Extraits du communiqué commun des ministres représentant les vingt-quatre pays membres de l'OCDE, réunis en conseil ministériel à Paris les 12 et 13 mai 1987.

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Circonstance : Conseil ministériel de l'OCDE réuni à Paris les 12 et 13 mai 1987

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Texte intégral

Améliorer les perspectives de croissance. La stratégie économique des pays de l'OCDE a, ces dernières années, ramené l'inflation au plus bas niveau observé depuis une génération, tout en maintenant des taux de croissance positifs. L'effort à long terme doit être poursuivi, en tenant compte de l'évolution des faits, afin de renforcer les perspectives de croissance régulière et durable, de réduire substantiellement le chomâge, celui-ci ayant atteint presque partout un niveau inacceptable ; de corriger les déséquilibres considérables des balances courantes des grands pays ; de consolider l'amélioration de la configuration des taux de change tout en parvenant à une plus grande stabilité ; et d'améliorer les performances économiques des pays en développement. Les pays de l'OCDE ne peuvent mieux faire pour contribuer à la prospérité mondiale que de favoriser la vigueur de leurs économies dans le cadre d'un système commercial mutilatéral ouvert.
- Afin d'atteindre ces objectifs, les ministres conviennent des actions suivantes, qui couvrent des domaines très divers et doivent se renforcer mutuellement. Ces actions se fondent sur la volonté commune d'utiliser pleinement les possibilités de coopération internationale et d'exploiter pour le mieux les interactions entre les politiques macro-économiques et les politiques d'ajustement structurel. Des politiques améliorées dans ces deux domaines sont les éléments indissociables de la stratégie de croissance plus forte de la production et de l'emploi. Les deux sont essentiels. Les politiques macro-économiques stabilisent les anticipations, assurent la confiance pour le moyen terme et renforcent les perspectives de croissance. Les politiques micro-économiques créent un environnement plus porteur et plus prompt à s'adapter, qui stimule la croissance et l'ajustement et donne ainsi plus d'efficacité aux politiques macro-économiques.
4 - Politiques macro-économiques. Les politiques macro-économiques doivent répondre simultanément à trois exigences : maintenir des orientations à moyen terme qui contribuent à la stabilité des anticipations et au renforcement de la confiance ; réduire les déséquilibres extérieurs exceptionnellement importants qu'accusent aujourd'hui les grands pays ; exploiter pleinement le potentiel pour la croissance non inflationniste et donc pour une progression plus forte de l'emploi. Il est indispensable que les politiques nationales soient complémentaires les unes des autres et compatibles entre elles pour que l'ajustement s'opère dans la perspective de la croissance et de la stabilité des taux de change. Chaque pays doit apporter sa contribution à l'effort collectif. En particulier, la mise en oeuvre effective des engagements consignés dans "l'accord du Louvre", et de ceux du communiqué récent du Groupe des Sept, devra être assurée rapidement. Les pays membres renforceront leur coopération, continueront de revoir leur politique économique à la lumière des exigences de la situation et prendront les nouvelles mesures qui pourraient s'imposer.
- 5 - Les politiques monétaires, appuyées par les politiques budgétaires, devraient rester axées sur l'expansion des agrégats monétaires et le maintien sur les marchés des capitaux de conditions compatibles avec les objectifs de faible inflation et avec le potentiel de croissance réelle ; elles devraient aussi contribuer à un comportement ordonné des taux de change. Au vu des perspectives de faible inflation dans beaucoup de pays, une nouvelle baisse des taux d'intérêt dans ces pays - en particulier une diminution des taux à long terme à l'initiative du marché - serait utile.
- 6 - Comme la politique monétaire, à elle seule, n'offre que des possibilités limitées d'améliorer les perspectives, ces possibilités doivent être étendues par une action plus poussée sur le plan budgétaire.
- 7 - Aux Etats-Unis, le processus de réduction du déficit du budget fédéral - lequel reviendra de 5,2 % du PNB en 1986 à moins de 4 % en 1987 - doit se poursuivre et il se poursuivra dans les années à venir. Il est essentiel de maintenir fermement cette orientation pour des raisons d'ordre extérieur et intérieur. Elle conditionne très largement la confiance des agents économiques, aux Etats-Unis et dans les autres pays, et, par voie de conséquence, les perspectives de taux d'intérêt modérés et de taux de change stables, d'activité économique saine - les investissements productifs bénéficiant d'un apport de ressources suffisant - et de résistance aux tentations protectionnistes. Les effets particulièrement heureux qu'aura ainsi la réduction du déficit du budget fédéral devraient effacer au fil du temps l'effet de freinage à court terme qu'elle peut avoir aux Etats-Unis. L'évolution des taux de change a amélioré la compétitivité-coûts des produits américains et elle exerce actuellement un effet positif sur le solde extérieur.
8 - Pour le Japon, l'objectif est d'assurer une croissance plus forte s'appuyant sur une progression de la demande intérieure plus vive que celle de la production, accompagnée d'une croissance rapide des importations, en accord avec l'amélioration substantielle qu'ont marquée les termes de l'échange. La réaffirmation par le gouvernement japonais de son intention d'améliorer encore l'accès des biens et services étrangers à ses marchés intérieurs est également accueillie avec satisfaction. Les autorités japonaises prendront de nouvelles mesures importantes d'ordre budgétaire et autres pour renforcer la croissance de la demande intérieure. Cela ne compromettra pas les objectifs budgétaires à moyen terme de l'administration centrale. On doit noter à cet égard que l'initiative annoncée récemment par les autorités japonaises visant à accroître la demande intérieure s'inscrit dans le cadre du processus de longue haleine et de grande portée engagé pour réorienter l'économie japonaise.
- 9 - En Allemagne aussi, la croissance de la demande intérieure, et en particulier des investissements privés, doit dépasser sensiblement celle de la production potentielle. Pour soutenir la croissance et faciliter l'ajustement extérieur, le gouvernement allemand a déjà annoncé que certaines des réductions d'impôt prévues interviendraient dès le 1er janvier 1988 et qu'une réforme fiscale plus large serait mise en oeuvre en 1990. Cela aura un effet favorable sur l'investissement. En outre, de nouvelles mesures d'ajustement structurel, notamment la réduction des subventions, seront appliquées. La conjonction de ces diverses actions contribuera à accroître, d'ici à 1990, le déficit du budget général par rapport au PNB. La prudence qui a marqué ces dernières années la politique budgétaire autorise ce genre d'action. S'il pesait un risque sérieux sur l'expansion soutenue de la demande intérieure, en particulier des investissements privés, la stratégie à moyen terme en faveur de la croissance et du renforcement de l'emploi serait ajustée en conséquence.
- 10 - Les autres pays ayant une balance courante largement excédentaire devraient aussi prendre les mesures appropriées pour favoriser la croissance de la demande intérieure par rapport au rythme de production soutenable.
- 11 - Certains pays se heurtent à de sévères contraintes en ce qui concerne la politique budgétaire. Les pays qui ont d'importants déficits budgétaires doivent continuer de s'employer en priorité à les corriger. Il y a toutefois en Europe quelques pays dont le budget n'accuse pas un déficit considérable mais où les considérations de balance courante pèsent sur la politique économique. Ces pays verraient s'accroître leurs possibilités d'action budgétaire et s'améliorer leurs perspectives de croissance si la demande se raffermissait chez leurs principaux partenaires commerciaux. Sur ce dernier point, à titre d'exemple, une stratégie économique des pays de la CEE fondée sur la coopération pourrait tirer profit de leur interdépendance et être accompagnée par les autres pays européens.
Agriculture. 19 - Le rapport conjoint du Comité de l'agriculture et du Comité des échanges a été approuvé. Cet important travail met clairement en lumière les déséquilibres sérieux qui caractérisent les marchés des principaux produits agricoles. Stimulée par des politiques qui ont empêché une transmission suffisante des signaux du marché aux producteurs agricoles, l'offre dépasse substantiellement la demande solvable. Le coût des politiques agricoles est considérable, pour les budgets publics, pour les consommateurs et pour l'économie dans son ensemble. En outre, les mesures de soutien excessives faussent de plus en plus la concurrence sur les marchés mondiaux, s'opposent au principe de l'avantage comparatif qui est à la source des échanges internationaux et compromettent gravement la situation de nombreux pays en développement. Cette détérioration continue, accentuée par le progrès technique et par d'autres facteurs, notamment la faiblesse de la croissance économique et l'ampleur des fluctuations des taux de change, entraîne de sérieuses difficultés dans le commerce international, qui risquent de déborder le seul domaine des échanges agricoles.
- 20 - Tous les pays ont des responsabilités dans la situation actuelle. Il faut mettre un terme à ce processus de détérioration et l'inverser. Certains pays ou groupe de pays ont amorcé un effort dans ce sens. Toutefois, étant donné l'ampleur des problèmes et la nécessité de les résoudre d'urgence, une réforme concertée des politiques agricoles sera mise en oeuvre d'une manière équilibrée.
21 - Cette réforme sera fondée sur les principes suivants :
- a) L'objectif à long terme est de faire en sorte que, par la réduction progressive et concertée de l'aide à l'agriculture, ainsi que par tous les autres moyens appropriés, les signaux des marchés influencent l'orientation de la production agricole ; il en résultera une meilleure allocation des ressources, dont bénéficieront les consommateurs et l'économie en général.
- b) En poursuivant l'objectif à long terme de la réforme agricole, on peut prendre en considération des préoccupations, sociales et autres, telles que la sécurité alimentaire, la protection de l'environnement ou l'emploi global, qui ne sont pas exclusivement économiques. L'ajustement progressif des politiques en vue d'atteindre l'objectif à long terme requerra du temps. Il est d'autant plus nécessaire d'entamer sans retard ce processus.
- c) Le besoin le plus pressant est d'éviter que ne s'aggrave le déséquilibre actuel des marchés. Il importe : - du côté de la demande, d'en améliorer autant que faire se peut les perspectives dans la zone de l'OCDE et dans le reste du monde ; - du côté de l'offre, de mettre en oeuvre des mesures qui, par des réductions des prix garantis et autres incitations à la production, par l'imposition de limites quantitatives à la production, ou par d'autres méthodes, permettront d'éviter une augmentation de l'offre excédentaire.
- d) Lorsque sont prises des mesures visant à limiter la production ou à retirer de l'agriculture des ressources productives par des décisions réglementaires, elles devraient être mises en oeuvre de façon à atténuer au maximum les distorsions économiques qui peuvent en résulter, et elles devraient être conçues et appliquées de manière à permettre un meilleur fonctionnement des mécanismes du marché.
- e) Au lieu d'être assuré par des mesures de garantie des prix ou par d'autres mesures liées à la production ou aux facteurs de production, le soutien des revenus agricoles devrait en tant que de besoin être recherché par des aides directes au revenu.
- Cette approche serait particulièrement adaptée pour répondre aux besoins, entre autres, des agriculteurs à faible revenu, ou qui vivent dans les régions particulièrement défavorisées, ou qui sont affectés par l'ajustement structurel dans l'agriculture.
- f) L'ajustement du secteur agricole sera facilité s'il peut s'appuyer sur un ensemble de mesures visant au développement des diverses activités en zone rurale. Les agriculteurs et leurs familles seront ainsi mieux à même de trouver des sources de revenus complémentaires ou de remplacement.
- g) Dans la mise en oeuvre des principes ci-dessus, les gouvernements gardent de la flexibilité quant au choix des moyens nécessaires pour la réalisation de leurs engagements.
22 - Les négociations d'Uruguay revêtent une importance décisive. La Déclaration ministérielle de Punta del Este et ses objectifs prévoient l'amélioration de l'accès aux marchés et la réduction des obstacles aux échanges dans le domaine de l'agriculture et fourniront un cadre pour la plupart des mesures nécessaires pour donner effet aux principes de réforme agricole dont sont convenus les ministres de l'OCDE, y compris une réduction progressive, selon une approche multipays et multiproduits, de l'aide et de la protection accordées à l'agriculture. Comme il a été convenu au paragraphe 16, les négociations d'Uruguay seront poursuivies activement et des propositions de négociation complètes seront soumises au cours des prochains mois, dans ce domaine comme dans d'autres. Dans les négociations d'Uruguay, il faudrait tenir compte de manière appropriée des actions menées unilatéralement.
- 23 - Pour permettre un relâchement progressif des tensions actuelles et renforcer ainsi les chances de faire avancer le plus tôt possible les négociations d'Uruguay dans leur ensemble, les gouvernements des pays de l'OCDE exécuteront promptement leurs engagements concernant le statu quo et le démantèlement et, de manière plus générale, s'abstiendront de recourir à des actions qui dégraderaient le climat des négociations : ils éviteront notamment d'engager des actions qui conduiraient à stimuler la production de denrées agricoles en excédent et à isoler davantage le marché national des marchés internationaux ; en outre, ils agiront de façon responsable quand ils écouleront les stocks excédentaires et ne se livreront pas à des pratiques commerciales conflictuelles et destabilisatrices.
- 24 - La réforme agricole n'est pas seulement dans l'intérêt des pays Membres. Les pays en développement exportateurs de produits agricoles trouveront avantage au redressement des marchés mondiaux. Les pays en développement importateurs de produits agricoles se verront incités à asseoir leur développement économique sur des bases plus solides en renforcant leur propre secteur agricole.
- 25 - La réforme agricole pose aux pays Membres des problèmes importants et complexes. Un renforcement de la coopération internationale est nécessaire pour surmonter ces difficultés. L'OCDE continuera de contribuer à leur solution en approfondissant ses travaux, en actualisant et en améliorant les outils d'analyse qu'elle a commencé de mettre au point et qui se révèleront précieux à maints égard, et en suivant la mise en oeuvre des divers principes et actions énumérés ci-dessus. Le secrétaire général est invité à soumettre un rapport sur l'état d'avancement des travaux au Conseil au niveau des ministres en 1988.