Interview de M. Dominique Perben, ministre de la justice, dans "Le Parisien" du 5 mai 2003, sur la coopération judiciaire entre les Etats du G8 en matière de criminalité financière et de fichier ADN et sur l'application du mandat d'arrêt européen.

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Circonstance : Réunion des ministres de la justice des pays du G8, à Paris le 5 mai 2003

Média : Le Parisien

Texte intégral

Q - Les magistrats se plaignent de voir leurs enquêtes, surtout celles sur le blanchiment, freinées par le manque de coopération internationale. Le G8 veut-il vraiment résoudre ce problème ?
R - Les Etats du G8 sont les premiers victimes de la criminalité financière. Lutter contre le blanchiment d'argent, c'est lutter contre le terrorisme et son financement et contre les grandes mafias internationales. Un magistrat qui mène une enquête ne doit pas être arrêté dans ses recherches par une frontière juridique. Il doit pouvoir trouver des preuves dans tous les pays du G8. Aujourd'hui à Paris, ces pays, dont la France, adopteront vingt-neuf principes directeurs pour faire échec aux manuvres de plus en plus sophistiquées des délinquants financiers. Ces mesures permettront, entre autre, la traçabilité des flux financiers d'un pays à l'autre, mais aussi la possibilité de geler, saisir ou confisquer des avoirs d'origine criminelle. Les mafias ne doivent plus profiter aujourd'hui de la perméabilité des frontières.
Q - A quoi servent ces accords si les pays hors G8 continuent à pratiquer le secret bancaire ?
R - Les pays les plus puissants se mettent d'accord pour eux-mêmes sur des règles du jeu et ensuite ils essaient de les faire partager par les autres pays, c'est un peu l'esprit du G8. En matière de criminalité financière, grâce à la traçabilité des capitaux, nous aurons une possibilité d'alerte lorsque des fonds arriveront de provenance suspecte.
Q - L'ADN est aujourd'hui une preuve essentielle dans les dossiers criminels et la France vient de lancer son propre fichier. Comment envisagez-vous de coopérer avec les autres pays ?
R - Pour établir la culpabilité ou l'innocence d'un suspect, l'ADN est en effet devenu essentiel. Le fichier français se constitue progressivement et nous avons déjà été sollicités à quelques reprises par l'Allemagne, les Pays-Bas et la Belgique notamment. Dans ce domaine aussi nous adopterons ce soir onze principes directeurs, notamment sur le fait que les experts auront la même formation pour rendre les données facilement transmissibles et lisibles. Nous publierons aussi un guide méthodologique "ADN pratique".
Q - Où en est le mandat d'arrêt européen ?
R - Il sera applicable le 1er janvier prochain. Cette procédure constitue une véritable avancée en Europe. C'est une reconnaissance réciproque des décisions de justice qui permettra la remise automatique d'une personne arrêtée sur demande d'un Etat de l'Union européenne. Avec ce texte, Patrick Henry aurait pu être remis à la France dès son arrestation./.
(Source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 6 mai 2003)