Texte intégral
THOMAS SOTTO
Elle est la porte-parole d'un Gouvernement qui slalome entre les problèmes et les dossiers chauds. Maud BREGEON est donc l'invitée de RTL matin. Bonjour et bienvenue sur RTL Maud BREGEON.
MAUD BREGEON
Bonjour à tous.
THOMAS SOTTO
Les sujets ne manquent pas. On va les prendre dans l'ordre. Et on commence avec les inquiétudes multiples des agriculteurs. On attaque avec le Mercosur, le traité commercial de libre-échange avec l'Amérique latine, dont la signature est reportée au mois de janvier. Décision des 27 cette nuit, à Bruxelles. "Il faut que le texte change de nature", a dit Emmanuel MACRON cette nuit. Ça veut dire quoi ?
MAUD BREGEON
D'abord, je voudrais vous dire que les négociations hier ont été très dures et très tendues à Bruxelles. Et pour autant, la France a gagné ce bras de fer.
THOMAS SOTTO
Provisoirement ?
MAUD BREGEON
La France a gagné ce bras de fer. Nous avons demandé le report. Depuis plusieurs semaines maintenant, nous avons exprimé le fait que les conditions n'étaient pas remplies, que le compte n'y était pas. Il reste des combats à mener : sur la question des clauses de sauvegarde, sur le frein, sur la question des mesures miroirs, donc de la réciprocité, sur la question des contrôles, sur la question de la PAC, du revenu des agriculteurs pour les prochaines années. Aujourd'hui, il est prévu 20 % de moins dans la PAC telle qu'elle est en train de négocier.
THOMAS SOTTO
Le patron de la coordination rurale disait tout à l'heure sur RTL : "Il sera signé. C'est un rideau de fumée". Est-ce que ça ne s'appelle pas reculer pour mieux sauter ?
MAUD BREGEON
Notre position, elle est constante. Et elle est claire. L'objectif du Président de la République, c'est de protéger les agriculteurs. Et c'est de protéger la sécurité alimentaire des Français.
THOMAS SOTTO
Donc, si on n'est pas content, même en janvier, on ne signera pas ?
MAUD BREGEON
Et on devrait parler davantage de sécurité alimentaire, parce qu'on ne peut pas accepter que des produits qu'on interdit dans nos champs arrivent dans l'assiette des Français. Donc, notre position, elle ne variera pas. Si nos conditions ne sont pas remplies, nous ne signerons pas ce traité.
THOMAS SOTTO
Ni en janvier, ni en février, ni en mars ?
MAUD BREGEON
Mais nous allons nous battre. Nous allons nous battre pour avoir ces avancées. Il y a déjà eu des avancées. Et donc, on continue dans ce sens-là, encore une fois, avec les trois exigences françaises qui sont sur la table depuis longtemps maintenant, et avec cette question, je le redis, de la PAC, qui est absolument centrale, parce que ça concerne le revenu de nos agriculteurs.
THOMAS SOTTO
Et donc, je vous repose la question, Maud BREGEON : si la France n'obtient pas satisfaction sur ces trois, même ces quatre points-là, elle ne signera pas ?
MAUD BREGEON
Si les exigences ne sont pas remplies, la France ne signera pas pour une raison simple. Encore une fois, l'objectif de protéger les agriculteurs et de protéger les consommateurs français est absolument primordial et central pour le Président de la République.
THOMAS SOTTO
Autre volet de la crise agricole : l'épizootie de Dermatose. Combien reste-t-il de foyers de dermatose dans le pays ce matin ?
MAUD BREGEON
Aujourd'hui, il n'y a plus de foyers de dermatose à ma connaissance.
THOMAS SOTTO
Zéro ?
MAUD BREGEON
Ce que je peux vous dire, en revanche, c'est que la stratégie vaccinale qui touche les huit départements au-dessus de l'Espagne, donc en Nouvelle-Aquitaine et en Occitanie, avance. Et on a signé la mobilisation générale. On a 100 % des Pyrénées-Orientales, pour vous donner cet exemple, qui a été vaccinée. 60 % de l'Aude qui a été vaccinée, et 30 % de l'Ariège. On a beaucoup parlé ces derniers jours, vous le savez. L'objectif de vacciner tout le département de l'Ariège, tous les bovins du département de l'Ariège, sera tenu avant le 31 décembre.
THOMAS SOTTO
Avant le 31 décembre ?
MAUD BREGEON
Avant le 31 décembre. On a déjà réalisé…
THOMAS SOTTO
Et l'ensemble de la couverture vaccinale, les 750 000 doses, c'est pour avant le 31 décembre aussi ?
MAUD BREGEON
Les départements avancent et termineront en janvier.
THOMAS SOTTO
D'accord.
MAUD BREGEON
Vous savez que l'ensemble des doses ont été livrés. Il y a 750 000 bovins à vacciner.
THOMAS SOTTO
Il y en a assez, des doses ?
MAUD BREGEON
On a 900 000 doses sur place.
THOMAS SOTTO
D'accord.
MAUD BREGEON
Donc, le compte y est. Les préfets sont largement mobilisés. On a mobilisé les vétérinaires, vous le savez, des vétérinaires de l'armée, des moyens de l'armée pour faire venir les vaccins…
THOMAS SOTTO
Les conditions de sécurité pour ces vétérinaires qui sont très souvent menacés ?
MAUD BREGEON
Et donc, à moyen, pardonnez-moi, à situation exceptionnelle, moyens exceptionnels. Et nous protégeons, bien sûr, autant que nécessaire les vétérinaires. Mais enfin, aujourd'hui, il y a un dialogue qui se noue. Et les agriculteurs comprennent bien. C'était d'ailleurs leur demande, que cette vaccination, elle est nécessaire, parce que c'est ce qui permet de protéger leur cheptel.
THOMAS SOTTO
Quand est-ce qu'on pourra dire du coup : "OK, l'épidémie est derrière nous" ? C'est quoi l'objectif ?
MAUD BREGEON
Le plus rapidement possible. Nous, on se bat avec deux piliers : la vaccination et l'abattage lorsque c'est nécessaire. Et je rappelle, parce que je sais que la question de l'abattage a créé beaucoup de débats. Ce n'était pas une décision politique. C'est une décision sanitaire.
THOMAS SOTTO
Et ça reste la doctrine ?
MAUD BREGEON
Oui, parce qu'elle a été validée par ce qu'on appelle ce Parlement sanitaire qui compose des éleveurs, des vétérinaires, l'ANSES, les chambres d'agriculture, les organisations syndicales. L'ennemi, c'est le virus. Voilà.
THOMAS SOTTO
Bon, il y a beaucoup d'inquiétudes autour des points de blocage, parce qu'il y en a encore pas mal, des points de blocage ce matin : sur l'A20, l'A63, l'A89, l'A64, l'A75. Il y a des agriculteurs sont réunis en ce moment devant la maison du couple MACRON, au Touquet. Des tracteurs sur la route des vacances s'interrogent la Dépêche du Midi en une. La colère agricole s'installe dans la durée. Qu'est-ce que vous leur dites ? Il faut partir maintenant, il faut arrêter les blocages ou est-ce qu'il y a toujours une tolérance ?
MAUD BREGEON
Je leur dis : je sais que les agriculteurs sont conscients que les Français vont partir en vacances. Pour certains, aujourd'hui, ce soir, dans le week-end. Ils vont aller retrouver leur famille pour les fêtes de Noël. Et les Français doivent pouvoir aller retrouver sereinement leur famille. De même que les commerçants, parce qu'on est aussi dans une période où les commerçants travaillent beaucoup, doivent pouvoir faire fonctionner leurs commerces et leurs entreprises.
THOMAS SOTTO
Donc, vous voulez plus de blocages sur les routes pour les départs en vacances ?
MAUD BREGEON
Nous ne tolérerons plus de nouveaux blocages. Et nous ferons tout ce qui est nécessaire. Et je le dis aux gens qui s'apprêtent peut-être à partir, pour que les Françaises et les Français puissent aller retrouver sereinement leur famille.
THOMAS SOTTO
À partir de quand, plus de blocages ?
MAUD BREGEON
Nous le ferons encore une fois avec discernement. Et c'est la consigne qui a été donnée par Laurent NUNEZ aux forces de l'ordre. On ne veut pas opposer les policiers, les gendarmes et les agriculteurs.
THOMAS SOTTO
Discernement et fermeté, donc.
MAUD BREGEON
Mais pour autant, bien sûr que les Français doivent pouvoir rejoindre leur famille pour ces moments de fête. Ce sont toujours des moments particuliers, importants, familiaux. Donc, voilà. C'est aussi notre responsabilité.
THOMAS SOTTO
Autre sujet, Maud BREGEON : la recherche d'un budget pour le pays. La commission mixte paritaire va débuter dans moins de deux heures. Autrement dit, 7 députés et 7 sénateurs qui vont s'enfermer pour tenter de surmonter leurs désaccords, qui sont nombreux et souvent profonds, et d'écrire une copie commune qui sera le budget de la France. Maud BREGEON, vous êtes réputée pour ne pas être langue de bois. À combien estimez-vous les chances de succès de cette CMP ?
MAUD BREGEON
Ecoutez. Je n'ai pas de boule de cristal.
THOMAS SOTTO
Vous êtes inquiète ?
MAUD BREGEON
Ce que je peux vous dire, en revanche, c'est que de la capacité des sénateurs et des députés à s'accorder aujourd'hui découle notre capacité commune à avoir un budget.
THOMAS SOTTO
Ça se joue aujourd'hui ?
MAUD BREGEON
Dit autrement, si les 7 sénateurs et les 7 députés qui vont être réunis dans une même pièce, ce matin, ne s'accordent pas, le budget de l'État ne pourra pas être voté d'ici à la fin de l'année.
THOMAS SOTTO
Donc, s'il n'y a pas d'accord aujourd'hui, on va sur une loi spéciale ? C'est ça ?
MAUD BREGEON
Et je précise, pardon, un point important. Oui. Et je précise un point important : le Gouvernement n'est pas présent lors de cette instance de discussion. Donc, députés et sénateurs doivent se parler. Et moi, j'appelle vraiment les uns et les autres à faire le pas nécessaire pour aller vers ce compromis. Et j'ajouterais, parce qu'il y a aussi parfois des postures politiques, j'invite les uns et les autres à ne confondre le budget 2026 avec la présidentielle 2027.
THOMAS SOTTO
Quelle posture ? Vous visez qui ?
MAUD BREGEON
Ce qui se joue là, ce qui se joue là, c'est notre capacité à avoir un budget pour un an. Ça n'embarque pas les positions définitives des potentiels candidats, des partis politiques. Mais on a besoin d'un budget, parce que c'est ce qui permet de faire avancer le pays.
THOMAS SOTTO
S'il n'y a pas de budget, là, il y aura une loi spéciale. C'est quoi, pour faire simple, une loi spéciale ?
MAUD BREGEON
Une loi spéciale, c'est ce qui vous permet de faire tourner le pays à minima, de payer vos créanciers, de payer vos fonctionnaires. Donc, moi, je ne suis pas là ce matin…
THOMAS SOTTO
On prolonge le budget actuel. C'est ça ?
MAUD BREGEON
Oui.
THOMAS SOTTO
Et ça coûte cher.
MAUD BREGEON
Grossièrement, on prolonge le budget, mais on se prive d'un certain nombre d'avancées. C'est pas de postes de policiers supplémentaires, pas de postes de magistrats supplémentaires, pas de moyens supplémentaires pour les armées, par exemple. Et autre précision qui est absolument nécessaire : une loi spéciale, ce n'est pas un budget.
THOMAS SOTTO
Sans ça, le budget, ça reviendrait en janvier.
MAUD BREGEON
Une loi spéciale, c'est un sparadrap qui vous permet de gagner un peu de temps et de revenir en janvier en reprenant les discussions budgétaires. Mais ce n'est aucunement un budget. Et c'est pour ça que…
THOMAS SOTTO
Il n'y a toujours pas de 49.3 pour régler tout ça ?
MAUD BREGEON
Non.
THOMAS SOTTO
Non ?
MAUD BREGEON
Non. Vous me poserez la question. Vous m'avez déjà posé la question quand je suis venue la dernière fois.
THOMAS SOTTO
Parce que les échéances approchent.
MAUD BREGEON
Oui, mais quand on parle de 49.3, on ne parle pas de la question fondamentale : que mettons-nous dans ce texte ? Au fond, le 49.3, c'est une discussion de procédures. Alors, je ne dis pas qu'elle n'a pas d'importance, mais c'est la façon…
THOMAS SOTTO
Mais ça permettrait d'avoir un budget.
MAUD BREGEON
Oui, mais vous mettez quoi dedans ? Parce que quand monsieur RETAILLEAU, monsieur HOLLANDE ou madame BORNE nous demandent le 49.3, ils ne nous disent pas sur la base de quel budget utiliser ce 49.3.
THOMAS SOTTO
On parle d'ordonnances négociées.
MAUD BREGEON
Mais la question est la même.
THOMAS SOTTO
Donc, c'est non aussi ?
MAUD BREGEON
La question est la même : sur quel budget les parlementaires doivent s'accorder ?
THOMAS SOTTO
Donc, c'est non aussi les ordonnances ou pas ? Est-ce que vous êtes aussi ferme sur les ordonnances que sur le 49.3 ?
MAUD BREGEON
Les parlementaires, je dis une chose extrêmement simple, les parlementaires doivent s'accorder sur le budget qu'ils veulent pour la nation. Et nous ne pouvons pas le faire à leur place. Le Gouvernement ne sera pas présent ce matin en commission mixte paritaire.
THOMAS SOTTO
Maud BREGEON, vous n'avez pas répondu à ma question. Est-ce que vous êtes aussi ferme sur les ordonnances que sur le 49.3 ?
MAUD BREGEON
Ça n'a pas de sens de parler d'ordonnances ce matin.
THOMAS SOTTO
Ça n'a pas de sens, bon.
MAUD BREGEON
Ça n'a pas de sens, parce que vous ne répondez pas à la question centrale : quel budget on veut ? Certains veulent davantage de fiscalité, d'autres ne veulent pas toucher aux impôts, y compris pour les plus grandes entreprises. Il va falloir trouver un point médian entre la position des uns et des autres.
THOMAS SOTTO
Et on va avoir un budget à 5,3 ou 5,4 de déficit. Vous avez lâcher la bride sur les déficits.
MAUD BREGEON
Avec un déficit qui doit être inférieur à 5 %.
THOMAS SOTTO
Ça reste la ligne ?
MAUD BREGEON
Roland LESCURE a eu l'occasion de le dire cette semaine. Ça n'a pas plu à certains, mais enfin, c'est la vérité. Un déficit à 5,3 % n'est pas acceptable.
THOMAS SOTTO
La ligne, c'est 5, toujours ?
MAUD BREGEON
On doit ramener cet objectif d'inférieur à 5 %.
THOMAS SOTTO
Inférieur à 5 %. Maud BREGEON, alors que la justice dira aujourd'hui si la plateforme SHEIN sera ou non suspendue pour trois mois pour cause de vente de produits interdits, Libération a découvert, le journal, qu'on pouvait acheter des livres antisémites, racistes, négationnistes, manifeste de terroristes, et cetera, via les sites de la FNAC, d'Amazon ou de Cultura. Est-ce que le Gouvernement va porter plainte là aussi, comme il l'a fait pour SHEIN ?
MAUD BREGEON
Oui. Et Laurent NUNEZ a fait ce qu'on appelle un article 40, donc un signalement au procureur. C'est inexplicable, insupportable et inexcusable. Voilà. Et donc, des poursuites judiciaires doivent évidemment avoir lieu, et les sites en question doivent…
THOMAS SOTTO
Il faut changer les règles, il faut durcir la loi sur ces plateformes ?
MAUD BREGEON
Alors, avant de parler de la loi, il y a la responsabilité des entreprises et des plateformes en question, qui ont une responsabilité personnelle. Comment est-ce possible qu'on trouve des produits comme ça sur les sites que vous venez de citer ? C'est incompréhensible.
THOMAS SOTTO
Cultura, la FNAC, Amazon.
MAUD BREGEON
Oui. D'abord, il y a une responsabilité des sites en question. Et ensuite, s'il faut changer la loi, on le fera. Mais il y a une responsabilité. Et c'est à ces sites de donner des explications. Comment cela est-ce possible ?
THOMAS SOTTO
À propos de culture, Maud BREGEON, il y a eu hier des perquisitions au domicile de Rachida DATI, à la mairie du 7e. Rappelons qu'elle est maire de cet arrondissement, au ministère de la Culture. Et ce, dans le cadre d'une enquête pour corruption menée par le parquet national financier. Rachida DATI soupçonnée d'avoir perçu 299 000 euros d'honoraires de GDF Suez, quand elle était eurodéputée, sans en avoir déclaré la provenance. Elle sera aussi jugée en septembre dans une autre affaire : Renault-Nissan. Les affaires s'accumulent. Est-ce qu'il y a un problème DATI au Gouvernement ?
MAUD BREGEON
Non.
THOMAS SOTTO
Non ?
MAUD BREGEON
Rachida DATI a toujours clamé son innocence. Et Rachida DATI est évidemment présumée innocente.
THOMAS SOTTO
Donc, elle est à sa place au ministère de la Culture ?
MAUD BREGEON
Elle a évidemment toute sa place au Gouvernement. Elle fait un travail remarquable au ministère de la Culture. Et il n'y a donc pas de sujet vis-à-vis de ce que vous venez d'évoquer.
THOMAS SOTTO
Une dernière question : Emmanuel MACRON a dit qu'il allait redevenir utile de parler avec Vladimir POUTINE. Concrètement, ça veut dire quoi ? Que le chef de l'Etat va décrocher son téléphone pour l'appeler, là ?
MAUD BREGEON
Ça veut dire que si on veut avancer vers un accord de paix, les différents partis prenantes devront, le moment venu, et lorsqu'ils l'estimeront nécessaire, se parler. Mais je le redis : la paix, ce n'est pas la capitulation de l'Ukraine.
THOMAS SOTTO
On ne retourne pas la niche. Ce n'est pas ça ?
MAUD BREGEON
C'est la position qui a toujours été claire et portée par le Président de la République. Nous voulons des garanties de paix pour l'Ukraine.
Source : Service d'information du Gouvernement, le 19 décembre 2025