Une épizootie décrit une maladie, souvent très contagieuse, qui frappe simultanément un grand nombre d'animaux d'une même espèce ou d'espèces différentes en un court laps de temps, dans une région donnée.
Les épizooties concernent des maladies qui se transmettent directement d'un animal à l'autre ou via un vecteur, par exemple un insecte qui se nourrit de sang. Le caractère épizootique de ces maladies tient principalement à leur propagation rapide, qui peut se faire à l'occasion :
- de mouvements, commerciaux ou non, d'animaux ou de leurs produits ;
- de flux migratoires d'oiseaux sauvages ;
- de déplacements de personnes…
Parmi les maladies épizootiques, on peut citer l'influenza aviaire (ou grippe aviaire), la peste porcine africaine (PPA), la fièvre aphteuse, l'encéphalopathie bovine spongiforme (ESB, ou "maladie de la vache folle"), la tuberculose bovine, la fièvre de la vallée du Rift, la peste équine…
Dans le cas d'épizooties, le terme "peste" est utilisé pour désigner des maladies dont le taux de létalité est élevé, quel que soit l'agent responsable, bactérie ou virus.
L'Organisation mondiale de la santé animale (OMSA), fondée en 1924 sous l'appellation d'Office international des épizooties (OIE), a donné une liste des épizooties (ou "liste A").
Toute maladie animale peut prendre une ampleur épizootique si les conditions la favorisent.
Parmi les maladies animales, certaines se transmettent des animaux vertébrés à l'homme. On parle alors de zoonose. L'agent pathogène en cause peut être une bactérie, un virus ou un parasite. La transmission de ces maladies peut se faire :
- directement, lors d'un contact entre un animal et un homme ;
- indirectement, par voie alimentaire ou via un vecteur (moustique, araignée…).
Selon l'Organisation mondiale de la santé (OMS), 60% des maladies infectieuses émergentes notifiées dans le monde proviennent d'animaux, qu'ils soient sauvages ou domestiques. Plus de 30 nouveaux agents pathogènes humains ont été détectés lors des trois dernières décennies, dont 75% sont d'origine animale.
Une zoonose pouvant, comme toute maladie animale, prendre une ampleur épizootique, certaines épizooties sont transmissibles à l'homme : grippe aviaire (selon les souches, même si le risque de transmission à l'homme est jugé faible), ESB (par l'alimentation), encéphalomyélite équine de l'Est (ayant le moustique pour vecteur), fièvre de la vallée du Rift (au contact de ruminants malades et par piqûre de moustique infecté)…
D'autres épizooties ne sont pas transmissibles à l'homme : dermatose nodulaire contagieuse (DNC), PPA , fièvre aphteuse…
Les épizooties peuvent avoir divers impacts dans différents domaines :
- monde agricole (impact économique notamment) ;
- santé publique ;
- ordre public ;
- protection des personnes et de l'environnement…
Les épizooties et plus généralement les maladies animales peuvent avoir un impact par les pertes :
- directes (mortalité, animaux malades) ;
- indirectes (augmentation du coût des productions, entraves aux échanges commerciaux).
Les conséquences socio-économiques et politiques peuvent être graves. La DNC, détectée pour la première fois en Savoie le 29 juin 2025, est fortement préjudiciable :
- à la santé des bovins (potentiellement mortelle) ;
- aux éleveurs (pertes de production importantes du cheptel infecté, abattage de troupeaux).
L'ancienne liste A des maladies notifiables à l'OIE définissait ainsi les épizooties : "Maladies transmissibles qui ont un grand pouvoir de diffusion et une gravité particulière, susceptible de s'étendre au-delà des frontières nationales, dont les conséquences socio-économiques ou sanitaires sont graves et dont l'incidence sur le commerce international des animaux et des produits d'origine animale est très importante."
La gestion des épizooties est planifiée dans les plans nationaux d'intervention sanitaire d'urgence (PNISU) en santé animale, qui s'intègrent dans les plans d'organisation de la réponse de sécurité civile (ORSEC). Le PNISU a été introduit en 2017 dans le domaine de la santé animale.
Le PNISU santé animale définit un cadre national à la préparation et à la réponse aux menaces sanitaires pouvant affecter les élevages. Un document décrit les principes généraux pour la gestion de certains dangers sanitaires de première catégorie, les maladies animales réglementées d'intérêt national, qui peuvent être des zoonoses ou des épizooties. Des mesures de surveillance, de prévention et de lutte peuvent être mises en place pour ces maladies animales réglementées.
Ces dispositions nationales prises en application du code rural et de la pêche maritime complètent le règlement (UE) 2016/429, dit "loi de santé animale", qui établit des règles relatives aux mouvements des animaux et des produits d'origine animale, entre les États membres ou vers l'UE en provenance de pays tiers, afin de protéger le statut zoosanitaire des animaux dans l'UE.
Cinq catégories de maladies animales sont définies par le règlement (UE) 2018/1882 :
- catégorie A : maladie normalement absente de l’Union européenne (éradication immédiate) ;
- catégorie B : maladie devant être contrôlée par tous les États membres (éradication obligatoire) ;
- catégorie C : maladie soumise à contrôle volontaire des États membres (éradication volontaire) ;
- catégorie D : maladie pour laquelle des restrictions aux mouvements entre États membres s’appliquent ;
- catégorie E : maladie soumise à surveillance.
Une maladie dépend d'une combinaison de catégories, entraînant différentes obligations : ADE, BDE, CDE, DE ou E.
Dans le cadre d'un PNISU santé animale, lors de la confirmation d'un foyer de maladie contagieuse, la stratégie de lutte repose sur des mesures sanitaires offensives :
- abattage des animaux (ou "opération de dépeuplement") afin de mettre fin à la production de l'agent infectieux ;
- destruction de l'agent infectieux partout où il se trouve (cadavres et produits, désinfection des locaux et du matériel).
Les mesures d'abattage peuvent concerner des animaux susceptibles d'avoir été contaminés. Il peut être décidé de recourir à des mesures de vaccination d'urgence au cas où l'application exclusive d'une stratégie sanitaire ne permettrait pas d'empêcher la propagation de la maladie.
Dans le cas d'une maladie vectorielle, c'est-à-dire transmise essentiellement par des insectes ou des acariens se nourrissant de sang, l'abattage des animaux ne se révèle efficace que dans des circonstances particulières :
- l'introduction accidentelle d'animaux infectés par transport à longue distance ;
- une identification rapide de la maladie ;
- une période peu propice à l'activité vectorielle.
Les opérations de dépeuplement doivent respecter trois principes en intervenant :
- rapidement (par exemple, un porc atteint de fièvre aphteuse excrète chaque minute dans l'air suffisamment de virus pour infecter 70 000 bovins) ;
- dans des conditions assurant la sécurité des personnes ;
- dans des conditions permettant de limiter la souffrance animale.
Un zonage autour des foyers et des mesures de zone sont mis en place par arrêté préfectoral afin de contenir la diffusion du virus :
- pour les maladies contagieuses :
- une zone de protection d'au moins 3 kilomètres de rayon ;
- une zone de surveillance d'au moins 10 kilomètres de rayon ;
- pour les maladies vectorielles, au risque plus diffus :
- un périmètre interdit d'au moins 20 kilomètres de rayon ;
- une zone de protection d'au moins 100 kilomètres de rayon ;
- une zone de surveillance d'au moins 50 kilomètres de rayon autour de la zone de protection.
Le niveau de vigilance sur le territoire est renforcé dès la détection d'un premier foyer. Un plan de vaccination, sous réserve de la disponibilité de vaccins, est mis en place.
Des mesures de surveillance, de biosécurité et de restrictions sont mises en place.
Les étapes de sortie de crise sont déterminées par le code de l'OIE et la réglementation européenne :
- éradication des foyers (abattage des animaux sensibles et décontamination) ;
- levée du zonage après un certain délai ;
- recouvrement du statut indemne vis-à-vis de la maladie.
L'État prend en charge, pour les maladies soumises à plan d'urgence et sous certaines conditions déterminées par arrêtés :
- l'indemnisation des éleveurs (animaux abattus et denrées et produits détruits) ;
- les opérations de police sanitaire réalisées par des vétérinaires mandatés (visites d'exploitations, enquêtes épidémiologiques, prélèvements, euthanasie, vaccination d'urgence…) ;
- les analyses de laboratoire ;
- la décontamination ;
- les frais d'équarrissage et de transport des cadavres d'animaux abattus.
Ces coûts peuvent faire l'objet de demandes de subvention auprès de la Commission européenne, au titre des mesures d'urgence.
Le Fonds national agricole de mutualisation des risques sanitaire et environnemental (FMSE) peut contribuer à l'indemnisation des producteurs affiliés.
La dermatose nodulaire contagieuse des bovins est une maladie virale émergente, transmise principalement par insectes piqueurs, détectée pour la première fois en France le 29 juin 2025 en Savoie. Entre cette date et le 22 décembre 2025, 114 foyers de DNC ont été détectés : Savoie (32), Haute-Savoie (44), Ain (3), Rhône (1), Jura (7), Pyrénées-Orientales (22), Doubs (1), Ariège (1) et Hautes-Pyrénées (1), Haute-Garonne (1), Aude (1).
Si c'est une maladie vectorielle, les animaux malades peuvent transmettre la maladie ou contaminer leur environnement (matériel, véhicules…). La DNC n'est pas transmissible à l'homme, ni par contact, ni par consommation de produits, ni par piqûre d'insectes vecteurs. La DNC est classée A par l'Union européenne, c'est-à-dire qu'elle est considérée comme une maladie normalement absente de l’UE qu'il faut immédiatement éradiquer.
Afin d'éradiquer cette maladie, l'État applique depuis le début une stratégie fondée sur :
- une détection précoce des foyers (surveillance de l'état de santé des bovins, signalement systématique de signes évocateurs) ;
- instauration de zones réglementées autour des foyers ;
- abattage des élevages infectés ;
- la limitation des mouvements des bovins ;
- vaccination de tous les bovins dans les zones réglementées.
Les mesures appliquées jusqu'au 1er janvier 2026 sur l'ensemble du territoire sont les suivantes afin de limiter la propagation du virus :
- interdiction des rassemblements festifs de bovins ;
- notifications de mouvements de bovins à effectuer dans les 24 heures suivant le mouvement (au lieu de 7 jours habituellement) , uniquement pour les centres de rassemblement et les marchés aux bestiaux ;
- désinsectisation des moyens de transport de bovins en cas de mouvement commercial en dehors de France.
Six zones réglementées ont été instaurées par arrêté préfectoral autour de chaque foyer.
Les zones réglementées peuvent être reclassées en zones vaccinales 45 jours à compter du dernier dépeuplement de foyer dans cette zone, et si au moins 75% du cheptel bovin y est vacciné depuis plus de 28 jours. Trois zones réglementées sont devenues des zones vaccinales depuis le début de l'épizootie.
L'épizootie de DNC conduit à des pertes de production importantes du cheptel, mais aussi à de fortes tensions entre pouvoirs publics et éleveurs. Des syndicats agricoles, comme la Confédération paysanne et la Coordination rurale, s'opposent à l'abattage des troupeaux dès qu'un animal malade est identifié. Ils militent pour une vaccination généralisée sur l'ensemble du territoire.
Une vaccination systématique de tous les animaux n'est cependant pas sans conséquence. En décidant une vaccination sur l'ensemble du territoire national, le France perdrait son statut de "pays indemne de la DNC", ce qui renforcerait les exigences sanitaires pour l'exportation des bovins.