Texte intégral
Mesdames, Messieurs les Ambassadeurs,
Je saisis quant à moi l'occasion de cette entrée en matière pour vous faire partager quelques unes des mes observations sur le travail des prochains mois. Sans aucune exhaustivité naturellement. Certaines de ces préoccupations constituent le thème de tables rondes ou de déjeuners de travail qui vont nous réunir, d'autres relèvent d'un travail "à plus long cours"
La reconstruction de notre dispositif de coopération internationale et au développement, déjà à l'ordre du jour l'an dernier, en fait partie.
Inutile ici de s'étendre sur la période de rodage de la DGCID. C'était une entreprise tout à fait considérable, qui a été conduite dans les temps, grâce aux efforts de tous : la DGA, la DGCID formée pour l'essentiel des personnels de l'ex DG et de l'ancienne DEV, tout cela sous la coordination personnelle du Secrétaire général. Des procédures homogènes ont été définies et une programmation unique des crédits a été adoptée ; la gestion des personnels s'est faite de façon rapide, transparente, avec une vraie participation interministérielle pour les postes de coopération. La totale confiance que nous accordons à ces personnels doit vous permettre la pratique de délégation qui conditionne notre efficacité sur le terrain. Bref, beaucoup a déjà été fait.
Mais il reste trois chantiers à conduire : le calage des compétences respectives du Département et de Bercy est en cours, comprenant notamment les modalités de notre tutelle sur l'Agence française de développement.
Si le concept de Zone de solidarité prioritaire entre dans les pratiques il reste encore du chemin pour rénover les instruments de coopération.
Quant à la réforme du FAC, rebaptisé Fonds de solidarité prioritaire, il finance les projets de coopération institutionnelle, scientifique, culturelle et technique dans les pays en développement, notamment lorsqu'ils induisent des réformes de fond dans ces pays. Son régime juridique fait l'objet d'une révision sous l'autorité du Secrétariat général du gouvernement.
L'AFD dédiée au développement économique et aux infrastructures, va progressivement déployer son activité sur les infrastructures de santé et d'éducation.
Notre position est claire dans ces domaines : veiller à la cohérence de stratégie et d'action de la France. En ZSP et j'attire votre attention là-dessus, vos avis seront maintenant sollicités tout au long du cycle des projets conduits par l'AFD et vous donnent de ce fait une responsabilité nouvelle et réelle sur l'unité de notre aide au développement.
Nous avons d'un autre côté lancé une réflexion sur l'assistance technique et l'expertise française à l'étranger, confiée à Jean Némo. Il vient de nous remettre son rapport d'étape et les prochains mois seront consacrés à une remise à plat de ce dispositif qui procure à la France un réel avantage comparatif mais qui, dans la forme actuelle, n'est plus adapté, ni dans ses modalités, ni dans sa correspondance aux besoins, ni probablement dans sa gestion.
Enfin le Parlement va prochainement discuter le projet de loi sur le volontariat civil, élément essentiel pour la ressource humaine dont a besoin notre action internationale et pour combler le vide que va créer la fin du service national.
Le troisième chantier c'est le "projet d'entreprise" de la DGCID. F. Nicoullaud a lancé ce travail avec ses cinq directions. A ce stade il est encore "brut de décoffrage". C'est à mes yeux une tâche essentielle, d'abord comme document stratégique et prospectif pour le ministère et la parfaite intégration de la DGCID à l'ensemble de l'appareil diplomatique, ensuite parce qu'à l'instar de nos grands partenaires bilatéraux et multilatéraux, nous avons besoin d'un outil de communication externe qui fasse connaître nos priorités, leur sens et notre façon de les traiter.
Cela me conduit à un second grand champ d'action : la coordination de notre coopération bilatérale et de l'investissement multilatéral de la France.
Trois constats ici : Nous faisons beaucoup en multilatéral mais cela ne se voit pas toujours assez. Il ne serait pas normal que l'expression de la solidarité de notre pays, qui reste au tout premier rang des pays développés en pourcentage du PIB consacré à l'aide internationale, soit relativisée voire minimisée. Deux événements modifient aussi le paysage de nos relations de coopération. Les récentes décisions du Sommet du G7 à Cologne sur l'annulation de la dette des pays les plus pauvres vont nous conduire à des modifications de nos positions et de nos projets. L'utilisation des marges de manoeuvre dégagées par l'annulation de leurs dettes au profit de la lutte contre la pauvreté et notre appui dans la définition des programmes correspondants en sont la première illustration. De même, cette mesure signale la fin, ou du moins la diminution en volume de l'ajustement structurel et des plans du même nom, puisque le poids des dettes qui justifiait cette approche et ces mesures aura mécaniquement chuté. Enfin, il est clair aussi que nous aurons à redéfinir nos modalités d'intervention avec nombre de partenaires demain éligibles aux dons, là où nous faisions du prêt. Notre réflexion devra aussi, d'ailleurs, porter sur notre alimentation en crédits budgétaires pour prendre en compte cette évolution. Lomé aussi, et la renégociation des accords de l'Union européenne avec les pays ACP va occuper une bonne part de notre temps dans les mois à venir. Nombreux sont les dossiers techniques, industriels ou commerciaux dont nous saisissent nos partenaires et qui sont soumis au régime de ces accords. C'est pour eux une préoccupation majeure et ils cherchent dans la position de la France la traduction de la solidarité que nous affichons par ailleurs dans notre politique de coopération. Bref, ce sont à la fois nos intérêts économiques et commerciaux et la qualité de notre relation politique qui est en question.
L'engagement francophone de la France va trouver au Sommet de Moncton une traduction renouvelée. Je crois pouvoir dire que les positions françaises, déjà affichées à Hanoï, auront beaucoup marqué la préparation de ce rendez-vous. Nous avons insisté, sur deux points :
D'abord la rénovation complète des outils de coopération et des opérateurs de la Francophonie pour faire un sort à toutes les critiques qu'on entendait : efficacité relative, centralisme excessif, opacité dans la gestion.
La réforme de l'Agence de la Francophonie est faite ; l'AUPELF-UREF a été évaluée et auditée et je remercie nos ambassadeurs d'avoir fidèlement exposé les positions de la France à nos partenaires des pays membres de la Francophonie ; enfin le plan STOCK est lancé pour TV5. Ensuite promouvoir une Francophonie plus attractive, et plus proche des populations. Dans les trois grands champs de la francophonie politique, culturelle, éducative et linguistique, un travail de mise à plat est en cours et devrait permettre à l'organisation francophone de jouer - enfin, diront certains - son rôle dans un contexte mondial où la formation, la production et la circulation des biens culturels, l'accès aux technologies modernes de communication exigent d'elle des majorités d'idées, des programmes compétitifs et une meilleure participation des acteurs de terrain. Pour nous, ministère des Affaires étrangères, c'est en tout cas un vrai chantier : songez que sur 1 milliard de FF environ que dépense annuellement la Francophonie, les deux tiers viennent de la France et l'essentiel de ce département, la DGCID en particulier.
Troisième grande préoccupation enfin : le "Hors Etat", entendez coopération décentralisée et dynamisation de la vie associative et des actions non gouvernementales au service du projet international de la France.
Je n'y insisterai pas, deux rendez-vous sont prévus pour cela dans votre conférence.
J'attire simplement à ce stade votre attention sur ce que nous apprennent les événements des derniers mois.
La gestion des crises y compris mais pas seulement l'action humanitaire : les dix derniers mois ont malheureusement été fertiles en crises de toute sorte, nous obligeant à nous adapter à des situations extrêmement complexes. L'administration du ministère des Affaires étrangères ne réagit plus seule même si son rôle est essentiel ; elle fait appel à des compétences externes et agit dans un cadre interministériel.
Dans ce domaine une réflexion approfondie a été ouverte sur les méthodes, les outils et les acteurs. Elle a été confiée à un inspecteur des finances, Laurent Vachey et à un inspecteur des postes François Descoueyte.
La redéfinition du rôle de l'Etat dans son dialogue avec la société civile : mobilisation, conseil, coordination autour de projets locaux pertinents et profitables, information dans tous les secteurs : les rencontres nationales de la coopération décentralisée des 16 et 17 avril dernier ont été je crois instructifs et les actes qui vont bientôt paraître devraient pour vous être un bon vade-mecum de ce type d'action.
De tout cela nous aurons l'occasion de nous entretenir pendant cette conférence.
Je vous remercie.
(source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 02 septembre 1999)
Je saisis quant à moi l'occasion de cette entrée en matière pour vous faire partager quelques unes des mes observations sur le travail des prochains mois. Sans aucune exhaustivité naturellement. Certaines de ces préoccupations constituent le thème de tables rondes ou de déjeuners de travail qui vont nous réunir, d'autres relèvent d'un travail "à plus long cours"
La reconstruction de notre dispositif de coopération internationale et au développement, déjà à l'ordre du jour l'an dernier, en fait partie.
Inutile ici de s'étendre sur la période de rodage de la DGCID. C'était une entreprise tout à fait considérable, qui a été conduite dans les temps, grâce aux efforts de tous : la DGA, la DGCID formée pour l'essentiel des personnels de l'ex DG et de l'ancienne DEV, tout cela sous la coordination personnelle du Secrétaire général. Des procédures homogènes ont été définies et une programmation unique des crédits a été adoptée ; la gestion des personnels s'est faite de façon rapide, transparente, avec une vraie participation interministérielle pour les postes de coopération. La totale confiance que nous accordons à ces personnels doit vous permettre la pratique de délégation qui conditionne notre efficacité sur le terrain. Bref, beaucoup a déjà été fait.
Mais il reste trois chantiers à conduire : le calage des compétences respectives du Département et de Bercy est en cours, comprenant notamment les modalités de notre tutelle sur l'Agence française de développement.
Si le concept de Zone de solidarité prioritaire entre dans les pratiques il reste encore du chemin pour rénover les instruments de coopération.
Quant à la réforme du FAC, rebaptisé Fonds de solidarité prioritaire, il finance les projets de coopération institutionnelle, scientifique, culturelle et technique dans les pays en développement, notamment lorsqu'ils induisent des réformes de fond dans ces pays. Son régime juridique fait l'objet d'une révision sous l'autorité du Secrétariat général du gouvernement.
L'AFD dédiée au développement économique et aux infrastructures, va progressivement déployer son activité sur les infrastructures de santé et d'éducation.
Notre position est claire dans ces domaines : veiller à la cohérence de stratégie et d'action de la France. En ZSP et j'attire votre attention là-dessus, vos avis seront maintenant sollicités tout au long du cycle des projets conduits par l'AFD et vous donnent de ce fait une responsabilité nouvelle et réelle sur l'unité de notre aide au développement.
Nous avons d'un autre côté lancé une réflexion sur l'assistance technique et l'expertise française à l'étranger, confiée à Jean Némo. Il vient de nous remettre son rapport d'étape et les prochains mois seront consacrés à une remise à plat de ce dispositif qui procure à la France un réel avantage comparatif mais qui, dans la forme actuelle, n'est plus adapté, ni dans ses modalités, ni dans sa correspondance aux besoins, ni probablement dans sa gestion.
Enfin le Parlement va prochainement discuter le projet de loi sur le volontariat civil, élément essentiel pour la ressource humaine dont a besoin notre action internationale et pour combler le vide que va créer la fin du service national.
Le troisième chantier c'est le "projet d'entreprise" de la DGCID. F. Nicoullaud a lancé ce travail avec ses cinq directions. A ce stade il est encore "brut de décoffrage". C'est à mes yeux une tâche essentielle, d'abord comme document stratégique et prospectif pour le ministère et la parfaite intégration de la DGCID à l'ensemble de l'appareil diplomatique, ensuite parce qu'à l'instar de nos grands partenaires bilatéraux et multilatéraux, nous avons besoin d'un outil de communication externe qui fasse connaître nos priorités, leur sens et notre façon de les traiter.
Cela me conduit à un second grand champ d'action : la coordination de notre coopération bilatérale et de l'investissement multilatéral de la France.
Trois constats ici : Nous faisons beaucoup en multilatéral mais cela ne se voit pas toujours assez. Il ne serait pas normal que l'expression de la solidarité de notre pays, qui reste au tout premier rang des pays développés en pourcentage du PIB consacré à l'aide internationale, soit relativisée voire minimisée. Deux événements modifient aussi le paysage de nos relations de coopération. Les récentes décisions du Sommet du G7 à Cologne sur l'annulation de la dette des pays les plus pauvres vont nous conduire à des modifications de nos positions et de nos projets. L'utilisation des marges de manoeuvre dégagées par l'annulation de leurs dettes au profit de la lutte contre la pauvreté et notre appui dans la définition des programmes correspondants en sont la première illustration. De même, cette mesure signale la fin, ou du moins la diminution en volume de l'ajustement structurel et des plans du même nom, puisque le poids des dettes qui justifiait cette approche et ces mesures aura mécaniquement chuté. Enfin, il est clair aussi que nous aurons à redéfinir nos modalités d'intervention avec nombre de partenaires demain éligibles aux dons, là où nous faisions du prêt. Notre réflexion devra aussi, d'ailleurs, porter sur notre alimentation en crédits budgétaires pour prendre en compte cette évolution. Lomé aussi, et la renégociation des accords de l'Union européenne avec les pays ACP va occuper une bonne part de notre temps dans les mois à venir. Nombreux sont les dossiers techniques, industriels ou commerciaux dont nous saisissent nos partenaires et qui sont soumis au régime de ces accords. C'est pour eux une préoccupation majeure et ils cherchent dans la position de la France la traduction de la solidarité que nous affichons par ailleurs dans notre politique de coopération. Bref, ce sont à la fois nos intérêts économiques et commerciaux et la qualité de notre relation politique qui est en question.
L'engagement francophone de la France va trouver au Sommet de Moncton une traduction renouvelée. Je crois pouvoir dire que les positions françaises, déjà affichées à Hanoï, auront beaucoup marqué la préparation de ce rendez-vous. Nous avons insisté, sur deux points :
D'abord la rénovation complète des outils de coopération et des opérateurs de la Francophonie pour faire un sort à toutes les critiques qu'on entendait : efficacité relative, centralisme excessif, opacité dans la gestion.
La réforme de l'Agence de la Francophonie est faite ; l'AUPELF-UREF a été évaluée et auditée et je remercie nos ambassadeurs d'avoir fidèlement exposé les positions de la France à nos partenaires des pays membres de la Francophonie ; enfin le plan STOCK est lancé pour TV5. Ensuite promouvoir une Francophonie plus attractive, et plus proche des populations. Dans les trois grands champs de la francophonie politique, culturelle, éducative et linguistique, un travail de mise à plat est en cours et devrait permettre à l'organisation francophone de jouer - enfin, diront certains - son rôle dans un contexte mondial où la formation, la production et la circulation des biens culturels, l'accès aux technologies modernes de communication exigent d'elle des majorités d'idées, des programmes compétitifs et une meilleure participation des acteurs de terrain. Pour nous, ministère des Affaires étrangères, c'est en tout cas un vrai chantier : songez que sur 1 milliard de FF environ que dépense annuellement la Francophonie, les deux tiers viennent de la France et l'essentiel de ce département, la DGCID en particulier.
Troisième grande préoccupation enfin : le "Hors Etat", entendez coopération décentralisée et dynamisation de la vie associative et des actions non gouvernementales au service du projet international de la France.
Je n'y insisterai pas, deux rendez-vous sont prévus pour cela dans votre conférence.
J'attire simplement à ce stade votre attention sur ce que nous apprennent les événements des derniers mois.
La gestion des crises y compris mais pas seulement l'action humanitaire : les dix derniers mois ont malheureusement été fertiles en crises de toute sorte, nous obligeant à nous adapter à des situations extrêmement complexes. L'administration du ministère des Affaires étrangères ne réagit plus seule même si son rôle est essentiel ; elle fait appel à des compétences externes et agit dans un cadre interministériel.
Dans ce domaine une réflexion approfondie a été ouverte sur les méthodes, les outils et les acteurs. Elle a été confiée à un inspecteur des finances, Laurent Vachey et à un inspecteur des postes François Descoueyte.
La redéfinition du rôle de l'Etat dans son dialogue avec la société civile : mobilisation, conseil, coordination autour de projets locaux pertinents et profitables, information dans tous les secteurs : les rencontres nationales de la coopération décentralisée des 16 et 17 avril dernier ont été je crois instructifs et les actes qui vont bientôt paraître devraient pour vous être un bon vade-mecum de ce type d'action.
De tout cela nous aurons l'occasion de nous entretenir pendant cette conférence.
Je vous remercie.
(source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 02 septembre 1999)