Déclaration de Mme Brigitte Bourguignon, ministre déléguée chargée de l'autonomie, sur les mesures destinées à l'autonomie des personnes âgées et des personnes en situation de handicap inscrites dans le PLFSS 2022, le 29 septembre 2021.

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Circonstance : Conseil de la Caisse nationale de solidarité pour l'autonomie (CNSA) sur le PLFSS pour 2022 29 septembre 2021

Texte intégral

Madame la ministre, chère Sophie 
Madame la présidente du Conseil de la CNSA, chère Marie-Anne Montchamp 
Mesdames, messieurs, bonjour à toutes et tous, 


Nous sommes ici, avec Sophie Cluzel, pour vous présenter les mesures destinées à l'autonomie des personnes âgées et des personnes en situation de handicap inscrites dans le prochain projet de loi de la sécurité sociale. 

Je laisserai évidemment Sophie Cluzel vous présenter les mesures tenant à la politique d'accompagnement du handicap. 

Je crois que ce budget de la sécurité sociale pour 2022 est historique, puisqu'il porte pour la première fois des dépenses affectées à la CNSA, dans le cadre de la nouvelle branche de la sécurité sociale. 

Votre responsabilité en tant que membres de ce Conseil est donc de nature différente des autres années. Cette branche, le gouvernement et la majorité l'ont créé parce que la perte d'autonomie, liée soit à un handicap soit à l'âge, nécessitait une réponse nationale des pouvoirs publics. 

C'était une demande forte du secteur de l'Autonomie et ce depuis de nombreuses années. Cette branche, nous lui avons affecté un financement pérenne et dynamique de 2.4 milliards d'euros dès 2024, qui augmentera pour dépasser les 3 milliards d'euros en 2030. 

Cette branche Autonomie a pour objet de lutter contre les iniquités territoriales dans la prise en charge de la perte d'autonomie et d'accompagner les départements, chefs de file de cette politique, dans le déploiement de réponses fortes face à ces enjeux.

Cette promesse de plus d'équité pour l'autonomie des personnes, mais aussi dans le financement de tous les services à domicile, elle se réalisera dès 2022, avec le tarif plancher horaire de 22€ pour l'APA et la PCH qui sera voté dans cette LFSS. 

Il est en effet inacceptable que dans notre République une personne en perte d'autonomie ne puisse pas bénéficier d'un niveau garanti d'accompagnement, quel que soit son territoire. 

Ce tarif plancher, c'est aussi toute la promesse de la politique menée par la Branche Autonomie de décloisonner les secteurs du handicap et du Grand âge. 

La branche accompagnera les départements dans la mise en oeuvre de ce tarif plancher, en prenant à sa charge l'effort financier que représentera pour les départements concernés le passage à 22 € de l'heure pour l'APA et la PCH. 

Ce tarif plancher sera abondé par une dotation complémentaire, qui visera à renforcer la qualité des interventions à domicile, dans le cadre d'une co-construction avec les départements, les fédérations et les parlementaires. C'est un travail qui sera mené dans les semaines à venir, et que nous avons débuté avec les fédérations hier soir, nous allons l'approfondir avec tous les acteurs du domicile très prochainement. 

Ce tarif plancher sera compensé intégralement aux départements, comme l'a rappelé le Premier Ministre jeudi dernier. Des travaux ont été engagés avec l'ADF sur ces sujets, comme sur celui de la dotation complémentaire, le dialogue est ouvert et nous le voulons fructueux avec les départements.

Notre action pour plus d'équité passe aussi par la mise en place progressive d'un système d'information unique à tous les départements pour la gestion de l'APA. Ce système d'information sera développé et fourni par la CNSA et représentera, non seulement une simplification de gestion et une économie de moyens financiers et humains pour les départements, mais aussi un levier supplémentaire pour renforcer la capacité de la CNSA à accompagner les départements. 

Cet investissement pour plus d'équité dans l'accompagnement à domicile de la perte d'autonomie traduit, en somme, toute l'ambition de la réforme que je porte depuis ma nomination. 


Nous devons transformer la façon dont notre société accompagne la perte d'autonomie de nos concitoyens, en mettant les aspirations des personnes âgées au coeur de l'action publique. 

Vouloir que les personnes âgées vivent à domicile le plus longtemps possible n'est pas, je l'admets, une idée nouvelle. 

Depuis 20 ans, tous les gouvernements et tous les ministres en charge des personnes âgées le disent. Mais les chiffres sont têtus, je n'en n'utiliserai qu'un seul. 

En 2010, 61% des bénéficiaires de l'APA vivait à domicile, aujourd'hui c'est 59%. 

C'est-à-dire que malgré les professions de foi successives, malgré les lois votées, malgré la volonté des personnes âgées elles-mêmes de rester à leurs domiciles, l'action publique n'a pas su remplir son objectif jusqu'à aujourd'hui. 

Il y a une telle brutalité dans ces chiffres, qui dessinent tant d'épreuves de vie que nos concitoyens vivent tous les jours. 

Se résoudre à mettre son parent en EHPAD, se faire une raison, en se disant que ce ne sera pas si mal, qu'il sera entouré, mais toujours se répéter, des années après parfois, qu'il aurait fallu le soutenir à son domicile, mais qu'à l'époque cela semblait si compliqué. 

Ces personnes ne peuvent plus entendre que la priorité est le maintien à domicile, car, dans leur quotidien, elles ne l'ont pas toujours vu cette priorité. 

De là, naît une défiance dans l'action publique, ce à quoi je ne peux me résoudre. 

C'est pourquoi il fallait changer de paradigme. Il fallait le faire dans l'urgence, car si la crise sanitaire a été une épreuve sans précédent pour les acteurs de l'autonomie, les années à venir, avec l'accélération de la transition démographique, nous place face à un défi collectif colossale. 

A l'urgence des besoins, je préfère répondre rapidement et concrètement par un texte de loi budgétaire, que de donner la responsabilité d'agir au prochain gouvernement, et laisser cette défiance s'installer. 

S'attaquer à cette défiance, qui est aussi celle des professionnels du Grand âge, cela devait passer d'abord et avant tout par un grand chantier de revalorisation salariale, qui n'avait que trop tardé. 

Nous avons été au rendez-vous avec un investissement historique de plus de 2,8 milliards d'euros, qui seront consacrés chaque année à ces revalorisations massives. 

Ces revalorisations, je le dis, doivent toucher toutes les aides à domicile, y compris celles qui sont employées par des structures privés lucratives. Avec la mise en place du tarif national, qui sera abondé par la dotation complémentaire, j'en appelle donc à la responsabilité des acteurs privé du domicile pour engager le dialogue social sans plus attendre.

Permettre le soutien à domicile, c'est aussi garantir un financement aux services de soins qui correspondent à la perte d'autonomie de la personne. Cette réforme de la tarification des SSIAD, qui dure depuis maintenant de nombreuses années, je souhaite qu'elle aboutisse dans cette LFSS. 

Permettre le soutien à domicile, c'est enfin de renforcer la coordination entre les différents types de services à domicile, pour que les personnes accompagnées à domicile et leurs aidants ne soient plus obligées de faire ce travail elles-mêmes. C'est en ce sens, que nous construisons, pas à pas, le SAAD de demain. 

Agir contre cette défiance, cela passe aussi par la transformation du modèle des EHPAD. 

Car rien n'est pire pour des proches, qui ont accepté de mettre son parent en EHPAD, que de réaliser qu'il ne bénéficie pas du bon accompagnement au sein de son établissement, qu'il multiplie les entrées aux urgences et que le temps de soignant est trop insuffisant. 

C'est pourquoi nous faisons encore une fois un effort financier supplémentaire à destination de ces établissements, pour augmenter la présence du médecin coordonnateur, pour généraliser les astreintes d'infirmiers de nuit, pour pérenniser les équipes mobiles gériatriques et d'hygiènes. Nous renforçons aussi les moyens dédiés à la prise en charge des personnes atteintes de maladies neurodégénératives, comme j'ai pu l'annoncer lundi lors des Assises de la santé mentale. 

C'est pourquoi aussi nous nous engageons dans le recrutement de 10 000 personnels soignants supplémentaires sur 4 ans, qui s'ajoutent au 10 000 recrutements financés depuis 2017, c'est-à-dire 10% des effectifs des établissements. 

Créer des postes, sans les pourvoir, je l'ai dit et je le redis : cela ne sert à rien. C'est pourquoi il fallait travailler à la fidélisation des professionnels pour lutter contre l'absentéisme, avec les revalorisations du Ségur mais aussi une meilleure qualité de vie au travail, avec les investissements dans les petits équipements du quotidien dans le cadre du Ségur de l'investissement. 

Transformer le modèle des EHPAD, c'est aussi les adapter au besoin des territoires. 

A ce titre, nous ouvrons une enveloppe de 20 M€ en 2022 qui iront jusqu'à 80 M€ en 2025, pour donner la possibilité aux EHPAD d'assurer une nouvelle mission de centre de ressources territorial pour les professionnels. Cette mission repose sur des formations, du partage de bonnes pratiques, de la mise à disposition de plateaux techniques, ainsi que pour les personnes âgées du territoire et leurs aidants, avec de l'animation ou de l'hébergement temporaire. Mais nous en sommes au début et devons co construire cet EHPAD de demain avec vous, acteurs des EHPAD et du domicile ainsi que les départements.

Par ailleurs, les EHPAD pourront proposer un accompagnement « hors les murs » pour certaines personnes âgées à domicile, nécessitant un accompagnement à domicile plus intensif dans le but d'éviter justement une entrée en établissement qu'on croyait hier inéluctable.


Voilà, mesdames et messieurs, notre réforme pour l'Autonomie. 

Au total, c'est un effort global supplémentaire de plus de 400M€ de mesures nouvelles que nous consacrerons pour l'autonomie dès 2022, et qui montera progressivement en charge pour atteindre de l'ordre de 1,3 Md€ supplémentaires en 2025. 

C'est donc une véritable trajectoire pluriannuelle que nous engageons pour l'Autonomie, et ce grâce à la création de la 5e branche de la sécurité sociale. 

Un document de présentation détaillé de ces mesures va vous être présenté par la suite. 

Mesdames, messieurs, cette réforme agira concrètement dans le quotidien des personnes âgées dès l'année prochaine. 

Elle est une étape essentielle pour que, demain, la perte d'autonomie ne sera plus synonyme de perte de citoyenneté, ou d'angoisse pour ses proches.

Soyons collective fiers de ces avancées, que vous avez toutes et tous contribué à faire naître et faire vivre, du fait de votre engagement de longue date au service de l'Autonomie. 

Soyons confinant dans l'avenir, car désormais avec cette réforme, la politique de l'Autonomie entre enfin dans le quotidien des français. 


Je vous remercie, je passe désormais la parole à Sophie Cluzel. 


Source https://www.cnsa.fr, le 4 octobre 2021