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Financiarisation de l'offre de soins : quelle régulation ?

Temps de lecture  3 minutes

Par : La Rédaction

Un mouvement de financiarisation de l'offre de soins ainsi que de concentration autour d'acteurs privés est observé en France depuis plusieurs années. La commission des affaires sociales du Sénat s'interroge sur ce processus et présente des propositions pour en encadrer les effets.

Selon le rapport d'information de la commission des affaires sociales du Sénat publié le 25 septembre 2024, un processus de concentration accompagne l'entrée d'acteurs privés dans le domaine hospitalier privé lucratif (quatre principaux fonds d'investissement) ce qui est aussi le cas pour les laboratoires d'analyses médicales (concentrés autour de six grands groupes, secteur le plus financiarisé en ambulatoire) mais aussi pour les groupes d'imagerie médicale.

Le constat : un processus de financiarisation aux effets "peu maîtrisés"

Divers facteurs ont favorisé la financiarisation de l'offre de soins, qu'il s'agisse du cadre juridique (possibilité pour des non-soignants d'investir dans des sociétés d'exercice libéral, SEL) ou des exigences de qualité de soins, qui ont encouragé les regroupements pour supporter les coûts induits.

Les restructurations, visant à rechercher une "taille critique" pour réaliser des économies d'échelle, permettent de mieux faire face aux baisses des tarifs de l'assurance maladie.

À  l'heure actuelle, les effets de la financiarisation de l'offre de soins sur le système de santé apparaissent "mal évalués et peu maîtrisés" : ainsi, la création de monopoles ou d'oligopoles, pourrait nuire à la diversité de l'offre de soins. La capacité des autorités de tutelle (ARS, assurance maladie) à contrôler le développement d’une offre financiarisée "dans le respect des critères d’accessibilité, de qualité et de pertinence des soins" fait question.

Un retour sur investissement avantageux

L'offre de santé représente un investissement "rentable et sûr", note la commission. Le taux de rentabilité en biologie médicale atteint 23% en 2020, ce qui conduit la Caisse nationale d'assurance maladie (CNAM) à évoquer un risque de "bulle spéculative". L'accroissement continu de la demande de soins et le haut degré de socialisation des dépenses garantissent la sûreté des investissements.

Quelles mesures d'encadrement ?

Le rapport appelle à garantir l’accessibilité de l’offre de soins. Il présente plusieurs pistes. Un renforcement de la régulation par les ARS, en s’appuyant sur les autorisations d’activités de soins et d’équipements matériels lourds, mais aussi une collaboration accrue avec les élus locaux, concourraient à un meilleur maillage territorial. Pour lutter contre la dégradation du service rendu au patient, le Sénat recommande d'augmenter le nombre de sites de biologie médicale de proximité et de conditionner l’ouverture des centres de soins primaires à un agrément.

Il apparaît "indispensable" de préserver des conditions économiques favorables à la survie de structures indépendantes, en adaptant l'outil conventionnel et la tarification hospitalière. La politique de contrôle est également un levier adapté d'encadrement de l'offre financiarisée : en 2023, l'assurance maladie a détecté et évité 58 millions d’euros de fraudes réalisées par les centres de santé ; 200 centres (sur environ 2 500) ont été contrôlés en 2021-2023 et 21 déconventionnés.

Les rapporteurs souhaitent une évolution du cadre législatif pour mieux maîtriser l’influence des acteurs financiers non professionnels au sein des SEL. Ils soulignent le risque de volatilité des capitaux, faisant peser la menace d’un retrait des investisseurs. Il convient d'empêcher les investissements purement spéculatifs et, plus largement, d'inscrire le recours aux capitaux privés dans le système de santé dans un cadre présentant des "garanties de durabilité et/ou de réinvestissement".