Texte intégral
Madame, Monsieur
Il y a un peu plus de cinq mois, une nouvelle Assemblée nationale a été élue et un nouveau gouvernement a été formé. Aujourd'hui, alors que des décisions économiques importantes ont été prises et que le débat sur le temps de travail est ouvert, nous avons éprouvé le besoin de faire le point sur les grandes orientations que nous entendons poursuivre avec, nous le souhaitons, votre concours.
Vous le savez : l'objectif premier du gouvernement est l'emploi. À cette fin, notre priorité a tout d'abord été de favoriser le retour de la croissance : les déficits publics ont été réduits, les dépenses de l'État stabilisées, le pouvoir d'achat des ménages protégé, notamment grâce à une fiscalité plus juste. La croissance repart, et elle est plus équilibrée avec le redémarrage de la consommation et de la demande intérieure.
Avec la confirmation d'une reprise de la production, qui doit se poursuivre en 1998, et la fin des incertitudes sur l'entrée dans l'Euro en 1999, l'horizon des chefs d'entreprise est plus dégagé. Une croissance de 3 % pour 1998 est une perspective réaliste.
Pour assurer son développement, notre pays doit tirer tout le parti possible de son potentiel d'innovation. La France doit viser, avec la création de richesses nouvelles, une croissance forte et durable. Elle ne doit pas seulement vivre des rentes héritées du passé.
Notre pays a, depuis quelques années, pris du retard dans le domaine des nouvelles technologies et de l'innovation. Nous voulons le combler en favorisant l'émergence de nouveaux entrepreneurs, en encourageant la diffusion de nouvelles technologies dans tous les domaines d'activité, même dans les secteurs plus traditionnels ; notre objectif est de mobiliser les capitaux pour favoriser l'apparition et le développement des entreprises dans les secteurs nouveaux. Nous avons pris des premières mesures fiscales en ce sens dans le budget 1998.
Dans cette perspective, nous savons que la création d'emplois est parfois freinée dans les petites et moyennes entreprises par la complexité des formalités administratives. « L'impôt-papier » est trop lourd dans notre pays. À la demande du Premier ministre, nous ferons rapidement des propositions de simplification administrative.
Comme chef d'entreprise, vous savez mieux que nous que notre pays ne peut pas laisser s'enliser des millions de personnes dans le chômage, en particulier les jeunes. Or, nous savons que si une croissance forte est nécessaire pour réduire le chômage, elle ne sera pas suffisante. C'est pour cette raison que nous avons engagé un effort exceptionnel en faveur de l'emploi des jeunes. C'est pour cette raison que nous souhaitons encourager l'aménagement et la réduction du temps de travail.
Nous sommes convaincus que des négociations sur le temps de travail dans les entreprises et dans les branches sont souhaitable. Tout le monde y a intérêt :
- les entreprises qui ont besoin de plus de réactivité et d'efficacité dans l'organisation du travail ;
- les salariés qui veulent un meilleur équilibre entre vie professionnelle et vie familiale ;
- surtout, les millions de chômeurs qui cherchent, avec anxiété, un emploi.
L'expérience de nombreuses entreprises montre que vous êtes capables de négocier avec succès pour trouver un bon équilibre entre durée du travail, évolution des salaires, organisation et modulation du temps de travail. La création d'emplois doit être la priorité.
La loi d'orientation et d'incitation que nous préparons a pour objectif de faciliter ces discussions. Des allégements de charges favorisant les entreprises de main-d'œuvre ont été annoncés par le Premier ministre lors de la conférence du 10 octobre. La réduction du temps de travail ne doit en effet pas affaiblir la compétitivité des entreprises.
L'objectif de baisse de la durée légale à l'horizon du 1er janvier 2000 ne doit pas être vécu comme un « couperet ». Un bilan des négociations sera réalisé au cours du second semestre 1999 : il tiendra le plus grand compte de la situation économique. Sur cette base, le gouvernement proposera au Parlement les modalités concrètes de mise en œuvre de cet abaissement de la durée légale, notamment en ce qui concerne les heures supplémentaires dont le taux ne pourra pas excéder celui qui prévaut actuellement.
L'action du gouvernement vis-à-vis des entreprises est ainsi guidée par deux convictions que nous savons partager avec la plupart d'entre vous :
- la richesse et l'emploi résultent du développement des entreprises ;
- le succès des entreprises repose sur un dialogue constant avec les salariés. Informer, former et négocier font partie des responsabilités des entreprises de notre pays.
Vous trouverez, ci-joint, une présentation plus détaillée de la politique économique poursuivie depuis cinq mois ainsi qu'un exposé précis de notre démarche en matière d'aménagement et de réduction du temps de travail.
Nous vous prions d'agréer, Madame, Monsieur, l'expression de notre sincère considération.