, car le bénéficiaire de la PSD n’aura qu’un seul interlocuteur.
Le Parisien : Qu’en attendez-vous en termes d’emplois ?
Jacques Barrot : La prestation dépendance va stimuler les emplois d’aide à la personne et de service. Nous attendons quelque 50 000 créations de postes en trois ans, des emplois qui auront l’avantage d’être répartis sur l’ensemble du territoire.
Le Parisien : Présenter la prestation dépendance à trois semaines du premier tour des législatives, c’est quand même un peu électoraliste…
Jacques Barrot : Non, seule la procédure a dicté le calendrier. Il a fallu mener jusqu’au dernier moment une concertation très poussée avec les présidents des conseils généraux. De plus, le processus de parution des décrets a commencé bien avant la dissolution de l’Assemblée.