Déclaration de M. Christian Pierret, secrétaire d'Etat à l'industrie, sur la tenue en France du Mondial du timbre, l'évolution du service public postal, sur la volonté française de renforcer les exigences associées à la notion de service universel européen et sa proposition de faire du service universel une valeur commune à tous les membres de l'Union postale universelle, Paris, le 2 juillet 1999.

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Circonstance : Inauguration du Mondial du timbre Philexfrance 99, à Paris, le 2 juillet 1999

Texte intégral

Messieurs les Premiers ministres,
Messieurs les Ministres,
Messieurs les Ambassadeurs,
Madame la Conseillère auprès du Président de la République,
Monsieur le Président de la Fédération internationale de la philatélie,
Monsieur le Président de La Poste,
Mesdames et Messieurs les Présidents et les Directeurs,
Mesdames, Messieurs,
En 1998, un timbre rond l'a illustré: la France était championne du monde. En 1999, un Mondial chassant l'autre, c'est - d'une certaine manière - La Poste, les postes, qui sont devenues championnes du monde! Paris accueille, en effet, du 2 au 11 juillet, PhilexFrance 99, le Mondial du timbre, le plus grand événement philatélique de la fin de ce siècle. Au nom du gouvernement, j'inaugure avec vous cette manifestation, en éprouvant beaucoup de fierté et beaucoup de plaisir, et en vous exprimant les regrets du Premier ministre qui n'a pas pu être parmi nous. PhilexFrance 99 est un événement exceptionnel, par sa qualité, sa richesse et sa diversité, qui dépassent celles de 1989. Je félicite chaleureusement André DARRIGAND,
Président d'honneur de La Poste, Serge DEBIEN, Directeur du Musée de La Poste et Secrétaire général de l'exposition, ainsi que leurs équipes. Permettez-moi de féliciter également tous les exposants et les partenaires de PhilexFrance 99, qui contribuent - par la qualité de leur présence - à assurer le succès de cette exposition mondiale. Je souhaite, en particulier, remercier tous les pays représentés et leur témoigner de notre reconnaissance. A tous, je dis donc: bravo, bravo et merci!
La France célèbre aujourd'hui le cent cinquantième anniversaire de son premier timbre-poste. Elle commémore cette création à l'occasion d'une manifestation labellisée par la "Mission 2000 en France". De 1849 à l'an 2000, c'est l'histoire postale et l'avenir, les continuités de La Poste et ses perspectives, que je souhaite évoquer. Et quand je parle de La Poste, je pense d'abord aux postières et aux postiers, qui sont les agents, les ferments du plus populaire de nos services publics. Et je salue les factrices et les facteurs, venant de Lille et Strasbourg, Marseille et Bayonne, Arcachon et Le Mans, et au-delà d'une vingtaine de pays européens. Il doit être dit ici, aujourd'hui, au Mondial du timbre, que l'Europe est la grande affaire de La Poste. Donnons à La Poste l'Europe qu'elle mérite! Et à l'Europe et au monde les postes qu'ils méritent en retour!
1. Donnons à La Poste l'Europe qu'elle mérite!
150 ans! Le cent cinquantième anniversaire du premier timbre-poste nous ramène à la Seconde République, celle de Victor Hugo et Lamennais, de Louis Blanc et Lamartine, cette République qui imposa le triptyque "Liberté, égalité et fraternité". La notion de service public, bien que dégagée plus tard par la jurisprudence, était déjà en germe. Le service public est, à proprement parler, un projet républicain, par sa tension vers l'avenir, l'attention portée aux aspirations des citoyens et à leurs évolutions, sa contribution à l'édification d'un espace public sur l'ensemble du territoire national. Egalité d'accès au service - du fait de ce qu'on appelle la "péréquation tarifaire" -, continuité du service dans le temps et dans l'espace, mutabilité des techniques employées et des services rendus: La Poste était déjà, elle est toujours, un service public, né de nos valeurs républicaines, et essentiel pour notre cohésion sociale et territoriale.
Ce service public postal, auquel les Français sont légitimement attachés, je m'emploie à en faire partager les valeurs par nos partenaires de l'Union européenne. Une directive européenne est en cours de transposition dans les Etats membres: elle consacre un service universel européen, assorti de fortes exigences en matière de qualité. De nouvelles négociations s'engageront prochainement. La France entend qu'elles soient l'occasion de renforcer le service universel pour offrir un meilleur service aux usagers: délais d'acheminement resserrés, normes techniques plus rigoureuses, frais terminaux assurant le développement des échanges européens. Je note que le Traité d'Amsterdam, en reconnaissant les services d'intérêt économique général, peut nous permettre, au-delà d'un service universel postal, de définir un service public postal européen. Je ne me paie pas de mots: dans le vocabulaire communautaire, en effet, qui dit "service universel" pense "approche défensive" - c'est déjà ça! -; et qui dit "service public" décrit, en revanche, une ambition collective. Refusant toute libéralisation excessive, la France nourrit bien une ambition collective, européenne, pour La Poste et les postes européennes. J'ajoute que notre pays caresse un rêve, celui d'un timbre européen, comme il existe une monnaie unique européenne... Dans ce Mondial du timbre, qui est le salon de la philatélie, des loisirs du timbre, de ses passions d'enfants comme de ses émerveillements d'adultes, je souhaitais évoquer ce qui n'est encore qu'une utopie...
150 ans, c'est aussi un siècle et demi d'adaptations et de modernisations. L'histoire postale est faite de changements permanents, et même de progrès incessants, de la malle-poste à l'aéropostale, des premiers wagons postaux au T.G.V. jaune de La Poste. Différents symboles sont ici exposés, qui décrivent les degrés des progrès accomplis en un siècle et demi. Si leur intérêt historique est grand, il émane d'eux aussi une certaine poésie. Il incombe au Ministre que je suis de signer le programme des émissions philatéliques - un timbre emportant avec un courrier l'image d'un pays, la représentation de son histoire et de sa géographie, la définition de ses valeurs comme de ses ambitions. La collection complète des timbres émis en France nous en donne ici un aperçu saisissant. Parmi ces ambitions, j'en mets une en avant; je suis confiant dans la capacité de La Poste, de toutes les postes, à s'adapter de nouveau dans l'avenir. Ou plutôt: de s'adapter, dès à présent, à l'avenir!
Donnons à l'Europe et au monde les postes
qu'ils méritent!
Cette manifestation - ce n'est pas fortuit - porte le label de la "Mission 2000 en France". J'en remercie Jean-Jacques AILLAGON, son Président, qui préside également le Centre Geoges-POMPIDOU. La Poste n'est pas seulement un héritage du siècle dernier: elle est aussi, elle est surtout un investissement dans le siècle prochain. C'est là le message que j'adresse à tous. Les termes que j'emploie vont peut-être surprendre: pour que cet investissement soit profitable, les opérateurs postaux doivent être performants et compétitifs. "Compétitifs": le mot est lâché! La Poste n'est plus une administration à l'ancienne, en effet, avec ce que l'expression comporte d'ailleurs d'injustement péjoratif; elle est un service public, à esprit d'entreprise, tourné vers l'international. Elle affronte des marchés de plus en plus concurrentiels et, partant, doit faire la synthèse du service public et de l'esprit d'entreprise, sans renier les exigences de celui-là, ni négliger les nécessités de celui-ci. Ces évolutions touchent d'ailleurs l'ensemble des postes. S'agissant de La Poste française, je me réjouis de constater qu'elle réussit plutôt bien: elle est plus solide que jamais; tout en négociant en interne, et en se concertant avec les élus, elle a vu croître son chiffre d'affaires, et elle a développé ses métiers dans le courrier, le colis ainsi que les services financiers.
L'an 2000 est un mythe, l'image de l'avenir, le symbole de l'innovation, notamment technologique. La Poste doit saisir comme autant d'opportunités les mutations qui sont en cours. Il lui incombe en particulier de maîtriser, de favoriser le développement et la démocratisation des nouvelles technologies de l'information et de la communication. Une enfant est lauréate du concours "Dessine-moi le timbre de l'an 2000". Ce timbre, qui sera émis le 6 juillet, est d'abord un message de solidarité. Apposé sur une enveloppe, il sera bientôt emporté dans l'espace par Ariane V. Nouvelles technologies, esprit d'entreprise, service public: ainsi se présente l'avenir de La Poste.
Un avenir qui doit être tourné vers l'international! J'ai beaucoup parlé de l'Europe, mais La Poste, les postes ont le monde entier pour horizon. L'internationalisation des services postaux a conduit à l'internationalisation des opérateurs postaux: en créant Chronopost, La Poste a su être pionnière. De nombreuses évolutions sont en cours, auxquelles La Poste ne peut pas rester étrangère. La semaine dernière, à titre d'illustration, La Poste française a annoncé pour 750 millions de francs d'acquisitions à l'international, renforçant ainsi sa présence en Allemagne et s'implantant sur le marché américain. C'est là la voie qu'il lui faut suivre.
Traitant de ces questions internationales, comment pourrais-je - avant de conclure - ne pas évoquer le congrès de l'Union postale universelle, qui se réunira à Pékin le mois prochain ? Brièvement: deux idées... Première idée: la France souhaite que le service universel devienne une valeur fondatrice de l'U.P.U. A notre initiative, l'Union postale universelle a déjà mené différentes études sur ce thème. Il s'agirait ainsi de développer un socle minimal d'exigences pour que tous, à travers le monde, aient accès à un service postal et pour que chaque Etat définisse des objectifs ambitieux en terme de qualité. Dans cette perspective, il nous faudra garder à l'esprit la situation particulière des pays en voie de développement. Par son aide au développement, en effet, notre pays tient un rôle important, pour permettre à ces pays d'améliorer la qualité des services rendus: il continuera, résolument, à le tenir. La France souhaite que l'Union postale universelle s'approprie le projet d'un service postal universel, sans remettre en cause l'autonomie ni des opérateurs postaux ni même des Etats. Un consensus, sur cette base équilibrée, ne paraît pas hors de portée... Deuxième idée: la France souhaite qu'un accord soit trouvé rapidement sur les frais terminaux. Le règlement de cette question sera décisif, si nous voulons aller, et nous le voulons, vers un service universel postal au niveau mondial. La France souhaite que des progrès significatifs soient faits rapidement. Le prochain congrès de Pékin nous en donne l'occasion.
Mesdames et Messieurs,
Je voudrais, en conclusion, remercier à nouveau PhilexFrance 99, à laquelle je souhaite un plein succès. Vous m'avez permis d'exposer l'ambition que la France nourrit pour le service public postal. En évoquant son universalité, et la pérennité de ses valeurs, en exposant aussi les évolutions qu'appellent les mutations technologiques et la mondialisation des échanges, vous apportez une contribution remarquable à la réflexion que nous devons avoir, tous ensemble, sur l'avenir du service public postal. Pour les postes, comme pour l'industrie, ou les services financiers, un nouveau moment s'est ouvert. Et ce moment est mondial. Donnons donc à La Poste l'Europe qu'elle mérite! Et donnons l'Europe et au monde les postes qu'ils méritent en retour! J'en suis convaincu: le service public, à esprit d'entreprise, tourné vers l'international, a un bel avenir! C'est cet avenir, autant que son histoire, que nous fêtons ici ensemble.
(Source http://www.industrie.gouv.fr, le 15 juillet 1999)