Déclaration de M. Michel Sapin, ministre de la fonction publique et de la réforme de l'Etat, sur l'approfondissement et l'adaptation du statut de la fonction publique territoriale et sur l'accompagnement des collectivités dans la mise en oeuvre de la gestion prévisionnelle des emplois, des effectifs et des compétences, Paris le 7 mars 2002.

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Circonstance : Installation du conseil supérieur de la fonction publique territoriale à Paris le 7 mars 2002

Texte intégral

Monsieur le Président,
Mesdames et Messieurs,
Merci, cher Michel-Antoine Rognard, d'assurer ainsi la transition entre l'équipe sortante du Conseil supérieur et l'équipe appelée à siéger jusqu'en 2007.
Le mandat qui s'achève a été riche et productif. Depuis 1996, le Conseil supérieur a tenu 27 réunions plénières, 65 formations spécialisées, examiné 14 projets de lois, 138 décrets et 44 arrêtés. Ce mandat se caractérise par un approfondissement et une adaptation permanente du statut de la fonction publique territoriale. Plusieurs cadres d'emplois ont été révisés, les concours ajustés en conséquence, des souplesses introduites, des dysfonctionnements supprimés. Mais toujours a prévalu dans vos travaux le respect des grands principes statutaires, comme la séparation du grade et de l'emploi, l'égalité de traitement dans l'accès aux emplois publics, la parité entre fonctions publiques, la mobilité.
Des chantiers nouveaux ont également été ouverts pour résorber l'emploi précaire, instituer les 3èmes concours de recrutement, faciliter la promotion interne, prendre en compte l'expérience professionnelle, valoriser les emplois fonctionnels de direction, prendre en compte les conséquences de l'intercommunalité, introduire des améliorations indiciaires.
Nous avons également grandement progressé sur la connaissance de la fonction publique territoriale. Les travaux de votre groupe statistique ont permis de mettre autour de la table toutes les sources et de mieux coordonner et croiser les données. C'est également depuis ce mandat, qu'est désormais réalisée tous les deux ans la synthèse des bilans sociaux.
Ainsi, nous pouvons mieux voir où sont les enjeux du futur proche et mieux anticiper sur les évolutions souhaitables.
Vous-même, Monsieur Rognard, vous avez su être l'avocat de la fonction publique territoriale et parfaitement uvrer au respect de l'équilibre paritaire entre les besoins des collectivités-employeurs et les attentes des fonctionnaires territoriaux.
Votre implication personnelle s'est même traduite dans un rapport remarqué dans le cadre du conseil économique et social. Les pistes que vous avez tracées, pourront utilement servir de feuilles de routes pour la réforme à vos successeurs.
Mesdames et Messieurs, je voudrais tout d'abord vous féliciter les uns et les autres pour votre élection ou votre désignation à la suite des élections professionnelles. Certes le processus est long et complexe, mais il repose sur l'élection - dans chaque collège - par des scrutins qui ont connu un haut niveau de participation.
Je constate que dans leur sagesse les électeurs ont fait la part de la continuité et du changement, puisque je reconnais plusieurs visages connus et que j'ai plaisir à découvrir plusieurs visages nouveaux. A la veille de la journée des femmes, je constate que la parité femme-homme a une marge de progression, tout particulièrement dans le collège des élus locaux.
Avant d'esquisser avec vous ce que pourraient être vos axes de travail pour le mandat 2002-2007, je voudrais - en ce lieu et en ce mois - rendre hommage à Gaston Defferre. Nous fêtons actuellement les 20 ans de la décentralisation, une réforme qui a changé le décor de l'action publique locale, et ouvert la voie à la fonction publique territoriale.
Une fonction publique territoriale égale en droits et en devoirs à son homologue de l'Etat, était pour Gaston Defferre le corollaire de cette révolution politique et administrative. Car il fallait que les collectivités aient les moyens humains de leurs nouvelles responsabilités.
On peut aujourd'hui mesurer le chemin parcouru par les élus et par les fonctionnaires territoriaux qui ont servi avec talent la décentralisation.
Si le titre III du statut général de la fonction publique est parfois critiqué il a parfaitement résisté à l'épreuve du temps, principalement parce qu'il n'est pas un carcan. Par delà les nécessaires ajustements, il offre au contraire une grande faculté d'adaptation. Il est vrai qu'une fonction publique à 59 cadres d'emplois est moins complexe à gérer qu'une fonction publique à 1700 corps
Le conseil supérieur de la fonction publique territoriale a été un artisan décisif de cette uvre juridique originale. Je voudrais souligner également l'excellent travail de la DGCL en la matière et la qualité des relations qu'elle entretient avec les membres du Conseil supérieur.
Le renouvellement, consécutif aux élections municipales et cantonales et aux élections professionnelles de 2001, devrait symboliser un nouvel élan pour les travaux de votre instance paritaire nationale et permettre de renforcer la capacité de proposition du conseil supérieur sur la base du dialogue social entre élus, organisations syndicales et représentants de l'Etat.
Pour le proche avenir, vous le savez, le dossier prioritaire doit être celui de l'accompagnement des collectivités dans la mise en uvre de politiques de gestion prévisionnelle des emplois, des effectifs et des compétences.
Les données statistiques sont bien connues dans la fonction publique territoriale, grâce aux travaux de l'Observatoire de l'emploi territorial du CNFPT et de la CNRACL qui ont réalisé une étude par catégorie, par filière, par grade, par région et par année jusqu'en 2020.
La Fonction publique territoriale bénéficie d'un petit délai de grâce par rapport à la Fonction publique d'Etat, mais c'est dès maintenant que se préparent les décisions qui permettront un renouvellement sans à coups des ressources humaines des collectivités locales
Le Gouvernement a déjà pris des décisions importantes, notamment pour diversifier les filières de recrutement, introduire de la souplesse pour une meilleure fluidité des carrières et supprimer les obstacles à la mobilité, dans le cadre du comité interministériel à la réforme de l'Etat du 15 novembre dernier.
Mais c'est sur le terrain que peuvent être synthétisés au mieux les besoins des collectivités, ainsi que toutes les données relatives à l'évolution des emplois, à l'organisation des concours.
La loi du 3 janvier 2001 confie aux centres de gestion un rôle pivot de concertation pour évaluer les besoins prévisionnels de recrutement, ainsi que pour déterminer les moyens pour y répondre. Cette concertation doit être réelle, approfondie et régulièrement actualisée. Cette anticipation doit intégrer une analyse plus large au niveau régional et national, en particulier pour les cadres d'emplois à effectifs limités, notamment ceux de catégorie A. Une collaboration inter-centres de gestion et avec le CNFPT sur une base régionale doit être recherchée.
On mesure bien aujourd'hui l'effet des politiques malthusiennes à l'entrée des écoles d'infirmières par exemple, dans les années 94-97. Ne commettons pas la même erreur.
Pour réussir, deux conditions doivent être remplies :
·* la première est de parvenir à une réelle coordination des différentes instances de gestion, de formation et de concertation de la fonction publique territoriale. L'heure n'est plus aux querelles de territoires et de clochers.
Plusieurs chantiers sont devant nous :
- pour améliorer le recueil d'informations grâce aux nouvelles technologies de l'information,
- pour mettre en relation les différentes bases de données,
- pour développer l'assistance technique et le conseil aux collectivités,
- pour conduire des études prospectives par métiers, par régions.
·* La deuxième est la rénovation du dialogue social au sein des fonctions publiques, sur la base du Livre blanc qui vient de m'être remis. Outre les points communs aux trois fonctions publiques, des questions spécifiques à la fonction publique territoriale sont posées, en particulier celle de l'émergence d'une représentation des employeurs au niveau départemental, comme au niveau national. Le Livre blanc propose trois hypothèses pour organiser cette représentation collective. A vous d'en débattre.
Sur le fond, les dossiers ne manquent pas, et les ordres du jour seront sans doute chargés.
Plusieurs dossiers sont déjà bien engagés, comme la revalorisation de la situation des techniciens territoriaux, l'amélioration des carrières de la filière administrative, en particulier dans la catégorie C, la résorption de l'emploi précaire, la professionnalisation des concours, l'assouplissement de certains quotas, la mobilité inter-fonction publique, l'avenir du dispositif emplois-jeunes.
Outre l'accompagnement de la gestion prévisionnelle des emplois et des compétences et la modernisation du dialogue social, d'autres pistes de travail seront engagées durant votre mandat : très rapidement, une note d'orientation va vous être transmise sur la transposition du protocole d'accord hospitalier du 14 mars 2001 à la fonction publique territoriale.
Avant l'été, des projets de décrets vous seront soumis qui modifieront les cadres d'emplois des sages-femmes, des infirmiers, des rééducateurs, des assistants médico-techniques et des puéricultrices.
Les différences entre la FPH et la FPT étaient en effet devenues difficilement justifiables, quand, pour un certain nombre de professions, les conditions d'exercice des missions ont tendu, au cours de ces dernières années, à se rapprocher.
Elles devenaient risquées à l'heure où l'on constate des difficultés de recrutement dans ce domaine et à la veille d'un important renouvellement démographique au sein des professions de santé.
Ultérieurement, d'autres dossiers pourraient être soumis à votre examen, notamment le droit syndical et bien d'autres encore.
Mesdames, Messieurs,
Un sondage réalisé par la Sofres pour la DGCL en janvier 2002, montre que 71 % des sondés estiment que les services publics locaux sont bien gérés, que 54 % estiment que si une entreprise privée se voyait confier la gestion du service public local, ce service coûterait plus cher que lorsque la collectivité locale s'en charge.
Cette satisfaction des citoyens, il nous appartient de la conforter. Si vous êtes les gardiens du statut, vous ne devez pas oublier que le but ultime de nos services publics, c'est le service de l'usager.
Je sais que nous pourrons compter sur vous pour franchir de nouvelles étapes, avec la même efficacité dont votre instance a fait preuve depuis la loi du 26 janvier 1984.
Il ne me reste qu'à former des vux pour vos travaux qui commencent aujourd'hui.
Je vous remercie de votre attention.
(source http://www.fonction-publique.gouv.fr, le 8 mars 2002)