Texte intégral
J.-L. Borloo - A Nantes se tenait le Congrès des HLM. Le constat c'est que l'on n'a jamais autant construit, et qu'en même temps il y a une pénurie de logement social, et, dans le secteur social, on dit même qu'il y a une crise du logement. Ceci est-il vrai ?
F. Laborde - Oui, il y a une crise du logement. Parce qu'il y a 20 ans, on construisait 400.000 logements par an, voire 500.000, dont 80.000 logements sociaux, et puis depuis dix ans, on a fait deux fois moins. Maintenant il faut redoubler, il faut doubler - ce que l'on est en train de faire mais la machine est lente à se mettre en route. Et de plus, le retard accumulé fait qu'il y a des tensions sur le marché, et c'est ce à quoi l'on veut répondre.
Q- L'Etat va montrer l'exemple. Deux objectifs : vous "deviez", si je puis dire, un peu d'argent aux établissements de logements sociaux, vous allez en rembourser une partie ?
R- 250 millions d'euros avant la fin de l'année.
Q- Il y a aussi un certain nombre de terrains que l'Etat pourrait mettre à disposition pour construire des logements sociaux ?
R- Il y a 20 ans qu'il y a des terrains qui appartenaient à la SNCF, à l'Etat, à la RATP, surtout en Ile-de-France, qui étaient là, on ne savait pas très bien s'il fallait les vendre, on n'était pas d'accord sur le prix... Bref, on fait, et on fait tout de suite de quoi construire 20.000 logements sociaux, indépendamment que ce que construisent les HLM et les villes, parce que c'est de leur responsabilité.
Q- Vous parlez des villes. Justement, la difficulté, souvent disent celles-ci, c'est d'acheter du foncier, parce que les terrains coûtent cher, qu'ils sont amortis sur 50 ans - une durée qui semble beaucoup mais pour une ville ce n'est pas si long que cela. Que fait-on pour elles ?
R- On a décidé hier qu'il y aurait des prêts de 50 ans pour les villes qui font des réserves foncières pour le logement social.
Q- C'est-à-dire qu'elles peuvent acheter aujourd'hui et avoir une sorte de petit capital ?
R- Elles peuvent acheter aujourd'hui mais avec un prêt de la Caisse des dépôts très bas pour qu'elles remboursent sur 50 ans, ce qui est presque une éternité. Et puis surtout, dans toutes ces villes, il y a des terrains magnifiques qui en général appartiennent aux villes ou aux HLM, là où il y a la rénovation urbaine. Et j'avais proposé - le Premier ministre a accepté - que dans ces endroits-là, pour les petites maisons, pour le petit collectif, la TVA passe de 19 à 5 %, de 19,6 à 5,5. Je ne sais pas si vous vous souvenez, avec certains maires, on avait lancé "La maison à 100.000 euros". Elle a démarré dans un certain nombre de villes, une vingtaine, mais c'est tout juste. Il fallait donc un coup de main financier. Le Premier ministre a donc décidé que, dans ces sites-là, la TVA baisserait à 5,5 %, ce qui fait 15 % d'écart. Soit, pour le prix d'un logement social ou à peu près, avec un prêt à taux zéro sur une durée assez longue, ce ne sera pas plus cher pour être propriétaire de sa maison.
Q- Cela veut dire que l'on va se retrouver dans des quartiers qui vont être totalement rénovés ?
R- Oui, parce que ces quartiers où il y avait des barres, des tours, on réhabilite, on en rase une ou deux de temps en temps, on refait tous ces quartiers-là, mais de fait, ce sont de très beaux sites. Et là, on a des terrains disponibles, on peut construire tout de suite, on devrait pouvoir en construire 20.000 par an.
Q- Certains avaient imaginé que les sociétés HLM, qui sont propriétaires d'un certain nombre d'immeubles pourraient vendre une partie de ces immeubles pour avoir un peu plus de capital disponible et le réinvestir ailleurs. Est-ce une piste raisonnable ou pas ?
R- On peut le faire, et certaines le font, il faut probablement accentuer. Mais en même temps, il faut être prudent, car quand vous avez une grande barre par exemple, et que vous vendez par petits bouts, si la personne qui est à l'intérieur revend à quelqu'un d'autre, un marchand de sommeil, par exemple, cela peut déstabiliser l'immeuble. On a beaucoup de que l'on appelle de "copropriétés privées dégradées" qui sont d'anciennes HLM vendues.
Q- Des exemples ?
R- A Montfermeil, on a des copropriétés privées dégradées, c'est très difficile à gérer. Cela dit, il faut le faire, il faut avancer, les HLM sont d'accord. C'est surtout une aspiration des gens qui vivent dedans. Pas seulement un problème de financement. Il y a un certain nombre de gens qui, surtout sur du petit patrimoine, préfèreraient évidemment être propriétaires.
Q- La construction d'HLM évolue beaucoup. Aujourd'hui, on fait de plus en plus des petits immeubles, des pavillons...
R- Je voudrais vraiment en profiter pour faire un appel aux maires ou aux Français afin qu'ils disent à leur maire : les HLM, le logement conventionné, aujourd'hui c'est du très beau logement aidé financièrement. Mais c'est aussi beau que le reste. Or, tous les maires ont des employés municipaux, des employés à La Poste...
Q- C'est exactement ce que disait M. Malvy qui était ici hier.
R- ...qui ont besoin de logements conventionné. Je vous en supplie, construisez ! On a des outils. On a donné beaucoup de moyens hier aux HLM, donc il n'y a plus d'excuses financières, c'est fini.
Q- Il y a un prêt à 0 %, il y a la baisse du taux de TVA...
R- C'est invraisemblable ! Honnêtement, financièrement, c'est incroyable. Je vous en supplie ! Mesdames et Messieurs les maires, allez-y, c'est sympa les logements conventionnés. On en a tous besoin ! Savez-vous à qui cela s'adresse ? A 70 % de la population française. Et une ville ne gagne que si elle est attractive, en termes de logements. Il faut construire plus grand, plus sympa, plus adapté. On a les capacités.
Q- Un mot sur la loi Robien. Elle a été un peu critiquée par les établissements de logements sociaux. Ils disent qu'il y a eu beaucoup d'avantages fiscaux mais il n'y a pas tellement de contreparties, et du coup, les investisseurs se sont jetés sur ce dispositif, et il y a des logements qui sont inoccupés.
R- Il y a deux choses qui sont valables. La première, c'est que, quand on ne construit pas beaucoup de logements sociaux on ne construit pas non plus de logements tout court. Près de 500.000, 250.000. C'est toute la chaîne du logement qui est "embellisée ?" [sic]. Alors, Robien a permis de relancer la construction, on n'a jamais autant construit en France. On peut se poser la question de savoir s'il faut mettre des contreparties de convention sociale. Probablement que l'on va y réfléchir.
Q- Changement de casquette, parce que vous occupez du logement, mais emploi et logement sont liés. J'ai appris un nouveau mot que je livre à votre sagacité : le BPO [pour] "business process out forcing... ?"-, une expression anglaise pour dire : "Allez vous faire
voir ailleurs", en français dans le texte. Et pour être plus raisonnable, cela veut dire qu'il y a beaucoup de sociétés, notamment dans l'électronique qui diminuent leur taille en Europe pour aller investir ailleurs, notamment Hewlett-Packard, avec des licenciements importants. D. de Villepin dit : "Il faudrait que Hewlett-Packard rembourse l'argent public". Avez-vous donné de l'argent public à Hewlett-Packard ?
R- Peu, pour dire la vérité, mais quand même un peu. Et d'une manière générale, le Premier ministre souhaite que, dès lors qu'il y a manifestement ou délocalisation, j'allais dire "facile", ou tout simplement mauvais dialogue social - parce que le vrai problème de Hewlett-Packard, c'est la brutalité des choses... G. Larcher a vu l'intersyndicale, ce sont des gens avec lesquels on peut parfaitement travailler ! Qu'il y ait des mutations, on le comprend. Quand les gens ne se comportent pas dans le cadre de la loi française de janvier dernier, il est normal que l'on demande le remboursement de toutes les aides publiques.
Q- Sony annonce un plan de réduction qui pourrait toucher la France, IBM aussi. Est-ce que cela veut dire que la France est moins attractive ?
R- Pour Sony, c'est un plan mondial. Ce qui est clair, c'est qu'aujourd'hui, on est dans une mondialisation qui fait qu'il y a des pans entiers d'activités, très vite, qui se déplacent d'un endroit vers l'autre. Toyota vient d'annoncer qu'il surinvestissait en France, en créant des milliers d'emplois. De l'autre côté, et notamment dans ces secteurs de pointe, l'Inde est extrêmement attractive. Il y a des mutations...
Q- Véolia aussi a également annoncé son plan...
R- Oui, 3.000 apprentis, il y a quinze jours en France. Et vous savez qu'ils sont les leaders mondiaux sur leur secteur. Il y a des mutations rapides. C'est pour cela qu'il faut que l'on ait de la formation permanente, tout au long de la vie, pour nous adapter en permanence.
Q- Donc cela ne veut pas dire qu'il faut perdre le moral et penser que tout le monde s'en va de chez nous ?
R- Pas du tout. Mais il y a des mutations rapides...
(Source : premier-ministre, Service d'information du gouvernement, le 23 septembre 2005)
F. Laborde - Oui, il y a une crise du logement. Parce qu'il y a 20 ans, on construisait 400.000 logements par an, voire 500.000, dont 80.000 logements sociaux, et puis depuis dix ans, on a fait deux fois moins. Maintenant il faut redoubler, il faut doubler - ce que l'on est en train de faire mais la machine est lente à se mettre en route. Et de plus, le retard accumulé fait qu'il y a des tensions sur le marché, et c'est ce à quoi l'on veut répondre.
Q- L'Etat va montrer l'exemple. Deux objectifs : vous "deviez", si je puis dire, un peu d'argent aux établissements de logements sociaux, vous allez en rembourser une partie ?
R- 250 millions d'euros avant la fin de l'année.
Q- Il y a aussi un certain nombre de terrains que l'Etat pourrait mettre à disposition pour construire des logements sociaux ?
R- Il y a 20 ans qu'il y a des terrains qui appartenaient à la SNCF, à l'Etat, à la RATP, surtout en Ile-de-France, qui étaient là, on ne savait pas très bien s'il fallait les vendre, on n'était pas d'accord sur le prix... Bref, on fait, et on fait tout de suite de quoi construire 20.000 logements sociaux, indépendamment que ce que construisent les HLM et les villes, parce que c'est de leur responsabilité.
Q- Vous parlez des villes. Justement, la difficulté, souvent disent celles-ci, c'est d'acheter du foncier, parce que les terrains coûtent cher, qu'ils sont amortis sur 50 ans - une durée qui semble beaucoup mais pour une ville ce n'est pas si long que cela. Que fait-on pour elles ?
R- On a décidé hier qu'il y aurait des prêts de 50 ans pour les villes qui font des réserves foncières pour le logement social.
Q- C'est-à-dire qu'elles peuvent acheter aujourd'hui et avoir une sorte de petit capital ?
R- Elles peuvent acheter aujourd'hui mais avec un prêt de la Caisse des dépôts très bas pour qu'elles remboursent sur 50 ans, ce qui est presque une éternité. Et puis surtout, dans toutes ces villes, il y a des terrains magnifiques qui en général appartiennent aux villes ou aux HLM, là où il y a la rénovation urbaine. Et j'avais proposé - le Premier ministre a accepté - que dans ces endroits-là, pour les petites maisons, pour le petit collectif, la TVA passe de 19 à 5 %, de 19,6 à 5,5. Je ne sais pas si vous vous souvenez, avec certains maires, on avait lancé "La maison à 100.000 euros". Elle a démarré dans un certain nombre de villes, une vingtaine, mais c'est tout juste. Il fallait donc un coup de main financier. Le Premier ministre a donc décidé que, dans ces sites-là, la TVA baisserait à 5,5 %, ce qui fait 15 % d'écart. Soit, pour le prix d'un logement social ou à peu près, avec un prêt à taux zéro sur une durée assez longue, ce ne sera pas plus cher pour être propriétaire de sa maison.
Q- Cela veut dire que l'on va se retrouver dans des quartiers qui vont être totalement rénovés ?
R- Oui, parce que ces quartiers où il y avait des barres, des tours, on réhabilite, on en rase une ou deux de temps en temps, on refait tous ces quartiers-là, mais de fait, ce sont de très beaux sites. Et là, on a des terrains disponibles, on peut construire tout de suite, on devrait pouvoir en construire 20.000 par an.
Q- Certains avaient imaginé que les sociétés HLM, qui sont propriétaires d'un certain nombre d'immeubles pourraient vendre une partie de ces immeubles pour avoir un peu plus de capital disponible et le réinvestir ailleurs. Est-ce une piste raisonnable ou pas ?
R- On peut le faire, et certaines le font, il faut probablement accentuer. Mais en même temps, il faut être prudent, car quand vous avez une grande barre par exemple, et que vous vendez par petits bouts, si la personne qui est à l'intérieur revend à quelqu'un d'autre, un marchand de sommeil, par exemple, cela peut déstabiliser l'immeuble. On a beaucoup de que l'on appelle de "copropriétés privées dégradées" qui sont d'anciennes HLM vendues.
Q- Des exemples ?
R- A Montfermeil, on a des copropriétés privées dégradées, c'est très difficile à gérer. Cela dit, il faut le faire, il faut avancer, les HLM sont d'accord. C'est surtout une aspiration des gens qui vivent dedans. Pas seulement un problème de financement. Il y a un certain nombre de gens qui, surtout sur du petit patrimoine, préfèreraient évidemment être propriétaires.
Q- La construction d'HLM évolue beaucoup. Aujourd'hui, on fait de plus en plus des petits immeubles, des pavillons...
R- Je voudrais vraiment en profiter pour faire un appel aux maires ou aux Français afin qu'ils disent à leur maire : les HLM, le logement conventionné, aujourd'hui c'est du très beau logement aidé financièrement. Mais c'est aussi beau que le reste. Or, tous les maires ont des employés municipaux, des employés à La Poste...
Q- C'est exactement ce que disait M. Malvy qui était ici hier.
R- ...qui ont besoin de logements conventionné. Je vous en supplie, construisez ! On a des outils. On a donné beaucoup de moyens hier aux HLM, donc il n'y a plus d'excuses financières, c'est fini.
Q- Il y a un prêt à 0 %, il y a la baisse du taux de TVA...
R- C'est invraisemblable ! Honnêtement, financièrement, c'est incroyable. Je vous en supplie ! Mesdames et Messieurs les maires, allez-y, c'est sympa les logements conventionnés. On en a tous besoin ! Savez-vous à qui cela s'adresse ? A 70 % de la population française. Et une ville ne gagne que si elle est attractive, en termes de logements. Il faut construire plus grand, plus sympa, plus adapté. On a les capacités.
Q- Un mot sur la loi Robien. Elle a été un peu critiquée par les établissements de logements sociaux. Ils disent qu'il y a eu beaucoup d'avantages fiscaux mais il n'y a pas tellement de contreparties, et du coup, les investisseurs se sont jetés sur ce dispositif, et il y a des logements qui sont inoccupés.
R- Il y a deux choses qui sont valables. La première, c'est que, quand on ne construit pas beaucoup de logements sociaux on ne construit pas non plus de logements tout court. Près de 500.000, 250.000. C'est toute la chaîne du logement qui est "embellisée ?" [sic]. Alors, Robien a permis de relancer la construction, on n'a jamais autant construit en France. On peut se poser la question de savoir s'il faut mettre des contreparties de convention sociale. Probablement que l'on va y réfléchir.
Q- Changement de casquette, parce que vous occupez du logement, mais emploi et logement sont liés. J'ai appris un nouveau mot que je livre à votre sagacité : le BPO [pour] "business process out forcing... ?"-, une expression anglaise pour dire : "Allez vous faire
voir ailleurs", en français dans le texte. Et pour être plus raisonnable, cela veut dire qu'il y a beaucoup de sociétés, notamment dans l'électronique qui diminuent leur taille en Europe pour aller investir ailleurs, notamment Hewlett-Packard, avec des licenciements importants. D. de Villepin dit : "Il faudrait que Hewlett-Packard rembourse l'argent public". Avez-vous donné de l'argent public à Hewlett-Packard ?
R- Peu, pour dire la vérité, mais quand même un peu. Et d'une manière générale, le Premier ministre souhaite que, dès lors qu'il y a manifestement ou délocalisation, j'allais dire "facile", ou tout simplement mauvais dialogue social - parce que le vrai problème de Hewlett-Packard, c'est la brutalité des choses... G. Larcher a vu l'intersyndicale, ce sont des gens avec lesquels on peut parfaitement travailler ! Qu'il y ait des mutations, on le comprend. Quand les gens ne se comportent pas dans le cadre de la loi française de janvier dernier, il est normal que l'on demande le remboursement de toutes les aides publiques.
Q- Sony annonce un plan de réduction qui pourrait toucher la France, IBM aussi. Est-ce que cela veut dire que la France est moins attractive ?
R- Pour Sony, c'est un plan mondial. Ce qui est clair, c'est qu'aujourd'hui, on est dans une mondialisation qui fait qu'il y a des pans entiers d'activités, très vite, qui se déplacent d'un endroit vers l'autre. Toyota vient d'annoncer qu'il surinvestissait en France, en créant des milliers d'emplois. De l'autre côté, et notamment dans ces secteurs de pointe, l'Inde est extrêmement attractive. Il y a des mutations...
Q- Véolia aussi a également annoncé son plan...
R- Oui, 3.000 apprentis, il y a quinze jours en France. Et vous savez qu'ils sont les leaders mondiaux sur leur secteur. Il y a des mutations rapides. C'est pour cela qu'il faut que l'on ait de la formation permanente, tout au long de la vie, pour nous adapter en permanence.
Q- Donc cela ne veut pas dire qu'il faut perdre le moral et penser que tout le monde s'en va de chez nous ?
R- Pas du tout. Mais il y a des mutations rapides...
(Source : premier-ministre, Service d'information du gouvernement, le 23 septembre 2005)