Déclaration de M. Michel Sapin, ministre de la fonction publique et de la réforme de l'Etat, sur la place prise par les centres de gestion auprès des collectivités locales et sur leur rôle pour renforcer l'attractivité de l'emploi public dans la fonction publique territoriale, Saint-Brieuc le 18 février 2002.

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Circonstance : Inauguration du Centre de gestion des Côtes d'Armor à Saint-Brieuc le 18 février 2002

Texte intégral

Madame la Préfète,
Madame, Messieurs les Parlementaires,
Messieurs les Sénateurs, Monsieur le Sénateur honoraire,
Monsieur le Président du Conseil général,
Mesdames et Messieurs les Conseillers généraux,
Mesdames et Messieurs les Maires,
Monsieur le Président du Centre de gestion,
Avant toute chose, je voudrais vous remercier de votre accueil et de cette présentation du Centre de gestion des Côtes-d'Armor et surtout de cette réalisation. Votre implantation - au sein de ce parc d'affaires - le mois dernier, et la mise en place simultanée d'un nouvel organigramme autour de trois directions, atteste bien de la place prise auprès des collectivités locales par les centres de gestion. Il en va du service rendu aux employeurs -et tout particulièrement aux petites communes- mais aussi de l'intérêt des fonctionnaires territoriaux et donc de la bonne application des règles statutaires.
Je note qu'en 20 ans, vous avez développé une véritable plate-forme de services à la carte. Les collectivités peuvent vous solliciter pour un remplacement temporaire de personnel qualifié, ou pour monter des dossiers emplois-jeunes, pour l'ARTT, ou mettre en place des périmètres de protection de l'eau, pour classer les archives communales, ou assurer une fonction de conseil juridique, pour assurer la médecine professionnelle, ou organiser les concours et bien sûr aider à la gestion des carrières et des retraites des 7724 agents affectés dans les 600 collectivités affiliées du département.
Cela est tellement vrai que la cotisation légale pour les missions obligatoires ne représente que 10 % de vos recettes. L'essentiel de votre budget est financé par les cotisations additionnelles et la rétribution de prestations à la demande des collectivités.
C'est la meilleure des évaluations de votre action. La loi avait initié un Centre de gestion de la fonction publique territoriale, vous avez créé au fil des ans une véritable Maison du service public territorial.
Je voudrais également souligner votre démarche d'ouverture partenariale. Pour certaines de vos missions, vous travaillez avec les autres Centres de gestion bretons, avec le CNFPT, avec la CNRACL et l'IRCANTEC, c'est naturel. Mais vous avez également développé des partenariats avec l'ANPE, avec le service départemental de l'agriculture et de l'environnement, avec les Archives départementales, avec la Préfecture aussi
Chez vous, l'institution de formules intercommunales pour l'affectation de personnel permanent dans les petites collectivités est une pratique ancienne ; de même pour optimiser l'offre et réduire les coûts, la coopération régionale est la règle en matière d'organisation de concours entre les 4 départements bretons.
C'est essentiel pour les maires-employeurs, qui découvrent souvent au lendemain de leur première élection l'univers de la fonction publique territoriale ; c'est utile pour les fonctionnaires territoriaux qui sans les Centres de gestion ne pourraient pas toujours bénéficier de déroulements de carrière attractifs.
C'est une nouvelle démonstration de la fonction essentielle que remplissent -au niveau local, comme au niveau national- les institutions de la FPT. Elles permettent, par leurs missions et leur légitimité démocratique, de concilier le principe d'autonomie de gestion des collectivités locales avec l'égalité d'accès aux emplois publics et l'égalité de traitement, c'est-à-dire l'unité statutaire.
Je pense que dans les Côtes-d'Armor, la démonstration est évidente et qu'elle le sera encore plus demain au plan national sous l'impulsion du nouveau Conseil supérieur de la FPT. Il n'y avait qu'une seule liste candidate. Je prends donc un risque limité de féliciter par avance Claudy Lebreton de son élection au Conseil supérieur. J'aurai pour ma part le plaisir d'installer début mars le nouveau conseil.
Ce renouvellement, consécutif aux élections municipales et cantonales de mars 2001, devrait symboliser un nouvel élan pour les travaux de cette instance paritaire nationale et un renforcement de la capacité de proposition du Conseil supérieur sur la base du dialogue social entre élus, organisations syndicales et représentants de l'Etat.
Depuis 1997, des chantiers importants ont été entrepris : résorption de l'emploi précaire, aménagement et réduction du temps de travail, emplois-jeunes. A chaque fois les Centres de gestion ont été au cur de ces dossiers, contribuant ainsi à la réussite de ces dispositifs nouveaux.
Dans la période récente de nombreuses améliorations statutaires ont été introduites. D'autres sont en préparation pour renforcer l'attractivité de l'emploi public dans les collectivités locales :
- Les seuils démographiques ont été assouplis avec l'abaissement du seuil de fonctionnalité des emplois de direction à 3 500 habitants, les conditions d'assimilation des EPCI à des communes à partir du seul critère du nombre d'habitants ont été améliorées, les possibilités de surclassement démographiques ont été assouplies, l'alignement des seuils de création des emplois de grade sur ceux des emplois fonctionnels sont mis à l'étude ;
- Le cadre d'emplois des techniciens territoriaux va désormais pouvoir bénéficier du classement indiciaire intermédiaire ;
- Les emplois de direction bénéficieront d'une nouvelle bonification indiciaire. Nous avons retenu un spectre très large de collectivités, dès 3 500 habitants. Mais, je sais le problème posé aux départements de moins de 500 000 habitants, dont les directeurs généraux et leurs adjoints ne bénéficient pas de cette NBI. Cela repose sur des éléments de cohérence interne au statut et de cohérence avec les autres fonctions publiques ;
- L'extinction progressive du cadre d'emplois des secrétaires de mairie, des communes de moins de 2000 habitants est programmée, par intégration dans le cadre d'emplois des attachés territoriaux. Cette mesure qui touche plus de 20 000 secrétaires de mairie devrait permettre de résoudre les difficultés de ce cadre d'emplois atypique, qui ne différencie pas le grade et l'emploi et ne favorise de ce fait ni la fluidité des déroulements de carrière, ni la mobilité fonctionnelle des agents ;
- Une nouvelle filière de recrutement a été créée avec l'instauration des 3ème concours dans une quinzaine de cadres d'emplois ;
- Les conditions de classement, de rémunération et d'avancement des agents de catégorie B ont été amliorées ;
- L'expérience professionnelle a été prise en compte pour la résorption de l'emploi précaire ;
- Le classement dans un emploi fonctionnel a été revu et son régime juridique a été précisé ;
- Les administrateurs territoriaux ont vu leur statut particulier révisé (reclassement des lauréats du concours interne, conditions de mobilité, revalorisation indiciaire);
- Les concours des filières administrative et technique ont été révisés ;
- Le maintien des avantages acquis a été gatanti par la loi en cas de transferts de personnels lors de la création d'un EPCI.
D'autres dispositions sont en préparation, sous les auspices du Conseil supérieur, en particulier sur la base des recommandations du rapport Schwartz -déjà largement mises en uvre- et du groupe de travail animé par Claudy Lebreton au sujet du cadre d'emplois des administrateurs territoriaux.
Vous le voyez, le bilan de la modernisation du statut est consistant et pour toutes les catégories d'agents, y compris pour les cadres dont la carrière avait perdu en attractivité par rapport aux autres catégories couvertes par l'accord Durafour de 1990.
Pour le proche avenir, vous le savez, le dossier prioritaire doit être celui de l'accompagnement des collectivités dans la mise en uvre de politiques de gestion prévisionnelle des emplois, des effectifs et des compétences.
Les données statistiques sont bien connues dans la FPT, grâce aux travaux de l'Observatoire de l'emploi territorial du CNFPT et de la CNRACL qui ont réalisé une étude par catégorie, par filière, par grade, par région et par année jusqu'en 2020.
Vous bénéficiez d'un petit délai de grâce par rapport aux fonctionnaires de l'Etat, mais c'est maintenant que se jouent les enjeux de 2005 - 2006 en commençant par les cadres dont la moyenne d'âge est plus élevée.
Pour sa part, l'Etat contribue à diversifier les filières de recrutement, à introduire de la souplesse pour une meilleure fluidité des carrières et à supprimer les obstacles à la mobilité. Cela a fait l'objet d'un important Comité interministériel à la réforme de l'Etat, le 15 novembre dernier.
Mais c'est sur le terrain que peuvent être synthétisés au mieux les besoins des collectivités, ainsi que toutes les données relatives à l'évolution des emplois, à l'organisation des concours.
La loi du 3 janvier 2001 confie aux Centres de gestion un rôle pivot de concertation pour évaluer les besoins prévisionnels de recrutement, ainsi que pour déterminer les moyens pour y répondre. Cette concertation doit être réelle, approfondie et régulièrement actualisée.
On mesure bien aujourd'hui l'effet des politiques malthusiennes à l'entrée des écoles d'infirmières dans les années 94-97. Ne commettons pas la même erreur.
Cette anticipation, doit intégrer une analyse plus large au niveau régional et national, en particulier pour les cadres d'emplois à effectifs limités, notamment ceux de catégorie A.
Une collaboration inter-centres de gestion et avec le CNFPT sur une base régionale est une tradition dans les Côtes-d'Armor, dont il faut s'inspirer et je ne puis qu'encourager votre projet, Monsieur le Président CAURET, d'un Observatoire de l'emploi territorial.
Plusieurs Centres de gestion se sont déjà saisi de cette nouvelle compétence. C'est à l'évidence la priorité des priorités et le bel outil que vous nous présentez aujourd'hui devrait grandement faciliter la réussite de votre mission, car vous pouvez immédiatement traduire en termes de postes ouverts aux concours, de besoins de formation, les conséquences des besoins recensés et cela avec un calendrier prévisionnel pluri-annuel.
Plusieurs initiatives sont en cours, qui recoupent la diversité des acteurs de la FPT :
- L'Union nationale des Centres de gestion propose sur son site internet des outils permettant une meilleure connaissance des réalités des ressources humaines dans les collectivités ;
- L'Association nationale des directeurs des Centres de gestion a lancé deux études et travaille à la mise au point d'outils méthodologiques mettant en commun le recueils des données informatisées.
- L'Observatoire de l'emploi territorial du CNFPT conduit des travaux remarquables dans le domaine statistique ;
- Le groupe statistique du Conseil supérieur de la FPT, qui comprend l'ensemble des partenaires intéressés, induit une meilleure coordination des travaux et permet de croiser les données avec la synthèse des bilans sociaux que les collectivités réalisent tous les deux ans ;
Pour ce qui est de l'Etat, l'INSEE, la DGCL et l'Observatoire de l'emploi public sont des sources et des ressources reconnues qui permettent également une réflexion inter-fonctions publiques.
Plusieurs chantiers sont devant nous :
- pour améliorer le recueil d'informations grâce aux nouvelles technologies de l'information ;
- pour mettre en relation les différentes bases de données ;
- pour développer l'assistance technique et le conseil aux collectivités ;
- pour conduire des études prospectives par métiers, par régions.
Pour réussir deux conditions sont impératives, selon moi :
- la première est de parvenir à une réelle coordination des différentes instances de gestion, de formation et de concertation de la FPT. L'heure n'est plus aux querelles de territoires et de clochers.
- La deuxième est la rénovation du dialogue social au sein des fonctions publiques, sur la base du Livre blanc qui vient de m'être remis. Outre les points communs aux trois fonctions publiques, des questions spécifiques à la FPT sont posées, en particulier celle de l'émergence d'une représentation des employeurs au niveau départemental, comme au niveau national. Le Livre blanc propose trois hypothèses pour organiser cette représentation collective. A vous d'en débattre dans le cadre des associations d'élus.
Marx disait qu'on ne consacrait des études statistiques qu'aux questions que l'on voulait résoudre. Si j'en crois la production sur la FPT, je suis tout à fait confiant !
Mesdames et Messieurs, nous fêtons en ce moment les 20 ans de la décentralisation, une réforme qui a changé le décor de l'action publique locale en France.
La création de la fonction publique territoriale est une conséquence directe de la décentralisation, que le législateur avait prévue dès la loi fondatrice du 2 mars 1982.
Alors que nous sommes à la veille de la promulgation de la loi relative à la démocratie de proximité, adoptée dans les mêmes termes par l'Assemblée nationale et le Sénat, une nouvelle étape de la décentralisation devra s'ouvrir lors de la prochaine législature.
La liberté des collectivités locales, l'égalité garantie par l'Etat, et la fraternité des territoires doivent s'enrichir, s'approfondir, se renouveler autour des notions de développement local, de décentralisation et de démocratie de proximité.
Les services publics et donc les fonctionnaires qui les font vivre sont les garants de la solidarité et de la cohésion nationale.
Je sais que nous pourrons compter sur vous pour franchir de nouvelles étapes, avec le même talent dont vous avez fait la démonstration depuis la loi du 2 mars 1982.
Je vous remercie de votre attention et de votre engagement, aux côtés de l'Etat, pour des services publics de qualité, proches et réactifs au service de nos concitoyens.
(Source http://www.fonction-publique.gouv.fr, le 19 février 2002)