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© Jean-Luc Ichard / Stock-adobe.com

Différenciation territoriale : les insuffisances de la loi 3DS

Temps de lecture  3 minutes

Par : La Rédaction

Le principe de différenciation – "adaptation des normes et des compétences à la diversité des territoires" – a pour enjeu de conjuguer au mieux, au niveau local, efficacité de l'action publique et volonté politique : c'est ce que défend une mission sénatoriale.

Dans un rapport sénatorial intitulé "Différenciation : la diversité des territoires dans l'unité de la République", la délégation aux collectivités territoriales et à la décentralisation se montre favorable :

  • à un meilleur encadrement des demandes de différenciation formulées par les collectivités territoriales, en application de la loi relative à la différenciation, la décentralisation, la déconcentration (loi "3DS") du 21 février 2022 ;
  • à ouvrir un champ plus étendu aux mesures de différenciation, par le biais d'une révision constitutionnelle. 

Mieux encadrer les demandes de différenciation des collectivités

La loi 3DS ouvre la possibilité au législateur de différencier les règles relatives à l'attribution et à l'exercice des compétences applicables au sein d'une même catégorie de collectivités (département, région), à condition que celles-ci se trouvent dans des "différences objectives de situation" (art. L 1111-3-1 CGCT).

L'article 2 de la loi ouvre la possibilité à ces collectivités de saisir le Premier ministre ainsi que les assemblées parlementaires de demandes de différenciation territoriale. Ces demandes font l'objet d'une délibération de l'assemblée délibérante.

La délégation recommande qu'en amont des délibérations des collectivités, des échanges "fructueux et constructifs" aient lieu avec l'État. Elle souligne que ce n'est pas encore le cas, en raison de "freins culturels" à ce niveau.

Elle distingue le rôle de l'"État local" (préfecture), qui serait chargé d'informer et de dialoguer avec les collectivités, de celui de l'État central, appelé à évaluer ex ante les bénéfices attendus de la différenciation voulue, et sa faisabilité juridique.

Le rapport souligne l'impératif d'une réponse "obligatoire et motivée" des services du Premier ministre dans un délai de six mois. Les demandes de différenciation jusqu'ici formulées – Occitanie (30 novembre 2022), Île-de-France (16 octobre 2023), et département de la Lozère (24 février 2023) – n'ont toujours pas reçu de réponse. Ce délai, qui "n'est pas acceptable", peut être perçu comme "une forme de "mépris" de l'État".

Étendre le droit à la différenciation par une révision constitutionnelle

La commission des lois du Sénat, lors des débats sur la loi 3DS, avait pointé le "manque d'ambition" des dispositions liées à la différenciation, et préconisait une révision constitutionnelle, "nécessaire et consensuelle dans son principe".

Le principe constitutionnel d'égalité est vu comme une "contrainte forte" sur la voie d'une réelle différenciation. Une telle révision écarterait la "notion introuvable" de "différences objectives de situation".

La délégation préconise l'inscription à l'article 72C de trois possibilités :

  • exercice de compétences dont ne disposent pas l'ensemble des collectivités de même niveau ;
  • dérogation, "pour un objet limité", aux dispositions législatives ou réglementaires ;
  • expérimentations menées désormais sans limite de temps.

À titre d'exemple, la loi pourrait confier à une région volontaire la gestion des lycées et collèges (les collèges relevant actuellement des départements).