La prise en compte des preuves scientifiques dans les actions de prévention et promotion de la santé

Remis le :

Auteur(s) : Pierre-Louis Bras ; Hélène Monasse

Auteur(s) moral(aux) : Inspection générale des affaires sociales

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Comment concevoir et mettre en œuvre des actions et des politiques de prévention et de promotion de la santé (PPS), en se fondant sur des preuves scientifiques ? Dans son rapport, l’Inspection générale des affaires sociales analyse, en premier lieu, la question des preuves de manière globale, avant de se pencher sur les actions locales de PPS, qui visent à modifier les comportements néfastes pour la santé.

En France, la promotion et la prévention de la santé (PPS) renvoie à un ensemble d’interventions très vaste et disparate selon les facteurs de risque ciblés (tabac, alcool, nutrition…), les publics priorisés, les modes d’intervention (taxation, marketing social, réglementation…) ou les acteurs mobilisés (collectivités locales, professionnels de santé).

Dans les pays anglo-saxons et en Europe du Nord, une approche des actions de PPS, engagée depuis les années 1990, appuie la construction de ces politiques sur des preuves scientifiques, en s’inspirant de la démarche d’evidence-based medecine : celle-ci fonde les pratiques sur des preuves issues des essais cliniques et des évaluations en vie réelle.

Dans un premier temps, les travaux de la mission présentent cette approche des actions de PPS. En l’absence d’une évaluation structurée en France de l’efficacité et de l’efficience des actions de PPS, les critères de priorisation de cette politique publique peuvent manquer. Ils peuvent donner lieu, soit à une approche réductrice de recherche d’économies en matière de dépenses de santé, soit à une conduite éparpillée des actions de PPS.

Les travaux engagés sur les actions locales de PPS montrent que la plupart des acteurs s’accordent sur l’importance de s’appuyer sur des « preuves d’efficacité » pour les concevoir et les déployer, mais que cette exigence peine à se matérialiser. Les principales limites sont liées à la faible organisation du paysage universitaire dans le champ de la PPS et aux financements limités pour engager des actions de recherche et accompagner cette démarche.

Le déploiement des programmes fondés sur les preuves ne suit pas une approche dite « planificatrice », mais plutôt une logique que l’on pourrait qualifier d’« opportuniste », où les acteurs territoriaux développent quelques actions pilotes au vu de leur capacité de financement résiduelle et des volontaires identifiés. Une telle organisation est contradictoire avec l’ambition affichée au niveau national de développer les compétences psychosociales chez les enfants selon une démarche pluriannuelle, fondée sur des données solides relatives à l’efficacité et l’efficience de ces programmes à court et moyen terme, tant pour ce qui concerne la santé que le climat et la réussite scolaire.

Dans ce contexte, la mission propose trois principaux axes de recommandations :

  • Développer les études d’efficience concernant les actions de PPS et désigner une institution chargée de prioriser des recommandations de santé publique ;
  • Engager le déploiement des compétences psychosociales en milieu scolaire sur une trajectoire triennale, associant les rectorats, les agences régionales de santé et le réseau de l’assurance maladie. Cette mesure, dont l’impact sur le climat scolaire est documenté, pourrait accompagner la priorité donnée à la santé mentale en 2025 ;
  • Enfin, les travaux engagés par l’Agence pour l’innovation en santé dans le cadre de la stratégie d’accélération "prévention" devraient accompagner la structuration du champ académique de recherche interventionnelle en santé publique. 

SYNTHESE  
RECOMMANDATIONS DE LA MISSION 

1 LES POLITIQUES DE PREVENTION ET PROMOTION DE LA SANTE ET LES "PREUVES" 

1.1 UNE EXTENSION PAR ANALOGIE : DE L'EVIDENCE-BASED MEDECINE A L'EVIDENCE-BASED POLICY  
1.1.1 L'ambition de l'evidence-based medecine : fonder les pratiques cliniques sur des données issues de la science  
1.1.2 L'ambition de l'evidence-based policy : fonder les politiques publiques sur des données scientifiques   
1.2 QUELS TYPES DE PREUVES POUR ORIENTER LES POLITIQUES DE SANTE PUBLIQUE ?  
1.2.1 La définition de cibles quantifiées et la mesure du "fardeau des maladies"
1.2.2 La quantification économique des cibles des politiques de PPS  
1.2.3 La preuve de l'efficacité des interventions fondée sur une métrique commune 
1.2.4 La preuve de l'efficience des interventions, à fin d'arbitrages dans un contexte de rareté des ressources  
1.2.5 L'efficience d'une intervention, une notion à distinguer de la recherche d'économies budgétaires 
1.2.6 Les limites des études coût-utilité, pour mesurer les effets positifs des interventions au-delà des seuls gains sanitaires 

1.3 LES DONNEES D'EFFICIENCE SUR LES ACTIONS DE PPS 
1.3.1 Les actions de PPS ont-elles fait la preuve de leur efficience ?  
1.3.2 L'Angleterre, une référence pour les études d'efficience 
1.3.3 L'absence de dynamique en France autour des études d'efficience 
1.3.4 La dispersion des instances de recommandations de PPS en France 

1.4 LES POLITIQUES DE PPS EN FRANCE ET LEUR RAPPORT AUX "PREUVES"
1.4.1 La politique de réduction du tabagisme, une illustration de l'efficacité et de l'efficience des politiques de PPS mobilisant les prix 
1.4.2 La mise en place du Nutri-score, ou l'importance d'utiliser des données scientifiques structurées auprès d'intérêts économiques constitués
1.4.3 Les bilans de prévention dédiés, ou l'articulation entre la notion de « bon sens » et la construction d'une politique efficace 

1.5 RECOMMANDATIONS 

2 LES INTERVENTIONS LOCALES EN PREVENTION ET PROMOTION DE LA SANTE

2.1 UNE UTILISATION RECENTE ET POLYSEMIQUE DE LA NOTION DE "DONNEES PROBANTES"
2.1.1 Des tensions au sein du monde de la PPS entre l'utilisation des seules données expérimentales, et l'évaluation dite "réaliste"
2.1.2 Des interventions progressivement structurées autour du développement des compétences psychosociales
2.1.3 Les limites de la consolidation de programmes hétérogènes dans différents répertoires ou portails

2.2 LA DIFFICILE EMERGENCE DE PROGRAMMES EVALUES, DANS UN PAYSAGE ECLATE DE LA RECHERCHE INTERVENTIONNELLE EN SANTE PUBLIQUE 
2.2.1 L'évaluation scientifique reste limitée, malgré plusieurs guichets de financement 
2.2.2 Des capacités de recherche et d'évaluation limitées 

2.3 UNE ORGANISATION GLOBALE QUI N'EST PAS CONÇUE POUR FAVORISER LE PASSAGE A L'ECHELLE DES INTERVENTIONS LOCALES DE PPS  
2.3.1 Des priorités d'action au niveau régional fortement déterminées par la mobilisation du tissu associatif et des partenaires 
2.3.2 Un cadre de pilotage national relativement limité 
2.3.3 De faibles marges de manœuvre financières 

ANNEXE 1 : ORGANISATION DE LA SANTE PUBLIQUE AU NIVEAU LOCAL EN ANGLETERRE 

ANNEXE 2 : PRESENTATION DETAILLEE DE QUATRE PROGRAMMES SUIVIS PAR SPF 
1 ICAPS 
2 UNPLUGGED 
3 GOOD BEHAVIOR GAME 
4 PROGRAMME DE SOUTIEN AUX FAMILLES ET A LA PARENTALITE (PSFP) 

ANNEXE 3 : ESTIMATION DU MONTANT DU FIR LIE A DES MISSIONS REGLEMENTAIRES  

LISTE DES PERSONNES RENCONTREES  

SIGLES UTILISES 
 

  • Type de document : Rapport d'inspection
  • Pagination : 105 pages
  • Édité par : Inspection générale des affaires sociales