Texte intégral
[Première partie - 7h55]
Bonjour,
Q- D. de Villepin. Je vous voyais sourire en écoutant le "Cartier libre" de C. Cartier..
R- .C'est un beau morceau, parce qu'il y a tout...
Q- Mais très révélateur...
R- Très révélateur, effectivement. "La Marseillaise" et le football, une Marseillaise internationale. Mais il est très important que, dans un pays comme le nôtre, qui est un pays qui a une très très longue histoire, on se souvienne et que l'on ait, ensemble, des symboles communs qui nous unissent. Nous vivons dans un monde où tout est fait pour nous différencier, nous séparer. Or, quelle que soit notre identité, quelle que soit notre sensibilité, quelle soit notre religion, la couleur de notre peau, nous appartenons tous à cette grande nation française. Et cela, il faut le faire vivre, et c'est vrai que "la Marseillaise", c'est un moment fort, c'est un moment d'émotion et il faut que tous, nous le revendiquions.
Q- On verra tout à l'heure, si cette loi de 1905 dont on célèbre aujourd'hui le centenaire, peut protéger la République des dérives auxquelles malheureusement, on assiste aujourd'hui, c'est-à-dire de certaines dérives du communautarisme, mais aussi de la montée du racisme. Mais tout de même, au républicain que vous êtes - parce que dans un entretien que publie La Vie cette semaine, vous affichez votre exigence républicaine -, je voudrais poser la question, ce matin - sans tomber dans la caricature bien entendu - la question Gaymard. Laissons l'homme de côté ; j'aimerais vous interroger sur la fonction. A ce poste-là, de cette importance-là, la situation créée ne met-elle pas monsieur Gaymard dans une situation intenable ?
R- Il y a une erreur qui a été commise et H. Gaymard en a tiré les leçons très rapidement. Le Gouvernement, le Premier ministre a fixé des règles extrêmement claires, et dans une République, dans une démocratie, je crois que c'est la clé. Chacun peut faire des erreurs, quel que soit son niveau. Plus on monte dans la hiérarchie, plus nous devons, bien sûr, être exemplaires. Mais l'important, c'est cette santé démocratique qui fait que l'on corrige à chaque étape. Alors, on peut effectivement tomber dans le camp des donneurs de leçons, de ceux qui pensent qu'il faut toujours rajouter dans l'exigence vis-à-vis de l'autre. Je crois que c'est un formidable moment pour chacun, pour regarder ce qui est bien et ce qui est moins bien. Et cet examen, il faut le faire chacun en conscience.
Q- Il n'est franchement pas question de donner des leçons - d'ailleurs qui pourrait en donner... - mais restons sur cette exigence républicaine, qui est la question du modèle. Est-ce qu'en effet, puisque faute il y a eu, ce n'est pas embêtant quand on est, encore une fois, à ce niveau-là de la responsabilité politique de continuer comme si rien ne s'était passé ?
R- Ce n'est pas tout à fait ce qui se passe, puisque H. Gaymard a dit qu'il assumait l'erreur commise, qu'il rembourserait les sommes concernées. Il ne s'agit donc pas de faire comme si rien ne s'était passé. Il s'agit bien d'en tirer les conséquences et il s'agit non seulement de cela, mais de faire mieux. C'est pour cela que le Premier ministre a fixé des règles exigeantes, très exigeantes pour le Gouvernement. Il y avait là un domaine où les choses pouvaient, à certains égards, apparaître floues. Eh bien on profite de l'expérience pour corriger, comme nous l'avions fait pour ce qui est de l'organisation du financement des partis politiques. Je crois que la République, c'est en permanence se soucier d'établir des règles valables pour chacun et qui permettent de fixer des repères.
Q- Mais ce n'est pas facile. Pour un homme comme vous, qu'allez-vous dire au petit jeune qui écoutait "la Marseillaise" tout à l'heure et qui se pose des questions sur ce que tout cela apporte au fond ? Ceux qui vont dire que maintenant, on fait des maisons à 100.000 euros pour que tout le monde, et ceux qui n'ont pas beaucoup d'argent, puissent avoir accès à cela. Sauf que l'homme qui va gérer cette situation, c'est le même Gaymard. Et là, il y a un décalage républicain qui n'est pas facile à gérer quand même...
R- C'est tout le sens d'une communauté nationale. Et dans cette communauté nationale, il faut, chacun, toujours faire mieux, toujours faire preuve de plus d'exemplarité, et quand, une fois de plus, on commet des erreurs, on les répare et il faut aller plus loin. Donc, cette
exigence d'exemplarité, elle pèsera encore plus lourd sur les épaules de H. Gaymard.
[Deuxième partie - 8h20]
Q- La loi de 1905 sur la séparation des Eglises et de l'Etat, pilier républicain dont on célèbre cette année le centenaire, protège-t-elle aujourd'hui la société française des dérives communautaristes et du racisme ? Cette loi sait-elle répondre à l'intégration de l'islam, peu ou pas présent dans le pays, au moment de l'établissement de la loi ? La question se pose après qu'un rapport de la Commission européenne contre le racisme et l'intolérance l'écrit, s'inquiète de la "ghettoïsation - pour reprendre le néologisme du rapport - des populations immigrées en France et des conséquences de ce phénomène sur l'évolution du racisme". Cette loi de 1905, ce pilier républicain nous protège-t-il aujourd'hui de ce que vous avez d'ailleurs vous-même appelé "les faits ignominieux", qu'ils se produisent à Drancy, à la Grande mosquée, qu'ils s'inscrivent parfois dans des propos outranciers ?
R- Il est un repère essentiel, il est un pilier central de la notre République. Pourquoi ? Parce que notre pays a connu, pendant des siècles, pendant des décennies, des divisions, des querelles religieuses qui ont conduit à des milliers, à des centaines de milliers de morts. Et la loi de 1905 a créé véritablement l'apaisement dans notre pays, en établissant une règle simple : la séparation des Eglises et de l'Etat, une garantie de neutralité de l'Etat, une garantie de liberté de liberté d'exercice des cultes, et une liberté de conscience. Cette règle claire est incroyablement moderne. Et quand je vois les débats qui se développent en Allemagne, en Espagne, aux Pays-Bas, je me dis que nous sommes, nous, extraordinairement chanceux de disposer d'une loi qui prend en compte, très tôt, les risques des fondamentalismes. Et cette loi, parce qu'elle organise notre société, dans le respect des uns et des autres, chacun à sa place, non pas du tout dans un esprit de laïcité de combat, comme c'était le cas à l'origine, à travers "Le petit père Combes" par exemple, mais dans l'esprit d'A. Briand, dans l'esprit de Jaurès, dans un esprit d'ouverture et de compréhension, donne toute sa place à chacun. Et nous voyons aujourd'hui, puisque c'est la question centrale : est-ce que la loi de 1905 nous permet de donner sa juste place à l'islam, qui n'était pas invité à la table de la République en 1905 ? Eh bien, la réponse c'est "oui". Nous avons, avec la loi de 1905, un outil qui nous permet de donner toute sa place à l'islam. Et c'est pour cela que j'ai proposé la création d'une Fondation privée, fondation de droit privé, qui va permettre de financer le culte musulman, c'est-à-dire, de lui donner les moyens d'avoir des salles de prière, des mosquées, de former des imams... Donc, sur ces deux questions centrales, la formation des imams et le financement des lieux de culte, la Fondation privée pourra recueillir des fonds, des dons privés, des dons en provenance de pays étrangers, qui répondront à ce besoin de financement en toute transparence, et sans rupture du pacte républicain. C'est-à-dire que ce que l'islam pourra faire en France, toutes les autres Eglises pourront le faire et peuvent le faire. Ce principe d'égalité est essentiel.
Q- Mais "ce creuset républicain", dont on a souvent parlé, fonctionne-t-il aussi bien que cela ? Ce rapport de la Communauté européenne est intrigant quand même. Il parle "d'une ghettoïsation de la société française". Est-ce une réalité à vos yeux ? Y a-t-il, en effet, des ghettos français ?
R- Quand je suis arrivé au ministère de l'Intérieur, j'ai voulu mieux comprendre un certain nombre de phénomènes qui existent dans notre pays. En particulier, j'ai demandé aux Renseignements généraux de me faire le point sur le risque, dans certains quartiers, de communautarisation ou de ghettoïsation. Et nous avons constaté qu'effectivement, dans 300 quartiers - c'est près de 2 millions de personnes, 1,7 million -, il y avait le risque de repliement sur des critères ethniques ou religieux. Si nous voulons éviter cela, ce qui est une donnée très banale dans d'autres pays - c'est une donnée commune dans des pays qui s'appuient sur le communautarisme -, il est nécessaire que nous fassions vivre les principes de notre République. Quels sont ces principes ? C'est la laïcité, c'est l'égalité des chances, c'est l'égalité entre les hommes et les femmes, parce que je constate, en me déplaçant à Lyon, à Strasbourg, qu'il y a un risque aujourd'hui dans notre pays, à travers la différence religieuse, de voir un certain nombre de jeunes de filles, un certain nombre de jeunes femmes, maltraitées, parce que, justement, elles ne seraient pas suffisamment respectueuses des règles d'une certaine interprétation rigoriste de l'islam. Ceci est inacceptable, nous devons mettre en oeuvre ces règles communes, et c'est pour cela que nous devons défendre le principe de mixité sociale, d'égalité des chances, ou d'égalité entre les hommes et les femmes. Nous ne devons pas céder un pouce de terrain là-dessus. C'est tout le sens de la loi sur les signes religieux ostensibles à l'école, c'est tout le sens du respect de l'esprit républicain dans les services publics - à l'hôpital, dans les cantines scolaires, dans les piscines... Il y a là un combat républicain qui est la seule garantie de notre unité nationale. Il n'y a pas d'autre communauté en France que nationale. Donc, cette tendance, qui est une tendance mondiale, au repli sur les communautés, il faut prendre conscience qu'en France, dans la République, il n'y a pas d'autre communauté que nationale. Et si nous nous appuyons sur la défense des communautés, si parce que, la couleur de votre peau ou votre religion déterminaient votre appartenance à une communauté et vous donnaient certains droits ou vous conduisaient à vous replier sur cette communauté, eh bien nous perdrions tout simplement l'esprit de la République.
Q- La porte est étroite pour vous, parce que, en même temps, il faut trouver le moyen, en effet, d'intégrer, et puis il y a aussi la confrontation avec la réalité. Prenons des cas précis. 19ème arrondissement de Paris : une mosquée, et dans cette mosquée des jeunes, qui sont formés et qui sont envoyés aujourd'hui, d'abord en Syrie, et puis ensuite en Irak. Comment, là, "le creuset républicain" peut-il répondre à une difficulté de cette nature ?
R- C'est le problème que connaissent aujourd'hui tous les pays européens. Ce que nous connaissons, nous, aujourd'hui, dans une mosquée du 19ème arrondissement, les Anglais le connaissent eux-mêmes en Angleterre, les Espagnols en Espagne. Mais nous, on a un avantage sur eux : on a la solution. Et la solution, c'est la République ! On sait qu'en respectant nos principes républicains - promotion de l'égalité des chances, respect de la laïcité -, nous arrivons à régler ces problèmes. Et ce qui est formidable dans notre pays, c'est qu'aujourd'hui, c'est l'aspiration commune. Quand vous demandez à un jeune issu de l'immigration - j'étais à Strasbourg il y a quelques jours, à Aulnay -, ce à quoi il aspire, c'est à véritablement être français, pleinement. Il n'aspire pas à être intégré, il aspire à s'insérer. C'est-à-dire que là où il a connu un certain nombre de difficultés, parce qu'il maîtrisait peut-être moins bien la langue, parce qu'il avait des difficultés sociales, eh bien, il aspire à ce qu'on lui tende la main. C'est dire que la République doit très être très active, à travers des critères territoriaux par exemple, tels que les zones d'éducation prioritaire, à travers des critères sociaux, mais pas à travers des critères de races, des critères ethniques, ou des critères religieux. Si nous rentrons dans ce schéma - et c'est évidemment le risque que nous fait courir la proposition de "la discrimination positive", donner quelque chose de spécifique à quelqu'un parce qu'il a une certaine couleur de peau, parce qu'il a une certaine religion -, eh bien nous perdons l'essence républicaine. L'essence républicaine s'appuie sur la communauté nationale, sur l'idée que chacun d'entre nous est un citoyen avec des droits et des devoirs et qu'il est porteur d'une certaine dose d'universel. C'est le grand message de la France en 1789. Faisons donc vivre notre République, faisons vivre nos principes au quotidien. Par exemple, je prends le cas de mon ministère : j'ai développé ce que j'ai appelé "les cadets de la République", la possibilité pour des jeunes de milieux défavorisés, qui n'auraient jamais eu l'idée de rentrer dans les métiers de la sécurité, de la police, de la gendarmerie, des sapeurs-pompiers, d'avoir une formation en alternance à partie de 16 ans, à la fois, dans les lycées professionnels et à la fois, dans les écoles de police ou chez les sapeurs-pompiers - c'est ce que j'ai visité à Strasbourg. Eh bien, ces jeunes peuvent ainsi préparer les concours de sapeurs-pompiers, de policiers, pour pouvoir rentrer dans la police et que nous ayons ainsi une police républicaine, des institutions véritablement républicaines. Il faut tendre la main, mais ne pas le faire sur une base religieuse, ne pas le faire sur une bas ethnique, le faire sur la base de l'égalité des chances.
Q- Mais le commencer où ? Parce que, si on ne passe pas par la porte de "la discrimination positive", ne faut-il pas commencer alors dès la toute petite enfance à l'école à considérer qu'il est normal d'engager un Noir, qu'il est tout à fait légitime de lui louer un appartement etc. ?
R- Bien sûr, mais c'est un combat qui repose sur un triptyque, partant d'abord que la discrimination positive ne marche pas là où elle a été essayée, et qu'elle est même souvent abandonnée - c'est le cas très largement des Etats-Unis. Vous avez raison, il faut commencer à l'école, le plus tôt possible, dès l'école maternelle. Vous constatez qu'un enfant ne parle pas bien le français, que ses parents ne parlent pas bien le français, il faut établir une correction, il faut lui donner une chance supplémentaire. C'est tout le sens des classes relais, des classes en alternance. Nous devons mettre en place des dispositifs qui permettent à chaque étape, à l'entrée en sixième, à la sortie de l'école, dans la rentrée dans la vie active, par une politique de stages, de donner la possibilité à des jeunes défavorisés de faire des stages comme tout le monde. C'est pour cela que j'ai créé au ministère de l'Intérieur les stages avec VediorBis : j'offre 500 stages sur les métiers de la sécurité, pour découvrir cela. Et puis, il faut le faire aussi à tous les âges de la vie, parce que la discrimination existe à l'embauche, elle existe pour la recherche d'un logement, elle existe pour les loisirs, à l'entrée dans les boîtes de nuit. Cette vigilance, il faut qu'elle soit exercée partout dans la République. J'ai demandé aux préfets de me recenser dans chaque département l'ensemble des discriminations auxquelles nous faisons face. Nous avons créé avec J.-L. Borloo et D. Perben les "commissions pour l'égalité des chances", de façon à ce que travail soit fait méthodiquement. J'ai participé à la réunion d'une de ces commissions, à Lyon, et j'ai pu constater à quel point nous disposions d'une vitalité extraordinaire dans notre pays. Le monde d'associations, qui se mobilise, de jeunes chefs d'entreprise, pour donner justement une chance à l'entrée dans la vie professionnelle... J'étais à Aulnay, avec la Ligue de Paris et d'Ile-de-France de football, qui participe justement à la formation, au tutorat pour des jeunes, qui veulent exercer le métier d'animateur. Il y à là une énergie extraordinaire dans notre pays. Eh bien, cette énergie doit s'exprimer dans le cadre de la République, c'est ce que les Français demandent. Mais soyons exigeants, c'est une grande cause nationale. Et puis, bien sûr, il faut lutter contre toutes les formes de racisme et d'antisémitisme, parce que notre pacte républicain...
Q- Est-ce en augmentation ou pas ?
R- Nous avons connu, c'est vrai, au cours des dernières années, une augmentation. Mais nous nous sommes mobilisés. Et dans la deuxième partie de 2004, dans le deuxième semestre, les actes antisémites, pour prendre ceux-là, ont été divisés par trois. Et surtout, notre mobilisation pour sanctionner ces actes est maximale : 182 interpellations pour les actes antisémites l'année dernière. Et une volonté par la loi de renforcer les dispositifs contre ceux qui commettent de tels actes. Ce qui veut dire qu'à chaque infraction doit correspondre une sanction. Une fois de plus, ce qui est important dans notre société et dans notre République, c'est le respect des règles. La règle doit être respectée par chacun. C'est vrai, chaque fois qu'il y a entorse, il faut qu'il y ait une sanction proportionnée ou une réparation ou un soin. C'est ce que je veux mettre en place dans le domaine de la lutte contre la drogue ; c'est ce que je veux mettre en place dans l'ensemble des domaines, et en particulier, vis-à-vis de la politique des mineurs. Il faut que cette règle soit connue, respectée par chacun.
Q- Une dernière chose, et on est dans la complexité décidément. Comment réagit un ministre de l'Intérieur, quand on lui dit, après une enquête et que le rapport est publié, qu'il est quasiment impossible aujourd'hui de connaître l'importance de l'immigration clandestine en France ?
R- Nous ne pouvons pas connaître l'importance de cette immigration tout simplement parce qu'elle est clandestine !
Q- Mais même l'évaluation est difficile.
R- Oui, bien sûr, elle est difficile et c'est bien pour cela que nous avons décidé, dans le cadre de 2003, de nous doter d'outils et de créer un rapport qui va apporter l'ensemble des informations disponibles du côté du ministère des Affaires sociales, des Affaires étrangères, de l'Intérieur. Et c'est ce rapport que le Premier ministre va présenter dans quelques jours. Donc nous avons aujourd'hui un certain nombre de critères qui nous permettent de savoir où nous en sommes. Par exemple : baisse de la pression migratoire dans la principale frontière de France et d'Europe, qui est Roissy. Il y avait 500 demandes d'admissions en 2003 ; aujourd'hui, il y en a moins de 100. Donc baisse de cette pression migratoire. Augmentation du nombre de reconduites aux frontières, même si ce n'est pas suffisant. Et c'est pour cela que je vais présenter, au président de la République et au Premier ministre, un rapport dans quelques semaines, où je vais faire des propositions très fortes, parce que la lutte contre la lutte contre l'immigration irrégulière est décisive dans notre pays. D'abord si nous voulons donner toute leur place à nos compatriotes qui, aujourd'hui, sont en difficulté - donc c'est une condition absolue. Et puis parce que nous devons véritablement avoir une crédibilité dans ce domaine. Je viens de créer un Office de lutte contre le travail illégal pour lutter contre toutes ces formes de travail clandestin, je proposerai la création d'une véritable police de l'immigration, je proposerai la création de pôles d'immigration où les services administratifs des préfectures seront réunis avec les effectifs de sécurité - police et gendarmerie -, et je proposerai surtout un Service central de l'immigration pour que toutes les capacités du ministère des Affaires sociales, du ministère des Affaires étrangères, du ministère de l'Intérieur, du ministère de la Santé soient réunies dans une seule main. Nous avons besoin aujourd'hui d'avoir cette vision globale pour être plus efficaces. Mais c'est le grand enjeu pour moi de 2005 : faire en sorte que l'immigration irrégulière recule considérablement dans notre pays, parce que si nous voulons faire vivre notre pacte républicain, c'est le point de départ absolu.
(Source : premier-ministre, Service d'information du gouvernement, le 24 février 2005)
Bonjour,
Q- D. de Villepin. Je vous voyais sourire en écoutant le "Cartier libre" de C. Cartier..
R- .C'est un beau morceau, parce qu'il y a tout...
Q- Mais très révélateur...
R- Très révélateur, effectivement. "La Marseillaise" et le football, une Marseillaise internationale. Mais il est très important que, dans un pays comme le nôtre, qui est un pays qui a une très très longue histoire, on se souvienne et que l'on ait, ensemble, des symboles communs qui nous unissent. Nous vivons dans un monde où tout est fait pour nous différencier, nous séparer. Or, quelle que soit notre identité, quelle que soit notre sensibilité, quelle soit notre religion, la couleur de notre peau, nous appartenons tous à cette grande nation française. Et cela, il faut le faire vivre, et c'est vrai que "la Marseillaise", c'est un moment fort, c'est un moment d'émotion et il faut que tous, nous le revendiquions.
Q- On verra tout à l'heure, si cette loi de 1905 dont on célèbre aujourd'hui le centenaire, peut protéger la République des dérives auxquelles malheureusement, on assiste aujourd'hui, c'est-à-dire de certaines dérives du communautarisme, mais aussi de la montée du racisme. Mais tout de même, au républicain que vous êtes - parce que dans un entretien que publie La Vie cette semaine, vous affichez votre exigence républicaine -, je voudrais poser la question, ce matin - sans tomber dans la caricature bien entendu - la question Gaymard. Laissons l'homme de côté ; j'aimerais vous interroger sur la fonction. A ce poste-là, de cette importance-là, la situation créée ne met-elle pas monsieur Gaymard dans une situation intenable ?
R- Il y a une erreur qui a été commise et H. Gaymard en a tiré les leçons très rapidement. Le Gouvernement, le Premier ministre a fixé des règles extrêmement claires, et dans une République, dans une démocratie, je crois que c'est la clé. Chacun peut faire des erreurs, quel que soit son niveau. Plus on monte dans la hiérarchie, plus nous devons, bien sûr, être exemplaires. Mais l'important, c'est cette santé démocratique qui fait que l'on corrige à chaque étape. Alors, on peut effectivement tomber dans le camp des donneurs de leçons, de ceux qui pensent qu'il faut toujours rajouter dans l'exigence vis-à-vis de l'autre. Je crois que c'est un formidable moment pour chacun, pour regarder ce qui est bien et ce qui est moins bien. Et cet examen, il faut le faire chacun en conscience.
Q- Il n'est franchement pas question de donner des leçons - d'ailleurs qui pourrait en donner... - mais restons sur cette exigence républicaine, qui est la question du modèle. Est-ce qu'en effet, puisque faute il y a eu, ce n'est pas embêtant quand on est, encore une fois, à ce niveau-là de la responsabilité politique de continuer comme si rien ne s'était passé ?
R- Ce n'est pas tout à fait ce qui se passe, puisque H. Gaymard a dit qu'il assumait l'erreur commise, qu'il rembourserait les sommes concernées. Il ne s'agit donc pas de faire comme si rien ne s'était passé. Il s'agit bien d'en tirer les conséquences et il s'agit non seulement de cela, mais de faire mieux. C'est pour cela que le Premier ministre a fixé des règles exigeantes, très exigeantes pour le Gouvernement. Il y avait là un domaine où les choses pouvaient, à certains égards, apparaître floues. Eh bien on profite de l'expérience pour corriger, comme nous l'avions fait pour ce qui est de l'organisation du financement des partis politiques. Je crois que la République, c'est en permanence se soucier d'établir des règles valables pour chacun et qui permettent de fixer des repères.
Q- Mais ce n'est pas facile. Pour un homme comme vous, qu'allez-vous dire au petit jeune qui écoutait "la Marseillaise" tout à l'heure et qui se pose des questions sur ce que tout cela apporte au fond ? Ceux qui vont dire que maintenant, on fait des maisons à 100.000 euros pour que tout le monde, et ceux qui n'ont pas beaucoup d'argent, puissent avoir accès à cela. Sauf que l'homme qui va gérer cette situation, c'est le même Gaymard. Et là, il y a un décalage républicain qui n'est pas facile à gérer quand même...
R- C'est tout le sens d'une communauté nationale. Et dans cette communauté nationale, il faut, chacun, toujours faire mieux, toujours faire preuve de plus d'exemplarité, et quand, une fois de plus, on commet des erreurs, on les répare et il faut aller plus loin. Donc, cette
exigence d'exemplarité, elle pèsera encore plus lourd sur les épaules de H. Gaymard.
[Deuxième partie - 8h20]
Q- La loi de 1905 sur la séparation des Eglises et de l'Etat, pilier républicain dont on célèbre cette année le centenaire, protège-t-elle aujourd'hui la société française des dérives communautaristes et du racisme ? Cette loi sait-elle répondre à l'intégration de l'islam, peu ou pas présent dans le pays, au moment de l'établissement de la loi ? La question se pose après qu'un rapport de la Commission européenne contre le racisme et l'intolérance l'écrit, s'inquiète de la "ghettoïsation - pour reprendre le néologisme du rapport - des populations immigrées en France et des conséquences de ce phénomène sur l'évolution du racisme". Cette loi de 1905, ce pilier républicain nous protège-t-il aujourd'hui de ce que vous avez d'ailleurs vous-même appelé "les faits ignominieux", qu'ils se produisent à Drancy, à la Grande mosquée, qu'ils s'inscrivent parfois dans des propos outranciers ?
R- Il est un repère essentiel, il est un pilier central de la notre République. Pourquoi ? Parce que notre pays a connu, pendant des siècles, pendant des décennies, des divisions, des querelles religieuses qui ont conduit à des milliers, à des centaines de milliers de morts. Et la loi de 1905 a créé véritablement l'apaisement dans notre pays, en établissant une règle simple : la séparation des Eglises et de l'Etat, une garantie de neutralité de l'Etat, une garantie de liberté de liberté d'exercice des cultes, et une liberté de conscience. Cette règle claire est incroyablement moderne. Et quand je vois les débats qui se développent en Allemagne, en Espagne, aux Pays-Bas, je me dis que nous sommes, nous, extraordinairement chanceux de disposer d'une loi qui prend en compte, très tôt, les risques des fondamentalismes. Et cette loi, parce qu'elle organise notre société, dans le respect des uns et des autres, chacun à sa place, non pas du tout dans un esprit de laïcité de combat, comme c'était le cas à l'origine, à travers "Le petit père Combes" par exemple, mais dans l'esprit d'A. Briand, dans l'esprit de Jaurès, dans un esprit d'ouverture et de compréhension, donne toute sa place à chacun. Et nous voyons aujourd'hui, puisque c'est la question centrale : est-ce que la loi de 1905 nous permet de donner sa juste place à l'islam, qui n'était pas invité à la table de la République en 1905 ? Eh bien, la réponse c'est "oui". Nous avons, avec la loi de 1905, un outil qui nous permet de donner toute sa place à l'islam. Et c'est pour cela que j'ai proposé la création d'une Fondation privée, fondation de droit privé, qui va permettre de financer le culte musulman, c'est-à-dire, de lui donner les moyens d'avoir des salles de prière, des mosquées, de former des imams... Donc, sur ces deux questions centrales, la formation des imams et le financement des lieux de culte, la Fondation privée pourra recueillir des fonds, des dons privés, des dons en provenance de pays étrangers, qui répondront à ce besoin de financement en toute transparence, et sans rupture du pacte républicain. C'est-à-dire que ce que l'islam pourra faire en France, toutes les autres Eglises pourront le faire et peuvent le faire. Ce principe d'égalité est essentiel.
Q- Mais "ce creuset républicain", dont on a souvent parlé, fonctionne-t-il aussi bien que cela ? Ce rapport de la Communauté européenne est intrigant quand même. Il parle "d'une ghettoïsation de la société française". Est-ce une réalité à vos yeux ? Y a-t-il, en effet, des ghettos français ?
R- Quand je suis arrivé au ministère de l'Intérieur, j'ai voulu mieux comprendre un certain nombre de phénomènes qui existent dans notre pays. En particulier, j'ai demandé aux Renseignements généraux de me faire le point sur le risque, dans certains quartiers, de communautarisation ou de ghettoïsation. Et nous avons constaté qu'effectivement, dans 300 quartiers - c'est près de 2 millions de personnes, 1,7 million -, il y avait le risque de repliement sur des critères ethniques ou religieux. Si nous voulons éviter cela, ce qui est une donnée très banale dans d'autres pays - c'est une donnée commune dans des pays qui s'appuient sur le communautarisme -, il est nécessaire que nous fassions vivre les principes de notre République. Quels sont ces principes ? C'est la laïcité, c'est l'égalité des chances, c'est l'égalité entre les hommes et les femmes, parce que je constate, en me déplaçant à Lyon, à Strasbourg, qu'il y a un risque aujourd'hui dans notre pays, à travers la différence religieuse, de voir un certain nombre de jeunes de filles, un certain nombre de jeunes femmes, maltraitées, parce que, justement, elles ne seraient pas suffisamment respectueuses des règles d'une certaine interprétation rigoriste de l'islam. Ceci est inacceptable, nous devons mettre en oeuvre ces règles communes, et c'est pour cela que nous devons défendre le principe de mixité sociale, d'égalité des chances, ou d'égalité entre les hommes et les femmes. Nous ne devons pas céder un pouce de terrain là-dessus. C'est tout le sens de la loi sur les signes religieux ostensibles à l'école, c'est tout le sens du respect de l'esprit républicain dans les services publics - à l'hôpital, dans les cantines scolaires, dans les piscines... Il y a là un combat républicain qui est la seule garantie de notre unité nationale. Il n'y a pas d'autre communauté en France que nationale. Donc, cette tendance, qui est une tendance mondiale, au repli sur les communautés, il faut prendre conscience qu'en France, dans la République, il n'y a pas d'autre communauté que nationale. Et si nous nous appuyons sur la défense des communautés, si parce que, la couleur de votre peau ou votre religion déterminaient votre appartenance à une communauté et vous donnaient certains droits ou vous conduisaient à vous replier sur cette communauté, eh bien nous perdrions tout simplement l'esprit de la République.
Q- La porte est étroite pour vous, parce que, en même temps, il faut trouver le moyen, en effet, d'intégrer, et puis il y a aussi la confrontation avec la réalité. Prenons des cas précis. 19ème arrondissement de Paris : une mosquée, et dans cette mosquée des jeunes, qui sont formés et qui sont envoyés aujourd'hui, d'abord en Syrie, et puis ensuite en Irak. Comment, là, "le creuset républicain" peut-il répondre à une difficulté de cette nature ?
R- C'est le problème que connaissent aujourd'hui tous les pays européens. Ce que nous connaissons, nous, aujourd'hui, dans une mosquée du 19ème arrondissement, les Anglais le connaissent eux-mêmes en Angleterre, les Espagnols en Espagne. Mais nous, on a un avantage sur eux : on a la solution. Et la solution, c'est la République ! On sait qu'en respectant nos principes républicains - promotion de l'égalité des chances, respect de la laïcité -, nous arrivons à régler ces problèmes. Et ce qui est formidable dans notre pays, c'est qu'aujourd'hui, c'est l'aspiration commune. Quand vous demandez à un jeune issu de l'immigration - j'étais à Strasbourg il y a quelques jours, à Aulnay -, ce à quoi il aspire, c'est à véritablement être français, pleinement. Il n'aspire pas à être intégré, il aspire à s'insérer. C'est-à-dire que là où il a connu un certain nombre de difficultés, parce qu'il maîtrisait peut-être moins bien la langue, parce qu'il avait des difficultés sociales, eh bien, il aspire à ce qu'on lui tende la main. C'est dire que la République doit très être très active, à travers des critères territoriaux par exemple, tels que les zones d'éducation prioritaire, à travers des critères sociaux, mais pas à travers des critères de races, des critères ethniques, ou des critères religieux. Si nous rentrons dans ce schéma - et c'est évidemment le risque que nous fait courir la proposition de "la discrimination positive", donner quelque chose de spécifique à quelqu'un parce qu'il a une certaine couleur de peau, parce qu'il a une certaine religion -, eh bien nous perdons l'essence républicaine. L'essence républicaine s'appuie sur la communauté nationale, sur l'idée que chacun d'entre nous est un citoyen avec des droits et des devoirs et qu'il est porteur d'une certaine dose d'universel. C'est le grand message de la France en 1789. Faisons donc vivre notre République, faisons vivre nos principes au quotidien. Par exemple, je prends le cas de mon ministère : j'ai développé ce que j'ai appelé "les cadets de la République", la possibilité pour des jeunes de milieux défavorisés, qui n'auraient jamais eu l'idée de rentrer dans les métiers de la sécurité, de la police, de la gendarmerie, des sapeurs-pompiers, d'avoir une formation en alternance à partie de 16 ans, à la fois, dans les lycées professionnels et à la fois, dans les écoles de police ou chez les sapeurs-pompiers - c'est ce que j'ai visité à Strasbourg. Eh bien, ces jeunes peuvent ainsi préparer les concours de sapeurs-pompiers, de policiers, pour pouvoir rentrer dans la police et que nous ayons ainsi une police républicaine, des institutions véritablement républicaines. Il faut tendre la main, mais ne pas le faire sur une base religieuse, ne pas le faire sur une bas ethnique, le faire sur la base de l'égalité des chances.
Q- Mais le commencer où ? Parce que, si on ne passe pas par la porte de "la discrimination positive", ne faut-il pas commencer alors dès la toute petite enfance à l'école à considérer qu'il est normal d'engager un Noir, qu'il est tout à fait légitime de lui louer un appartement etc. ?
R- Bien sûr, mais c'est un combat qui repose sur un triptyque, partant d'abord que la discrimination positive ne marche pas là où elle a été essayée, et qu'elle est même souvent abandonnée - c'est le cas très largement des Etats-Unis. Vous avez raison, il faut commencer à l'école, le plus tôt possible, dès l'école maternelle. Vous constatez qu'un enfant ne parle pas bien le français, que ses parents ne parlent pas bien le français, il faut établir une correction, il faut lui donner une chance supplémentaire. C'est tout le sens des classes relais, des classes en alternance. Nous devons mettre en place des dispositifs qui permettent à chaque étape, à l'entrée en sixième, à la sortie de l'école, dans la rentrée dans la vie active, par une politique de stages, de donner la possibilité à des jeunes défavorisés de faire des stages comme tout le monde. C'est pour cela que j'ai créé au ministère de l'Intérieur les stages avec VediorBis : j'offre 500 stages sur les métiers de la sécurité, pour découvrir cela. Et puis, il faut le faire aussi à tous les âges de la vie, parce que la discrimination existe à l'embauche, elle existe pour la recherche d'un logement, elle existe pour les loisirs, à l'entrée dans les boîtes de nuit. Cette vigilance, il faut qu'elle soit exercée partout dans la République. J'ai demandé aux préfets de me recenser dans chaque département l'ensemble des discriminations auxquelles nous faisons face. Nous avons créé avec J.-L. Borloo et D. Perben les "commissions pour l'égalité des chances", de façon à ce que travail soit fait méthodiquement. J'ai participé à la réunion d'une de ces commissions, à Lyon, et j'ai pu constater à quel point nous disposions d'une vitalité extraordinaire dans notre pays. Le monde d'associations, qui se mobilise, de jeunes chefs d'entreprise, pour donner justement une chance à l'entrée dans la vie professionnelle... J'étais à Aulnay, avec la Ligue de Paris et d'Ile-de-France de football, qui participe justement à la formation, au tutorat pour des jeunes, qui veulent exercer le métier d'animateur. Il y à là une énergie extraordinaire dans notre pays. Eh bien, cette énergie doit s'exprimer dans le cadre de la République, c'est ce que les Français demandent. Mais soyons exigeants, c'est une grande cause nationale. Et puis, bien sûr, il faut lutter contre toutes les formes de racisme et d'antisémitisme, parce que notre pacte républicain...
Q- Est-ce en augmentation ou pas ?
R- Nous avons connu, c'est vrai, au cours des dernières années, une augmentation. Mais nous nous sommes mobilisés. Et dans la deuxième partie de 2004, dans le deuxième semestre, les actes antisémites, pour prendre ceux-là, ont été divisés par trois. Et surtout, notre mobilisation pour sanctionner ces actes est maximale : 182 interpellations pour les actes antisémites l'année dernière. Et une volonté par la loi de renforcer les dispositifs contre ceux qui commettent de tels actes. Ce qui veut dire qu'à chaque infraction doit correspondre une sanction. Une fois de plus, ce qui est important dans notre société et dans notre République, c'est le respect des règles. La règle doit être respectée par chacun. C'est vrai, chaque fois qu'il y a entorse, il faut qu'il y ait une sanction proportionnée ou une réparation ou un soin. C'est ce que je veux mettre en place dans le domaine de la lutte contre la drogue ; c'est ce que je veux mettre en place dans l'ensemble des domaines, et en particulier, vis-à-vis de la politique des mineurs. Il faut que cette règle soit connue, respectée par chacun.
Q- Une dernière chose, et on est dans la complexité décidément. Comment réagit un ministre de l'Intérieur, quand on lui dit, après une enquête et que le rapport est publié, qu'il est quasiment impossible aujourd'hui de connaître l'importance de l'immigration clandestine en France ?
R- Nous ne pouvons pas connaître l'importance de cette immigration tout simplement parce qu'elle est clandestine !
Q- Mais même l'évaluation est difficile.
R- Oui, bien sûr, elle est difficile et c'est bien pour cela que nous avons décidé, dans le cadre de 2003, de nous doter d'outils et de créer un rapport qui va apporter l'ensemble des informations disponibles du côté du ministère des Affaires sociales, des Affaires étrangères, de l'Intérieur. Et c'est ce rapport que le Premier ministre va présenter dans quelques jours. Donc nous avons aujourd'hui un certain nombre de critères qui nous permettent de savoir où nous en sommes. Par exemple : baisse de la pression migratoire dans la principale frontière de France et d'Europe, qui est Roissy. Il y avait 500 demandes d'admissions en 2003 ; aujourd'hui, il y en a moins de 100. Donc baisse de cette pression migratoire. Augmentation du nombre de reconduites aux frontières, même si ce n'est pas suffisant. Et c'est pour cela que je vais présenter, au président de la République et au Premier ministre, un rapport dans quelques semaines, où je vais faire des propositions très fortes, parce que la lutte contre la lutte contre l'immigration irrégulière est décisive dans notre pays. D'abord si nous voulons donner toute leur place à nos compatriotes qui, aujourd'hui, sont en difficulté - donc c'est une condition absolue. Et puis parce que nous devons véritablement avoir une crédibilité dans ce domaine. Je viens de créer un Office de lutte contre le travail illégal pour lutter contre toutes ces formes de travail clandestin, je proposerai la création d'une véritable police de l'immigration, je proposerai la création de pôles d'immigration où les services administratifs des préfectures seront réunis avec les effectifs de sécurité - police et gendarmerie -, et je proposerai surtout un Service central de l'immigration pour que toutes les capacités du ministère des Affaires sociales, du ministère des Affaires étrangères, du ministère de l'Intérieur, du ministère de la Santé soient réunies dans une seule main. Nous avons besoin aujourd'hui d'avoir cette vision globale pour être plus efficaces. Mais c'est le grand enjeu pour moi de 2005 : faire en sorte que l'immigration irrégulière recule considérablement dans notre pays, parce que si nous voulons faire vivre notre pacte républicain, c'est le point de départ absolu.
(Source : premier-ministre, Service d'information du gouvernement, le 24 février 2005)