Texte intégral
Le ministre de l'Économie, des Finances et de la Souveraineté industrielle et numérique a présenté un projet de loi ratifiant l'ordonnance n° 2024-936 du 15 octobre 2024 relative aux marchés de crypto-actifs et l'ordonnance n° 2024-937 du 15 octobre 2024 relative au renforcement des obligations de lutte contre le blanchiment de capitaux et le financement du terrorisme en matière de transfert de crypto-actifs.
Ces deux ordonnances ont été prises sur le fondement de l'article 6 de la loi n° 2024-364 du 22 avril 2024 portant diverses dispositions d'adaptation au droit de l'Union européenne en matière d'économie, de finances, de transition écologique, de droit pénal, de droit social et en matière agricole, et avaient été présentées au conseil des ministres du 15 octobre 2024.
Pour rappel, l'ordonnance relative aux marchés de crypto-actifs vise à adapter les dispositions du code monétaire et financier, mais aussi d'autres codes ou lois, pour assurer, à l'entrée en application du règlement (UE) 2023/1114 du Parlement européen et du Conseil du 31 mai 2023 sur les marchés de crypto-actifs, et modifiant les règlements (UE) 1093/2010 et (UE) 1095/2010 et les directives 2013/36/UE et (UE) 2019/1937 (dit règlement "MiCA"), leur cohérence et leur conformité à ce règlement et à définir les compétences de l'Autorité des marchés financiers (AMF) et de l'Autorité de contrôle prudentiel et de résolution (ACPR) pour l'application dudit règlement.
Inspiré en partie du régime des prestataires de services sur actifs numériques (PSAN) créé par la loi PACTE du 22 mai 2019, le règlement "MiCA" établit un cadre européen harmonisé en matière de crypto-actifs, tout en protégeant les consommateurs des risques inhérents à leur utilisation. Ce cadre concerne à la fois les émetteurs de crypto-actifs, dont les "stablecoins" (jetons de monnaie électronique et jetons se référant à un ou à des actifs), et les prestataires de services sur crypto-actifs (PSCA), qui devront être implantés et autorisés dans l'Union européenne pour pouvoir y exercer et seront soumis à de nombreuses obligations en matière prudentielle, de gouvernance, ou encore d'abus de marché, au-delà des obligations du cadre national actuel. Ce règlement entrera en application à partir du 30 décembre 2024, à l'exception de ses dispositions relatives aux stablecoins qui sont déjà applicables depuis le 30 juin dernier.
En ce sens, l'ordonnance prévoit les principales dispositions suivantes :
- elle adapte le régime national actuel des PSAN, qui sera mis en extinction à la fin de la période transitoire prévue pour les PSAN déjà autorisés avant la date d'entrée en vigueur du règlement "MiCA", c'est-à-dire au 1er juillet 2026 ;
- elle adapte le cadre applicable en matière de démarchage, de quasi-démarchage, de publicité, de parrainage et d'influence commerciale pour tirer les conséquences du règlement "MiCA" ;
- plus largement, l'ordonnance modifie plusieurs codes pour adapter leur terminologie à l'entrée en application du règlement "MiCA".
En outre, certaines obligations nouvelles sont introduites, dont notamment :
un régime juridique à part entière relatif aux actifs numériques. Ces dispositions clarifient la nature juridique des actifs numériques ainsi que leur régime de transfert de propriété ;
la répartition des compétences entre l'AMF et l'ACPR en matière d'agrément et de supervision des prestataires de services sur crypto-actifs, des émetteurs de jetons de monnaie électronique et de jetons se référant à un ou des actifs ainsi qu'en matière de surveillance des abus de marché portant sur des crypto-actifs.
Par ailleurs, l'ordonnance prévoit que le régime applicable à la Caisse des dépôts et consignations, aujourd'hui enregistrée en tant que PSAN en France, sera précisé ultérieurement par voie réglementaire. Exclue du champ d'application du règlement "MiCA" en tant qu'autorité publique, la Caisse sera néanmoins soumise à un régime ad hoc adaptant les dispositions du règlement "MiCA" à son statut spécifique. L'ensemble de la supervision des activités de la Caisse en matière de crypto-actifs sera confié à l'ACPR, à la fois en matière de lutte contre le blanchiment et le financement du terrorisme et en matière prudentielle. Ces dispositions entreront en application au 1er juillet 2026.
La seconde ordonnance transpose dans le code monétaire et financier les dispositions de la directive (UE) 2015/849 du Parlement européen et du Conseil du 20 mai 2015 relative à la prévention de l'utilisation du système financier aux fins du blanchiment de capitaux ou du financement du terrorisme dans leur rédaction telle que modifiée par le règlement (UE) 2023/1113 du Parlement européen et du Conseil du 31 mai 2023 sur les informations accompagnant les transferts de fonds et de certains crypto-actifs (dit règlement "TFR").
Ce règlement, adopté en même temps que le règlement "MiCA", assujettit les prestataires de crypto-actifs aux règles européennes en matière de lutte contre le blanchiment de capitaux et le financement du terrorisme. Ces prestataires étant déjà assujettis en droit national, la majorité des dispositions de l'ordonnance visent à adapter la terminologie du code monétaire et financier au régime issu du règlement "MiCA" en ce qui concerne les obligations en matière de lutte contre le blanchiment et le financement du terrorisme des prestataires de services sur crypto-actifs.
Certaines obligations nouvelles sont cependant introduites, dont notamment :
- des mesures de vigilance adaptées aux spécificités des transferts de crypto-actifs exécutés vers ou depuis un portefeuille auto-hébergé ;
- l'application aux relations de correspondance entre un prestataire de crypto-actifs établi et enregistré dans l'Union européenne et un organisme financier établi dans une juridiction tierce des mesures d'atténuation des risques de blanchiment de capitaux et de financement du terrorisme semblables à celles prévues pour les relations de correspondance bancaire classique ;
- l'obligation pour les prestataires de services sur crypto-actifs, sur demande d'un État membre dans lequel ils sont établis sous une forme autre qu'une succursale et lorsque leur siège social est situé dans un autre État membre, de nommer un point de contact national chargé de veiller au respect des règles en matière de lutte contre le blanchiment de capitaux et le financement du terrorisme.
Les dispositions de ces deux ordonnances sont entrées en application à compter du 30 décembre 2024, à l'exception des dispositions de l'ordonnance relative aux marchés de crypto-actifs portant sur les jetons de monnaie électronique et les jetons se référant à un ou des actifs, qui étaient déjà entrées en application dès le lendemain de sa publication. Les dispositions de l'ordonnance mettant définitivement un terme au régime national PSAN entreront également en application à partir du 1er juillet 2026, à l'issue de la période transitoire prévue pour les PSAN déjà autorisés avant la date d'entrée en vigueur du règlement "MiCA".