Texte intégral
A. Hausser.- Vous êtes ministre de la Fonction publique, de la Réforme de l'Etat et de l'Aménagement du territoire. Aujourd'hui, c'est la Fonction publique qui nous intéresse. Ce ne sont pas les agents de la Fonction publique, mais les employés du secteur public, qui seront dans la rue. Vous menez des négociations avec la Fonction publique, tout cela est quand même très proche. Est-ce que la journée d'aujourd'hui est un vrai test ?
- "Non, cela montre une inquiétude des agents - et ils l'expriment d'ailleurs - sur leur statut, leur devenir. Y a-t-il encore une perspective dans le service public ? La réponse est oui. Et dans les négociations, nous les invitons à partager avec nous, ce formidable défi de faire un service public performant, de faire des entreprises publiques des champions européens. Notre économie a besoin d'être performante et, pour cela, elle a besoin d'un service public de qualité."
Oui, mais "performance", cela veut dire "concessions" aujourd'hui.
- "Aujourd'hui, personne n'imagine un seul instant qu'on ne puisse pas, dans un monde mobile, réactif, qui est en train de changer, avoir des réponses totalement identiques. Nous sommes convaincus qu'aujourd'hui les Français - rappelez-vous au premier tour des présidentielles -, et notamment dans le monde rural, ont eu un sentiment d'abandon par rapport au service public. Ils avaient un sentiment de dire que le service public se dégradait, avec les écoles, les hôpitaux... Nous voulons au contraire redonner fierté aux fonctionnaires et nous leur demandons d'être des acteurs du changement et non pas des freins au changement. Aucune structure, aucune entreprise, aucune administration ne peut résister si demain elle n'est pas efficace, si elle ne donne pas satisfaction à l'usager. Ce sont tous les chantiers que nous ouvrons. Comment raccourcir les délais ? Comment alléger les procédures ? Comment accompagner celles et ceux qui sont porteurs de croissance, qu'il s'agisse de l'entreprise, de l'association ou de la collectivité locale."
Tout cela c'est très bien, c'est donc la performance. Je parlais de "concessions", je vous répondrais aussi "compensations"...
- "Nous leur avons très clairement indiqué qu'il n'était absolument pas question de toucher aux statuts. J'ai entendu, et notamment dans mes discussions, une interrogation qui demandait si la décentralisation n'est pas un moyen d'éparpiller les fonctions publiques et de faire en sorte de fragiliser le statut de la fonction publique..."
Avant la décentralisation, il y a le problème des salaires.
- "Pour le problème des rémunérations, bien évidemment, c'est un sujet de leurs préoccupations. Nous avons accordé 0,7 % au 1er décembre, nous ouvrirons des négociations salariales dans le premier semestre 2003, et nous ouvrirons aussi des négociations sur les retraites. Cela fait 20 ans que l'on parle de "réforme de l'Etat". Cela fait 20 ans que, par rapport au secteur public, il y a des réflexions et pas de décisions. Et nous voyons bien qu'aujourd'hui, nous sommes totalement déterminés à assumer nos responsabilités et à faire en sorte que renforcer le service public, c'est lui donner les moyens d'être renforcé et d'être performant. Si nous laissons le système des retraites fragilisé, c'est une formidable inquiétude sur les agents de la Fonction publique. Regardez ce qui s'est passé dans le domaine de la sécurité : le ministre de l'Intérieur a donné les moyens, a mis en place des procédures, et permet aujourd'hui d'être jugés sur les résultats et non pas sur les moyens..."
Vous voulez faire la même chose ?
- "Absolument. Nous disons aux fonctionnaires qu'il faut que l'on révolutionne et que l'on change de culture dans les managements de la Fonction publique. Avant - caricature ! -, celui qui dépensait l'argent était plus récompensé que celui qui l'économisait. Vis-à-vis de celles et ceux qui paient des impôts, nous devons avoir, à chaque fois, l'interrogation : est-ce que cet impôt est bien utilisé, au bon endroit, au bon moment et est-ce que les résultats sont à la hauteur ? Celui qui ne prenait pas d'initiatives avait une carrière plutôt récompensée. Il faut redonner "la culture du risque", la prise de risques, de responsabilités."
Vous parlez de "renforcement" de la Fonction publique. Pourtant, pendant la campagne électorale, on a entendu un autre langage, on a entendu parler de "suppressions de postes", parce que la fonction publique en France est trop importante, c'est la plus importante d'Europe. Elle devrait être réduite en volume, on le sait. C'est fini, c'est abandonné ? Il y a très peu de suppressions de postes dans le budget.
- "Il y a des suppressions de postes à certains endroits et des créations de postes en d'autres. Comment voulez-vous imaginer un seul instant que, selon les priorités politiques, il n'y ait pas un choix de moyens à mettre là où il faut un peu plus - ce qui s'est passé pour la sécurité et la justice - et en réduire là où l'on estime que nous n'avons pas besoin de ces moyens pour être plus efficaces. On peut aussi réfléchir à toutes ces superpositions de procédures. A chaque fois, quand nous regardons attentivement comment les choses se passent, nous avons des procédures locales, des procédures nationales qui font exactement la même chose. Si on supprime tout cela, à l'évidence on se retrouve avec des moyens excédentaires, qu'il nous faut soit réaffecter, soit ne pas remplacer."
Donc, ceux qui redoutent la décentralisation ont raison ?
- "La décentralisation n'est pas l'affaiblissement de l'Etat. Ce n'est pas la chasse aux compétences."
C'est aussi le redéploiement de la Fonction publique ?
- "C'est le souci, à chaque fois, de choisir le bon territoire pour être plus efficaces dans l'action publique. Nous avons en charge, le Gouvernement, et sous l'autorité du Premier ministre, la responsabilité à chaque fois d'être plus efficaces dans l'action publique, de donner plus de satisfaction à l'usager et de valoriser les conditions de travail du fonctionnaire. Voilà nos trois objectifs."
Et non pas de réduire de volume la Fonction publique ?
- "La réduction des effectifs n'est pas un signe d'affaiblissement de la gestion de l'administration. On sent bien, les uns et les autres que, vis-à-vis des contribuables, si nous voulons être honnêtes, si nous voulons être transparents, il faut que l'on sache pouvoir leur dire à chaque fois : qui fait quoi, à quel endroit ? Et nous interroger pour savoir si nous n'avons pas trop de moyens dans certains administrations et pas assez dans d'autres. Notre bonne gestion, c'est justement de mettre ..."
Mais vous avez déjà les réponses quand même, pour les administrations qui sont trop volumineuses...
- "Nous avons pris un certain nombre de décisions dans le budget 2003, mais nous les avons prises d'une façon rapide. Aujourd'hui, nous sommes en train de faire l'analyse de la gestion prévisionnelle : combien de départs en retraite, pour quels postes ? Les métiers changeront dans l'administration. Comment imaginer un seul instant que l'on garde des structures identiques sur des situations et des solutions différentes."
Quelle est votre interprétation de la remobilisation de ceux que l'on appelle les "anciens de 1995" ? On attend le Gouvernement au tournant ?
- "Notre souci est de faire en sorte que, dans cette Europe qui se construit, la France puisse peser au plan politique - ce qui est le cas avec le président de la République -, au plan économique, de la recherche, sur le plan de l'agriculture. Pour qu'elle le fasse, il faut qu'on la modernise, notamment dans son secteur public. Nous sommes extrêmement peinés de voir certains discours politiques qui veulent appliquer des solutions du passé et qui mettent de la résistance au changement. Ceci est un discours et une attitude contraires à l'intérêt de la France."
La France joue son va-tout là-dessus, en termes de modernisation ?
- "Nous sommes en situation de concurrence. Et nous avons tous les atouts - l'intelligence, la qualité des fonctionnaires, la qualité de la main-d'oeuvre française, la qualité du management des chefs d'entreprise - pour être une puissance économique au sein d'un espace européen. Si effectivement, nous avons un service public qui alourdit les procédures, qui stérilise les initiatives, qui pénalise cette gestion, ceux qui sont porteurs de projets iront les réaliser ailleurs. Nous devons attirer chez nous les talents, les compétences, les financements, les entreprises. Si nous n'arrivons pas à développer cela et à être attractifs, nous n'arriverons pas à payer les factures auxquelles les Françaises et les Français sont attachés : facture de santé, de retraite, des infrastructures, facture des services publics. L'affaiblissement du service public, c'est la résistance au changement."
(Source :premier-ministre, Service d'information du gouvernement, le 3 oct 2002)
- "Non, cela montre une inquiétude des agents - et ils l'expriment d'ailleurs - sur leur statut, leur devenir. Y a-t-il encore une perspective dans le service public ? La réponse est oui. Et dans les négociations, nous les invitons à partager avec nous, ce formidable défi de faire un service public performant, de faire des entreprises publiques des champions européens. Notre économie a besoin d'être performante et, pour cela, elle a besoin d'un service public de qualité."
Oui, mais "performance", cela veut dire "concessions" aujourd'hui.
- "Aujourd'hui, personne n'imagine un seul instant qu'on ne puisse pas, dans un monde mobile, réactif, qui est en train de changer, avoir des réponses totalement identiques. Nous sommes convaincus qu'aujourd'hui les Français - rappelez-vous au premier tour des présidentielles -, et notamment dans le monde rural, ont eu un sentiment d'abandon par rapport au service public. Ils avaient un sentiment de dire que le service public se dégradait, avec les écoles, les hôpitaux... Nous voulons au contraire redonner fierté aux fonctionnaires et nous leur demandons d'être des acteurs du changement et non pas des freins au changement. Aucune structure, aucune entreprise, aucune administration ne peut résister si demain elle n'est pas efficace, si elle ne donne pas satisfaction à l'usager. Ce sont tous les chantiers que nous ouvrons. Comment raccourcir les délais ? Comment alléger les procédures ? Comment accompagner celles et ceux qui sont porteurs de croissance, qu'il s'agisse de l'entreprise, de l'association ou de la collectivité locale."
Tout cela c'est très bien, c'est donc la performance. Je parlais de "concessions", je vous répondrais aussi "compensations"...
- "Nous leur avons très clairement indiqué qu'il n'était absolument pas question de toucher aux statuts. J'ai entendu, et notamment dans mes discussions, une interrogation qui demandait si la décentralisation n'est pas un moyen d'éparpiller les fonctions publiques et de faire en sorte de fragiliser le statut de la fonction publique..."
Avant la décentralisation, il y a le problème des salaires.
- "Pour le problème des rémunérations, bien évidemment, c'est un sujet de leurs préoccupations. Nous avons accordé 0,7 % au 1er décembre, nous ouvrirons des négociations salariales dans le premier semestre 2003, et nous ouvrirons aussi des négociations sur les retraites. Cela fait 20 ans que l'on parle de "réforme de l'Etat". Cela fait 20 ans que, par rapport au secteur public, il y a des réflexions et pas de décisions. Et nous voyons bien qu'aujourd'hui, nous sommes totalement déterminés à assumer nos responsabilités et à faire en sorte que renforcer le service public, c'est lui donner les moyens d'être renforcé et d'être performant. Si nous laissons le système des retraites fragilisé, c'est une formidable inquiétude sur les agents de la Fonction publique. Regardez ce qui s'est passé dans le domaine de la sécurité : le ministre de l'Intérieur a donné les moyens, a mis en place des procédures, et permet aujourd'hui d'être jugés sur les résultats et non pas sur les moyens..."
Vous voulez faire la même chose ?
- "Absolument. Nous disons aux fonctionnaires qu'il faut que l'on révolutionne et que l'on change de culture dans les managements de la Fonction publique. Avant - caricature ! -, celui qui dépensait l'argent était plus récompensé que celui qui l'économisait. Vis-à-vis de celles et ceux qui paient des impôts, nous devons avoir, à chaque fois, l'interrogation : est-ce que cet impôt est bien utilisé, au bon endroit, au bon moment et est-ce que les résultats sont à la hauteur ? Celui qui ne prenait pas d'initiatives avait une carrière plutôt récompensée. Il faut redonner "la culture du risque", la prise de risques, de responsabilités."
Vous parlez de "renforcement" de la Fonction publique. Pourtant, pendant la campagne électorale, on a entendu un autre langage, on a entendu parler de "suppressions de postes", parce que la fonction publique en France est trop importante, c'est la plus importante d'Europe. Elle devrait être réduite en volume, on le sait. C'est fini, c'est abandonné ? Il y a très peu de suppressions de postes dans le budget.
- "Il y a des suppressions de postes à certains endroits et des créations de postes en d'autres. Comment voulez-vous imaginer un seul instant que, selon les priorités politiques, il n'y ait pas un choix de moyens à mettre là où il faut un peu plus - ce qui s'est passé pour la sécurité et la justice - et en réduire là où l'on estime que nous n'avons pas besoin de ces moyens pour être plus efficaces. On peut aussi réfléchir à toutes ces superpositions de procédures. A chaque fois, quand nous regardons attentivement comment les choses se passent, nous avons des procédures locales, des procédures nationales qui font exactement la même chose. Si on supprime tout cela, à l'évidence on se retrouve avec des moyens excédentaires, qu'il nous faut soit réaffecter, soit ne pas remplacer."
Donc, ceux qui redoutent la décentralisation ont raison ?
- "La décentralisation n'est pas l'affaiblissement de l'Etat. Ce n'est pas la chasse aux compétences."
C'est aussi le redéploiement de la Fonction publique ?
- "C'est le souci, à chaque fois, de choisir le bon territoire pour être plus efficaces dans l'action publique. Nous avons en charge, le Gouvernement, et sous l'autorité du Premier ministre, la responsabilité à chaque fois d'être plus efficaces dans l'action publique, de donner plus de satisfaction à l'usager et de valoriser les conditions de travail du fonctionnaire. Voilà nos trois objectifs."
Et non pas de réduire de volume la Fonction publique ?
- "La réduction des effectifs n'est pas un signe d'affaiblissement de la gestion de l'administration. On sent bien, les uns et les autres que, vis-à-vis des contribuables, si nous voulons être honnêtes, si nous voulons être transparents, il faut que l'on sache pouvoir leur dire à chaque fois : qui fait quoi, à quel endroit ? Et nous interroger pour savoir si nous n'avons pas trop de moyens dans certains administrations et pas assez dans d'autres. Notre bonne gestion, c'est justement de mettre ..."
Mais vous avez déjà les réponses quand même, pour les administrations qui sont trop volumineuses...
- "Nous avons pris un certain nombre de décisions dans le budget 2003, mais nous les avons prises d'une façon rapide. Aujourd'hui, nous sommes en train de faire l'analyse de la gestion prévisionnelle : combien de départs en retraite, pour quels postes ? Les métiers changeront dans l'administration. Comment imaginer un seul instant que l'on garde des structures identiques sur des situations et des solutions différentes."
Quelle est votre interprétation de la remobilisation de ceux que l'on appelle les "anciens de 1995" ? On attend le Gouvernement au tournant ?
- "Notre souci est de faire en sorte que, dans cette Europe qui se construit, la France puisse peser au plan politique - ce qui est le cas avec le président de la République -, au plan économique, de la recherche, sur le plan de l'agriculture. Pour qu'elle le fasse, il faut qu'on la modernise, notamment dans son secteur public. Nous sommes extrêmement peinés de voir certains discours politiques qui veulent appliquer des solutions du passé et qui mettent de la résistance au changement. Ceci est un discours et une attitude contraires à l'intérêt de la France."
La France joue son va-tout là-dessus, en termes de modernisation ?
- "Nous sommes en situation de concurrence. Et nous avons tous les atouts - l'intelligence, la qualité des fonctionnaires, la qualité de la main-d'oeuvre française, la qualité du management des chefs d'entreprise - pour être une puissance économique au sein d'un espace européen. Si effectivement, nous avons un service public qui alourdit les procédures, qui stérilise les initiatives, qui pénalise cette gestion, ceux qui sont porteurs de projets iront les réaliser ailleurs. Nous devons attirer chez nous les talents, les compétences, les financements, les entreprises. Si nous n'arrivons pas à développer cela et à être attractifs, nous n'arriverons pas à payer les factures auxquelles les Françaises et les Français sont attachés : facture de santé, de retraite, des infrastructures, facture des services publics. L'affaiblissement du service public, c'est la résistance au changement."
(Source :premier-ministre, Service d'information du gouvernement, le 3 oct 2002)