Texte intégral
Mesdames, Messieurs,
Lors de notre rencontre de l'année dernière, je vous avais annoncé la mise en chantier de plusieurs mesures pour renforcer la compétitivité et l'attractivité de notre territoire, ainsi qu'une réforme de notre régulation financière pour restaurer la confiance. Nous avons bien avancé : l'Assemblée Nationale devrait adopter définitivement le 17 juillet le projet de loi de sécurité financière, qui permet aussi de moderniser notre droit financier. Parallèlement, la présidence française du G7 fait progresser la réflexion commune sur la stabilité financière.
Les investisseurs recherchent des marchés transparents et régulés, mais également un environnement économique, réglementaire et fiscal favorable. Nous avons toutes les cartes en main, il nous appartient de les utiliser au mieux.
I - Premier point : Qu'avons-nous fait depuis un an pour renforcer la confiance des investisseurs dans la place de Paris, et donc son attractivité ?
1/ Avec la loi de sécurité financière, nous avons d'abord modernisé nos autorités de contrôle, pour plus de confiance et pour plus d'efficacité.
L'Autorité des marchés financiers verra le jour à l'automne. Elle sera au centre du contrôle de l'ensemble des professions de la chaîne de l'information financière. Emetteurs, investisseurs, intermédiaires financiers, analystes ou agences de notation seront à des titres divers dans son champ d'action. Elle bénéficiera d'un statut jusqu'alors inusité en France : Autorité publique indépendante dotée de la personnalité morale, elle disposera de moyens accrus, propres à lui garantir une plus grande efficacité. Ses équipes de contrôle seront renforcées, ses procédures de sanctions seront claires et rapides, une coopération étroite avec l'autorité judiciaire sera mise en place.
L'une des conditions de l'efficacité de cette autorité nouvelle, c'est bien sûr la bonne intégration des équipes de différentes origines dans la nouvelle structure. Grâce à la mobilisation de Jean-François Lepetit et de Monique Bourven, qui ont mis les bouchées doubles pour que cette installation puisse être effective dans les meilleurs délais et dans les meilleures conditions, je suis très confiant sur ce point. Je voudrais ici leur rendre hommage, car la COB et le CMF auront excellemment préparé le terrain à l'AMF. Il y a une autre condition pour que cette nouvelle autorité soit efficace et respectée, c'est un collège fort, une instance où différentes compétences et sensibilités pourront pleinement s'exprimer. J'y veillerai personnellement, sur la base des consultations qui seront engagées par le Directeur du Trésor.
Conformément à ce que je vous avais indiqué l'année dernière, la loi de sécurité financière fusionne également la Commission de contrôle des assurances et la Commission de contrôle des mutuelles et des institutions de prévoyance en une Commission unique. Cette nouvelle autorité disposera de ressources propres et de pouvoirs étendus. Elle sera compétente pour contrôler l'ensemble des acteurs français du marché de l'assurance, montée en puissance particulièrement bienvenue au moment où se mettront en place des plans d'épargne retraite individuelle dont la gestion sera assurée par des organismes d'assurances.
La page législative bientôt tournée, nous sommes désormais engagés dans un vaste chantier réglementaire pour que ces autorités soient en place rapidement. Afin que ses instances dirigeantes soient nommées et que l'Autorité des marchés financiers soit opérationnelle d'ici la fin du mois d'octobre, le Conseil d'Etat sera saisi de l'ensemble des projets de décrets nécessaires cet été.
2/ La confiance que l'Autorité contribuera à restaurer suppose aussi plus de transparence.
Transparence vis-à-vis des actionnaires, pour créer les conditions d'un bon gouvernement des entreprises. Transparence sur l'exercice des droits de vote par les gérants d'OPCVM, pour une meilleure démocratie actionnariale. Transparence avec une plus grande flexibilité donnée aux associations représentatives d'actionnaires minoritaires pour agir en justice.
La loi n'impose pas de modèle unique aux entreprises, qui demeurent libres de s'organiser, en s'inspirant notamment des réflexions des rapports VIENOT et BOUTON. La transparence à l'égard du marché et des actionnaires doit servir d'aiguillon. Je pense ici aux administrateurs indépendants et aux comités du conseil : contrairement aux souhaits de certains, la loi n'impose ni les uns, ni les autres. Je ne pense pas que l'on puisse trancher de manière définitive sur le papier ce qu'est un administrateur indépendant, mais chacun voit bien ce que l'on recherche. Je ne doute pas que le marché des administrateurs indépendants et compétents sera un marché en croissance rapide, un marché de très grande utilité collective. La création de l'institut de formation des administrateurs, sous la présidence de Daniel Lebègue, s'inscrit parfaitement dans cette perspective.
Il en va de même s'agissant du renforcement de la régulation des commissaires aux comptes. Même si le système français n'avait pas failli, il fallait mettre fin à l'autorégulation pour accroître l'indépendance des commissaires aux comptes. La loi imposera désormais la rotation des associés signataires tous les six ans dans les sociétés faisant appel public à l'épargne. Elle clarifiera la séparation entre l'audit et le conseil. Et un Haut conseil du commissariat aux comptes sera chargé de réguler la profession, avec une attention particulière aux sociétés cotées. Là aussi, il faudra procéder rapidement à sa mise en place, avec des moyens suffisants.
La Commission européenne, dans la communication qu'elle a récemment rendue publique, souscrit largement à cette approche. Il faut maintenant voir ses propositions dans le détail.
Dans le même temps, la France soutient la Commission dans ses négociations avec la SEC et les autorités américaines pour obtenir une forme de reconnaissance mutuelle au niveau européen des systèmes de régulation.
3/ Au terme de ce rapide tour d'horizon, je voudrais aussi souligner que la loi de sécurité financière a permis de moderniser notre cadre juridique.
A l'issue des débats parlementaires, notre loi est en effet également une loi de modernisation financière. Certains en déplorent d'ailleurs le caractère fourre-tout. Je suis pour ma part pragmatique : pourquoi remettre au lendemain ce qui peut être fait le jour même, dans l'intérêt des acteurs de notre économie ?
Plusieurs mesures vont ainsi renforcer la compétitivité de notre place.
Pour notre industrie de la gestion, sont adoptées les mesures législatives requises pour transposer sans retard les directives OPCVM de 2001. Les travaux réglementaires complémentaires nécessaires seront terminés à la rentrée. Sera également ouverte la possibilité de créer différentes catégories de parts au sein d'un même OPCVM, ce qui permettra de rationaliser le marché et d'accroître la taille des fonds français, et des fonds contractuels, ce qui permettra de constituer des fonds de gestion alternative directe en droit français dans un cadre transparent et régulé. Avec l'ensemble de ces dispositions, nos opérateurs disposeront des outils nécessaires pour faire face à la compétition dans les meilleures conditions.
Autre point important pour la compétitivité de notre place, la réforme du régime des sociétés de crédit foncier et des fonds communs de créance, qui permettra de rapatrier de nombreuses opérations de titrisation, en particulier la titrisation synthétique. Faute de cadre juridique adéquat, ces opérations sont en effet montées hors de nos frontières. Les travaux réglementaires requis pour l'entrée en vigueur de ces nouvelles dispositions seront engagés très rapidement.
Troisièmement, le marché des titres de créances négociables, essentiel pour que les émetteurs puissent financer leurs besoins à court terme, sera conforté. La loi de sécurité financière facilitera la rédaction des documents d'information, en permettant notamment l'usage d'une autre langue que le français, elle élargira le champ des émetteurs, et clarifiera la répartition des rôles entre la future Autorité des Marchés Financiers et la Banque de France. Toutes les conditions seront ainsi réunies pour en faire un marché de référence en Europe.
Quatrièmement, la création d'une nouvelle catégorie de titres, dits " ultra subordonnés ", complétera la panoplie des instruments de financement de nos entreprises, comme on en trouve à l'étranger.
Enfin, je rappelle l'abrogation en mars dernier des dispositions obsolètes et inutilement contraignantes du décret de 1989 sur les placements étrangers en France.
II - Nous avons donc fait beaucoup pour moderniser notre cadre juridique et financier, mais il nous faut poursuivre ces efforts.
1/ Ces efforts sont nécessaires pour conforter le redémarrage de l'activité.
Nous savons que la croissance a été décevante depuis l'automne. Elle a été affectée par la crise irakienne, la hausse du prix du pétrole et les tensions sur les marchés financiers. L'activité reste déprimée en Allemagne, notre principal partenaire. De fait, la croissance n'est pas repartie dès le conflit terminé contrairement à certaines attentes et le deuxième trimestre n'aura pas été dynamique. Et pourtant, comme le relèvent le FMI et l'OCDE, les conditions d'un redémarrage de l'activité sont bien réunies.
D'une part, les bases sont là pour une accélération de l'investissement. Comme le signalent les dernières enquêtes, les entreprises n'ont fait que différer leurs investissements face aux incertitudes internationales et à la pression des marchés financiers. Les conditions de financement se sont en outre considérablement assouplies : les taux d'intérêt sont au plus bas depuis les années 50. Cela facilite la consolidation des bilans dans un contexte où les problèmes d'endettement sont concentrés sur quelques grands groupes ayant procédé à des opérations de croissance externe à la fin des années 90, alors que l'essentiel de nos entreprises disposent d'une situation financière saine.
D'autre part, la consommation devrait rester ferme. Le revenu des ménages progresse encore nettement. Les " ponts " et les grèves ont évidemment perturbés les chiffres du mois de mai, mais le bon début des soldes et la robustesse des immatriculations en juin montrent que la tendance est bonne.
Du côté des changes, l'euro a progressé de plus de 30 % face au dollar en deux ans, ce qui l'a ramené à son niveau de lancement, mais il n'y a pas lieu de s'alarmer pour notre compétitivité. Nos entreprises ont réalisé des efforts très importants de différenciation et de montée en gamme de leurs produits. Par ailleurs, la majorité de nos échanges se situe au sein même de la zone euro.
Au total, la croissance inférieure à nos anticipations en 2003 devrait repartir sur de bonnes bases en 2004. Elle sera confortée par les réformes structurelles engagées par le Gouvernement, pour accroître notre potentiel de croissance et rétablir la soutenabilité de nos finances publiques. La réforme des retraites assurera la pérennité des régimes de retraite par répartition et contribuera à accroître notre potentiel de croissance. La décentralisation améliorera l'efficacité des dépenses publiques. Pour accompagner la réforme de l'État, une discussion a été engagée avec tous les ministères afin de tirer partie des gisements de productivité pour offrir au public un service de qualité à un moindre coût. La préparation de la mise en oeuvre de la loi organique sur les lois de finances (LOLF), sera un vecteur de réforme très puissant. Enfin, vous savez aussi que le Gouvernement a engagé un train de mesures fortes pour stimuler l'innovation et la création d'entreprises, avec la loi Dutreil et le plan innovation.
Si je suis optimiste, c'est aussi parce que j'ai le sentiment que les esprits redeviennent plus positifs, et que les freins psychologiques à la reprise sont en voie de desserrement. Or vous savez que la psychologie joue un rôle moteur dans le comportement des agents économiques, qu'il s'agisse de la consommation des ménages ou de l'investissement des entreprises.
Naturellement, dans un contexte difficile pour les finances publiques, il est essentiel de poursuivre une gestion active de la dette de l'Etat.
L'Etat ne modifiera pas son programme de financement à moyen et long terme, arrêté à 111 Md d'euros en 2003. La révision du déficit de l'Etat sera donc financée en ajustant les émissions à court terme (BTF).
Je fais confiance au nouveau groupe de Spécialistes en Valeurs du Trésor, qui a été rendu public hier au terme d'un processus de sélection rigoureux, pour jouer pleinement son rôle dans le cadre d'un partenariat renforcé et modernisé avec l'Etat.
2/ Au-delà de l'environnement économique et des réformes structurelles, la place financière de Paris doit cependant bénéficier d'un cadre réglementaire et fiscal plus attractif.
Sur le plan juridique, d'autres mesures devront donc être prises, pour compléter notre dispositif.
C'est l'un des objectifs de la loi habilitant le Gouvernement à simplifier le droit par ordonnance, qui inclut une ordonnance relative aux valeurs mobilières. Il s'agira de simplifier les procédures d'émission d'actions et d'obligations par les entreprises et de renforcer les droits des investisseurs. Mon collègue Dominique Perben, qui dirigera ces travaux, vous sollicitera dans cette perspective.
Mais, plus généralement, le Premier Ministre a dessiné, lors de son intervention à La Baule le 27 juin dernier, une politique d'envergure en faveur de l'attractivité. Il a défini une méthode de travail, mis place les outils permettant de préparer des mesures concrètes, et clairement identifié les thèmes sur lesquels portera l'action du gouvernement. Parmi ceux-ci figure une mesure très attendue en faveur des impatriés, sur laquelle le Premier Ministre m'a chargé de lui faire des propositions et qui, je le sais, vous tient particulièrement à coeur.
Cette initiative est cruciale. En tant que professionnels du secteur financier, vous savez mieux que quiconque l'impact des distorsions fiscales dans les choix d'implantation des cadres de haut niveau et à forte mobilité. Paris Europlace milite depuis de nombreuses années, et à juste titre, pour la prise en compte de cette contrainte et la mise en place d'un dispositif fiscal adapté, pour développer dans notre pays davantage de fonctions tertiaires ou technologiques supérieures, mais aussi pour faire revenir les Français talentueux partis à l'étranger exercer leur métier et qui hésitent à rentrer en raison de notre taux d'imposition marginale. Sans refaire ici le constat bien connu établi par le député Michel Charzat pour le compte du précédent gouvernement, je voudrais simplement rappeler un chiffre cité dans son rapport, qui souligne toute l'acuité du problème : pour obtenir un revenu net après impôt d'environ 150.000 , l'employeur doit payer en France 1,8 fois plus qu'en Allemagne et 2,3 fois plus qu'au Royaume-Uni !... Il faut impérativement atténuer ce " coin fiscal " fortement dissuasif. Certes, le coût de la vie est plus élevé à Londres qu'à Paris, et la comparaison des pouvoirs d'achat réels est défavorable au Royaume-Uni, notamment si l'on tient compte du logement, des études supérieures des enfants, de la santé ou de la constitution de la retraite. Mais ce raisonnement est en partie faux car les cadres de haut niveau dont il est question ne comptent pas sur ces prestations du système français pour compenser l'imposition fiscale qu'ils supportent. Or, la France ne peut pas faire " cavalier seul " quand 9 pays sur 15 dans l'Union européenne ont mis en place des dispositions fiscales ad hoc : c'est une question de réalisme et de pragmatisme.
Sans déflorer la proposition que je ferai au Premier Ministre, je peux déjà vous indiquer les pistes sur lesquels je travaille.
Première piste, cette mesure fiscale devrait s'appliquer aux cadres nouvellement détachés en France par leur employeur, afin de bien cibler la population que nous souhaitons attirer. Cela représente environ 20.000 à 25.000 personnes par an mais nous espérons naturellement que ce chiffre augmente.
La deuxième idée est d'exonérer la part du revenu qui correspond effectivement à l'impatriation en France du salarié détaché. Nos expatriés bénéficient d'une exonération sur le supplément de rémunération lié à leur expatriation. Nous verrons si cette exonération peut porter sur le supplément réel ou si nous optons pour un abattement forfaitaire de la base imposable.
La troisième piste est que ce dispositif pourra s'appliquer au contribuable pendant une certaine période, correspondant à l'idée que l'impatriation est temporaire : si le salarié s'implante durablement en France, il devient alors un résident comme les autres.
Enfin, le dernier volet consiste à assouplir les règles de déduction des cotisations versées par les salariés impatriés aux régimes de protection sociale de leur pays d'origine.
Vous le voyez, notre préoccupation est très concrète. Nous aurons l'occasion d'en reparler au cours des prochaines semaines afin d'affiner notre proposition, en concertation avec les entreprises.
Tout aussi concrètement, et sur un autre registre, la baisse des impôts sera poursuivie, comme l'a indiqué le Premier ministre, notamment grâce à la création d'un produit d'épargne retraite individuelle ouvert à tous.
A cette occasion, nous engagerons une réflexion plus générale sur l'épargne, car notre objectif n'est pas une augmentation du taux d'épargne, mais une réorientation de celle-ci vers les usages les plus utiles à notre économie et à nos concitoyens.
Le diagnostic est en effet connu : nous ne souffrons pas d'un manque d'épargne, mais celle-ci doit être davantage orientée vers les emplois les plus productifs et la préparation de l'avenir. L'enjeu majeur est de parvenir à activer cette épargne, à lui donner un caractère offensif, pour qu'elle ne soit pas une rente stérile mais un outil au service de la modernisation de notre pays par le financement de nos entreprises, en encourageant l'investissement en actions.
L'épargne retraite constitue un deuxième objectif pour faire mieux coïncider notre épargne à nos besoins. Avec la création du Plan d'épargne individuelle pour la retraite, chaque Français pourra désormais se constituer un capital en vue de sa retraite, avec une aide fiscale, et dans des conditions de sécurité qui ont été définies précisément dans un amendement déposé la semaine dernière. Le PEIR participera de manière importante à l'effort d'allègement des charges, tout en favorisant une réallocation de l'épargne vers des usages plus productifs. Les seuils de déductibilité, qui seront définis dans la loi de finances pour 2004, devront naturellement tenir compte des dispositifs existants, dans le cadre d'une réflexion qui concernera l'ensemble des dispositions réglementaires et fiscales.
3/ Mon dernier point concerne les défis que la financiarisation de l'économie pose à nos outils de régulation.
Les marchés ont montré une très grande capacité de résistance aux chocs, et il faut s'en féliciter. Mais nous devons prêter une attention renouvelée aux mécanismes de localisation et de diffusion des risques, via certains instruments ou certains acteurs du marché. Les dérivés de crédit, la réassurance, les hedge funds, posent à des degrés divers ces questions dans un système économique où les marchés financiers sont de plus en plus interconnectés et complexes. Ces sujets sont à l'étude dans différents forums, notamment au sein du G7 et du Forum de stabilité financière, qui se réunira à Paris en septembre prochain. Ils fournissent également de bons sujets de réflexion pour votre nouvel Institut Europlace de Finance, que le ministère financera pour soutenir et encourager son action.
Sans attendre le résultat de ces réflexions, il convient d'être vigilant sur quelques choix fondamentaux qui sont devant nous à brève échéance.
La structuration de marchés organisés constitue une première priorité d'action. Par exemple, alors que nous entrons dans la dernière année de la mise en oeuvre du Plan d'Action pour les Services Financiers, les débats en cours sur la directive sur les services d'investissement sont essentiels. Je le redis à Mme Randzio-Plath et à M. Schaub, dont la présence parmi nous témoigne de l'effort de Paris Europlace pour ouvrir ses rencontres sur l'Europe : cette directive, qui va se traduire par la multiplication des plates-formes de transactions, doit préserver tous les moyens de contrôle et d'action des régulateurs.
La France n'est pas hostile à la concurrence entre des plates-formes de négociation de titres de différentes natures : cette compétition est un facteur de réduction des coûts de transaction, grâce à la modernisation continue des systèmes qu'elle induit, et donc d'abaissement du coût d'accès au capital pour les entreprises, tout en améliorant les conditions des placements pour les investisseurs et les épargnants. Mais cet éclatement doit préserver la transparence du fonctionnement du marché et du processus de formation des prix : cela implique que, sur toute plate-forme de transaction qui représente un volume significatif de liquidité, la transparence des conditions de négociation soit assurée non seulement ex post mais aussi et surtout ex ante, de manière à ce que tout le marché puisse profiter de ces informations, sans qu'elles soient captées au profit de quelques intermédiaires et de leurs clients. C'est essentiel pour assurer la bonne formation des prix, la protection de l'épargnant et donc la confiance.
Des marchés organisés, ce sont aussi des marchés qui reposent sur des normes comptables fiables. Voici un chantier qui mobilise les entreprises dans un calendrier désormais de plus en plus tendu, avec le passage annoncé aux normes IAS en 2005.
C'est un sujet vital, car les normes comptables doivent permettre de mesurer les risques sans contribuer à une volatilité artificielle des marchés.
Or, il se trouve que certaines des normes en cours d'examen risquent de conduire à cette volatilité accrue de nos économies. Grâce à l'action conjointe et coordonnée des professionnels et des pouvoirs publics, la France a su faire partager à certains de ses partenaires et à la Commission européenne ses réserves sur les normes IAS 32 et 39. Il est aujourd'hui acquis que leur adoption sera reportée jusqu'à obtention de normes techniquement satisfaisantes et compatibles avec les stratégies de nos industries. Mais un certain nombre de normes IAS décisives ne sont pas encore prêtes et ne le seront pas pour la première application en 2005. C'est notamment le cas de la norme " performance reporting " qui traite de la mesure du résultat des entreprises. Les projets actuels soulèvent de nombreuses questions, en raison notamment d'une valorisation systématique et non encadrée à la juste valeur, même lorsqu'il n'y a pas de marché pour établir cette valeur.
De façon plus générale, ces derniers mois ont mis en lumière la nécessité d'une réflexion approfondie sur le dispositif institutionnel d'adoption des normes qui a été mis en place l'année dernière, avant d'aller plus loin. L'Europe doit pouvoir peser davantage sur l'élaboration des normes par l'IASB. Pour cela, il faut renforcer le comité technique européen qui assiste la Commission dans son analyse des normes, l'EFRAG, et y assurer une représentativité satisfaisante. De même, il faut renforcer l'association de l'Europe au fonctionnement de l'IASB, pour que soit dûment vérifiée la compatibilité des normes proposées avec l'intérêt public européen. C'est le message que le Président de la République vient d'adresser au Président de la Commission européenne, et que je discuterai avec mes collègues de l'Ecofin la semaine prochaine.
Au moment de conclure, je voudrais rendre hommage à Marc Viénot pour son action à la tête de Paris Europlace. Il aura beaucoup fait, avec ses équipes, pour faire progresser l'idée que l'industrie financière est une industrie comme les autres, et qu'elle justifie ainsi l'attention des pouvoirs publics. C'est le sens de la suppression de la contribution sur les institutions financières, qui a été décidée suite à notre rencontre de l'année dernière. Mais une place de Paris forte est aussi dans l'intérêt des entreprises non financières, qui y trouvent les ressources de leur développement. Gérard Mestrallet, lorsqu'il prendra la tête de votre association, illustrera parfaitement cette communion d'intérêt.
Je compte sur lui et sur vous pour que Paris Europlace accentue encore son action en Europe pour nourrir l'élaboration du droit communautaire et réfléchir à " l'après 2005 " à l'échéance du Plan d'action de la Commission, dans une vision nécessairement prospective qui est indispensable.
Je vous remercie.
(Source http://www.minefi.gouv.fr, le 10 juillet 2003)
Lors de notre rencontre de l'année dernière, je vous avais annoncé la mise en chantier de plusieurs mesures pour renforcer la compétitivité et l'attractivité de notre territoire, ainsi qu'une réforme de notre régulation financière pour restaurer la confiance. Nous avons bien avancé : l'Assemblée Nationale devrait adopter définitivement le 17 juillet le projet de loi de sécurité financière, qui permet aussi de moderniser notre droit financier. Parallèlement, la présidence française du G7 fait progresser la réflexion commune sur la stabilité financière.
Les investisseurs recherchent des marchés transparents et régulés, mais également un environnement économique, réglementaire et fiscal favorable. Nous avons toutes les cartes en main, il nous appartient de les utiliser au mieux.
I - Premier point : Qu'avons-nous fait depuis un an pour renforcer la confiance des investisseurs dans la place de Paris, et donc son attractivité ?
1/ Avec la loi de sécurité financière, nous avons d'abord modernisé nos autorités de contrôle, pour plus de confiance et pour plus d'efficacité.
L'Autorité des marchés financiers verra le jour à l'automne. Elle sera au centre du contrôle de l'ensemble des professions de la chaîne de l'information financière. Emetteurs, investisseurs, intermédiaires financiers, analystes ou agences de notation seront à des titres divers dans son champ d'action. Elle bénéficiera d'un statut jusqu'alors inusité en France : Autorité publique indépendante dotée de la personnalité morale, elle disposera de moyens accrus, propres à lui garantir une plus grande efficacité. Ses équipes de contrôle seront renforcées, ses procédures de sanctions seront claires et rapides, une coopération étroite avec l'autorité judiciaire sera mise en place.
L'une des conditions de l'efficacité de cette autorité nouvelle, c'est bien sûr la bonne intégration des équipes de différentes origines dans la nouvelle structure. Grâce à la mobilisation de Jean-François Lepetit et de Monique Bourven, qui ont mis les bouchées doubles pour que cette installation puisse être effective dans les meilleurs délais et dans les meilleures conditions, je suis très confiant sur ce point. Je voudrais ici leur rendre hommage, car la COB et le CMF auront excellemment préparé le terrain à l'AMF. Il y a une autre condition pour que cette nouvelle autorité soit efficace et respectée, c'est un collège fort, une instance où différentes compétences et sensibilités pourront pleinement s'exprimer. J'y veillerai personnellement, sur la base des consultations qui seront engagées par le Directeur du Trésor.
Conformément à ce que je vous avais indiqué l'année dernière, la loi de sécurité financière fusionne également la Commission de contrôle des assurances et la Commission de contrôle des mutuelles et des institutions de prévoyance en une Commission unique. Cette nouvelle autorité disposera de ressources propres et de pouvoirs étendus. Elle sera compétente pour contrôler l'ensemble des acteurs français du marché de l'assurance, montée en puissance particulièrement bienvenue au moment où se mettront en place des plans d'épargne retraite individuelle dont la gestion sera assurée par des organismes d'assurances.
La page législative bientôt tournée, nous sommes désormais engagés dans un vaste chantier réglementaire pour que ces autorités soient en place rapidement. Afin que ses instances dirigeantes soient nommées et que l'Autorité des marchés financiers soit opérationnelle d'ici la fin du mois d'octobre, le Conseil d'Etat sera saisi de l'ensemble des projets de décrets nécessaires cet été.
2/ La confiance que l'Autorité contribuera à restaurer suppose aussi plus de transparence.
Transparence vis-à-vis des actionnaires, pour créer les conditions d'un bon gouvernement des entreprises. Transparence sur l'exercice des droits de vote par les gérants d'OPCVM, pour une meilleure démocratie actionnariale. Transparence avec une plus grande flexibilité donnée aux associations représentatives d'actionnaires minoritaires pour agir en justice.
La loi n'impose pas de modèle unique aux entreprises, qui demeurent libres de s'organiser, en s'inspirant notamment des réflexions des rapports VIENOT et BOUTON. La transparence à l'égard du marché et des actionnaires doit servir d'aiguillon. Je pense ici aux administrateurs indépendants et aux comités du conseil : contrairement aux souhaits de certains, la loi n'impose ni les uns, ni les autres. Je ne pense pas que l'on puisse trancher de manière définitive sur le papier ce qu'est un administrateur indépendant, mais chacun voit bien ce que l'on recherche. Je ne doute pas que le marché des administrateurs indépendants et compétents sera un marché en croissance rapide, un marché de très grande utilité collective. La création de l'institut de formation des administrateurs, sous la présidence de Daniel Lebègue, s'inscrit parfaitement dans cette perspective.
Il en va de même s'agissant du renforcement de la régulation des commissaires aux comptes. Même si le système français n'avait pas failli, il fallait mettre fin à l'autorégulation pour accroître l'indépendance des commissaires aux comptes. La loi imposera désormais la rotation des associés signataires tous les six ans dans les sociétés faisant appel public à l'épargne. Elle clarifiera la séparation entre l'audit et le conseil. Et un Haut conseil du commissariat aux comptes sera chargé de réguler la profession, avec une attention particulière aux sociétés cotées. Là aussi, il faudra procéder rapidement à sa mise en place, avec des moyens suffisants.
La Commission européenne, dans la communication qu'elle a récemment rendue publique, souscrit largement à cette approche. Il faut maintenant voir ses propositions dans le détail.
Dans le même temps, la France soutient la Commission dans ses négociations avec la SEC et les autorités américaines pour obtenir une forme de reconnaissance mutuelle au niveau européen des systèmes de régulation.
3/ Au terme de ce rapide tour d'horizon, je voudrais aussi souligner que la loi de sécurité financière a permis de moderniser notre cadre juridique.
A l'issue des débats parlementaires, notre loi est en effet également une loi de modernisation financière. Certains en déplorent d'ailleurs le caractère fourre-tout. Je suis pour ma part pragmatique : pourquoi remettre au lendemain ce qui peut être fait le jour même, dans l'intérêt des acteurs de notre économie ?
Plusieurs mesures vont ainsi renforcer la compétitivité de notre place.
Pour notre industrie de la gestion, sont adoptées les mesures législatives requises pour transposer sans retard les directives OPCVM de 2001. Les travaux réglementaires complémentaires nécessaires seront terminés à la rentrée. Sera également ouverte la possibilité de créer différentes catégories de parts au sein d'un même OPCVM, ce qui permettra de rationaliser le marché et d'accroître la taille des fonds français, et des fonds contractuels, ce qui permettra de constituer des fonds de gestion alternative directe en droit français dans un cadre transparent et régulé. Avec l'ensemble de ces dispositions, nos opérateurs disposeront des outils nécessaires pour faire face à la compétition dans les meilleures conditions.
Autre point important pour la compétitivité de notre place, la réforme du régime des sociétés de crédit foncier et des fonds communs de créance, qui permettra de rapatrier de nombreuses opérations de titrisation, en particulier la titrisation synthétique. Faute de cadre juridique adéquat, ces opérations sont en effet montées hors de nos frontières. Les travaux réglementaires requis pour l'entrée en vigueur de ces nouvelles dispositions seront engagés très rapidement.
Troisièmement, le marché des titres de créances négociables, essentiel pour que les émetteurs puissent financer leurs besoins à court terme, sera conforté. La loi de sécurité financière facilitera la rédaction des documents d'information, en permettant notamment l'usage d'une autre langue que le français, elle élargira le champ des émetteurs, et clarifiera la répartition des rôles entre la future Autorité des Marchés Financiers et la Banque de France. Toutes les conditions seront ainsi réunies pour en faire un marché de référence en Europe.
Quatrièmement, la création d'une nouvelle catégorie de titres, dits " ultra subordonnés ", complétera la panoplie des instruments de financement de nos entreprises, comme on en trouve à l'étranger.
Enfin, je rappelle l'abrogation en mars dernier des dispositions obsolètes et inutilement contraignantes du décret de 1989 sur les placements étrangers en France.
II - Nous avons donc fait beaucoup pour moderniser notre cadre juridique et financier, mais il nous faut poursuivre ces efforts.
1/ Ces efforts sont nécessaires pour conforter le redémarrage de l'activité.
Nous savons que la croissance a été décevante depuis l'automne. Elle a été affectée par la crise irakienne, la hausse du prix du pétrole et les tensions sur les marchés financiers. L'activité reste déprimée en Allemagne, notre principal partenaire. De fait, la croissance n'est pas repartie dès le conflit terminé contrairement à certaines attentes et le deuxième trimestre n'aura pas été dynamique. Et pourtant, comme le relèvent le FMI et l'OCDE, les conditions d'un redémarrage de l'activité sont bien réunies.
D'une part, les bases sont là pour une accélération de l'investissement. Comme le signalent les dernières enquêtes, les entreprises n'ont fait que différer leurs investissements face aux incertitudes internationales et à la pression des marchés financiers. Les conditions de financement se sont en outre considérablement assouplies : les taux d'intérêt sont au plus bas depuis les années 50. Cela facilite la consolidation des bilans dans un contexte où les problèmes d'endettement sont concentrés sur quelques grands groupes ayant procédé à des opérations de croissance externe à la fin des années 90, alors que l'essentiel de nos entreprises disposent d'une situation financière saine.
D'autre part, la consommation devrait rester ferme. Le revenu des ménages progresse encore nettement. Les " ponts " et les grèves ont évidemment perturbés les chiffres du mois de mai, mais le bon début des soldes et la robustesse des immatriculations en juin montrent que la tendance est bonne.
Du côté des changes, l'euro a progressé de plus de 30 % face au dollar en deux ans, ce qui l'a ramené à son niveau de lancement, mais il n'y a pas lieu de s'alarmer pour notre compétitivité. Nos entreprises ont réalisé des efforts très importants de différenciation et de montée en gamme de leurs produits. Par ailleurs, la majorité de nos échanges se situe au sein même de la zone euro.
Au total, la croissance inférieure à nos anticipations en 2003 devrait repartir sur de bonnes bases en 2004. Elle sera confortée par les réformes structurelles engagées par le Gouvernement, pour accroître notre potentiel de croissance et rétablir la soutenabilité de nos finances publiques. La réforme des retraites assurera la pérennité des régimes de retraite par répartition et contribuera à accroître notre potentiel de croissance. La décentralisation améliorera l'efficacité des dépenses publiques. Pour accompagner la réforme de l'État, une discussion a été engagée avec tous les ministères afin de tirer partie des gisements de productivité pour offrir au public un service de qualité à un moindre coût. La préparation de la mise en oeuvre de la loi organique sur les lois de finances (LOLF), sera un vecteur de réforme très puissant. Enfin, vous savez aussi que le Gouvernement a engagé un train de mesures fortes pour stimuler l'innovation et la création d'entreprises, avec la loi Dutreil et le plan innovation.
Si je suis optimiste, c'est aussi parce que j'ai le sentiment que les esprits redeviennent plus positifs, et que les freins psychologiques à la reprise sont en voie de desserrement. Or vous savez que la psychologie joue un rôle moteur dans le comportement des agents économiques, qu'il s'agisse de la consommation des ménages ou de l'investissement des entreprises.
Naturellement, dans un contexte difficile pour les finances publiques, il est essentiel de poursuivre une gestion active de la dette de l'Etat.
L'Etat ne modifiera pas son programme de financement à moyen et long terme, arrêté à 111 Md d'euros en 2003. La révision du déficit de l'Etat sera donc financée en ajustant les émissions à court terme (BTF).
Je fais confiance au nouveau groupe de Spécialistes en Valeurs du Trésor, qui a été rendu public hier au terme d'un processus de sélection rigoureux, pour jouer pleinement son rôle dans le cadre d'un partenariat renforcé et modernisé avec l'Etat.
2/ Au-delà de l'environnement économique et des réformes structurelles, la place financière de Paris doit cependant bénéficier d'un cadre réglementaire et fiscal plus attractif.
Sur le plan juridique, d'autres mesures devront donc être prises, pour compléter notre dispositif.
C'est l'un des objectifs de la loi habilitant le Gouvernement à simplifier le droit par ordonnance, qui inclut une ordonnance relative aux valeurs mobilières. Il s'agira de simplifier les procédures d'émission d'actions et d'obligations par les entreprises et de renforcer les droits des investisseurs. Mon collègue Dominique Perben, qui dirigera ces travaux, vous sollicitera dans cette perspective.
Mais, plus généralement, le Premier Ministre a dessiné, lors de son intervention à La Baule le 27 juin dernier, une politique d'envergure en faveur de l'attractivité. Il a défini une méthode de travail, mis place les outils permettant de préparer des mesures concrètes, et clairement identifié les thèmes sur lesquels portera l'action du gouvernement. Parmi ceux-ci figure une mesure très attendue en faveur des impatriés, sur laquelle le Premier Ministre m'a chargé de lui faire des propositions et qui, je le sais, vous tient particulièrement à coeur.
Cette initiative est cruciale. En tant que professionnels du secteur financier, vous savez mieux que quiconque l'impact des distorsions fiscales dans les choix d'implantation des cadres de haut niveau et à forte mobilité. Paris Europlace milite depuis de nombreuses années, et à juste titre, pour la prise en compte de cette contrainte et la mise en place d'un dispositif fiscal adapté, pour développer dans notre pays davantage de fonctions tertiaires ou technologiques supérieures, mais aussi pour faire revenir les Français talentueux partis à l'étranger exercer leur métier et qui hésitent à rentrer en raison de notre taux d'imposition marginale. Sans refaire ici le constat bien connu établi par le député Michel Charzat pour le compte du précédent gouvernement, je voudrais simplement rappeler un chiffre cité dans son rapport, qui souligne toute l'acuité du problème : pour obtenir un revenu net après impôt d'environ 150.000 , l'employeur doit payer en France 1,8 fois plus qu'en Allemagne et 2,3 fois plus qu'au Royaume-Uni !... Il faut impérativement atténuer ce " coin fiscal " fortement dissuasif. Certes, le coût de la vie est plus élevé à Londres qu'à Paris, et la comparaison des pouvoirs d'achat réels est défavorable au Royaume-Uni, notamment si l'on tient compte du logement, des études supérieures des enfants, de la santé ou de la constitution de la retraite. Mais ce raisonnement est en partie faux car les cadres de haut niveau dont il est question ne comptent pas sur ces prestations du système français pour compenser l'imposition fiscale qu'ils supportent. Or, la France ne peut pas faire " cavalier seul " quand 9 pays sur 15 dans l'Union européenne ont mis en place des dispositions fiscales ad hoc : c'est une question de réalisme et de pragmatisme.
Sans déflorer la proposition que je ferai au Premier Ministre, je peux déjà vous indiquer les pistes sur lesquels je travaille.
Première piste, cette mesure fiscale devrait s'appliquer aux cadres nouvellement détachés en France par leur employeur, afin de bien cibler la population que nous souhaitons attirer. Cela représente environ 20.000 à 25.000 personnes par an mais nous espérons naturellement que ce chiffre augmente.
La deuxième idée est d'exonérer la part du revenu qui correspond effectivement à l'impatriation en France du salarié détaché. Nos expatriés bénéficient d'une exonération sur le supplément de rémunération lié à leur expatriation. Nous verrons si cette exonération peut porter sur le supplément réel ou si nous optons pour un abattement forfaitaire de la base imposable.
La troisième piste est que ce dispositif pourra s'appliquer au contribuable pendant une certaine période, correspondant à l'idée que l'impatriation est temporaire : si le salarié s'implante durablement en France, il devient alors un résident comme les autres.
Enfin, le dernier volet consiste à assouplir les règles de déduction des cotisations versées par les salariés impatriés aux régimes de protection sociale de leur pays d'origine.
Vous le voyez, notre préoccupation est très concrète. Nous aurons l'occasion d'en reparler au cours des prochaines semaines afin d'affiner notre proposition, en concertation avec les entreprises.
Tout aussi concrètement, et sur un autre registre, la baisse des impôts sera poursuivie, comme l'a indiqué le Premier ministre, notamment grâce à la création d'un produit d'épargne retraite individuelle ouvert à tous.
A cette occasion, nous engagerons une réflexion plus générale sur l'épargne, car notre objectif n'est pas une augmentation du taux d'épargne, mais une réorientation de celle-ci vers les usages les plus utiles à notre économie et à nos concitoyens.
Le diagnostic est en effet connu : nous ne souffrons pas d'un manque d'épargne, mais celle-ci doit être davantage orientée vers les emplois les plus productifs et la préparation de l'avenir. L'enjeu majeur est de parvenir à activer cette épargne, à lui donner un caractère offensif, pour qu'elle ne soit pas une rente stérile mais un outil au service de la modernisation de notre pays par le financement de nos entreprises, en encourageant l'investissement en actions.
L'épargne retraite constitue un deuxième objectif pour faire mieux coïncider notre épargne à nos besoins. Avec la création du Plan d'épargne individuelle pour la retraite, chaque Français pourra désormais se constituer un capital en vue de sa retraite, avec une aide fiscale, et dans des conditions de sécurité qui ont été définies précisément dans un amendement déposé la semaine dernière. Le PEIR participera de manière importante à l'effort d'allègement des charges, tout en favorisant une réallocation de l'épargne vers des usages plus productifs. Les seuils de déductibilité, qui seront définis dans la loi de finances pour 2004, devront naturellement tenir compte des dispositifs existants, dans le cadre d'une réflexion qui concernera l'ensemble des dispositions réglementaires et fiscales.
3/ Mon dernier point concerne les défis que la financiarisation de l'économie pose à nos outils de régulation.
Les marchés ont montré une très grande capacité de résistance aux chocs, et il faut s'en féliciter. Mais nous devons prêter une attention renouvelée aux mécanismes de localisation et de diffusion des risques, via certains instruments ou certains acteurs du marché. Les dérivés de crédit, la réassurance, les hedge funds, posent à des degrés divers ces questions dans un système économique où les marchés financiers sont de plus en plus interconnectés et complexes. Ces sujets sont à l'étude dans différents forums, notamment au sein du G7 et du Forum de stabilité financière, qui se réunira à Paris en septembre prochain. Ils fournissent également de bons sujets de réflexion pour votre nouvel Institut Europlace de Finance, que le ministère financera pour soutenir et encourager son action.
Sans attendre le résultat de ces réflexions, il convient d'être vigilant sur quelques choix fondamentaux qui sont devant nous à brève échéance.
La structuration de marchés organisés constitue une première priorité d'action. Par exemple, alors que nous entrons dans la dernière année de la mise en oeuvre du Plan d'Action pour les Services Financiers, les débats en cours sur la directive sur les services d'investissement sont essentiels. Je le redis à Mme Randzio-Plath et à M. Schaub, dont la présence parmi nous témoigne de l'effort de Paris Europlace pour ouvrir ses rencontres sur l'Europe : cette directive, qui va se traduire par la multiplication des plates-formes de transactions, doit préserver tous les moyens de contrôle et d'action des régulateurs.
La France n'est pas hostile à la concurrence entre des plates-formes de négociation de titres de différentes natures : cette compétition est un facteur de réduction des coûts de transaction, grâce à la modernisation continue des systèmes qu'elle induit, et donc d'abaissement du coût d'accès au capital pour les entreprises, tout en améliorant les conditions des placements pour les investisseurs et les épargnants. Mais cet éclatement doit préserver la transparence du fonctionnement du marché et du processus de formation des prix : cela implique que, sur toute plate-forme de transaction qui représente un volume significatif de liquidité, la transparence des conditions de négociation soit assurée non seulement ex post mais aussi et surtout ex ante, de manière à ce que tout le marché puisse profiter de ces informations, sans qu'elles soient captées au profit de quelques intermédiaires et de leurs clients. C'est essentiel pour assurer la bonne formation des prix, la protection de l'épargnant et donc la confiance.
Des marchés organisés, ce sont aussi des marchés qui reposent sur des normes comptables fiables. Voici un chantier qui mobilise les entreprises dans un calendrier désormais de plus en plus tendu, avec le passage annoncé aux normes IAS en 2005.
C'est un sujet vital, car les normes comptables doivent permettre de mesurer les risques sans contribuer à une volatilité artificielle des marchés.
Or, il se trouve que certaines des normes en cours d'examen risquent de conduire à cette volatilité accrue de nos économies. Grâce à l'action conjointe et coordonnée des professionnels et des pouvoirs publics, la France a su faire partager à certains de ses partenaires et à la Commission européenne ses réserves sur les normes IAS 32 et 39. Il est aujourd'hui acquis que leur adoption sera reportée jusqu'à obtention de normes techniquement satisfaisantes et compatibles avec les stratégies de nos industries. Mais un certain nombre de normes IAS décisives ne sont pas encore prêtes et ne le seront pas pour la première application en 2005. C'est notamment le cas de la norme " performance reporting " qui traite de la mesure du résultat des entreprises. Les projets actuels soulèvent de nombreuses questions, en raison notamment d'une valorisation systématique et non encadrée à la juste valeur, même lorsqu'il n'y a pas de marché pour établir cette valeur.
De façon plus générale, ces derniers mois ont mis en lumière la nécessité d'une réflexion approfondie sur le dispositif institutionnel d'adoption des normes qui a été mis en place l'année dernière, avant d'aller plus loin. L'Europe doit pouvoir peser davantage sur l'élaboration des normes par l'IASB. Pour cela, il faut renforcer le comité technique européen qui assiste la Commission dans son analyse des normes, l'EFRAG, et y assurer une représentativité satisfaisante. De même, il faut renforcer l'association de l'Europe au fonctionnement de l'IASB, pour que soit dûment vérifiée la compatibilité des normes proposées avec l'intérêt public européen. C'est le message que le Président de la République vient d'adresser au Président de la Commission européenne, et que je discuterai avec mes collègues de l'Ecofin la semaine prochaine.
Au moment de conclure, je voudrais rendre hommage à Marc Viénot pour son action à la tête de Paris Europlace. Il aura beaucoup fait, avec ses équipes, pour faire progresser l'idée que l'industrie financière est une industrie comme les autres, et qu'elle justifie ainsi l'attention des pouvoirs publics. C'est le sens de la suppression de la contribution sur les institutions financières, qui a été décidée suite à notre rencontre de l'année dernière. Mais une place de Paris forte est aussi dans l'intérêt des entreprises non financières, qui y trouvent les ressources de leur développement. Gérard Mestrallet, lorsqu'il prendra la tête de votre association, illustrera parfaitement cette communion d'intérêt.
Je compte sur lui et sur vous pour que Paris Europlace accentue encore son action en Europe pour nourrir l'élaboration du droit communautaire et réfléchir à " l'après 2005 " à l'échéance du Plan d'action de la Commission, dans une vision nécessairement prospective qui est indispensable.
Je vous remercie.
(Source http://www.minefi.gouv.fr, le 10 juillet 2003)