Déclaration de M. Yves Galland, ministre délégué aux finances et au commerce extérieur, sur la mise en œuvre de la loi sur la concurrence et ses effets sur les prix et sur les nouvelles relations commerciales entre partenaires de la distribution, Paris le 3 février 1997.

Prononcé le

Intervenant(s) : 
  • Yves Galland - Ministre délégué aux finances et au commerce extérieur

Circonstance : Signature d'une convention de partenariat entre Carrefour et ses fournisseurs (PME) le 3 février 1997

Texte intégral

Monsieur le président,
Cher Daniel Bernard,
Mesdames et messieurs,

Je suis particulièrement heureux d’être ici, car j’ai la profonde conviction de le 3 février 1996, une telle réunion eût été difficilement imaginable.

C’était l’époque où dans un climat quelque fois passionné le gouvernement appelait de ses vœux à un rééquilibrage des relations entre distributeurs et producteurs.

C’était l’époque où dans un climat plus morose qu’aujourd’hui le gouvernement cherchait à faire partager sa mobilisation en faveur des PME-PMI, qui avait été tracée quelques semaines auparavant par le Premier ministre, Alain Juppé, à Bordeaux avec le « plan PME-PMI pour la France », plan qui depuis a été remarquablement mis en œuvre par mon collègue et ami Jean-Pierre Raffarin.

C’était l’époque où le gouvernement élaborait les projets de loi sur l’urbanisme commercial et sur la loyauté et l’équilibre des relations commerciales.

Dans une atmosphère conflictuelle et suspicieuse, cette loi sur la concurrence faisait alors l’objet d’un scepticisme général puisque ce sujet sensible n’avait été traité que par voie d’ordonnances depuis 60 ans. On voyait le gouvernement débordé par les corporatismes, on prédisait un monstre législatif et même un retour à l’encadrement des prix.

Que de progrès réalisés aujourd’hui !

D’abord, monsieur le président, quelles que soient les différences qui nous ont séparés par le passé lors de l’élaboration et de la discussion de la loi sur la concurrence, je tiens à vous rendre hommage sur le fait, qu’après les débats parlementaires, vous avez considéré qu’il fallait la mettre en œuvre et la faire respecter dans un état d’esprit, que je tiens à saluer.

Pour les acteurs ici rassemblés, l’importance des enjeux fait que ces premières et très importantes négociations commerciales avec les nouvelles règles du jeu ne sont pas totalement achevées. À la vérité je sais que ces négociations ont substantiellement avancé, contredisant une fois de plus les cassandres qui prédisaient le pire.

La situation actuelle, l’absence de recul un mois seulement après la mise en œuvre effective de la loi, ne me permet pas, honnêtement, de dresser un bilan exhaustif aujourd’hui.

Soyez persuadé que ce premier bilan sera fait par moi-même, en toute rigueur et transparence et avec l’ensemble des éléments de jugement nécessaires, dès le mois de mars prochain.

Ce bilan portera sur :
     - les évolutions des négociations commerciales ;
     - les évolutions objectives des prix. Sur ce sujet essentiel, monsieur le président, vous m’avez personnellement indiqué que, selon votre analyse, les hausses, consécutives aux nouvelles règles sur la revente à perte ou les prix abusivement bas, seraient compensées par des baisses parallèles sur tout un ensemble d’autres produits ; vous savez que ceci a toujours été au cœur de mes convictions ;
     - la mise en œuvre effective par les professionnels des nouvelles possibilités offertes par la libéralisation de l’interdiction du refus de vente ainsi que par la libéralisation des ventes liées ;
     - l’interdiction des déréférencements abusifs.
     
D’ores et déjà, je tiens à saluer le changement d’esprit symbolisé par la manifestation d’aujourd’hui.

J’y vois la volonté clairement manifestée d’un partenariat renforcé entre Carrefour et ses fournisseurs.

Carrefour a engagé depuis de nombreuses années des relations contractuelles de long terme avec ses PME-fournisseurs, avec les produits libres, avec les produits Carrefour, avec la qualité filières ou avec les innovations en termes de sécurité alimentaire. Mais aujourd’hui, le groupe fait un saut « qualitatif » et initie un nouveau type de relations pour créer des comportements différents.

Cette assemblée en est un peu l’« Assemblée constituante ». Il s’agit de favoriser le dialogue avec les PME hors des négociations commerciales en mobilisant les fournisseurs et les équipes de Carrefour.

Je crois que l’initiative qui nous réunit aujourd’hui adresse un signe fort à l’externe, à l’ensemble des acteurs du marché ainsi qu’au personnel de Carrefour et à ses fournisseurs. Ceci ne manquera pas de tisser des relations plus transparentes, plus durables et avec une confiance accrue.

Je salue la convention que vous mettez en œuvre. Je sais que son contenu a été élaboré par un groupe commun PME-Carrefour depuis plusieurs mois. Il s’ensuivra, je sais, un contrat d’engagements proposé aux fournisseurs référencés.

Je salue aussi la mise en place d’une instance de conciliation pour résoudre les problèmes posés en cas de déréférencement, qui sera présidée par M. Claude Villain, inspecteur général des finances. Avec le texte de loi, j’ai voulu mettre un terme aux déréférencements abusifs, je ne peux donc que me réjouir de cette initiative.

J’apprécie tout particulièrement que les engagements souscrits par Carrefour ne fassent l’objet d’aucune contrepartie et ne remettent pas en cause les accords commerciaux existants. De plus, je me réjouis de ce que vous ayez décidé de dépasser les simples déclarations d’intention, avec des engagements concrets.

Je souhaite que dans cet esprit vous soyez un précurseur inspirant l’ensemble de vos collègues de la grande distribution, car tous – et l’ensemble des consommateurs les premiers –, doivent savoir que cette convention est autrement plus utile et fructueuse que la critique systématique et la récupération publicitaire démagogique qui pourrait tenter certains mais qui s’avérerait finalement stérile et sans intérêt.

Enfin, il ne vous surprendra pas que devant un groupe avec 117 hypermarchés en France et 158 dans le reste du monde, que devant un groupe qui réalise un chiffre d’affaires de plus de 145 milliards de francs dans le monde, dont 63 milliards hors de nos frontières, et que devant une assemblée de 500 PME-PMI représentatives de ces 140 000 PME qui totalisent 3 % des exportations françaises, le ministre du Commerce extérieur vous fasse part de quelques convictions sur le formidable « atout France » que représente notre politique économique et financière dans le monde.

Dans ce domaine, nous avons depuis longtemps entamé une collaboration fructueuse et constructive et je suis très heureux d’avoir participé, à votre demande, à l’inauguration de 3 magasins Carrefour en Chine, en Corée et en Turquie.

Le 25 février à 8 h 45 – les marchés monétaires et boursiers nous obligent à être précis ! –, je présenterai le bilan de notre commerce extérieur pour l’année écoulée.

Voilà plusieurs mois, prenant des risques, j’ai pronostiqué que l’excédent atteindrait 120 milliards de francs. Je maintiens ma prévision. C’est la symbolique d’une extraordinaire « dynamique France » à l’international, touchant les grandes entreprises, les producteurs, les distributeurs et les grands prestataires de services.

Cette dynamique bénéficie à beaucoup de nos PME. Demain, avec les réformes mises en œuvre par le gouvernement, elle doit en toucher beaucoup plus encore.

Cet excédent record apporte la démonstration de notre savoir-faire technologique, porteur de croissance et d’emplois pour notre pays.

Carrefour est un membre extraordinairement dynamique de l’association Partenariat France que j’ai créée, depuis bientôt un an, avec 56 groupes français implantés à l’international qui aident des PME françaises à réussir leur première implantation dans le monde.

Je suis convaincu que ce partenariat renforcé entre PME et grands groupes de distribution peut et doit avoir des prolongements internationaux.

Certes, déjà vous êtes un formidable pont-levis pour les implantations françaises dans le monde. Certes, cette réalité varie selon les pays et une enseigne française doit naturellement s’intégrer dans les différents environnements nationaux.

Mais je suis convaincu que là où vous avez 1 % ou 2 % de références françaises, on peut se fixer des objectifs ambitieux et faire encore mieux.

Ainsi, vous contribuerez à l’objectif que je me fixe pour notre commerce extérieur, c’est-à-dire accroître de 70 milliards nos exportations, ce qui représente 1 point de croissance et 250 000 emplois.

Voici un formidable objectif pour l’équipe France à l’international et à l’exportation, qui est incarnée dans son dynamisme ici, aujourd’hui.

Saint-Exupéry disait : « Si tu veux réunir les hommes, apprends-leur à bâtir ensemble ». Merci d’être ses disciples aujourd’hui.