Texte intégral
JOURNALISTE
C'est Catherine VAUTRIN, ministre du Travail, de la Santé, des Solidarités et de la Famille, qui est l'invitée des 4V ce matin. Bonjour à vous et bienvenue.
JULIEN ARNAUD
Bonjour madame la ministre. Alors, c'est vrai qu'on a commencé par une bonne nouvelle : du record, et puis, on a fini par une nouvelle un petit peu moins bonne. Peut-être une première réponse là-dessus. Vous dites quoi à ces microentrepreneurs qui vont être obligés, donc, de récolter la TVA et de s'occuper de ce dossier dont ils ne s'occupaient pas avant ?
CATHERINE VAUTRIN
Évidemment, j'ai envie, d'abord, de, surtout, continuer, parce qu'on le voit, l'activité de transport, commerce et soutien scolaire, c'est hyper important dans notre pays.
JULIEN ARNAUD
Oui, mais vous ne leur facilitez pas la tâche.
CATHERINE VAUTRIN
Je crois que, vous savez, notre sujet est simple, la situation financière du pays est extrêmement compliquée. On va en parler. Le budget est un budget en déficit. Et la difficulté pour notre pays, c'est d'essayer que chacun, d'une manière ou d'une autre, participe à réduire la dette et participe à financer.
JULIEN ARNAUD
Alors justement, la question du budget qui est au menu de l'Assemblée nationale, deux motions de censure examinées aujourd'hui, très vraisemblablement rejetées. Ni le PS ni le RN ne vont les voter, sauf le théâtre. Vous leur dites quoi ce matin ? Merci le PS, merci le RN ?
CATHERINE VAUTRIN
Moi, je dis merci à tous les groupes que nous avons reçus, parce que, vous le savez, nous avons été nommés, le 23 décembre, et en fait, dès le 2 janvier, nous avons rencontré tous les groupes de l'Assemblée, comme du Sénat, qui ont accepté de venir nous voir. Le but de la manœuvre, c'est…
JULIEN ARNAUD
Donc, pas LFI ?
CATHERINE VAUTRIN
Donc, pas LFI, pour être clair, exactement. Et donc, ça faisait une quinzaine de rendez-vous. Vous ajoutez évidemment les partenaires sociaux, les patrons des entreprises comme organisations syndicales de salariés, bien sûr. Et l'idée, ça a été d'échanger avec eux sur les grandes lignes, à la fois du projet de loi de financement de la sécurité sociale, du budget du pays, pour regarder comment on pouvait trouver un plus petit dénominateur commun à défaut de trouver un accord absolu. L'idée, c'est que notre pays a besoin d'un budget pour fonctionner. Là, nous sommes, la télévision, les Français se souviennent de ce dont il s'agit, nous sommes en service minimum. Ça veut dire que nous ne pouvons démarrer aucun nouveau projet. Les communes attendent, par exemple, pour lancer les travaux, on parlait des entreprises, la commande publique, c'est 70 % de la commande des petites entreprises.
JULIEN ARNAUD
Alors, il y a eu ça, peut-être une forme de prise de conscience, c'est ce que vous nous dites. Il y a aussi eu des concessions, notamment, au Parti Socialiste. Le Député Charles DE COURSON, les chiffres à 7 milliards d'Euros, dont 5,8 milliards pour la Sécu. Est-ce que vous confirmez ces chiffres ?
CATHERINE VAUTRIN
Alors, on peut, ce matin, faire un débat de chiffres. Moi, je vais être très concrète pour nos concitoyens et donner deux exemples. Effectivement, quand on regarde le projet de loi de financement de la Sécurité Sociale, un des points clés du désaccord, c'était la non-indexation des retraites. Pour ne prendre que cet exemple-là, vous êtes déjà à 2 milliards d'Euro. Vous aviez un sujet de tickets modérateurs, c'est-à-dire, de moins remboursés, pour être très concret, d'un côté les médicaments, de l'autre côté les consultations médicales. Ça, ça représente 1 milliard d'Euro. Vous voyez, on est déjà à 3 milliards d'euros.
JULIEN ARNAUD
Alors, juste, je vous interromps, parce que sur ce point précis, les mutuelles sont furieuses, parce qu'elles disent "Le Gouvernement s'est fichu de nous là-dessus, parce qu'en fait, c'est nous, les mutuelles, qui allons payer la note." Et elles sont en colère, elles n'arrêtent pas de le dire.
CATHERINE VAUTRIN
Mais non, les mutuelles, très concrètement, elles ont prélevé les cotisations. J'imagine que vous voyez comment fonctionne votre mutuelle. Dès octobre, novembre plus tard, vous recevez les mensualités que vous allez payer pour l'année qui arrive. Et évidemment, ces mutuelles avaient anticipé le fait qu'il y aurait un ticket modérateur.
JULIEN ARNAUD
Elles disent que ce n'est pas vrai. Elles disent : "Août-Septembre, le Gouvernement ment."
CATHERINE VAUTRIN
Ce n'était pas août-septembre, c'était au mois d'octobre-novembre. Et donc, aujourd'hui, ce que nous estimons, c'est que dans les augmentations portées par les mutuelles, il y avait bien ce milliard d'euros. Et c'est la raison pour laquelle, ça n'est d'ailleurs pas dans le PLFSS.
JULIEN ARNAUD
Projet de loi de finance de la Sécu.
CATHERINE VAUTRIN
Parce que pour des raisons techniques budgétaires, il faut un texte spécifique. Il y aura donc, effectivement, un texte qui revient sur les taxes, qui augmentera la taxe des mutuelles et qui permettra de générer une recette d'un milliard d'euros, qui prend en charge l'abandon de la notion du ticket modérateur, tant pour les médicaments que pour les consultations médicales.
JULIEN ARNAUD
Et qui compensera donc sur le déremboursement. Alors, vous nous avez parlé des retraites. C'est vrai qu'on a l'impression que c'est un tabou absolu, les retraites. Ça veut dire qu'on n'y touchera jamais, aux retraites, ou pas ?
CATHERINE VAUTRIN
Les retraites ne sont absolument pas un tabou. En revanche, vous l'avez vu, le Premier ministre a fait un choix qu'il a expliqué en disant "Je confie aux partenaires sociaux le sujet de travailler sur les retraites." À partir de là, deux sujets clairs. Le premier, le président de la Cour des comptes est en train de travailler l'ensemble des chiffres pour qu'il y ait un diagnostic partagé, résultat : 19 février. À partir de là, l'idée c'est que les organisations de salariés patronales et évidemment de salariés se retrouvent et, ensemble, travaillent sur le sujet. Donc, évidemment, à ce stade, je ne vais pas commencer à dire "Il faut faire ci, il faut faire ça". Laissons ce travail se faire et tirons-en les conclusions. Et d'ailleurs, François ASSELIN, l'ancien président de CPME, les petites entreprises, disait : "Il y a peu de pays dans le monde qui font autant confiance aux partenaires sociaux pour leur confier un sujet aussi important."
JULIEN ARNAUD
Vous savez très bien que ça ne débouchera pas sur un accord. Les positions sont bien trop antinomiques pour ça.
CATHERINE VAUTRIN
Vous êtes hyper pessimiste ce matin.
JULIEN ARNAUD
Mais ils le disent absolument tous. On a reçu le patron du Medef, hier, qui ne croyait pas du tout à un accord, Patrick MARTIN. D'ailleurs, sur les retraites, il y a cette petite musique qui est en train de monter. C'est encore, ce matin, à la une de l'opinion, de la capitalisation. C'est porté par la droite dont vous êtes issu depuis longtemps. Gabriel ATTAL, également, ce week-end, a dit qu'il était favorable. Est-ce que vous dites oui à la capitalisation ? Il faut le regarder de près.
CATHERINE VAUTRIN
Mais Julien ARNAUD, ce n'est pas nouveau. Regardez le nombre d'agents de la fonction publique qui ont des Préfons.
JULIEN ARNAUD
Oui, mais est-ce qu'il faut élargir ?
CATHERINE VAUTRIN
Regardez le nombre de Français qui ont déjà des programmes personnels. Donc, toute la question, laissons, déjà, travailler, aussi bien, les partenaires sociaux et nous discuterons après avec eux. Ne commençons pas à ambiancer, alors même qu'ils n'ont pas commencé leur travail.
JULIEN ARNAUD
Alors, sur le travail, justement, la droite propose, demain, de fusionner les aides sociales et de faire en sorte qu'elles ne dépassent pas 70 Euros du SMIC. C'est un des projets que porte Laurent WAUQUIEZ, que vous connaissez bien. Est-ce que vous soutenez ce projet ou pas ?
CATHERINE VAUTRIN
Moi, je trouve que le principe est à la fois plus simple et met en avant le fait que le travail est toujours plus rémunérateur. Là-dessus, je suis tout-à-fait d'accord. Le petit codicille non négligeable dans ce texte, c'est que tel qu'il va être proposé demain, il prévoit les allocations familiales dès le premier enfant. Quand on parle du budget, autant vous dire que là, on est en milliards d'Euros et qu'on n'a pas tout à fait le budget pour aller là-dessus. Donc, l'idée est bonne, mais le texte mérite d'être travaillé.
JULIEN ARNAUD
Ah, mais quand même, on va regarder en détail cette proposition. Autre sujet qui dépend de votre compétence, c'est le sujet de la sécurité alimentaire, et il est à la une, encore, ce matin, avec l'affaire "Nestlé". On verra l'ampleur que prend cette affaire. Selon des révélations de presse qui ont été publiées hier, les autorités sanitaires avaient alerté sur des pratiques du groupe Nestlé concernant les eaux minérales du groupe. Matignon et l’Élysée auraient fermé les yeux d'après ces révélations de presse. Que savez-vous et que pouvez-vous nous dire, ce matin, de cette affaire ?
CATHERINE VAUTRIN
Alors, premièrement, moi, je n'étais pas en charge à cette époque, donc, je ne connais pas le dossier.
JULIEN ARNAUD
Bien sûr.
CATHERINE VAUTRIN
Deuxièmement il y a une commission d'enquête, évidemment l'engagement du Gouvernement. Et présentant le Gouvernement, je prends cet engagement. C'est évidemment de donner tous les éléments, ça a d'ailleurs, déjà, été fait. Pour la commission d'enquête, des gens sont auditionnés sous serment et l'idée, évidemment, c'est que tout soit examiné, plus globalement sur la sécurité alimentaire en général, c'est un sujet majeur dans notre pays, parfaitement interministériel : depuis l'agriculture, l'industrie jusqu'à la santé. Et moi, je suis très engagée sur ce sujet, parce qu'on a beaucoup parlé, depuis des années, de prix bas. Moi, je souhaite que l'on puisse parler de bonne qualité pour la santé.
JULIEN ARNAUD
Alors, justement.
CATHERINE VAUTRIN
C'est un sujet extrêmement important. Vous allez me parler Aspartame, j'imagine.
JULIEN ARNAUD
On va essayer, en-tout-cas.
CATHERINE VAUTRIN
Dernier sujet qui vient de sortir sur, peut-être, cet élément qui générerait des cancers, je n'ai pas, au moment où je vous parle, les informations sur le sujet, mais ça mérite d'être surveillé, comme mérite d'être surveillé toute l'alimentation et tous les sujets, notamment, liés au sucre, qui sont des sujets importants. On a vu dans une enquête récente que les produits dits marques de distributeurs auraient des taux de sucre plus importants que d'autres produits, c'est extrêmement important pour la santé des Français d'être vigilants.
JULIEN ARNAUD
Mais juste sur Nestlé, pour préciser les choses. Et on rappelle que le Président de la République s'est exprimé et a dit hier : "Ni entente, ni connivence." Il n'y a pas de risque pour la santé de ceux qui consomment ces eaux minérales aujourd'hui ?
CATHERINE VAUTRIN
Écoutez. Toutes les eaux minérales font l'objet de contrôle. Les agences régionales de santé, évidemment, sont particulièrement vigilantes et la France est l'un des pays qui contrôlent le plus, donc, la vigilance est là, bien évidemment.
JULIEN ARNAUD
Il y a également, peut-être, une proposition sur laquelle on voulait vous entendre, puisqu'il nous reste quelques secondes, qui semble un petit peu iconoclaste, c'est le maire de Grenoble, Éric PIOLLE, qui est un fervent partisan de la dépénalisation du cannabis. Et lui, il propose des contrôles salivaires anonymes pour les élus et pour les hauts fonctionnaires, pour montrer l'ampleur du problème de la drogue et comment elle est répandue dans tous les milieux. Est-ce que ça vous semble une bonne idée ? Est-ce que vous dites : "Pourquoi pas ?"
CATHERINE VAUTRIN
Alors, écoutez-moi. Il me contrôle quand il veut, pour être clair. Une fois qu'on a dit ça, à mon avis, c'est un peu démago, mais ce qui m'intéresse, c'est de savoir ce qu'il a fait de particulièrement intéressant à Grenoble qu'on pourrait utiliser partout ailleurs, parce que c'est un fléau et toute bonne mesure peut être reprise. Je n'ai pas connaissance de choses particulières à Grenoble, mais je suis preneuse de regarder les expérimentations.
JULIEN ARNAUD
Vous êtes opposé à la dépénalisation, lui, il propose un référendum sur la dépénalisation.
CATHERINE VAUTRIN
Moi, mon sujet, déjà, c'est d'alerter nos concitoyens sur les dangers de la pratique de la drogue, parce que, clairement, c'est un énorme sujet de santé publique.
JULIEN ARNAUD
Il y a plein de sujets qui sont au menu de votre portefeuille, on l'a entendu, ce matin, les réponses de Catherine VAUTRIN avant les votes, donc, sur l'émotion de censure cet après-midi. Merci beaucoup.
CATHERINE VAUTRIN
Merci à vous.
Source : Service d'information du Gouvernement, le 6 février 2025