Déclaration de M.Christian Pierret, secrétaire d'Etat à l'industrie, sur le développement de la télévision numérique et des lignes à haut débit, la reconnaissance de la signature électronique et l'accès des PME à internet, Rennes, le 17 mars 2000.

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Circonstance : Fête de l'internet, à Rennes, le 17 mars 2000

Texte intégral

Je me réjouis de pouvoir intervenir devant vous dans le cadre de la fête de l'Internet, juste après des démonstrations qui illustrent - bien mieux que des discours - les fantastiques horizons qu'ouvrent les nouvelles technologies de l'information et de la communication.
Si j'ai souhaité participer à cet événement à Rennes aujourd'hui, c'est tout d'abord que votre Région est exemplaire dans le domaine des nouvelles technologies de l'information et de la communication, exemplarité qui se traduit dans le dynamisme économique de la région. Je viens d'en avoir encore la preuve auprès d'industriels de la région Bretagne que je viens de rencontrer. Je souhaite aujourd'hui devant vous mesurer l'ampleur du chemin parcouru en deux ans et demi en faveur de la société de l'information sous l'égide de Lionel Jospin, Premier ministre, et détailler les étapes qui jalonneront notre action en 2000. Industrie et télécommunication sont au cur de cette révolution numérique que nous vivons et de la nouvelle croissance qu'elle génère. Responsable de ces secteurs, il m'incombe une responsabilité particulière que je résumerais ainsi :
" Une société de l'information au bénéfice de tous ". Aujourd'hui je souhaite me concentrer sur 3 thèmes concrets qui illustrent cette ambition, au service de nos concitoyens, de nos entreprises et de notre pays : (1) la télévision numérique, (2) l'adaptation de notre droit à la société de l'information, (3) le soutien aux entreprises du secteur. (1)
La télévision numérique de terre : aspects technologiques et industriels Très concrètement, après les démonstrations que nous avons eu le plaisir de regarder, je voudrais tout d'abord évoquer le passage de la télévision analogique à la télévision numérique. Les pouvoirs publics ont décidé de soumettre à l'Assemblée Nationale, dans le cadre du projet de loi audiovisuelle en discussion, des propositions visant à permettre l'introduction de la télévision hertzienne numérique terrestre. De nombreux pays se sont déjà orientés vers la télévision hertzienne numérique terrestre - ou vont le faire sous peu.
La France, après les Etats-Unis, le Royaume Uni, la Suède et l'Espagne, s'engage donc elle aussi dans cette voie. Il s'agit d'un changement fort, que les pouvoirs publics entendent conduire avec détermination pour qu'il profite à l'ensemble des téléspectateurs français. Pour cela, le gouvernement souhaite mettre en place les conditions réglementaires les plus favorables à l'engagement résolu de l'ensemble des acteurs économiques. Catherine Trautmann, Ministre de la Culture et de la Communication aura l'occasion de s'exprimer aujourd'hui sur ce thème à Paris. En matière d'offre de programmes et de services, il reviendra ainsi au Conseil Supérieur de l'Audiovisuel de veiller au pluralisme de l'offre ainsi qu'à la diffusion de programmes intéressant un large public. Les avantages pour le citoyen de cette utilisation des technologies numériques dans le monde audiovisuel sont immédiats.
Je voudrais les détailler ici pour la première fois devant vous : - l'offre va se diversifier, du fait de la multiplication des programmes permises par une exploitation plus efficace des fréquences radio : au lieu de 6 chaînes actuellement, ce ne sont pas moins de 36 chaînes qui pourront être reçues, permettant notamment d'accorder une place plus importante aux événements de proximité ; - la qualité de la réception de la télévision s'en trouvera aussi considérablement augmentée puisqu'elle bénéficiera de la technologie numérique dont nous venons de découvrir la qualité, grâce au savoir-faire de TDF à qui je rends hommage et dont je salue la mobilisation autour de la numérisation de la diffusion. J'ajoute - et c'est un élément d'information important - que dans la très grande majorité des cas cette réception pourra être réalisée par l'antenne actuelle sans modification particulière, avec une augmentation particulièrement nette de la qualité pour tous ceux qui utilisent une antenne d'appartement ;
Enfin, cette évolution ouvre potentiellement la voie au développement de services nouveaux et interactifs : guide électronique de programmes offrant aux téléspectateurs des informations sur les programmes, jusqu'à des services plus interactifs proposés dans le cadre d'émissions spécialisées. L'expérimentation de France 3 avec France Télécom en Bretagne qui vient de nous être présentée montre tout le champ nouveau qui est ainsi ouvert. Je souhaite aujourd'hui répondre plus particulièrement à deux questions qui me paraissent essentielles pour les téléspectateurs : -
Qui pourra avoir accès à la télévision numérique et dans quels délais ? La planification des fréquences reste à conduire, mais il est d'ores et déjà possible d'espérer une évolution rapide de la couverture du territoire. La majeure partie des services pourrait être reçue dès la fin 2003 par 80% de la population et dès la fin 2005 par 90% de la population. C'est là un objectif ambitieux sur lequel les pouvoirs publics souhaitent la mobilisation de tous les acteurs concernés. Le gouvernement se propose d'ailleurs de réaliser un examen de la dynamique de croissance de l'hertzien numérique en 2005 pour en tirer des conclusions.
L'arrêt à terme de la diffusion analogique en France pourra être envisagé dès lors que les technologies numériques assureraient une couverture équivalente à celle des services actuellement disponibles par voie hertzienne analogique. - Sur quels récepteurs de télévision sera accessible la télévision numérique de terre ? Le développement du marché sera assuré si les téléspectateurs peuvent acquérir des téléviseurs numériques terrestre à un prix voisin du téléviseur analogique. Je me réjouis à ce titre de l'engagement des constructeurs d'électronique grand public de mettre sur le marché des récepteurs numériques à un prix permettant au plus grand nombre de s'équiper. Ces téléviseurs pourront également profiter des avancées technologies en matière de portabilité (possibilité d'utiliser à l'intérieur d'un logement des récepteurs sans fil), voire de la mobilité (possibilité d'utiliser des récepteurs fixes par exemple dans des moyens de transports). Il me paraît enfin indispensable que l'ensemble des récepteurs soient compatibles avec l'ensemble des programmes.
C'est pourquoi j'ai proposé aux différents acteurs de travailler conjointement à la définition de conditions techniques assurant cette compatibilité. Tous ces aspects font du passage à la télévision numérique l'une des actions majeures qui contribueront au succès et à la démocratisation de la Société de l'Information dans notre pays. (2) l'adaptation de notre cadre juridique à la société de l'information : Je me réjouis de pouvoir évoquer en détail cette question aujourd'hui puisque c'est celle qui nous réunit pour ce débat. Futurs juristes, futurs acteurs de l'entreprise, déjà citoyens, l'adaptation de notre cadre juridique vous concerne tout particulièrement.
Le Premier ministre a annoncé en août dernier que la France adapterait son droit à l'essor de la société de l'information. J'ai lancé en octobre dernier une consultation publique à cet effet, avec le Ministre de l'Economie, des Finances et de l'Industrie et en étroite association avec la Garde des Sceaux et la Ministre de la Culture et de la Communication, sur la base d'un document d'orientation. Je vous annonce aujourd'hui que la synthèse de cette consultation publique sera disponible en ligne dès ce week-end et je souhaite vous présenter les principales orientation que je retiens de cette consultation : La consultation publique est un succès : saluée par tous comme un nouveau moyen de faire vivre le débat démocratique grâce à un forum en ligne notamment, elle a rencontré un large écho tant auprès des utilisateurs d'Internet qu'auprès des acteurs économiques et des fournisseurs de contenu. Près de 400 contributions ont été reçues.
Les douze tables rondes ont permis de réunir environ 250 participants venant d'horizons divers, qu'il s'agisse d'associations, notamment d'élus, d'entreprises ou encore de particuliers. Au delà de ces aspects quantitatifs, la qualité des échanges a permis de débattre en profondeur des orientations proposées par le gouvernement, d'en valider les grandes lignes, d'enrichir sur de nombreux aspects pratiques la réflexion du Gouvernement et d'appeler son attention sur des sujets qui n'avaient pas été mentionnés dans le document d'orientation. Parmi les sujets nouveaux évoqués dans le cadre de la consultation, je voudrais citer celui des ventes aux enchères en ligne pour lequel un dispositif juridique sera proposé très prochainement avec pour objectif d'assurer la dynamique de cette activité en France sans remettre en cause la protection du patrimoine et des consommateurs. Au titre des approfondissements apportés par la consultation publique, je voudrais citer la demande clairement formulée d'une information très fine sur les vrais risques encourus lors d'un achat en ligne et sur les sanctions applicables en cas d'acte de piratage, sanction élevées au titre de la loi anti-contrefaçon.
La confiance des consommateurs et des fournisseurs de contenu suppose une transparence exigeante sur les réseaux. De même, la table ronde sur la durée de conservation des données de connexion a permis de recueillir des avis, témoignages et expertises qui seront précieux pour le débat à venir sur cette question sensible en termes de libertés publiques. D'une manière générale, la consultation publique a ainsi permis de valider les orientations proposées par le Gouvernement que je souhaite ici confirmer : - Internet n'est pas un espace de non droit. Les principes de notre droit s'appliquent en ligne s'agissant par exemple de la protection des mineurs, de la vie privée ou encore du consommateur.
En revanche, les modalités concrètes qui permettront d'appliquer ces principes efficacement à Internet doivent être précisées par la loi chaque fois que le société de l'information crée un contexte nouveau comme c'est la cas par exemple pour le rôle des intermédiaires techniques ; - La société de l'information et Internet doivent reposer sur la responsabilisation des acteurs et la confiance des utilisateurs. Responsabilisation, confiance tels sont les traits saillants d'une étude du Service des études et statistiques industrielles que je rend publique aujourd'hui dans le cadre de la fête de l'internet. Il en ressort notamment que si 10% des Français étaient connectés à partir de leur domicile en 1999, près de 20% supplémentaires ont l'intention de se connecter au cours de l'année 2000 à partir de leur domicile. Ce chiffre est cohérent avec le taux d'équipement des ménages en micro-ordinateurs (plus d'un ménage sur 4) à la fin 1999. -
La dimension internationale et en particulier européenne, de la société de l'information doit être prise en compte. Je voudrais à ce titre souligner l'accord politique intervenu entre les membres de l'Union européenne sur une très importante directive concernant le commerce électronique : elle permet de clarifier le droit applicable en cas de transaction en ligne entre pays membres de l'Union européenne et précise les obligations de transparence en matière de commerce électronique afin de renforcer la protection des consommateurs.
L'adaptation de notre droit à la société de l'information est maintenant en cours à vitesse accélérée : - un ensemble de texte a été examiné par le Parlement ou est en cours d'examen : il s'agit de la loi sur la signature électronique publiée le 14 mars au Journal officiel et qui permet de garantir la validité juridique de la signature électronique . Il s'agit de la loi audiovisuelle dans le cadre de laquelle sera présenté le dispositif juridique permettant de mettre en uvre la télévision numérique de terre ; cette loi contient également une disposition importante qui permet préciser la responsabilité des intermédiaires techniques sur les contenus qu'ils véhiculent ou mettent à la disposition du public. Les compléments apportés à son texte par le député Patrick Bloche nous rapprochent des dispositions prévues à cet égard dans le projet de directive européenne sur le commerce électronique. Il s'agit enfin d'un certain nombre de textes qui seront prochainement présentés au Parlement, qu'il s'agisse de la protection des données à caractère personnel ou encore de l'adaptation du cadre réglementaire des télécommunications aux directives existantes. -
Comme vous le voyez, l'action du gouvernement est de rechercher en permanence le cadre le plus adapté à l'évolution de notre société, au fur et à mesure de l'évolution des technologies. C'est aussi la ligne que je mets en oeuvre pour le développement de l'accès à hauts débits. Dans ce domaine, France Télécom a lancé un service d'accès à haut débit à l'internet, utilisant la technologie ADSL. Cette technologie permet d'améliorer considérablement les débits des lignes en cuivre traditionnelles des abonnés pour des services nécessitant de hauts débits, tout en laissant disponible la ligne téléphonique pour passer et recevoir des appels. Mais ces progrès n'auront de sens que si le plus grand nombre de personnes peuvent en bénéficier. Et, pour que ce marché se développe, il est nécessaire que tous les opérateurs qui souhaitent investir puissent participer au développement de l'internet à haut débit en utilisant la partie terminale du réseau de l'opérateur historique.
C'est ce que l'on appelle le dégroupage de la boucle locale pour lequel le Gouvernement a préparé une mesure législative qui sera très prochainement présentée au Parlement. Notre objectif est qu'il puisse être opérationnel dès le début de l'année prochaine. - Les autres questions juridiques que pose le développement de la société de l'information devront être envisagées dans leur globalité. A cette fin, je présenterai en conseil des Ministres à l'automne avec Christian Sautter et en étroite liaison avec Elisabeth Guigou et Catherine Trautmann un projet de loi sur la société de l'information. Ce projet de loi sera articulé autour de trois orientations : la liberté de communication, qui doit être au cur de la société de l'information ; l'accès du plus grand nombre aux réseaux de la société de l'information ; la sécurité et la loyauté des transactions en ligne, afin de renforcer la confiance des utilisateurs et de promouvoir la transparence sur les réseaux. (3) les aides de mon département ministériel en faveur de la société de l'information : En 2000, j'ai annoncé que mon département ministériel consacrerait 1,5 MdsF aux technologies de l'information innovantes.
A l'occasion de la fête de l'internet, je vous annonce le lancement aujourd'hui de deux initiatives : - RNRT : le réseau national de recherche en télécommunication lance aujourd'hui son appel à projet 2000, qui sera doté de 210 MF. Il permettra de soutenir des projets dans les 4 domaines suivants : Internet du futur, mobiles, accès aux réseaux, usage des hauts débits. - UCIP : L'utilisation de l'internet par les PME s'est fortement développé. Alors que moins du quart d'entre elles disposaient d'un accès à l'internet fin 1997, elles sont plus de 60 % aujourd'hui. Cependant notre marge de progression reste importante, pour que les PME utilisent pleinement les potentialités offertes par Internet, notamment dans des secteurs d'activité traditionnels.
C'est pourquoi j'ai décidé de reconduire l'appel à propositions "Utilisation Collective d'Internet par les PME (UCIP)" pour soutenir les initiatives collectives et exemplaires des PME, et ce quel que soit leur secteur d'activité. Je lance aujourd'hui l'appel à projet pour l'année 2000 auquel les entreprises pourront candidater jusqu'au 15 juin. L'an passé, l'impact de cet appel à propositions a été important et a mobilisé des secteurs très variés, comme vous le verrez sur le site web du Ministère : partout où les entreprises veulent mettre des connaissances en commun en s'appropriant l'internet, l'Etat peut les y aider.
Plus de 70 dossiers ont été soutenus en 1999 au niveau national pour un budget de 50 MF, et un nombre équivalent de projets est traité en région par les DRIRE. Enfin, j'ai le plaisir de vous annoncer aujourd'hui la mise en place du site Internet des DRIRE : il s'agit d'un portail accessible sur www.drire.gouv.fr pour le portail national et pour chaque région, par exemple la Bretagne sur www.bretagne.drire.gouv.fr.
Sur la base d'une présentation harmonisé, ces sites permettent d'ores et déjà d'accéder aux informations nécessaires sur l'activité des Drire, au niveau national ou régional ; d'ici l'été, ils permettront de télécharger les demandes d'aides financières pour les PMI, enfin les travaux seront engagés cette année pour la naissance du pendant Internet du service minitel 36.14 VTDRIRE permettant aux usagers de prendre rendez-vous dans les centres de contrôle technique des DRIRE (1,2 millions de rendez-vous annuels).
Cette initiative va dans le sens souhaité par le Gouvernement d'une administration à l'écoute des besoins des utilisateurs, moderne et efficace. Conclusion : Une société de l'information pour tous, telle est la volonté du gouvernement depuis le Programme d'action gouvernemental pour la société de l'information au sein duquel le Secrétariat d'Etat à l'Industrie joue un rôle majeur. Son ambition n'est pas seulement de préparer les innovations de demain, clé de notre compétitivité mondiale, mais aussi de faciliter l'entrée de tous nos concitoyens et de toutes nos entreprises dans la Société de l'Information. Une société de l'information pour tous : oui ; une société de l'information à deux vitesses : non. J'espère vous avoir démontré ce matin, s'il en était besoin, que le Gouvernement se donne au plan industriel, technologique et juridique, les moyens de cette ambition.

(source http://www.industrie.gouv.fr. le 22 mars 2000)