Texte intégral
(Conférence de presse de Michel Barnier, à Luxembourg le 26 avril 2004) :
Je suis heureux de vous retrouver pour ce premier Conseil Affaires générales, juste un petit moment car le Conseil se poursuit et je dois également voir le ministre marocain avant de m'envoler pour mon premier voyage en Afrique. Je pars ce soir à Pretoria pour participer demain aux cérémonies d'investiture du président d'Afrique du Sud et au dixième anniversaire de la fin de l'apartheid.
Je vais évoquer quatre points devant vous qui ont fait l'objet de nos travaux ce matin, pendant le déjeuner et cet après-midi.
D'abord, dans l'urgence où nous sommes, si je puis dire, la Constitution européenne. La présidence qui fait un travail intelligent, volontaire va proposer une réunion les 17 et 18 mai et probablement une autre le 24 mai pour préparer le Conseil européen du mois du juin au cours duquel, nous l'espérons, un accord sera trouvé sur cette Constitution.
Mais nous n'en sommes pas encore là même si je veux redire, au nom du gouvernement français, que nous avons besoin de cette Constitution maintenant, et qu'il faut, avant les élections du 13 juin, à défaut d'un accord formel et définitif, un signal très fort, que nous y sommes, que la Maison est en ordre et que l'Union fonctionne. Vous savez que la Constitution est faite pour que l'Union soit en ordre de marche.
Nous travaillons pour cet accord et, avec nos partenaires allemands, avec d'autres pays avec lesquels les contacts se multiplient, nous souhaitons aider la présidence à trouver le chemin de cet accord. Nous avons une attitude constructive mais aussi exigeante d'ici le 18 juin parce que, pour nous, cet accord ne doit pas être obtenu au prix d'un recul ou d'un retrait par rapport aux textes sur lesquels nous avons travaillé tous ensemble, les ministres des Affaires étrangères, la Commission et le Parlement, notamment à Naples. Pour moi, le texte sur lequel nous devons finaliser l'accord c'est celui qu'avait préparé la présidence italienne à Naples et pas d'autre texte que celui-là.
Il nous faut clarifier encore quelques points, si possible améliorer le texte et trouver des solutions pour les questions en suspens, principalement celle de la mécanique du vote.
Améliorer le texte, pour nous Français, est notamment nécessaire sur un point auquel je tiens, cela ne vous surprendra pas, c'est la dimension sociale.
La France, en 1996, avait la première insisté, à travers un mémorandum social, sur cette dimension humaine, humaniste du projet européen ; Jacques Chirac avait dit à l'époque qu'il fallait remettre l'Homme au coeur du projet européen et je pense que, raisonnablement, on peut améliorer le texte de la Constitution sur quatre points : celui de l'institutionnalisation du sommet social tripartite, le dialogue social, une clause sociale "horizontale" qui a d'ailleurs été proposée par la présidence italienne, une avancée modeste, nécessaire sur la majorité qualifiée pour les prestations sociales concernant les travailleurs migrants, et enfin, sans doute aussi, quelques avancées dans le domaine de la santé publique.
Encore une fois, ces demandes ne sont pas révolutionnaires, elles sont au coeur de cette dimension humaniste que j'ai évoquée et nous allons à nouveau les présenter dans les dernières semaines de la négociation.
Avec nos partenaires allemands et d'autres pays - j'ai rencontré le ministre polonais la semaine dernière, je suis allé à Madrid - nous cherchons sur la mécanique du vote des solutions.
Chypre a été le sujet de l'actualité aujourd'hui, au lendemain du référendum. Je crois que nous sommes tous unanimes pour dire notre déception qu'une partie de l'île n'ait pas approuvé la proposition présentée par les Nations unies et nous avons voulu rendre hommage au travail réalisé par Kofi Annan et son équipe. C'est clairement une occasion manquée et pourtant, nous voulons persévérer. C'est le sens de la déclaration qui sera entre vos mains ce soir. Persévérer et garder cette perspective européenne pour tous les citoyens chypriotes. L'objectif reste celui de l'unité de l'île et je pense franchement, pour bien connaître cette île, pour y être allé plusieurs fois, notamment comme commissaire européen, que l'avenir est européen pour tous les Chypriotes. Moi, je n'oublierai pas les derniers contacts que j'ai eus il y a quelques semaines à Nicosie où j'avais demandé à rencontrer, ce qui ne s'était que rarement fait auparavant, les jeunes des associations des deux communautés. Je les ai rencontrés ensemble, dans une réunion qui a duré presque 2 heures. Du côté chypriote surtout et franchement, lorsque l'on discute avec ces jeunes qui ont envie de vivre ensemble, de travailler ensemble, de se marier, d'avoir cet avenir commun, on se dit, qu'il y a une sorte d'archaïsme dans cette séparation et l'on se dit que la responsabilité des hommes politiques des deux côtés est de garder la perspective qui est européenne. Nous voulons encourager cela, notamment par une aide qui sera apportée à la partie la plus pauvre de l'île, la partie chypriote turque où le revenu par habitant est beaucoup plus faible. J'ai insisté, avec les souvenirs que j'ai en tant qu'ancien commissaire à la politique régionale, sur la nécessité d'aider cette partie à consommer l'argent qui lui sera apporté, à avoir les outils pour absorber, pour monter des projets concrets pour améliorer la vie des gens. J'ai également insisté sur les programmes comme "Intereg" qui pourraient encourager plus précisément, plus fortement les initiatives qui intéressent ensemble les deux communautés.
Nous avons évoqué également la question de l'embargo sur les armes à l'égard de la Chine. Le sentiment existe, la France l'a exprimé depuis longtemps, que cette logique de l'embargo, imposée en 1989, est aujourd'hui dépassée ; elle est également contradictoire avec la logique d'engagement à l'égard de ce pays qui est poursuivie par l'ensemble de la communauté internationale, à un moment où Pékin va accueillir, je le pense avec un grand succès, le plus grand événement sportif que sont les Jeux olympiques. Cette logique de l'embargo est également contradictoire avec le partenariat stratégique que l'Union européenne est en train de construire avec ce très grand pays.
Nous avons donc parlé du contexte dans lequel cette décision de levée de l'embargo pourrait intervenir. Pour nous, la levée de l'embargo, ce n'est pas de l'irresponsabilité. La politique des Etats membres de l'Union en matière d'exportation d'armes est une politique responsable. Je rappelle que ces exportations sont efficacement encadrées par nos régimes nationaux et les dispositions du code de conduite européen. En aucun cas, il s'agit de mettre en danger la stabilité régionale en Asie. La levée de cet embargo, ce n'est pas non plus oublier la question des Droits de l'Homme, nous continuons de demander à la Chine des gestes concrets sur la question des Droits de l'Homme. Nous avons engagé depuis 1995 un dialogue avec ce grand pays qui permet d'évoquer, sans aucun tabou, tous les sujets sensibles qu'il s'agisse de la peine capitale, de la torture ou de la liberté d'expression et de réunion.
Enfin, la discussion qui a lieu depuis le début de l'après-midi concerne la situation extrêmement grave au Proche-Orient. J'ai rappelé, comme au Gymnich, notre inquiétude sur les derniers développements intervenus depuis la rencontre entre le président Bush et M. Sharon et cet accord unilatéral. J'ai rappelé que pour nous, on ne fera pas la paix au Proche-Orient uniquement entre Israéliens et Américains, on la fera avec les Palestiniens, avec le seul plan dont nous disposons et sur lequel nous sommes tous d'accord qui est la Feuille de route qui dicte les étapes, le chemin et le seul objectif sur lequel nous sommes tous d'accord, Américains, Union européenne, Nations unies, Russes, sur lequel également les Israéliens et les Palestiniens ont marqué leur accord, qui est l'objectif de deux Etats vivant côte à côte, un Etat palestinien viable et un Etat d'Israël dans la sécurité.
Je redis à ce sujet que la France ne transigera jamais avec la question de la sécurité d'Israël. Un objectif clair donc et une Feuille de route qui a comme méthode la négociation, la concertation. La prochaine occasion pour nous de rappeler tout cela sera la réunion du Quartet : c'est un moment important, à la fois pour la crédibilité de ce Quartet qui ne doit pas se résumer à un solo - j'ai déjà eu l'occasion de le dire - et pour la viabilité de la Feuille de route. J'ai insisté à nouveau aujourd'hui sur l'élément positif que représente l'annonce faite à Washington, qui est un élément utile de la Feuille de route, du retrait de la bande de Gaza ; j'ai insisté également sur le fait que décréter le retrait de la bande de Gaza, c'est bien, le réussir, c'est mieux. Et on ne réussira pas ce retrait sans remplir certaines conditions qui concernent précisément le moment, les modalités, le transfert de responsabilités à l'Autorité palestinienne, l'accès à Gaza pour que ce soit un espace viable, le lien avec la Cisjordanie, les services publics, tout ce que l'Union européenne avait construit et qui a été bombardé ou démoli. Bref, j'ai souhaité que nos représentants au Quartet puissent poser ces questions pour s'assurer qu'au moins cet aspect-là puisse être réussi et il y a quelques conditions pour que ce soit le cas.
Q - Vous avez parlé d'améliorer la Constitution, avez-vous des réactions à la décision britannique de ratifier par référendum ?
R - La négociation qui n'est pas terminée est une chose, la manière de ratifier le résultat en est une autre. Je ne veux pas croire qu'il y ait un lien entre l'une et l'autre.
Q - On ne peut pas ajouter une clause dans le Traité ?
R - Le problème que vous posez là est un problème de droit. Aujourd'hui, toute révision des Traités actuels, donc un nouveau traité comme celui que nous avons construit, patiemment pendant 18 mois dans la Convention, exige l'unanimité. Donc, ce que je peux dire en droit européen aujourd'hui, c'est que si un pays ne ratifie pas, il n'y a plus de traité. C'est l'une des raisons pour lesquelles, je vous le rappelle, nous avons été un certain nombre à souhaiter, dans ce projet de Constitution, des modalités plus souples d'évolution du traité, au moins de sa partie politique. Dans ce traité, il y a des parties qui n'ont pas les mêmes valeurs, des parties solennelles, constitutionnelles, les droits des citoyens, les principes, les valeurs, les institutions et il y a aussi, ce qui est inhabituel dans une Constitution nationale - mais nous ne sommes pas dans le cadre d'une Constitution nationale - il y a aussi toutes les politiques.
Dans le détail, moi je pense franchement que certaines de ces politiques vont évoluer avec la société - par exemple la santé publique, l'environnement - et donc je trouve qu'avoir, sur cette partie des politiques, une procédure extrêmement lourde et contraignante de ratification, c'est une faiblesse pour la Constitution. Mais, au point où nous en sommes, la Constitution ne sera mise en oeuvre que si elle est ratifiée d'une manière ou d'une autre par chacun des pays de l'Union européenne. Je ne peux pas dire autre chose aujourd'hui.
Q - Quel est votre avis sur la proposition de compromis présentée par Giscard d'Estaing sur la double majorité, le retour à Nice en cas de contestation durant une certaine période ?
R - Il y a plusieurs modèles sur lesquels nous allons travailler. Il y a d'abord le modèle de la Convention - 50 % des États, 60 % de la population - nous parlons là du problème du mécanisme : le système de vote. Franchement, je vous parle là comme l'homme politique que je suis. Alors qu'il y a tant de préoccupations parmi nos compatriotes, parmi les citoyens, d'inquiétudes liées au terrorisme, d'inquiétudes sociales, économiques, écologiques, je n'imagine pas que nous n'arrivions pas à trouver une solution sur cette question du mécanisme.
J'en reviens à votre question, j'avoue que la solution idéale est que l'on s'en tienne au texte de la Convention, c'est-à-dire à un système équitable, efficace et simple. Une décision est prise par le Conseil des ministres, quand la moitié des États représentant 60 % des citoyens sont d'accord pour la prendre. Encore une fois, c'est une solution efficace et équitable.
Valéry Giscard d'Estaing qui a beaucoup travaillé sur ces sujets, considère que l'on pourrait pendant 5 ans, de 2009 à 2014, garder une sorte de frein de secours, en ayant recours, dans certaines conditions, au système de Nice.
Nous ne souhaitons pas de rendez-vous. Nous souhaitons une décision tout de suite, même si l'application de cette décision peut être différée dans le temps, ce sera peut-être le cas par exemple pour la Commission. Nous ne souhaitons pas de clause de rendez-vous. Ce que l'on ne décidera pas maintenant, on ne le décidera plus jamais en étant plus nombreux encore. Il faut donc décider maintenant, même si la mise en oeuvre des décisions intervient quelques années plus tard.
On peut donc discuter de cette solution. Et la troisième voie, sur laquelle nous sommes également prêts à discuter, c'est de jouer sur les pourcentages - 50/55, 60/65 -, je serais tenté de dire que, pour bien trouver une solution sur cette question de mécanique, il faut trouver un système permettant d'être compris par les citoyens et de ne pas rendre les décisions plus compliquées. Mais la discussion est loin d'être terminée.
Q - Et qu'en pensent les Espagnols ?
R - Ils ont des réserves sur la solution proposée par M. Giscard d'Estaing ; ils refusent d'en rester à la Convention, la discussion est donc ouverte. Encore une fois, je viens de vous dire que nous pouvions travailler sur ce qui peut être décidé maintenant et appliqué complètement un peu plus tard. Nous pouvons également travailler sur une modification modeste des seuils, 50 ou 60, on peut les augmenter à condition, je le répète, - je pense que nos partenaires sont prêts à ce travail-, qu'on ne rende pas la décision plus difficile.
Q - Sur Chypre, seriez-vous aussi sévère que le sont vos collègues en disant que l'Europe a été bernée ?
R - Il faut comprendre M. Verheugen. J'ai travaillé pendant 5 ans à ses côtés, dans ce domaine et j'ai beaucoup travaillé, comme commissaire à la politique régionale et de cohésion, puisque cette politique intéresse la partie chypriote grecque qui est la plus développée mais elle intéresserait surtout la partie chypriote turque qui est la plus pauvre. Nous étions donc prêts à appliquer la politique de cohésion immédiatement à toute l'île, pour le profit de l'autre côté, pour le développement de toute l'île. Il y a eu un gros travail fait par cette équipe. Ce qu'il a exprimé, c'est à la mesure de sa déception, à la mesure de ce travail. Moi aussi, j'ai exprimé une déception.
Q - Lorsque vous dites qu'il faut continuer à travailler, comment pensez-vous que l'on puisse établir des relations avec des interlocuteurs qui, en droit international, n'existent pas ? Avez-vous une idée de la manière dont on peut faire progresser les choses ?
R - Ce n'est pas une situation nouvelle.
Q - Mais, jusqu'à présent, on avait l'impression que cela allait se terminer.
R - Oui, ça n'était pas le cas, la preuve. Depuis des années, nous travaillons avec cette communauté chypriote turque qui est là, où il y a un débat démocratique, la preuve, c'est qu'il y a eu un vote qui ne correspondait pas vraiment, du côté chypriote turc, à ce que souhaitaient les dirigeants. Il y a donc eu un débat démocratique et je trouve d'ailleurs que l'attitude des chypriotes turcs a été très responsable dans cette affaire.
Lors de ma dernière visite, j'avais rencontré à Nicosie, du côté chypriote turc, tous les chefs de partis politique, il y a des années que nous discutons avec cette communauté, nous continuerons.
Moi, je souhaite vraiment que l'on garde clairement cette idée que l'avenir de tous les citoyens chypriotes est un avenir européen. Ce n'est pas la première fois qu'il y a un échec dans un référendum - je ne cite personne - que l'on rediscute, que l'on explique mieux, que l'on prend un peu plus de temps. C'est l'état d'esprit dans lequel nous sommes et en attendant, j'ai plaidé aussi pour que l'on apporte une aide substantielle à cette communauté qui en a besoin.
Q - Y-a-t-il un lien entre le référendum à Chypre et la candidature turque à l'Union européenne ?
R - Je sais bien qu'il y a un contexte global, mais ne mélangeons pas les sujets, là nous parlons de l'île de Chypre, la Turquie, c'est une autre question. J'ai entendu le ministre des Affaires étrangères chypriote s'exprimer tout à l'heure, le ministre grec des Affaires étrangères dire que ce n'était pas leur état d'esprit. Les mots comptent, n'est-ce pas, les gens font attention à ce qu'ils disent lorsque nous sommes au Conseil des ministres des Affaires étrangères. Leur état d'esprit n'est donc pas de mettre une barrière entre les deux parties de Chypre. En tout cas, ce n'est sûrement pas l'état d'esprit de tous les autres ministres, c'est extrêmement clair. Nous souhaitons avoir un dialogue et d'ailleurs, la Commission est invitée à trouver les moyens de ce dialogue avec la communauté chypriote turque et nous souhaitons garder la perspective européenne pour toute l'île en prenant un peu plus de temps.
Q - Quel lien avec la candidature turque ?
R - Moi, je pense que les deux sujets doivent être abordés de manière distincte.
Q - Peut-on envisager un nouveau référendum à Chypre ?
R - Pour faire un nouveau référendum, il n'y a pas forcément besoin d'attendre des années mais il faut de nouvelles conditions naturellement, il faut peut-être que le Secrétaire général des Nations unies évalue, explore les réactions des uns et des autres et peut-être qu'il y ait une nouvelle proposition pour justifier une nouvelle consultation. Prenons un peu de temps si vous le voulez bien, il y a eu un vote démocratique des deux côtés, il faut respecter cela, le vote a été démocratique même M. Verheugen n'a pas vraiment eu la liberté de s'exprimer à la télévision chypriote grecque. Il y a eu un vote très clair des deux côtés. Il faut respecter ce vote, laisser reposer cela et se donner un peu de temps. Je le répète, pour les nouvelles générations, il faut préserver la perspective européenne, c'est la seule perspective possible pour tous les citoyens chypriotes.
(source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 29 avril 2004)
(Entretien de Michel Barnier avec Reuter et l'AFP, à Luxembourg le 26 avril 2004) :
Q - (A propos du vote sur le plan de réunification de l'île de Chypre)
R - Il faut remercier Kofi Annan qui a fait un formidable travail qu'il va falloir continuer, tout cela n'a pas suffi. Je souhaite que, d'une manière ou d'une autre, comme nous nous y étions engagés, on aide la communauté chypriote turque à se développer et quand je parle de cette île, nous lui souhaitons, nous continuons à souhaiter qu'elle soit un jour totalement dans l'Union. Quand je vous parle de cette île que je connais assez bien, je pense aux jeunes. Je suis allé à Nicosie il y a quelques semaines à peine comme commissaire européen et j'ai vécu un moment très émouvant et qui m'a marqué ; une rencontre qui a duré un certain moment, avec des jeunes des deux communautés et c'était de l'autre côté des barbelés ; j'étais dans la partie chypriote turque et j'avais convoqué cette rencontre entre des jeunes d'associations chypriotes turques et chypriotes grecques. Ce qui est incroyable, c'est qu'ils ont envie d'agir ensemble, ils ont envie de travailler ensemble et de s'entendre. Lorsque je parle de cette île, je pense d'abord à ces jeunes et je pense qu'il faut que les dirigeants politiques des pays qui s'intéressent à Chypre, les Européens, les dirigeants politiques actuels de l'île pensent aux nouvelles générations et mettent les choses en perspective. La perspective est européenne pour toute cette île réunie.
(source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 29 avril 2004)
Je suis heureux de vous retrouver pour ce premier Conseil Affaires générales, juste un petit moment car le Conseil se poursuit et je dois également voir le ministre marocain avant de m'envoler pour mon premier voyage en Afrique. Je pars ce soir à Pretoria pour participer demain aux cérémonies d'investiture du président d'Afrique du Sud et au dixième anniversaire de la fin de l'apartheid.
Je vais évoquer quatre points devant vous qui ont fait l'objet de nos travaux ce matin, pendant le déjeuner et cet après-midi.
D'abord, dans l'urgence où nous sommes, si je puis dire, la Constitution européenne. La présidence qui fait un travail intelligent, volontaire va proposer une réunion les 17 et 18 mai et probablement une autre le 24 mai pour préparer le Conseil européen du mois du juin au cours duquel, nous l'espérons, un accord sera trouvé sur cette Constitution.
Mais nous n'en sommes pas encore là même si je veux redire, au nom du gouvernement français, que nous avons besoin de cette Constitution maintenant, et qu'il faut, avant les élections du 13 juin, à défaut d'un accord formel et définitif, un signal très fort, que nous y sommes, que la Maison est en ordre et que l'Union fonctionne. Vous savez que la Constitution est faite pour que l'Union soit en ordre de marche.
Nous travaillons pour cet accord et, avec nos partenaires allemands, avec d'autres pays avec lesquels les contacts se multiplient, nous souhaitons aider la présidence à trouver le chemin de cet accord. Nous avons une attitude constructive mais aussi exigeante d'ici le 18 juin parce que, pour nous, cet accord ne doit pas être obtenu au prix d'un recul ou d'un retrait par rapport aux textes sur lesquels nous avons travaillé tous ensemble, les ministres des Affaires étrangères, la Commission et le Parlement, notamment à Naples. Pour moi, le texte sur lequel nous devons finaliser l'accord c'est celui qu'avait préparé la présidence italienne à Naples et pas d'autre texte que celui-là.
Il nous faut clarifier encore quelques points, si possible améliorer le texte et trouver des solutions pour les questions en suspens, principalement celle de la mécanique du vote.
Améliorer le texte, pour nous Français, est notamment nécessaire sur un point auquel je tiens, cela ne vous surprendra pas, c'est la dimension sociale.
La France, en 1996, avait la première insisté, à travers un mémorandum social, sur cette dimension humaine, humaniste du projet européen ; Jacques Chirac avait dit à l'époque qu'il fallait remettre l'Homme au coeur du projet européen et je pense que, raisonnablement, on peut améliorer le texte de la Constitution sur quatre points : celui de l'institutionnalisation du sommet social tripartite, le dialogue social, une clause sociale "horizontale" qui a d'ailleurs été proposée par la présidence italienne, une avancée modeste, nécessaire sur la majorité qualifiée pour les prestations sociales concernant les travailleurs migrants, et enfin, sans doute aussi, quelques avancées dans le domaine de la santé publique.
Encore une fois, ces demandes ne sont pas révolutionnaires, elles sont au coeur de cette dimension humaniste que j'ai évoquée et nous allons à nouveau les présenter dans les dernières semaines de la négociation.
Avec nos partenaires allemands et d'autres pays - j'ai rencontré le ministre polonais la semaine dernière, je suis allé à Madrid - nous cherchons sur la mécanique du vote des solutions.
Chypre a été le sujet de l'actualité aujourd'hui, au lendemain du référendum. Je crois que nous sommes tous unanimes pour dire notre déception qu'une partie de l'île n'ait pas approuvé la proposition présentée par les Nations unies et nous avons voulu rendre hommage au travail réalisé par Kofi Annan et son équipe. C'est clairement une occasion manquée et pourtant, nous voulons persévérer. C'est le sens de la déclaration qui sera entre vos mains ce soir. Persévérer et garder cette perspective européenne pour tous les citoyens chypriotes. L'objectif reste celui de l'unité de l'île et je pense franchement, pour bien connaître cette île, pour y être allé plusieurs fois, notamment comme commissaire européen, que l'avenir est européen pour tous les Chypriotes. Moi, je n'oublierai pas les derniers contacts que j'ai eus il y a quelques semaines à Nicosie où j'avais demandé à rencontrer, ce qui ne s'était que rarement fait auparavant, les jeunes des associations des deux communautés. Je les ai rencontrés ensemble, dans une réunion qui a duré presque 2 heures. Du côté chypriote surtout et franchement, lorsque l'on discute avec ces jeunes qui ont envie de vivre ensemble, de travailler ensemble, de se marier, d'avoir cet avenir commun, on se dit, qu'il y a une sorte d'archaïsme dans cette séparation et l'on se dit que la responsabilité des hommes politiques des deux côtés est de garder la perspective qui est européenne. Nous voulons encourager cela, notamment par une aide qui sera apportée à la partie la plus pauvre de l'île, la partie chypriote turque où le revenu par habitant est beaucoup plus faible. J'ai insisté, avec les souvenirs que j'ai en tant qu'ancien commissaire à la politique régionale, sur la nécessité d'aider cette partie à consommer l'argent qui lui sera apporté, à avoir les outils pour absorber, pour monter des projets concrets pour améliorer la vie des gens. J'ai également insisté sur les programmes comme "Intereg" qui pourraient encourager plus précisément, plus fortement les initiatives qui intéressent ensemble les deux communautés.
Nous avons évoqué également la question de l'embargo sur les armes à l'égard de la Chine. Le sentiment existe, la France l'a exprimé depuis longtemps, que cette logique de l'embargo, imposée en 1989, est aujourd'hui dépassée ; elle est également contradictoire avec la logique d'engagement à l'égard de ce pays qui est poursuivie par l'ensemble de la communauté internationale, à un moment où Pékin va accueillir, je le pense avec un grand succès, le plus grand événement sportif que sont les Jeux olympiques. Cette logique de l'embargo est également contradictoire avec le partenariat stratégique que l'Union européenne est en train de construire avec ce très grand pays.
Nous avons donc parlé du contexte dans lequel cette décision de levée de l'embargo pourrait intervenir. Pour nous, la levée de l'embargo, ce n'est pas de l'irresponsabilité. La politique des Etats membres de l'Union en matière d'exportation d'armes est une politique responsable. Je rappelle que ces exportations sont efficacement encadrées par nos régimes nationaux et les dispositions du code de conduite européen. En aucun cas, il s'agit de mettre en danger la stabilité régionale en Asie. La levée de cet embargo, ce n'est pas non plus oublier la question des Droits de l'Homme, nous continuons de demander à la Chine des gestes concrets sur la question des Droits de l'Homme. Nous avons engagé depuis 1995 un dialogue avec ce grand pays qui permet d'évoquer, sans aucun tabou, tous les sujets sensibles qu'il s'agisse de la peine capitale, de la torture ou de la liberté d'expression et de réunion.
Enfin, la discussion qui a lieu depuis le début de l'après-midi concerne la situation extrêmement grave au Proche-Orient. J'ai rappelé, comme au Gymnich, notre inquiétude sur les derniers développements intervenus depuis la rencontre entre le président Bush et M. Sharon et cet accord unilatéral. J'ai rappelé que pour nous, on ne fera pas la paix au Proche-Orient uniquement entre Israéliens et Américains, on la fera avec les Palestiniens, avec le seul plan dont nous disposons et sur lequel nous sommes tous d'accord qui est la Feuille de route qui dicte les étapes, le chemin et le seul objectif sur lequel nous sommes tous d'accord, Américains, Union européenne, Nations unies, Russes, sur lequel également les Israéliens et les Palestiniens ont marqué leur accord, qui est l'objectif de deux Etats vivant côte à côte, un Etat palestinien viable et un Etat d'Israël dans la sécurité.
Je redis à ce sujet que la France ne transigera jamais avec la question de la sécurité d'Israël. Un objectif clair donc et une Feuille de route qui a comme méthode la négociation, la concertation. La prochaine occasion pour nous de rappeler tout cela sera la réunion du Quartet : c'est un moment important, à la fois pour la crédibilité de ce Quartet qui ne doit pas se résumer à un solo - j'ai déjà eu l'occasion de le dire - et pour la viabilité de la Feuille de route. J'ai insisté à nouveau aujourd'hui sur l'élément positif que représente l'annonce faite à Washington, qui est un élément utile de la Feuille de route, du retrait de la bande de Gaza ; j'ai insisté également sur le fait que décréter le retrait de la bande de Gaza, c'est bien, le réussir, c'est mieux. Et on ne réussira pas ce retrait sans remplir certaines conditions qui concernent précisément le moment, les modalités, le transfert de responsabilités à l'Autorité palestinienne, l'accès à Gaza pour que ce soit un espace viable, le lien avec la Cisjordanie, les services publics, tout ce que l'Union européenne avait construit et qui a été bombardé ou démoli. Bref, j'ai souhaité que nos représentants au Quartet puissent poser ces questions pour s'assurer qu'au moins cet aspect-là puisse être réussi et il y a quelques conditions pour que ce soit le cas.
Q - Vous avez parlé d'améliorer la Constitution, avez-vous des réactions à la décision britannique de ratifier par référendum ?
R - La négociation qui n'est pas terminée est une chose, la manière de ratifier le résultat en est une autre. Je ne veux pas croire qu'il y ait un lien entre l'une et l'autre.
Q - On ne peut pas ajouter une clause dans le Traité ?
R - Le problème que vous posez là est un problème de droit. Aujourd'hui, toute révision des Traités actuels, donc un nouveau traité comme celui que nous avons construit, patiemment pendant 18 mois dans la Convention, exige l'unanimité. Donc, ce que je peux dire en droit européen aujourd'hui, c'est que si un pays ne ratifie pas, il n'y a plus de traité. C'est l'une des raisons pour lesquelles, je vous le rappelle, nous avons été un certain nombre à souhaiter, dans ce projet de Constitution, des modalités plus souples d'évolution du traité, au moins de sa partie politique. Dans ce traité, il y a des parties qui n'ont pas les mêmes valeurs, des parties solennelles, constitutionnelles, les droits des citoyens, les principes, les valeurs, les institutions et il y a aussi, ce qui est inhabituel dans une Constitution nationale - mais nous ne sommes pas dans le cadre d'une Constitution nationale - il y a aussi toutes les politiques.
Dans le détail, moi je pense franchement que certaines de ces politiques vont évoluer avec la société - par exemple la santé publique, l'environnement - et donc je trouve qu'avoir, sur cette partie des politiques, une procédure extrêmement lourde et contraignante de ratification, c'est une faiblesse pour la Constitution. Mais, au point où nous en sommes, la Constitution ne sera mise en oeuvre que si elle est ratifiée d'une manière ou d'une autre par chacun des pays de l'Union européenne. Je ne peux pas dire autre chose aujourd'hui.
Q - Quel est votre avis sur la proposition de compromis présentée par Giscard d'Estaing sur la double majorité, le retour à Nice en cas de contestation durant une certaine période ?
R - Il y a plusieurs modèles sur lesquels nous allons travailler. Il y a d'abord le modèle de la Convention - 50 % des États, 60 % de la population - nous parlons là du problème du mécanisme : le système de vote. Franchement, je vous parle là comme l'homme politique que je suis. Alors qu'il y a tant de préoccupations parmi nos compatriotes, parmi les citoyens, d'inquiétudes liées au terrorisme, d'inquiétudes sociales, économiques, écologiques, je n'imagine pas que nous n'arrivions pas à trouver une solution sur cette question du mécanisme.
J'en reviens à votre question, j'avoue que la solution idéale est que l'on s'en tienne au texte de la Convention, c'est-à-dire à un système équitable, efficace et simple. Une décision est prise par le Conseil des ministres, quand la moitié des États représentant 60 % des citoyens sont d'accord pour la prendre. Encore une fois, c'est une solution efficace et équitable.
Valéry Giscard d'Estaing qui a beaucoup travaillé sur ces sujets, considère que l'on pourrait pendant 5 ans, de 2009 à 2014, garder une sorte de frein de secours, en ayant recours, dans certaines conditions, au système de Nice.
Nous ne souhaitons pas de rendez-vous. Nous souhaitons une décision tout de suite, même si l'application de cette décision peut être différée dans le temps, ce sera peut-être le cas par exemple pour la Commission. Nous ne souhaitons pas de clause de rendez-vous. Ce que l'on ne décidera pas maintenant, on ne le décidera plus jamais en étant plus nombreux encore. Il faut donc décider maintenant, même si la mise en oeuvre des décisions intervient quelques années plus tard.
On peut donc discuter de cette solution. Et la troisième voie, sur laquelle nous sommes également prêts à discuter, c'est de jouer sur les pourcentages - 50/55, 60/65 -, je serais tenté de dire que, pour bien trouver une solution sur cette question de mécanique, il faut trouver un système permettant d'être compris par les citoyens et de ne pas rendre les décisions plus compliquées. Mais la discussion est loin d'être terminée.
Q - Et qu'en pensent les Espagnols ?
R - Ils ont des réserves sur la solution proposée par M. Giscard d'Estaing ; ils refusent d'en rester à la Convention, la discussion est donc ouverte. Encore une fois, je viens de vous dire que nous pouvions travailler sur ce qui peut être décidé maintenant et appliqué complètement un peu plus tard. Nous pouvons également travailler sur une modification modeste des seuils, 50 ou 60, on peut les augmenter à condition, je le répète, - je pense que nos partenaires sont prêts à ce travail-, qu'on ne rende pas la décision plus difficile.
Q - Sur Chypre, seriez-vous aussi sévère que le sont vos collègues en disant que l'Europe a été bernée ?
R - Il faut comprendre M. Verheugen. J'ai travaillé pendant 5 ans à ses côtés, dans ce domaine et j'ai beaucoup travaillé, comme commissaire à la politique régionale et de cohésion, puisque cette politique intéresse la partie chypriote grecque qui est la plus développée mais elle intéresserait surtout la partie chypriote turque qui est la plus pauvre. Nous étions donc prêts à appliquer la politique de cohésion immédiatement à toute l'île, pour le profit de l'autre côté, pour le développement de toute l'île. Il y a eu un gros travail fait par cette équipe. Ce qu'il a exprimé, c'est à la mesure de sa déception, à la mesure de ce travail. Moi aussi, j'ai exprimé une déception.
Q - Lorsque vous dites qu'il faut continuer à travailler, comment pensez-vous que l'on puisse établir des relations avec des interlocuteurs qui, en droit international, n'existent pas ? Avez-vous une idée de la manière dont on peut faire progresser les choses ?
R - Ce n'est pas une situation nouvelle.
Q - Mais, jusqu'à présent, on avait l'impression que cela allait se terminer.
R - Oui, ça n'était pas le cas, la preuve. Depuis des années, nous travaillons avec cette communauté chypriote turque qui est là, où il y a un débat démocratique, la preuve, c'est qu'il y a eu un vote qui ne correspondait pas vraiment, du côté chypriote turc, à ce que souhaitaient les dirigeants. Il y a donc eu un débat démocratique et je trouve d'ailleurs que l'attitude des chypriotes turcs a été très responsable dans cette affaire.
Lors de ma dernière visite, j'avais rencontré à Nicosie, du côté chypriote turc, tous les chefs de partis politique, il y a des années que nous discutons avec cette communauté, nous continuerons.
Moi, je souhaite vraiment que l'on garde clairement cette idée que l'avenir de tous les citoyens chypriotes est un avenir européen. Ce n'est pas la première fois qu'il y a un échec dans un référendum - je ne cite personne - que l'on rediscute, que l'on explique mieux, que l'on prend un peu plus de temps. C'est l'état d'esprit dans lequel nous sommes et en attendant, j'ai plaidé aussi pour que l'on apporte une aide substantielle à cette communauté qui en a besoin.
Q - Y-a-t-il un lien entre le référendum à Chypre et la candidature turque à l'Union européenne ?
R - Je sais bien qu'il y a un contexte global, mais ne mélangeons pas les sujets, là nous parlons de l'île de Chypre, la Turquie, c'est une autre question. J'ai entendu le ministre des Affaires étrangères chypriote s'exprimer tout à l'heure, le ministre grec des Affaires étrangères dire que ce n'était pas leur état d'esprit. Les mots comptent, n'est-ce pas, les gens font attention à ce qu'ils disent lorsque nous sommes au Conseil des ministres des Affaires étrangères. Leur état d'esprit n'est donc pas de mettre une barrière entre les deux parties de Chypre. En tout cas, ce n'est sûrement pas l'état d'esprit de tous les autres ministres, c'est extrêmement clair. Nous souhaitons avoir un dialogue et d'ailleurs, la Commission est invitée à trouver les moyens de ce dialogue avec la communauté chypriote turque et nous souhaitons garder la perspective européenne pour toute l'île en prenant un peu plus de temps.
Q - Quel lien avec la candidature turque ?
R - Moi, je pense que les deux sujets doivent être abordés de manière distincte.
Q - Peut-on envisager un nouveau référendum à Chypre ?
R - Pour faire un nouveau référendum, il n'y a pas forcément besoin d'attendre des années mais il faut de nouvelles conditions naturellement, il faut peut-être que le Secrétaire général des Nations unies évalue, explore les réactions des uns et des autres et peut-être qu'il y ait une nouvelle proposition pour justifier une nouvelle consultation. Prenons un peu de temps si vous le voulez bien, il y a eu un vote démocratique des deux côtés, il faut respecter cela, le vote a été démocratique même M. Verheugen n'a pas vraiment eu la liberté de s'exprimer à la télévision chypriote grecque. Il y a eu un vote très clair des deux côtés. Il faut respecter ce vote, laisser reposer cela et se donner un peu de temps. Je le répète, pour les nouvelles générations, il faut préserver la perspective européenne, c'est la seule perspective possible pour tous les citoyens chypriotes.
(source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 29 avril 2004)
(Entretien de Michel Barnier avec Reuter et l'AFP, à Luxembourg le 26 avril 2004) :
Q - (A propos du vote sur le plan de réunification de l'île de Chypre)
R - Il faut remercier Kofi Annan qui a fait un formidable travail qu'il va falloir continuer, tout cela n'a pas suffi. Je souhaite que, d'une manière ou d'une autre, comme nous nous y étions engagés, on aide la communauté chypriote turque à se développer et quand je parle de cette île, nous lui souhaitons, nous continuons à souhaiter qu'elle soit un jour totalement dans l'Union. Quand je vous parle de cette île que je connais assez bien, je pense aux jeunes. Je suis allé à Nicosie il y a quelques semaines à peine comme commissaire européen et j'ai vécu un moment très émouvant et qui m'a marqué ; une rencontre qui a duré un certain moment, avec des jeunes des deux communautés et c'était de l'autre côté des barbelés ; j'étais dans la partie chypriote turque et j'avais convoqué cette rencontre entre des jeunes d'associations chypriotes turques et chypriotes grecques. Ce qui est incroyable, c'est qu'ils ont envie d'agir ensemble, ils ont envie de travailler ensemble et de s'entendre. Lorsque je parle de cette île, je pense d'abord à ces jeunes et je pense qu'il faut que les dirigeants politiques des pays qui s'intéressent à Chypre, les Européens, les dirigeants politiques actuels de l'île pensent aux nouvelles générations et mettent les choses en perspective. La perspective est européenne pour toute cette île réunie.
(source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 29 avril 2004)