Déclaration de M. François Bayrou, président de l'UDF, sur le rôle de l'UDF au sein de la majorité, la politique économique et fiscale et sur la nécessité du référendum pour l'adoption de la future Constitution de l'Union européenne, Semur-en-Auxois le 21 septembre 2003.

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Circonstance : Journées parlementaires de l'UDF à Semur-en-Auxois (Côte d'Or) du 19 au 21 septembre 2003

Texte intégral

Mes chers amis,
Au terme de ces Journées parlementaires qui ont été passionnantes et amicales, je veux évidemment énoncer en votre nom des remerciements à tous ceux qui les ont organisées, à tous ceux qui nous ont accueillis.
Je veux commencer par les collaborateurs du groupe de l'Assemblée Nationale, ceux du groupe du Sénat et ceux du groupe du Parlement européen qui, ensemble, ont réalisé le délicat exercice de rendre compatibles les emplois du temps de tous, la recherche de débats intéressants, la présence d'experts passionnants et le sentiment de mobilisation amicale nécessaire dans ces journées. L'aspect humain joue en tout cas pour nous un très grand rôle.
Cela veut dire aussi, naturellement, qu'il fallait trouver une région passionnante, chargée d'histoire et d'avenir, qui donne à chacun le sentiment que l'on était dans un pays qui parle profondément à notre sensibilité. François Sauvadet, pour cette seule raison naturellement, touristique, nous a proposé la Bourgogne.
Je voudrais, François, que tu transmettes à tous ceux qui t'ont aidé à préparer ces journées notre gratitude parce que nous savons tous, élus de terrain, ce que cela représente comme recherche, imagination, engagement, mobilisation de réseaux amicaux pour que des journées comme celles-ci soient un succès.
Je voudrais en premier lieu nommer ta femme, Brigitte. En réalité on dit que François Sauvadet est un homme de terrain, c'est vrai, mais c'est de Brigitte Sauvadet dont il s'agit quand on dit cela. Celle qui tient le terrain, c'est elle. Lui c'est les grandes aventures politiques, je dis cela en souriant parce que chacun d'entre nous a pu voir, Michel Mercier l'a très bien dit, le lien affectif, direct, charnel qu'il y a entre le député de cette circonscription et les élus qui l'entourent.
C'est d'ailleurs je crois un des points communs d'identification, de tous ceux qui sont dans cette salle, j'ai pu l'observer chez Philippe Folliot pendant l'été, je l'observe chez Hervé Morin, chaque fois que j'y vais, je l'observe chez Michel Mercier, pour ne citer que ceux qui sont à la tribune.
C'est notre valeur ajoutée et notre manière de voir les choses.
Naturellement, François, notre présence n'avait pas que des raisons touristiques, historiques, architecturales, rurales. Notre présence avait aussi un sens politique parce qu'en plus des qualités humaines et d'élu que je soulignais à l'instant, il y a dans ton engagement, un élément de clarté qui est absolument nécessaire à cette région.
Chacun se souvient de 1998. En Bourgogne, on peut aussi se souvenir de 1992.
C'est une région dans laquelle beaucoup de Français, qui aiment la Bourgogne, ont eu le sentiment que la manoeuvre, les accords contre nature prenaient le pas sur la volonté politique et la clarté qui est nécessaire.
La démocratie ne peut pas vivre sans la clarté.
Naturellement, on peut sourire de l'expertise et des acrobaties qu'il faut pour réussir à être à la fois ministre de François Mitterrand et allié du Front national, pour un homme qui se prétendait par ailleurs de droite républicaine ; c'est un exercice de grand écart, mais la clarté n'y gagne pas. Si vous parlez à nos concitoyens les plus jeunes, dans le jugement parfois sévère qu'ils portent sur le monde politique français, il y a cette exigence que les actes et les paroles soient en harmonie et que l'on puisse faire confiance à ceux qui vous représentent en sachant qu'ils ne trahiront pas les valeurs au nom desquelles ils se sont fait élire.
C'est pour cette raison, François, qui est toute simple, toute démocratique, toute civique, que tu relèves le défi de préparer dans cette région une bataille régionale. Pour nous, tu portes un drapeau qui dépasse les limites mêmes de la Bourgogne. C'est un combat exemplaire et c'est pourquoi nous avons voulu venir te le dire chez toi.
Cette rentrée, vous le savez bien, intervient dans un climat difficile.
Nous l'avons analysée à huis clos, aussi bien que portes ouvertes avec une unanimité qui, pour moi, a été un des éléments les plus prometteurs et les plus solides de notre avenir.
Chacun de ceux qui se sont exprimés ont noté, sans qu'il y ait besoin de concertation préalable, sans qu'il y ait besoin de discipline et d'oukases, à quel point en effet, en ce moment, les citoyens français, la société française manifestaient inquiétude, doute, et parfois scepticisme.
En face de ces inquiétudes et de ces doutes, nous nous sentons, nous, UDF, en situation de responsabilité.
Chacun à son tour, les trois responsables des trois groupes des trois assemblées qui sont présents à cette tribune, ont noté que notre situation dans la majorité devait nécessairement être une situation de responsabilité.
Je voudrais m'arrêter un instant sur ce sujet.
Je ne veux pas trahir un secret, mais chacun sait bien que nous ne sommes pas directement aux commandes, que le cercle étroit où toutes les décisions se prennent, où tout se tranche, nous n'y avons pas accès.
Mais, pour autant, nous ne sommes pas spectateurs. Nous sommes responsables de l'avenir autant que tout autre partenaire de la majorité, j'allais dire autant que tout autre acteur de la démocratie française et nous revendiquons cette responsabilité.
C'est pour cela que nous nous exprimons avec cette liberté et cette franchise, c'est pour cela que nous parlons, parce que celui qui se tait, lorsqu'il voit que l'on est en train de faire fausse route, celui qui se tait pour faire plaisir ou pour ne pas déranger, ou parce qu'il a peur, celui-là est aussi coupable que celui qui prend la mauvaise décision.
Nous sommes responsables de l'avenir à la place qui est la nôtre, dans la majorité, parce que nous appartenons au nombre de ces Français qui voudraient que le gouvernement réussisse, que les choses changent et que la France s'en sorte.
J'ai été très frappé par le propos d'un grand sociologue engagé, Alain Touraine, dont tout le monde sait qu'il était proche du Parti socialiste.
Alain Touraine a dit dans un journal récemment, qu'il se sentait très loin des choix que le Parti socialiste était en train de faire parce que, dit-il, "c'est très simple, ils attendent 2007 et que le balancier revienne dans l'autre sens, cela fera 4 ans de plus de perdus pour la France".
Cette réflexion de responsabilité, c'est là nôtre. Nous n'en changerons pas dans les mois qui viennent.
Naturellement, nous avions une vision différente de celle de l'UMP parce que nous, nous croyons au pluralisme et pas au monopole.
Je veux simplement rappeler qu'au moins six fois dans l'année écoulée, nous avons exercé notre droit d'avertissement. Nous l'avons fait sur les 35 heures, nous l'avons fait sur le budget et les hypothèses de croissance, nous l'avons fait sur l'Education nationale et la recherche, nous l'avons fait sur le désastreux combat des modes de scrutin, nous l'avons fait sur la Corse, nous l'avons fait sur les intermittents du spectacle.
Je ne dis pas que nous avons toujours raison, mais chaque fois l'avenir a montré que notre analyse aurait, au moins, mérité l'examen, la confrontation, la réflexion, le débat.
Depuis 18 mois, l'idée qui préside à " l'organisation " de la majorité, au mode de fonctionnement de celle-ci, est pour nous une idée fausse.
L'idée qu'un seul parti, qui aurait toutes les commandes entre les mains, qui obéirait au doigt et à l'oeil, pourrait gouverner valablement la France, est une idée fausse. Nous contestons cette idée depuis le premier jour parce que, quand on décide seul, on est forcément amené à se tromper.
Quand les décisions sont prises au sommet, concentrées, centralisées, dans un petit cercle, sans discussion préalable, dans un pays aussi complexe que la France, aujourd'hui, on est, selon nous, assuré de se tromper.
Seul le partenariat, la reconnaissance de la légitimité des partenaires, des partenaires politiques, mais aussi des partenaires sociaux, économiques, décentralisés, cette reconnaissance du partenariat qui suppose que ceux qui sont différents de vous, on leur reconnaisse une légitimité équivalente, égale, cette démarche est la seule démarche juste.
Pour nous, le monopole n'est pas plus sain en démocratie qu'il l'est en économie.
Il fait faire autant d'erreurs, il est aussi frustrant pour le citoyen qu'il l'est pour le consommateur lorsque hélas cette dérive l'emporte.
La liberté de parole que nous avons acquise, nous ne l'abandonnerons pas, nous ne la limiterons pas.
Notre liberté de parole, elle n'est pas seulement un droit, elle est un devoir.
Nous exercerons sans faiblir le devoir d'écoute des Français, le devoir de vigilance devant le danger, le devoir d'avertissement pour éviter les écueils et le devoir de vision pour donner une perspective et offrir un espoir.
Je voudrais reprendre maintenant, avec cette responsabilité que nous revendiquons et aussi avec cette liberté qui est pour nous notre premier atout, les principaux sujets de débat de cette rentrée.
Naturellement, je parlerai d'abord de la baisse des impôts.
Oui, pour nous, les prélèvements sont trop lourds en France. Oui, notre fiscalité, Jean-Louis Bourlanges en a parlé, est inadaptée, compliquée, remplie de niches de toute nature qui sont à la fois exorbitantes du droit et dévoreuse d'emplois publics. Jean-Louis Bourlanges rappelait qu'il y a en France 150 impôts différents quand il y en a moins de 50 chez notre voisin allemand.
Hervé Morin notait l'inflation des emplois publics qui correspondent naturellement à cette complexité française.
Que l'une des premières décisions du gouvernement ait été de renoncer à la retenue à la source pour l'impôt sur le revenu, alors que cette retenue à la source a été réalisée dans tous les autres pays européens, est un exemple de ce que l'on ne se donne pas les marges de manoeuvre nécessaires.
Oui, nous croyons qu'au premier rang des réformes qu'il faut faire, il y a la réforme fiscale.
Oui nous croyons que les impôts sont trop lourds.
Encore plus que les impôts, oui nous croyons que les charges sur l'emploi sont trop lourdes en France.
Mais non, on ne peut pas financer la baisse des impôts par le déficit et par la dette.
Je voudrais simplement que l'on prenne ensemble la vraie mesure du déficit parce que l'habitude que nous avons héritée des débats sur le traité de Maastricht, l'habitude d'exprimer le déficit, en points de PIB, 3 %, 4 %, 2 %..., pour beaucoup de nos compatriotes, cela signifie que ce n'est pas beaucoup.
1 %, 2 %, 3 %, ce n'est pas la vérité des chiffres. La vérité des chiffres, c'est que nous dépensons chaque jour dans notre pays 20 % de plus que ce qui rentre dans les caisses de l'Etat.
20 % de plus que ce que les Français consentent comme impôts déjà lourds et charges déjà si lourdes.
Il n'est pas une entreprise, il n'est pas une famille, il n'est pas un individu qui puisse durablement assumer un tel déséquilibre.
On ne peut pas demander et quelquefois rigoureusement, aux individus, aux familles et aux entreprises, d'être exemplaires dans leur gestion, de respecter leurs engagements, on ne peut pas leur envoyer l'huissier avec du papier bleu et les soumettre aux commissions de désendettement quand l'Etat lui-même, chaque jour, montre qu'il est incapable d'approcher cet équilibre pourtant nécessaire.
Pour nous, en cela de simple bon sens, nous refusons de continuer à laisser s'engager notre pays dans le chemin du déficit et de la dette.
J'ai essayé de traduire la vraie mesure du déficit, je voudrais maintenant traduire la vraie mesure de la dette, en milliers de milliards, on n'arrive pas à se la représenter, que ce soit en euros, et hier en francs.
Mais si l'on essaie de mesurer la vraie mesure de la dette par famille française, parce qu'au bout du compte, personne d'autre que les familles françaises n'assumera la dette du pays, il n'y a pas d'autres contributeurs au bout du chemin que ceux qui travaillent en France.
Si l'on essaie de répartir la dette entre familles françaises, prenons par exemple une famille moyenne de 5 personnes (une personne âgée, 2 adultes, 2 enfants) : cette famille moyenne est endettée pour l'équivalent de 550000 francs.
Cette année, on a augmenté cette dette de 30000 francs. 80000 euros de dette à la charge de cette famille.
Ce qui veut dire que chaque mois une famille française moyenne, une famille française type, se voit privée de quelque 5000 francs pour assumer l'annuité de la dette que les dirigeants ont laissé se creuser en France.
En niveau de vie, je ne sais pas si vous voyez ce que cela représente, en salaire du travail... on parle de réhabiliter le travail.
Le Président de la République a parlé de réhabiliter le travail. Comment veut-on réhabiliter le travail lorsque l'on ponctionne ceux qui travaillent, de quelque 5000 francs par mois, simplement pour assumer la dette du pays ?
Cette situation n'est pas une situation qui vient de loin. Nos générations et même les générations des plus jeunes parmi nous, n'ont pas eu la charge de cette dette. Elles n'ont pas été plombées. Lorsque Valéry Giscard d'Estaing et Raymond Barre ont quitté leurs responsabilités, ce n'était pourtant pas une période facile - tout le monde sait ce que le deuxième choc pétrolier a signifié pour l'économie française - la dette était plus de 3 fois inférieure à ce qu'elle est aujourd'hui.
Cela signifie que les Français qui travaillaient n'étaient pas plombés. Et là, en niveau de vie et en emploi, les Français, eux, vont avoir à assumer la légèreté de ceux qui, depuis quelque deux décennies, ont gouverné la France. Car, évidemment, il est juste de dire que le gouvernement socialiste porte dans cette affaire une responsabilité accablante parce qu'il a eu la chance d'avoir un moment de croissance durable, vigoureux, un moment ou les ressources rentraient dans les caisses et permettaient ainsi de rééquilibrer les choses.
Ainsi, on voit la vanité du débat sur la "cagnotte" que nous avions signalée dès cette époque. Une société politique française tout entière qui se demande ce qu'elle peut faire de l'argent alors qu'elle est accablée de dettes et qu'il serait civique et juste de les rembourser avant de songer à faire autre chose de ses facilités.
On est en train de préparer des conséquences désastreuses sur les générations qui vont travailler dans les 20 ans qui viennent.
Cela veut dire que, ceux qui ont aujourd'hui 40 ans, ceux qui ont aujourd'hui 30 ans, ceux qui ont aujourd'hui 20 ans, ceux qui ont aujourd'hui 10 ans, vont être mis à contribution au nom de la légèreté des générations politiques qui ont précédé.
Je voudrais signaler, c'est une réflexion que l'on ne fait pas souvent, qu'il existe désormais une double épée de Damoclès qui va s'abattre sur ces générations-là.
Il y a la dette, j'allais dire financière, et il y a la dette démographique.
Vont s'abattre en même temps sur ces générations au travail, la nécessité de rembourser les montagnes d'obligation, d'endettement que nous avons laissé souscrire et l'augmentation, en même temps, exponentielle du nombre de Français à la retraite.
Sur ceux qui travaillent, le plomb va s'accumuler. Cela se traduira de deux manières, le niveau de vie s'effondre et les emplois s'en vont parce que, plus les emplois sont chargés, plus ils partent dans des pays ou ces charges sont plus faibles.
Nous nourrissons la délocalisation en particulier sous cette forme. Nous accablons ceux qui vont travailler et le pays tout entier dans la compétition extraordinaire et en effet très difficile que chacun a découvert.
C'est pourquoi, les meilleurs alliés des jeunes Français, sont ceux qui disent : "S'il vous plaît, par pitié, arrêtez de les alourdir de plomb, faites en sorte que ceux qui vont travailler aient un peu aussi le fruit de leur travail et pas seulement la charge d'assumer l'impéritie des générations qui les précédaient".
Un mot sur le raisonnement économique qui sous-tend cette politique.
J'avoue que je m'attendais à beaucoup de choses dans ma vie politique, y compris quand j'étais jeune, mais je n'aurais pas imaginé de voir la droite française réhabiliter le Keynesianisme. Il y avait des débats autrefois. Mais voir se développer un raisonnement économique, vicié dans son essence, par ceux-là même qui avaient proposé des principes et des valeurs qui étaient fondés sur la libération de l'initiative, la liberté, l'arbitrage des acteurs économiques, que ce soient les individus ou les entreprises, alors cela me sèche !
Ce sont des débats doctrinaux, mais pardon d'interroger une seconde, y compris les plus Keneysiens ; si l'on veut faire du Keneysianisme, alors il faut y mettre les moyens.
La baisse des impôts représente 0,1 % du produit intérieur, 1 pour 1000.
Croyez vous qu'avec 1 pour 1000, on relance la croissance ?
Vous savez les sommes considérables peut-être même irraisonnées que les Etats-Unis ont consacré ces temps-ci à la relance par le déficit. Mais deux choses, d'abord, avant cela, l'année précédente, ils étaient à l'équilibre et en excédent.
Alors évidemment, quand vous accumulez des noisettes pour l'hiver, vous avez le loisir de manger les noisettes pendant l'hiver, mais ce n'était pas notre cas, nous étions, nous, en déficit et en déficit lourd.
Puis, ils ont mis des moyens qui sont sans commune mesure avec ceux que nous voyons.
Mais il y a plus grave encore : comme les marges de manoeuvre en réalité n'existent pas, on est obligé de reprendre d'une main ce que l'on fait semblant de donner de l'autre.
Ce n'est pas seulement que nous devons avoir un débat sur l'opportunité ou pas de cette décision, mais nous devons avoir un débat sur la sincérité de ces décisions, civiquement. Parce que tout le monde le voit bien, le risque est l'incohérence et l'injustice.
Je voudrais m'arrêter un instant sur ces deux mots parce que je crois qu'il y a là, une des clés de la situation que nous sommes en train de vivre et des difficultés aujourd'hui entre le gouvernement et l'opinion.
La clef de la réforme, ce n'est pas un parti qui à tous les pouvoirs. La clef de la réforme, c'est l'adhésion des citoyens.
Pour que les citoyens adhèrent à une politique de réforme, forcément inconfortable, qui exige forcément des efforts, il y a selon nous trois conditions.
La première, c'est de dire la vérité. Autrement dit, que l'on mette devant les citoyens, pour les entraîner à la détermination nécessaire, qu'on leur mette sous les yeux la gravité de la situation. C'est ce qui n'a pas été fait au moment crucial, juste après les élections de 2002.
C'est le temps que l'on a perdu à faire mesurer au citoyen la gravité de la situation qui est une des explications de l'incertitude dans le pays. La mobilisation n'a pas été faite ou insuffisamment au moment où il le fallait.
La deuxième condition, c'est la cohérence.
Savoir où l'on va, avoir une vision, que chaque décision soit cohérente avec les autres, reliée aux autres, que tout cela forme un plan d'ensemble, que ce soit compréhensible pour les citoyens, qu'au travers de chacune des tâches que le peintre pose sur le tableau, on voit le dessin d'ensemble se former, qu'une décision soit dans la même logique qu'une autre.
La troisième condition, c'est la justice.
À mes yeux, c'est la plus importante.
Si tout le monde doit consentir des efforts, il faut que les efforts soient équitablement répartis. Il n'y a pas seulement une question économique, il y a aussi une question morale et de morale de la nation.
Dans l'effort général, il ne peut pas y avoir des privilèges et des avantages pour les uns et des sacrifices uniquement pour les autres.
Et même, en toute justice, l'effort devrait être distribué à la mesure des possibilités de chacun.
Je voudrais reprendre les deux décisions qui ont fait débat entre nous.
La hausse du gazole.
C'est incohérent.
Quand on veut réhabiliter le travail, alors il faut mesurer que le gazole, c'est le travail. Je veux dire que les artisans, les ouvriers qui prennent leur voiture tous les jours, parce qu'ils habitent loin de leur usine, les agriculteurs avec leur C15, les commerçants avec leur camionnette, c'est le travail.
Il est incohérent de concentrer sur eux cet effort financier.
J'entends bien, Gilles de Robien nous l'a dit, que dans un plan d'ensemble écologique, énergétique, on puisse penser à rééquilibrer la fiscalité sur les carburants, c'est légitime. Mais il faut que ce soit équitable et raisonné, il faut que ce soit dans un plan d'ensemble.
Et plus encore, la mesure annoncée vendredi, la suppression de l'allocation pour les chômeurs en fin de droit et leur transfert au RMI, ce n'est pas seulement incohérent, c'est injuste.
Bien sûr, Michel Mercier nous la dit, c'est une charge de plus pour la décentralisation. Bien sûr, cela veut dire que l'Etat va économiser et que les départements vont payer.
Pour le seul département du Rhône, c'est 6 000 personnes qui vont se retrouver à la charge du département, par RMI interposé.
Et donc évidemment, du point de vue de la décentralisation et de sa cohérence, cela ne va pas mais, je pense que chacun mesure combien, socialement, c'est un signe désastreux.
Pour l'esprit de justice, c'est un choix destructeur. Pour les finances, c'est une économie qui franchement coûte cher. Pour 150 millions d'euros, c'est-à-dire moins du dixième de la baisse des impôts, on prend le risque de se trouver avec un pays qui ne comprend plus et, le sentiment au moins d'une inquiétude sociale qui nuira à tout soutien à la réforme.
Pour nous qui voulons la cohérence et qui voulons la justice, ni la hausse du gazole, ni surtout la suppression de l'allocation des chômeurs en fin de droit, ne correspondent à notre vision.
L'UDF ne les accepte pas.
Ces deux mesures représentent la moitié de la baisse des impôts. Nous allons donc proposer de les écarter.
Nous déposerons un amendement de rectification du budget, pour limiter la baisse de l'impôt sur le revenu à 1 %, comme l'a par ailleurs proposé le Président de la Commission des finances, pour ne pas augmenter le gazole et pour sauvegarder l'allocation des chômeurs en fin de droits.
Décrivant ainsi notre action dans la majorité au Parlement, action de réhabilitation du Parlement. Si le Parlement à un sens, vous le savez depuis son origine, c'est qu'il vote les impôts.
C'est dans cet esprit que le Parlement, les premiers parlements que l'histoire note, ont été constitués.
Si le Parlement à un sens, il doit pouvoir rectifier le projet de budget en ce qu'il a d'incohérent et en ce qu'il a d'injuste.
Pour autant, sommes-nous en train de dire que la réforme doit être différée ?
Nous venons au contraire devant les Français pour dire : " la réforme doit être assumée tout de suite ". On a déjà un temps de retard. Ce temps de retard risque d'être pénalisant. On ne peut pas s'en payer un autre.
Par exemple en matière de santé et de sécurité sociale, au haut rythme où va le déficit, retarder, adopter une attitude dilatoire avant de mettre sur la table les problèmes comme ils se posent et d'imaginer cette grande réforme de la santé française et de la sécurité sociale dont nous avons besoin, c'est prendre le risque que l'avenir soit encore plus noir.
Alors, nous appelons le gouvernement à mettre devant les Français, les urgences qui s'imposent et notamment à traiter de ce grand sujet de la santé et de la sécurité sociale.
Dans les débats de rentrée, il y a un grand débat sur l'avenir européen.
Marielle de Sarnez l'a abordé au nom des parlementaires européens, Jean-Louis Bourlanges l'a abordé très profondément pendant tout l'été par une série d'articles très brillants. Nous avons un problème de vision européenne.
Je ne vais pas m'appesantir sur ce sujet aujourd'hui parce que nous aurons un grand débat à l'automne, parallèle à la CIG et, a fortiori, à l'issue de la CIG, pour juger de l'Etat de l'Europe en ce début d'année d'élections européennes.
Je voudrais simplement énoncer trois idées qui recadrent le débat.
Depuis des mois, on insinue ou on laisse croire que l'Europe limiterait notre souveraineté.
Je veux dire exactement le contraire. L'Europe, c'est notre souveraineté. Et même la seule raison qui vaille, en dehors de la paix, pour les pays européens de consentir cet effort d'édification en commun. C'est pour retrouver la souveraineté perdue.
On peut prendre 10 exemples, mais vous voyez bien que si l'on pose la question de la souveraineté dans les vrais termes qui s'imposent, la souveraineté c'est la capacité, c'est de pouvoir agir, faire, proposer, peser sur l'avenir.
Alors, l'Europe est le seul moyen dont nous disposions pour être assis à la table de ceux qui comptent, pour faire bouger les règles, s'il est nécessaire de les faire bouger.
Il m'est arrivé de conclure mes discours pendant la campagne, déjà lointaine des Européennes de 1999, en disant : " les vrais souverainistes, c'est nous " !
Je ne retire rien de cette formule, un tout petit peu paradoxale, j'en conviens, tant les mots se détournent. Mais lorsque Jacques Diouf est venu devant notre Université d'été, avec Michel Camdessus, pour nous dépeindre en termes poignants, terribles, les dérives qui faisaient qu'aujourd'hui 800 millions de paysans sur la planète n'arrivaient même pas à vivre et quittaient leur terre pour partir grossir d'immenses unités urbaines, il dépeignait aussi un monde dans lequel la question est de savoir comment peser sur le cours abandonné des choses, comment éviter les dérives auxquelles nous sommes exposés ?
Il n'est pas de domaine, songez à la recherche, à la défense, à la politique économique, où l'édification d'une vraie Europe ne soit la clef de notre capacité, c'est-à-dire de notre souveraineté.
La souveraineté est une exigence inéluctable, capitale, de la réflexion politique.
Simplement, la souveraineté a changé d'échelle. Non pas que nous le préférions, simplement parce que le cours du monde l'impose. Donc, ce besoin de souveraineté doit guider notre réflexion européenne.
Cela veut dire en particulier que, sur tous les textes fondateurs, sur les projets de constitution qui sortiront ou pas de la CIG, il faudra analyser précisément s'ils servent la capacité de l'Europe ou pas.
Vous savez bien que politique économique, politique fiscale, politique sociale, nous avons des exigences à présenter pour l'avenir.
Ce qui met en lumière en particulier l'idée que Marielle de Sarnez vient de défendre devant vous, que la prudence et l'espoir voudraient que les gouvernements préparent pour le texte de Constitution, une possibilité de révision crédible et pas un gel définitif qui verrouillerait à vues humaines la Constitution de l'Union européenne.
C'est le premier appel.
L'Europe, c'est la souveraineté ; la souveraineté, cela se mesure à la capacité.
Il y a un deuxième appel qui est parallèle à celui-là.
Nous, nous voulons que l'Europe devienne une démocratie. Pas un lieu où cela se joue dans les couloirs, un lieu où cela se joue sous l'il, sous le regard des citoyens, un lieu où les questions de frontière en particulier, soient posées, non pas de manière subreptice dans des accords dont personne n'a à répondre, puisqu'ils n'ont été présentés à personne, mais sous l'oeil, la responsabilité et l'influence des citoyens européens. À ce titre, la lisibilité des institutions est un critère de leur légitimité.
Ce n'est pas une affaire pour initiés de savoir qui on appelle le Président de l'Union, s'il y en a un ou plusieurs, s'il y a le huis clos sartrien que Jean-Louis Bourlanges dénonçait si justement, entre les trois visages qui, paraît-il, seront les visages de l'Union européenne : Président du Conseil, Président de la Commission, ministre des Affaires étrangères. Ce n'est pas une affaire pour initiés.
Ce n'est même pas seulement la question de savoir si cela va marcher. Ce n'est pas seulement la question de savoir s'ils peuvent décider entre eux. La vraie question est de savoir s'ils peuvent décider devant nous et avec nous.
L'Europe sera rejetée, si les citoyens n'en sont pas en charge. C'est la raison pour laquelle, pour aussi difficile que soit ce choix, je soutiens l'idée qu'on ne peut pas adopter une Constitution pour l'Union européenne en France avec notre tradition, sans que cela se fasse par référendum.
Je sais bien que ce serait plus facile pour nous, pour ceux qui voteraient au Parlement, pour ceux qui pourraient parler à la tribune. Mais ce sont de citoyens français qu'il s'agit et c'est donc bien à eux qu'il faut demander leur avis, ce sont eux qu'il faut plonger dans ce bain.
Ils le demandent. Si vous faites une enquête d'opinion en disant " voulez-vous que l'on adopte la Constitution sans vous ou avec vous ?" vous aurez 80 % ou 90 % de gens qui diront : je veux pouvoir participer.
Nous avons montré au moment de Maastricht, contrairement à ce que tout le monde a dit qu'un grand peuple pouvait avoir un grand débat et que ce grand débat pouvait être tranché y compris dans le sens qui demande le plus de novation c'est-à-dire de risques.
Pour nous, l'adoption de la Constitution par référendum, cela va dans la même logique. Il faut rendre l'Europe aux citoyens ; aux citoyens qui sont pour et aux citoyens qui sont contre.
Ce sera d'ailleurs à mon avis, le seul moyen de re-fabriquer une génération de citoyens qui soient engagés pour l'Europe.
Deuxième remarque. Toute antagonisation artificielle entre la France et l'Europe se retournera contre l'Europe, bien entendu, mais elle se retournera contre la France.
Bien sûr, elle sera nuisible à l'Europe mais elle sera d'abord, et à court terme, nuisible à la France.
En défendant cette idée, ce n'est que la conséquence de la première idée : l'Europe c'est nous, c'est notre avenir. Quand on critique notre avenir, et bien forcément, on se tire une balle dans le pied.
À ce titre, je n'ai pas approuvé les remarques désobligeantes qui ont été faites sur l'Europe. L'une d'entre elles est totalement infondée, c'est celle sur les disciplines budgétaires.
Je crois avoir montré que, quand on nous protège de la dérive budgétaire des déficits et de la dette, on nous rend service et on ne nous handicape pas.
L'autre se discute, je veux m'arrêter un instant sur le cas d'Alstom.
Personne ne peut imaginer que, pour quelque raison que ce soit, un pays soit empêché de s'engager pour défendre une grande entreprise en danger. L'Europe ne l'interdit en rien.
Ce sur quoi elle fait des remarques, c'est sur le fait que l'engagement conduise à long terme à une prise de participation qui assurerait un déséquilibre complet entre les entreprises.
On peut discuter ce point et je suis moi-même prêt à le discuter, à deux conditions : la première, c'est de se souvenir que c'est nous qui avons demandé cette règle.
Bernard Bosson qui a occupé les fonctions de ministre des Affaires européennes sait bien qu'aucune de ces disciplines-là n'a été adoptée sans que la France y consente et le plus souvent la propose. Donc, au minimum, reconnaissons la part de responsabilité que nous avons dans la règle que la Commission européenne est chargée de faire appliquer.
Deuxièmement, si nous voulons changer la règle, alors, il faut que lorsque nous prenons des engagements, nous respections notre parole.
Vous voyez que le débat sur le budget n'est pas extérieur au débat sur la politique économique de l'Europe.
Il n'y aura aucune évolution possible des règles de l'Union européenne, même quand il convient de les changer, si nous ne montrons pas que la France respecte la parole qu'elle donne, qu'elle est fidèle à ses engagements et qu'elle ne les remet pas en cause.
Je voudrais que vous réfléchissiez à cette idée : l'Europe, ce sont des grands pays, des pays moins grands et des pays tout à fait petits, en population. Pour moi, la dignité est égale. C'est pourquoi il faut prendre soin de la respecter, là, comme ailleurs. Je suis un défenseur de l'égalité de dignité et de l'égalité de responsabilité, dans un ensemble communautaire ou commun.
Mais mettez vous à la place de pays plus petits. C'est vrai que le "non" suédois, je ne dis pas qu'il est entièrement causé par nos attitudes, mais je suis sûr que cela a joué un rôle. Pourquoi ? Parce qu'un pays plus petit, quand il entre dans un ensemble comme l'ensemble européen, quelle garantie a-t-il ? Il a moins de force, il a moins d'argent, il a moins de poids politique que les autres. Il n'a qu'une garantie, c'est la règle pour laquelle, quand on donne son accord, une fois fixée, elle est respectée.
La garantie des plus petits pays est que tout le monde respecte sa parole, quelle que soit la taille et quelle que soit la force.
Dès l'instant que les grands pays, plus que les autres, refusent de respecter leur parole, dès l'instant qu'ils s'affranchissent de la parole donnée, ils menacent tous les accords à venir, ils déstabilisent toutes les constructions en cours, parce que la confiance n'existera plus dès l'instant où l'on saura qu'il n'y a que les rapports de force qui comptent, et la construction communautaire s'effondre sur elle-même dans son principe.
C'est pourquoi ce n'est pas un petit sujet, c'est un grand sujet.
Et enfin, dernière remarque sur ce point, ou à partir d'Alstom. Qui ne voit que la question posée est celle de la politique économique de l'Europe ?
Naturellement, il ne peut pas dépendre de la Commission, qui n'est pas un gouvernement, de poser avec les citoyens européens les grandes questions de l'avenir industriel, de l'équilibre des grandes entreprises. Naturellement cela ne peut pas se faire comme cela.
Nous avons besoin d'une politique économique en Europe, d'un gouvernement économique de l'Europe. À mon sens, nous avons besoin aussi d'une politique fiscale et sociale, mais nous avons besoin d'une stratégie économique décidée et assumée ensemble. Donc, pour savoir si nous voulons qu'un grand équipementier subsiste en Europe et que l'équilibre nécessaire à la concurrence soit respecté, sans cela on aura des catastrophes industrielles qui s'ajouteront à d'autres, déjà en cours, toute "antagonisation" et tout affrontement, artificiellement entretenu, entre la France et l'Europe, se retournera bien sûr contre l'Europe mais se retournera à coup sûr et à court terme contre la France.
Dernier point. Je me suis beaucoup interrogé pour savoir pourquoi, ou, comment Valéry Giscard d'Estaing avait eu autant de mal.
Quand sa désignation a été connue, j'avais dit : "C'est vraiment le mieux à même et peut-être le seul à même de réussir l'exercice en cours".
Pourquoi a-t-il autant de mal ?
Pourquoi un Européen aussi convaincu que lui a-t-il été obligé de reculer sur de nombreux combats et en particulier, la simple présence du mot fédéral ; uniquement pour les politiques que nous exercions en commun ?
C'est parce qu'il n'y a plus de parti européen en Europe.
Il y en avait deux : un très engagé, c'était le Parti populaire européen, que nous avions fondé ; j'étais, Bernard Bosson aussi, à la fondation du Parti populaire européen. Mais le Parti populaire européen a peu à peu abandonné ses convictions européennes ou, en tout cas, les a mises entre parenthèses.
Le Parti populaire européen, c'est désormais Silvio Berlusconi, José Maria Aznar qui, sur ce point n'est pas très engagé, et les conservateurs britanniques, dans notre groupe au Parlement européen.
Naturellement, le soutien à la politique européenne n'existe plus, y compris parmi les dirigeants.
Et il y avait un deuxième parti européen, c'était le Parti socialiste européen, les sociaux-démocrates. Eux aussi sont devenus, avec le temps, majoritairement euro-sceptiques ou en très grande partie euro-sceptiques.
Puisque nous parlons de responsabilité, notre responsabilité, je sais que c'est très difficile, c'est de faire renaître un mouvement politique de foi européenne parmi les citoyens européens.
Ce sera très difficile pour les appareils, parce que tout le monde voit bien en termes de rapports de force ce que cela signifie.
Ce ne sera pas difficile pour les citoyens européens parce que le paradoxe dans tout cela, c'est que la foi européenne est absolue ou, en tout cas, très présente chez les citoyens européens.
Si on faisait un sondage demandant " voulez-vous une défense européenne ?" vous auriez 70 % des gens qui diraient oui et une politique économique vous auriez 70 % des gens qui diraient oui.
Ce sont les élites, notamment les gouvernants, qui ne respectent pas la volonté profonde de leur peuple dans cette affaire.
Il revient aux héritiers des fondateurs que nous sommes, de reprendre le drapeau.
Il nous revient de nouer les contacts nécessaires, de parler avec tous ceux qui y croient, au-delà des frontières, des frontières nationales et des frontières de partis, pour que se ressaisisse et se reforme le grand mouvement européen qui est nécessaire à l'avenir de l'Europe. Sans cela, les combats continueront d'être perdus ; sans cela, on continuera à se battre en reculant.
Il faut désormais se battre en avançant, concevoir l'offensive et la défendre devant les citoyens.
Voilà les observations que je voulais faire.
On a le moment politique de la rentrée, mais tout le monde au-delà de cela voit qu'il s'agit d'un grand moment historique.
Les débats que nous avons eus toute la semaine sont très intéressants, notamment les débats économiques.
Un pays comme le nôtre, une société comme la nôtre, une civilisation comme celle que nous formons ensemble, arrivée à un degré de rayonnement comme celui que nous avons connu à la fin du XXème siècle. Apparemment victorieux sur tous les fronts, et voyant matérialisée cette victoire par la chute du mur de Berlin. Ces pays et ces civilisations découvrent, brutalement, qu'elles sont en butte à des menaces et à des dangers inédits. Ces menaces et ces dangers, on voit bien qu'ils sont économiques, sociaux, identitaires, intégristes, terroristes.
Ce n'est pas la peine de se dissimuler derrière notre petit doigt. Ce faisceau de dangers nous menace tous, menace précisément le grand édifice que nous avons bâti au travers des siècles.
Or, il se trouve, et c'est cela qui fait notre responsabilité, que la réponse à cette question dépend de nous.
L'avenir de notre société, de notre pacte social, l'avenir de notre langue, de notre culture, de nos valeurs, dépend de nous. Ou bien nous serons capables de conduire, comme des responsables, le grand changement nécessaire pour que le vieil arbre refleurisse, pour que la sève remonte de nouveau, pour que, selon une formule de Pierre Pflimlin que j'aimais tant , " que l'Europe redevienne ce qu'elle n'aurait dû jamais cessé d'être, je veux dire la lumière du Monde".
Ou bien, oui en effet, le déclin ne sera plus seulement un sujet de débat, mais une réalité pour nous tous ensemble, et il arrive dans l'histoire des hommes, que des petits groupes d'hommes aient à assumer la responsabilité, en tout cas, de mobiliser leur pays sur ces sujets.
Je crois que c'est le moment où nous sommes et la responsabilité qui est la nôtre.
Je vous remercie.

(Source http://www.udf.org, le 24 septembre 2003)