Interviews de M. Jean-François Mancel, secrétaire général du RPR, à RMC le 16 décembre 1996 et à France-Inter le 18, notamment sur la politique de l'emploi et les propositions des socialistes en matière d'emploi, la construction européenne, l'impôt sur la fortune, et le projet de loi Debré sur l'immigration clandestine.

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Média : Emission Forum RMC FR3 - France Inter - RMC

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RMC - lundi 16 décembre 1996

Philippe Lapousterle : Monsieur le secrétaire bonjour. Vous avez applaudi après l'intervention du Président de la République jeudi dernier, apparemment les Français n'ont pas tout à fait réagi comme vous, on dit que 60 % des Français ont trouvé Chirac plein de bonne volonté, mais qu'il n'a pas été convaincant.

Jean-François Mancel : Encore des sondages !

Philippe Lapousterle : Ça existe, ne faites pas semblant de ne pas les lire.

Jean-François Mancel : Bien sûr que les sondages ont un intérêt, ce ne sont pas les sondages qui décident au moment fatidique, ce sont les électeurs. En l'occurrence, je crois qu'il est important que Jacques Chirac se soit exprimé, il a dit beaucoup de choses qui ont été entendues par les Français, il continuera de le faire et ce qu'il nous faut, c'est du temps. Je vous ai toujours dit qu'il nous fallait du temps, ce temps va nous permettre, après l'avoir bien utilisé, de montrer dans le courant de l'année 1997, et surtout dans la deuxième partie de cette année, que les réformes mises en œuvre portent leur fruit et que les Français peuvent retrouver confiance.

Philippe Lapousterle : Il y a un point sur lequel peut-être le message était moins compris que les autres, c'est le point du chômage, quelques dizaines de milliers de stages supplémentaires, est-ce que c'est la réponse au problème du chômage en France ? Sur ce point on n’a pas eu le sentiment de rentrer dans une ère nouvelle.

Jean-François Mancel : Simplement parce que tout ce que nous faisons est destiné à lutter contre le chômage et pour l’emploi. La baisse des taux d'intérêts, qui est aujourd'hui de près de 40 % par rapport à ce qu'ils étaient en 1995, c'est efficace pour la lutte contre le chômage. Le prêt à taux zéro qui va permettre de relancer le secteur du bâtiment, c'est efficace pour lutter contre le chômage. Le redressement de la sécurité sociale, avec en contrepartie des baisses de charges sociales, c'est efficace pour lutter contre le chômage. Tout ça petit à petit accumulé va nous permettre de gagner. Seulement il faut du temps, et le Président de la République a ajouté un point très important, il a annoncé que l'année 1997 serait celle de la lutte contre le chômage des jeunes, tout particulièrement, et ça aussi est essentiel. Et les différentes mesures qu'il a préconisé devrait nous permettre de faire reculer d'une manière significative le chômage chez les jeunes, qui est la chose la plus épouvantable qu'on puisse imaginer pour les nouvelles générations, sans pour autant que ça ait des conséquences négatives sur les moins jeunes.

Philippe Lapousterle : Je pensais à l'instant à ce que vous diriez si les socialistes avaient promis ce que vous avez promis avec les résultats que vous avez.

Jean-François Mancel : Je crois que quand on a un passif aussi lourd à assumer, qui est celui que les socialistes nous ont laissé sur les bras en 1993, puis en 1995 quand Monsieur Mitterrand est parti. D'abord les socialistes devraient faire preuve, eux, de beaucoup de pudeur dans leurs critiques. Quant à nous, il nous faut du temps parce qu'on ne met pas la France de nouveau en marche après l'avoir remise debout, en l'espace de quelques années, alors que les socialistes ont pris deux septennats et dix ans de gouvernement pour arriver à la mettre en panne.

Philippe Lapousterle : Avant de passer au programme des socialistes, un mot sur les affaires qui frappent les responsables du RPR, est-ce que ces mises en examen qui se multiplient ne vont pas gêner le gouvernement et la majorité et ne vont pas brouiller l'image de ceux qui exigent des efforts en ce moment de la part des Français. Est-ce qu'il n'y a pas une difficulté, là ?

Jean-François Mancel : Là encore il faut dire les choses avec beaucoup de clarté. La présomption d'innocence, ça existe. Aujourd'hui effectivement on entend dire, on lit des choses, mais on constate que personne n'est condamné. Donc respectons les principes de notre droit et les individus. J'ai l'impression qu'aujourd'hui on ne respecte plus rien. Le Président de la République y a fait une allusion forte, très importante, en disant deux choses : il faut une indépendance totale de la justice, recherchons les moyens qui peuvent permettre d’y aboutir, et d'autre part respectons la présomption d'innocence, car ça c'est véritablement les droits de l’homme qui sont en cause.

Philippe Lapousterle : En face, Monsieur Jospin a dit hier être à l'heure de la reconquête. Est-ce que le PS vous paraît être en mesure de l'emporter aux prochaines élections ?

Jean-François Mancel : Certainement pas. J'ai trouvé une nouvelle fois, dans toutes les propositions, dans l'amalgame qu’a fait Monsieur Jospin d'une multitude de propositions très diverses, peu de raisons de gagner en 1998, dans la mesure où les Français ne se laisseront pas de nouveau gruger par les socialistes. Quand on dit par exemple qu'on va créer 350 000 emplois pour les jeunes, et que ça va être payé par l'État et par les collectivités locales, je souhaite bon courage à Monsieur Jospin. Qu'il aille consulter un peu les maires socialistes qui se plaignent en permanence d'avoir trop de charges à payer sur leur commune et qu'il aille leur proposer de payer encore plus pour recruter des jeunes. Tout ça n'est pas sérieux, c'est un retour à l'étatisme. La conférence nationale pour fixer les salaires, nous allons dans le sens contraire de tout ce que font aujourd'hui les pays développés. Annoncer également qu'on va pouvoir travailler trente-cinq heures payées trente-neuf, c'est véritablement « on rase gratis tous les matins ». Je crois que tout ça n'est pas très sérieux et c'est en plus couronné par un extraordinaire tête-à-queue en ce qui concerne la conception européenne des socialistes. Il y a un recul très fort dans ce qu’a dit Monsieur Jospin sur la construction de l'Europe, ça me paraît être véritablement terriblement démagogique et tout à fait indigne d'une formation politique qui devrait être responsable.

Philippe Lapousterle : Mais Monsieur Jospin a la réputation de quelqu'un de relativement sérieux, est-ce que finalement le fait que des emplois soient offerts à 700 000 jeunes qui n'en ont pas, est-ce que ça ne vaut pas le prix que ça coûtera, au bout du compte. Parce que les Français ne rejettent pas le programme socialiste, ça coûtera cher mais est-ce qu'il ne faut pas payer pour que tous les jeunes de ce pays aient un travail ?

Jean-François Mancel : Que ça coûte cher, ce n’est pas le problème. Le problème est de savoir où on prend l'argent. Si on prend l'argent de nouveau sur les entreprises ou sur les collectivités locales, ou dans les caisses de l'État, ce que sont finalement les trois origines que l'on peut imaginer, si c'est l'État vous accroissez les impôts, si c'est les collectivités locales vous accroissez également les impôts, et si ce sont les entreprises, ça se traduit généralement par des suppressions d'emplois supplémentaires, c'est-à-dire qu'on recrute des jeunes et on débauche des moins jeunes. Je ne crois pas que ce soit la bonne solution. Vous parliez tout à l'heure de sens de la responsabilité, moi je me demande si celui qui n'était pas le plus responsable au cours de ce week-end, c'était Monsieur Fabius, qui a mis en garde Monsieur Jospin sur les facilités qu'il était en train de s'accorder, parce qu'il s'est sans doute laissé entraîner par cette envie de répondre aux supplices des socialistes qui disaient depuis un bon moment : dites-nous quelque chose, faites-nous quelque chose, on voudrait que vous fassiez la démonstration que la reconquête est en marche. Il l’a fait, mais sur des bases qui sont à mon avis tout a fait bancales.

Philippe Lapousterle : Vous avez assisté ce week-end au colloque des balladuriens, mené par Monsieur Balladur soi-même, est-ce qu’après ce week-end on peut dire que la blessure de l'élection présidentielle, la division entre balladuriens et chiraquiens est refermée ?

Jean-François Mancel : Je vais vous décevoir, mon sentiment est que la blessure est refermée depuis longtemps.

Philippe Lapousterle : Vous êtes seul à avoir vu cette blessure refermée.

Jean-François Mancel : Je constate que les balladuriens et les chiraquiens, comme vous dites, avaient disparu depuis longtemps. Que Monsieur Balladur ait envie de s'exprimer, c'est tout à fait normal, Monsieur Balladur était candidat à l'élection présidentielle et il est ancien Premier ministre. Il continuera d'avoir une originalité, une place dans la vie politique nationale que personne ne lui conteste. Mais tous les gens qui sont adhérents, sympathisants du Rassemblement pour la République, adhérents ou sympathisants de la majorité, sont aujourd'hui derrière Jacques Chirac et soutiennent la politique du gouvernement d'Alain Juppé. La majorité est rassemblée. De temps en temps il y a quelques éclats de voix, mais dans une famille c'est inéluctable.

Philippe Lapousterle : Vous êtes une drôle de famille, quand même.

Jean-François Mancel : Nous sommes une famille rassemblée.

Philippe Lapousterle : Est-ce qu'à Dublin la France n'a pas décidé que les possibilités de ses dirigeants seraient très amoindries dans les années qui viennent, c'est-à-dire que finalement les dirigeants élus par les Français n’auront que de faibles moyens…

Jean-François Mancel : Je n'en ai pas du tout le sentiment, je crois qu'au contraire… Vous savez, quand on construit l'Europe, il est bien évident que l'on doit accepter un certain nombre de compromis. On ne peut pas vivre dans l'Europe demain comme on n'y vivait hier. Il y a des évolutions qui sont effectivement des pertes de responsabilité nationale. Le tout est que ces transferts de responsabilités qui étaient nationales hier et qui deviendront européennes demain ne se traduisent pas par des inconvénients, des difficultés pour les Français. Or en l'occurrence j'ai le sentiment que le Président de la République a suffisamment d'ardeur, de volonté de défendre les intérêts de la France, et il en fait la preuve régulièrement, pour être tout à fait rassuré là-dessus. C'est exactement ce que Jacques Chirac a dit dans son entretien avec les journalistes au cours de cette semaine, il a dit deux choses : un, je souhaite faire épouser l'avenir à mon pays, mais en même temps respecter l'identité nationale à laquelle les Français sont profondément attachés. Ce que nous faisons au niveau européen, c'est exactement cela.

Philippe Lapousterle : Qu'est-ce que vous pensez de la manière dont les nationalistes corses ont reçu l'appel du Président de la République ?

Jean-François Mancel : Le Président de la République a été très clair sur ce point aussi. Il a appelé en Corse tout le monde à la responsabilité… Il y a des irresponsables, il y a des gens qui ne respectent rien, il y a des gens qui ne respectent en tout cas pas les lois de la République, et pour ceux-là il est normal que la République soit impitoyable.

Philippe Lapousterle : Et quelle est votre position sur un point qui divise votre majorité, qui est le fameux problème de l'impôt de solidarité sur la fortune, puisqu'il est question d'exonérer les mille plus grosses fortunes françaises, de peur qu'elles n'aillent à l'étranger de l'impôt qui a été voté l'an dernier sur le capital ?

Jean-François Mancel : C'est un problème qui relève du Parlement, ce n’est pas un problème sur lequel le RPR en tant que tel a une position arrêtée, puisque c'est une affaire relativement de détail dans le débat parlementaire. En ce qui me concerne, je suis tout à fait favorable à l'amendement, pour deux raisons simples. La première, c'est que nous revenons simplement à ce que les socialistes avaient mis en place en 1990. Alors pour une fois, c'est une fois bien rare, mais pour une fois que l'on revient à ce qu'avaient fait les socialistes, j'attendrais d’eux qu’ils nous applaudissent. Deuxièmement, c'est pas du tout un cadeau à des riches, c'est un cadeau à l'emploi, car il est bien évident qu'on ne peut pas en matière de fiscalité faire payer à des gens, quels qu'ils soient, plus qu'ils ne gagnent. À partir de là, c'est un symbole fort de la volonté du gouvernement de contribuer à favoriser tout ce qui a trait à l'emploi. Et ne tombons pas dans des symboles absurdes qui sont évoqués par des socialistes en mal…

Philippe Lapousterle : Et des RPR.

Jean-François Mancel : Eh oui, mais il ne faut pas que ces RPR-là se laissent fragiliser par les quelques criailleries qu'on entend du côté du parti socialiste.

Philippe Lapousterle : Bonne journée, merci, à demain.

 

France Inter - 18 décembre 1996

Annette Ardisson : Jean-François Mancel bonjour. L'impôt de solidarité sur la fortune ne sera donc pas replafonné, le Président l'avait suggéré, les sénateurs le voulaient, les députés hésitaient avant de se laisser convaincre, puis de se rétracter sous la pression du gouvernement qui craint que l'opinion ne comprenne pas cette mesure. Résultat, une impression de désordre, voire de panique.

Jean-François Mancel : Vous savez c'est un peu la tempête dans un verre d’eau. D'abord ça concernait très peu de gens et très peu d'argent. En revanche, on a raconté que c'était destiné à favoriser des privilégiés, c'était pas du tout le cas, c'était destiné à favoriser l'emploi, c'est-à-dire des gens qui exercent des responsabilités importantes dans des entreprises, qui en sont propriétaires et qui donc peuvent créer des emplois ou les maintenir. À partir de là, je crois que la solution qui a été trouvée était la bonne, le Parlement a fait preuve de sagesse, le gouvernement d'intelligence, il va proposer en 1997 un certain nombre de réformes de fond concernant la fiscalité des entreprises, avec un but et un seul but : favoriser la création d’emplois.

Annette Ardisson : D'après certaines informations dont nous disposons, certains contribuables, qui payent l'impôt sur la fortune, seraient prêts à porter plainte devant la Cour européenne pour atteinte aux libertés. Vous imaginez que le gouvernement puisse être condamné sur ce sujet ?

Jean-François Mancel : Mes compétences en la matière sont inexistantes, je ne peux pas me prononcer à la place de la Cour.

Annette Ardisson : Mais de deux choses l'une, ou ce plafonnement était juste parce qu'effectivement l’impôt est confiscatoire pour quelques familles, et à ce moment-là pourquoi ne pas le faire et c'est facile à expliquer, ou bien c'est injuste au regard des millions de chômeurs qu'il y a.

Jean-François Mancel : Le plafonnement était je crois très juste dans la mesure où on ne peut pas demander à un contribuable, quel qu'il soit, de payer plus d'impôt qu'il ne gagne. Ça paraît tout à fait logique, quel que soit le contribuable en question. En revanche, se sont mêlé à cette question beaucoup de symboles. On va privilégier les riches, ce qui était complètement faux. On cherchait simplement à favoriser le maintien sur le territoire national de responsables d'entreprises importantes qui sont des employeurs.

Annette Ardisson : Ça veut dire quand même que vous avez peur de l’opinion.

Jean-François Mancel : Je considère que la solution qui a été trouvée, je vous le disais, est une solution de sagesse et d'intelligence, on arrête de provoquer ce que j'appelais tout à l'heure une tempête dans un verre d'eau, et puis en 1997, d'une manière très sereine, le gouvernement fait des propositions sur la fiscalité des entreprises, je le répète encore, avec une seule volonté : favoriser l'emploi, c'est la priorité numéro un du gouvernement.

Annette Ardisson : Même impression de flottement dans la majorité avec le débat sur l'immigration qui se déroule actuellement au Parlement, où l'on voit le ministre de l'Intérieur et le rapporteur, Pierre Mazeaux, freiner à mort contre une majorité qui voudrait durcir le texte, en expliquant que c'est parce qu'on ne peut pas aller au-delà des limites imposées par la Constitution et le juge constitutionnel.

Jean-François Mancel : Je ne vois pas de flottement. Je vois simplement le débat parlementaire, et le débat parlementaire, c'est quand même la liberté d'expression des parlementaires. Sinon, si les parlementaires ne disent rien, on dit que c'est une chambre d'enregistrement, cette Assemblée nationale, et qu'elle ne sert à rien. Il est normal que les parlementaires s'expriment, débattent. Mais ça ne doit pas faire disparaître l'essentiel du projet Debré. L'essentiel du projet Debré, c'est atteindre un objectif très important pour la cohésion nationale : immigration illégale zéro. C'est tout l'objectif du projet Debré. Les socialistes dans ce domaine on fait des fautes majeures. Ils ont régularisé des centaines de milliers de situations irrégulières d'étrangers en France, ils ont ouvert les portes - Michel Rocard a été jusqu'à dire que la France ne pouvait pas accepter toute la misère du monde - ils ont ouvert les portes de la France a un très grand nombre d'étrangers qui ne devaient pas y entrer, dans des conditions légales, avec les lois de 1993-94 qu'on a appelé les lois Pasqua, nous avons fait beaucoup de progrès dans ce domaine, de façon à contrôler l'immigration. Le projet Debré vient compléter ces lois.

Annette Ardisson : Et quelques bêtises que vous corrigez par ce projet. Notamment ceux qui sont dans des situations invraisemblables comme on l'a vu pour les sans-papiers.

Jean-François Mancel : Pas quelques bêtises, il s'agit simplement d'actualiser régulièrement la législation en fonction de l'évolution de la société. Nous nous sommes aperçus, avec ce qu'on a appelé l'affaire des sans-papiers, qu’il y avait un certain nombre de vides juridiques dans les lois qui avaient été adoptées entre 93 et 95, ces vides juridiques vont également être comblés par la loi Debré. Mais ne perdons pas de vue l'objectif essentiel de la loi Debré : immigration illégale zéro. Et ça c'est très important pour nos concitoyens.

Annette Ardisson : Vous parlez d'évolution de la législation, vous pensez qu'il pourrait y avoir d'autres lois ultérieurement ?

Jean-François Mancel : Je n'en sais absolument rien, ce que je sais en revanche c'est que notre système législatif, s'il ne veut pas devenir complètement obsolète, doit évoluer au fur et à mesure qu’évolue la société.

Annette Ardisson : L'immigration, la sécurité, la justice, c'étaient les trois points à l'ordre du jour du Conseil de l'Union, qui réunit un certain nombre de personnalités RPR et UDF, alors là encore, on a des UDF qui sont beaucoup plus durs que vous sur l'immigration, et qui voudraient notamment qu'en matière de regroupement familial, on soit plus sévère. Est-ce que dans ces craintes, est-ce que dans cette volonté d'avancer plus vite les uns que les autres, il n'y a pas sinon plus que la peur du Front national, ou à travers la peur du Front national, l'influence du Front national maintenant ?

Jean-François Mancel : Je ne le pense pas du tout. Je crois que c'est simplement répondre aux aspirations de nos concitoyens et à une certaine vision que nous avons du rôle de notre pays. La France est et doit rester une terre d'accueil. La France est un pays qui doit respecter les droits de l'homme et la dignité humaine. En revanche, les flux d'immigration que nous connaissons aujourd'hui sont devenus très importants est très différents par rapport à ce que nous connaissions dans le passé. Très importants parce que nous sommes confrontés à une situation de pénurie d'emplois en France, et très différents parce que les populations qui immigrent vers la France aujourd'hui sont moins assimilables que celles d'il y a quelques décennies. À partir de là, nous devons prendre un certain nombre de mesures fortes. C'est ce que nous faisons. Un, je le répète, immigration illégale zéro ; deux, que les étrangers qui veulent rester un certain temps en France y soient bien accueillis à partir du moment où ils respectent les lois de la République ; et troisièmement, pour tous ceux qui veulent devenir français, un système d'assimilation, c'est-à-dire épouser la France, avec son histoire, sa culture, et ses lois. C'est-à-dire les droits mais aussi les devoirs.

Annette Ardisson : L’INSEE annonce à la fois plus de croissance et plus de chômage pour les mois à venir. Du coup, Jacques Barrot, le ministre du Travail, n'est pas content, parce qu'il estime que ça génère de l'angoisse. Est-ce qu'il faut faire taire les statisticiens ?

Jean-François Mancel : non pas du tout, mais les statisticiens se trompent généralement une fois sur deux quand ce n’est pas deux fois sur trois. En l'occurrence ce que je constate, c'est qu'a priori nous allons avoir, et c'est déjà vrai sur la fin de l'année 1996, une accélération de la croissance économique. Qui dit accélération de la croissance économique dit automatiquement création d'emplois supplémentaires. Donc je pense qu'en 1997 nous allons vers une croissance beaucoup plus forte et dans ces conditions, je l'espère et je crois que nous y arriverons, et c'est grâce a la politique qu’a mené le gouvernement, une stabilisation et même peut-être, dans le deuxième semestre, un début de recul du chômage.

Annette Ardisson : On a lu l'article de Balladur hier dans Le Monde, on a entendu François Léotard, vous avez réuni le Conseil de l'Union, est-ce que ça va mieux dans la majorité ?

Jean François Mancel : J'ai constaté, notamment avec Édouard Balladur, puisque j'ai participé samedi à la réunion qu'il organisait, avec nos amis de l’UDF hier au sein du Conseil de l'Union, que la majorité est restait pluraliste, mais particulièrement riche en originalité mais parfaitement unie. Et je suis convaincu que nous allons nous approcher des échéances sur lesquelles les Français nous jugeront, eh bien vous pourrez constater que cette majorité est forte, dynamique, unie et elle répond aux aspirations de nos concitoyens.

Annette Ardisson : Jean-François Mancel merci.