Texte intégral
Je suis particulièrement heureux d'être parmi vous aujourd'hui.
En effet au-delà du caractère convivial de cette manifestation, elle me donne l'occasion, et ce trois mois après ma prise de fonction, de rencontrer une communauté professionnelle qui joue un rôle majeur pour le développement et l'aménagement de nos villes et de nos territoires. C'est aussi pour moi l'occasion de vous dire quelques-unes des orientations que j'entends donner à mon action en matière d'urbanisme.
Cette rencontre annuelle a su s'imposer au fil des ans comme un élément fort des échanges entre les différentes composantes de votre profession. En confrontant vos pratiques et en construisant des références communes, vous donnez bien sûr une visibilité à votre activité mais surtout vous consolidez des savoirs et des compétences au service des élus et de nos concitoyens.
Vous avez cette année, axé votre réunion sur l'attractivité des territoires. C'est un sujet essentiel car les territoires et les villes sont désormais en compétition au niveau européen mais aussi mondial. Leur avenir dépend de plus en plus de leur capacité à attirer les hommes et les entreprises. Vous allez réfléchir sur les facteurs multiples qui conditionnent cette attractivité qu'ils soient économiques, esthétiques, environnementaux, sociaux, culturels ou liés à la capacité des territoires à mener des politiques de qualité urbaine, en bref, à leur capacité de conduire un authentique développement durable.
Pour ma part j'insisterai sur quelques enjeux fondamentaux auxquels nos villes sont confrontées :
- Une polarisation du développement sur les "marges" du territoire national et tout particulièrement sur le littoral. Il y a peu, le chef de l'Etat a rappelé, à l'occasion du 30ème anniversaire du conservatoire du littoral, toute l'importance d'une politique de préservation et d'une gestion intégrée du littoral.
- Une périurbanisation mal maîtrisée autour des agglomérations dont les dernières données de l'INSEE montrent qu'elle ne se ralentit pas et qu'elle s'éloigne de plus en plus des centres urbains. Je suis particulièrement frappé par l'accélération de ce phénomène, en particulier autour de petites agglomérations et du développement des deuxièmes voire troisième couronnes. Ce mode de développement va se trouver confronté à un triple défi : celui de la lutte contre les émissions de gaz à effet de serre, celui de l'augmentation inéluctable du prix de l'énergie, alors que ce modèle urbain est fondé sur une énergie peu chère, et celui du vieillissement de la population.
- La difficulté à répondre aux besoins de construction de logement (notamment mais pas uniquement sociaux et intermédiaires) dans les zones où le marché est le plus tendu. Ces difficultés ne posent pas seulement la question de l'adéquation de l'offre à la demande, mais pèsent également sur la capacité des acteurs publics à contrecarrer les phénomènes de ségrégation sociale qui sont puissamment à l'uvre tout particulièrement dans les quartiers de la "politique de la ville".
- Enfin, en dépit des progrès de l'intercommunalité, l'extension des bassins de vie bien au-delà des périmètres des communautés d'agglomération, appelle des modes nouveaux de gouvernance des systèmes urbains, notamment dans les grandes métropoles, qu'il nous reste dans une large mesure à inventer.
Face à ces enjeux, l'action sur la ville doit être ambitieuse et volontariste. Elle doit combiner stratégie d'une part, action opérationnelle d'autre part. Enfin elle doit articuler les différentes échelles, de l'aire urbaine au quartier. La multiplication des schémas de cohérence territoriale, les SCOT, traduit une véritable et spectaculaire renaissance de la planification stratégique. Ces démarches sont bien évidemment portées par les communes et les intercommunalités, mais l'Etat doit en être partie prenante à un double titre :
- En assurant là où il y a des enjeux, un rôle de régulation et de mise en cohérence aux échelles de territoires dépassant les aires des SCOT ou regroupant plusieurs SCOT. L'élaboration des directives territoriales d'aménagement (DTA) relève de cette fonction. Des démarches de ce type, mais avec des processus associant pleinement les acteurs locaux et ne débouchant pas nécessairement sur des documents à portée juridique, méritent d'être impulsées sur d'autres territoires que ceux des actuelles DTA.
- En faisant pleinement valoir dans le cadre de son association à l'élaboration des SCOT les enjeux dont il est le garant et notamment ceux du développement durable. L'Etat doit veiller également à ce que les SCOT soient suffisamment ambitieux pour permettre les évolutions démographiques et économiques de la décennie à venir.
Au delà, je crois qu'il faut lancer deux chantiers essentiels :
1- Il nous faut repenser la manière dont nous organisons le développement urbain pour prendre en compte le coût pour les citoyens et la collectivités. Pour les ménages, le budget transport + logement peut représenter, actuellement, près de la moitié des ressources. Avec la hausse du pétrole, cela ne sera plus tenable très longtemps. De même, pour le coût induit pour la collectivité des différentes formes urbaines doit être réfléchi. Il me semble que les urbanistes devront travailler sur cette question et proposer aux élus des solutions innovantes dont les coûts de fonctionnement soient économiquement viables pour les habitants et les communes.
A titre d'exemple, certains communes ont montré comment allier densité urbaine, qualité architecturale et maison individuelle, conciliant ainsi l'exigence économique d'une plus grande compacité, qualité de vie et le désir profond de nos concitoyens pour une vie en habitat individuel. Il faut continuer dans cette voie et l'Etat fera tout pour promouvoir ces pratiques.
2- Second chantier : L'appréhension de la question des métropoles. Mon ministère doit mieux travailler avec vous sur cet objet singulier qu'est la fabrique, le fonctionnement et la régénération des grands métropoles. Il nous faut bâtir de nouveaux concepts, de nouveaux outils sur les structurations de ces territoires entièrement urbanisés. Je crois, ici aussi, que l'approche économique doit être creusée. Le marché de l'immobilier tertiaire est mal connu. Nous anticipons mal l'impact des grands équipements structurants (infrastructures, hôpitaux, grands centres de bureaux) sur le tissus urbain et la valorisation des espaces. Or, l'implantation des grands équipements est un outils essentiel de politique urbains. Je crois que ce travail important et difficile sur la question métropolitaine servira également aux agglomérations moyennes pour forger de nouveaux concepts de planification territoriale. Je souhaite que mon ministère s'y attelle.
Puisque nous sommes à Montpellier, j'insisterai plus particulièrement sur l'importance qui s'attache, dans les espaces littoraux, à une planification stratégique de qualité. Plus qu'ailleurs, l'acuité des problèmes nécessite une mise en cohérence volontariste des politiques de transport et de déplacement, d'habitat, de protection et d'aménagement de l'espace et de développement économique. C'est le sens des dynamiques enclenchées à l'occasion des DTA et des SCOT littoraux. Elles sont aussi l'occasion de renouer avec l'esprit et l'ambition de la loi littoral que le chef de l'Etat mentionnait, il y a peu, comme je l'ai précédemment rappelé.
Je demanderai aux DDE et aux DRE concernées d'en faire une priorité de leur action. Par ailleurs une plaquette à destination des élus sera diffusée sous peu, pour les sensibiliser sur ces sujets.
En ce qui concerne l'action opérationnelle les démarches de projets urbains, souvent de très grande qualité, se généralisent et témoignent de la capacité des élus, des concepteurs et des opérateurs à mener des opérations parfois complexes dont certaines servent de référence au-delà de nos frontières.
La création de quartiers périphériques et l'aménagement des centres historiques ont longtemps été les modes de faire privilégiés de l'action opérationnelle sur la ville. Mais ces modes de faire ne suffisent plus à répondre aux besoins contemporains. La réponse passe souvent aujourd'hui par la recomposition du territoire urbain à la frange des centres, pour en faire des lieux attractifs en termes de développement économique, universitaire et culturel. Ces "nouveaux centres" constituent la nouvelle frontière de nos grandes villes. On peut citer ainsi Euralille, Lyon Confluences, l'Ile Beaulieu à Nantes, l'opération "entre Meurthe et Canal" à Nancy ou la reconquête des rives de la Gironde à Bordeaux.
Exceptionnellement l'Etat participe à des projets de ce type lorsqu'ils représentent un enjeu national d'aménagement du territoire. C'est le cas d'Euro méditerranée à Marseille. Ce sera le cas à Saint Etienne où le gouvernement a récemment décidé de lancer une grande opération
d'urbanisme soutenue par l'Etat.
Les quartiers de la "politique de la ville" sont un autre lieu où une action et un projet fort sont indispensables. Par le biais de l'ANRU, l'Etat y a insufflé une ambition et une dynamique nouvelle à hauteur des défis sociaux auxquels ces quartiers sont confrontés. La qualité, urbaine, architecturale et sociale des projets est pour ces quartiers un enjeu essentiel. Nombre d'entre vous ont à cet égard un rôle important à jouer auprès des élus et des opérateurs.
Sur le moyen terme un des facteurs essentiels de succès de l'action sur la ville et de la nécessaire relance de la construction réside dans le développement des politiques d'action foncière. L'action foncière est de la responsabilité première et de la compétence des communes; mais elle nécessite souvent de mutualiser des outils et des financements à des échelles plus vastes, sur lesquelles l'intervention de l'Etat est légitime voire indispensable. Je vais, dans les tous prochains jours, saisir les préfets de région pour relancer des réflexions avec les collectivités, réflexions qui pourraient se concrétiser, là où cela se justifie, par la création de nouveaux établissements publics fonciers.
Par ailleurs il est de la responsabilité de l'Etat de faire évoluer le cadre
juridique dans lequel s'exerce l'action des collectivités locales, pour le
simplifier, et leur apporter à elle et à l'ensemble des acteurs, la sécurité
nécessaire pour empêcher que le contentieux ne prospère à l'excès.
Je souhaite à cet égard évoquer deux chantiers :
- Après la réforme des documents d'urbanisme qui a été parachevée par Gilles de ROBIEN avec la loi "Urbanisme et Habitat", je compte mener à bien dans les prochains mois la réforme des autorisations d'urbanisme, et tout particulièrement du permis de construire. L'ordonnance correspondante sera publiée avant la fin de l'année et le décret en début d'année prochaine.
- Deuxième chantier : celui de la réforme des concessions d'aménagement, pour laquelle des dispositions législatives viennent d'être votées. Au-delà de la mise en conformité avec le droit européen, la loi introduit une nouvelle manière de penser l'intervention des aménageurs. Elle conduit à donner plus de poids à la définition préalable des objectifs d'aménagement avant mise en concurrence des aménageurs et mise au point des traités de concession. Elle induit ainsi un renforcement des études préalables.
Pour être à la hauteur des enjeux que je viens de rappeler, nous avons besoin d'une ingénierie territoriale et urbaine de qualité. Or on constate aujourd'hui un réel déficit.
Les modes d'exercice de cette ingénierie sont pluriels. Il y a besoin de davantage d'urbanistes au sein des services des communes et des intercommunalités, mais aussi dans les différents outils publics ou para publics qui interviennent auprès des collectivités locales. Je pense notamment à cet égard aux agences d'urbanisme qui jouent un rôle essentiel pour l'élaboration des politiques d'urbaines à toutes les échelles de territoire et que mon ministère continuera de soutenir activement.
Enfin et bien sûr nous avons également besoin d'un secteur libéral actif et imaginatif, assis sur des bases économiques viables.
Or, à cet égard, il faut bien le dire, les études en aménagement et en urbanisme ne sont pas toujours payées aujourd'hui à leur juste prix, freinant ainsi le développement d'un milieu professionnel à hauteur des enjeux. Ce n'est évidemment pas à vous que je vais démontrer que le coût des études urbaines est sans rapport avec le coût des erreurs qu'elles évitent ou des économies collectives qu'elles procurent. Mais comptez sur moi pour porter fermement ce message.
Vous avez su prendre un certain nombre d'initiative pour promouvoir et structurer votre profession mais aussi pour la rendre plus lisible aux yeux des donneurs d'ordre.
Je pense notamment aux actions entreprises pour structurer des réseaux régionaux ouverts aux différents modes d'exercice professionnel comme aux différentes professions.
Je pense également à l'Office Professionnel de Qualification des Urbanistes que mon ministère continuera à soutenir afin de permettre la montée en puissance du nombre d'urbanistes qualifiés. C'est à mon sens un moyen puissant de donner de la lisibilité à la profession. Je pense aussi que l'élaboration d'un référentiel métiers par cet office, va dans le bon sens .
En troisième point je voudrais parler de formation. Car qu'elle soit initiale ou continue, la formation est à la fois un vecteur de transmission des savoirs, d'acquisition de méthodes, mais aussi un facteur puissant pour permettre de constituer l'identité d'une profession.
Nos lieux de formation en urbanisme doivent acquérir une visibilité plus grande pour exister au niveau européen et être à même de constituer des pôles de ressource, de réflexion, et de croisement avec la recherche.
Pour éclairer ces questions une mission de réflexion avait été confiée par le précédent gouvernement à Jean FREBAULT et Bernard POUYET. Elle a été menée dans une large concertation. Je sais que vous avez participé à cette réflexion de façon constructive et que ces universités dans le cadre des forums professionnels vont permettre de préciser les modalités d'une rencontre plus forte entre les questions de formation, de reconnaissance et de professionnalisation des métiers de votre champ.
Le rapport me sera remis prochainement. En concertation avec le milieu professionnel, j'en examinerai les suites à donner avec le ministre chargé de l'Education Nationale et de l'Enseignement Supérieur. Je ne doute pas que nous pourrons ainsi avancer dans la voie d'une meilleure adaptation de l'offre de formation en urbanisme, aux besoins de la société et des employeurs.
Enfin promouvoir l'urbanisme c'est aussi mettre en lumière le travail des urbanistes. Le grand prix de l'Urbanisme participe depuis longtemps à cet objectif en donnant à voir de grands professionnels reconnus. Mon Ministère a lancé au côté de ce prix un palmarès qui a plus vocation à mettre en lumière la diversité des modes d'exercices, la pluralité des démarches innovantes et la pratique quotidienne des urbanistes en aidant de jeunes professionnels de talent à être reconnus.
L'élaboration de ce palmarès des jeunes urbanistes a permis une grande concertation autour de la définition des catégories et des objectifs. Elle a aussi permis de nourrir des relations plus resserrées entre professionnels de tous horizons au niveau régional et national. Elle a surtout permis de mettre au cur des questionnements la nature spécifique des compétences à mobiliser pour la conduite des projets et politiques au service des territoires.
Plus de 110 dossiers de bonne qualité nous sont parvenus démontrant la vitalité de votre profession. Le jury qui se tiendra à l'automne désignera les lauréats et j'aurai le plaisir d'annoncer les résultats à ces jeunes talents lors de la cérémonie de remise du grand prix de l'urbanisme.
Pour conclure, je me référerai à Christian de PORTZAMPARC, grand prix de l'Urbanisme 2004, qui définit l'urbanisme comme une action politique qui exige beaucoup d'intelligence partagée. Face aux défis nombreux et souvent redoutables auxquels sont confrontés nos villes et leurs élus, je ne doute pas que vous saurez apporter et partager cette intelligence.
(Source http://www.equipement.gouv.fr, le 1e septembre 2005)
En effet au-delà du caractère convivial de cette manifestation, elle me donne l'occasion, et ce trois mois après ma prise de fonction, de rencontrer une communauté professionnelle qui joue un rôle majeur pour le développement et l'aménagement de nos villes et de nos territoires. C'est aussi pour moi l'occasion de vous dire quelques-unes des orientations que j'entends donner à mon action en matière d'urbanisme.
Cette rencontre annuelle a su s'imposer au fil des ans comme un élément fort des échanges entre les différentes composantes de votre profession. En confrontant vos pratiques et en construisant des références communes, vous donnez bien sûr une visibilité à votre activité mais surtout vous consolidez des savoirs et des compétences au service des élus et de nos concitoyens.
Vous avez cette année, axé votre réunion sur l'attractivité des territoires. C'est un sujet essentiel car les territoires et les villes sont désormais en compétition au niveau européen mais aussi mondial. Leur avenir dépend de plus en plus de leur capacité à attirer les hommes et les entreprises. Vous allez réfléchir sur les facteurs multiples qui conditionnent cette attractivité qu'ils soient économiques, esthétiques, environnementaux, sociaux, culturels ou liés à la capacité des territoires à mener des politiques de qualité urbaine, en bref, à leur capacité de conduire un authentique développement durable.
Pour ma part j'insisterai sur quelques enjeux fondamentaux auxquels nos villes sont confrontées :
- Une polarisation du développement sur les "marges" du territoire national et tout particulièrement sur le littoral. Il y a peu, le chef de l'Etat a rappelé, à l'occasion du 30ème anniversaire du conservatoire du littoral, toute l'importance d'une politique de préservation et d'une gestion intégrée du littoral.
- Une périurbanisation mal maîtrisée autour des agglomérations dont les dernières données de l'INSEE montrent qu'elle ne se ralentit pas et qu'elle s'éloigne de plus en plus des centres urbains. Je suis particulièrement frappé par l'accélération de ce phénomène, en particulier autour de petites agglomérations et du développement des deuxièmes voire troisième couronnes. Ce mode de développement va se trouver confronté à un triple défi : celui de la lutte contre les émissions de gaz à effet de serre, celui de l'augmentation inéluctable du prix de l'énergie, alors que ce modèle urbain est fondé sur une énergie peu chère, et celui du vieillissement de la population.
- La difficulté à répondre aux besoins de construction de logement (notamment mais pas uniquement sociaux et intermédiaires) dans les zones où le marché est le plus tendu. Ces difficultés ne posent pas seulement la question de l'adéquation de l'offre à la demande, mais pèsent également sur la capacité des acteurs publics à contrecarrer les phénomènes de ségrégation sociale qui sont puissamment à l'uvre tout particulièrement dans les quartiers de la "politique de la ville".
- Enfin, en dépit des progrès de l'intercommunalité, l'extension des bassins de vie bien au-delà des périmètres des communautés d'agglomération, appelle des modes nouveaux de gouvernance des systèmes urbains, notamment dans les grandes métropoles, qu'il nous reste dans une large mesure à inventer.
Face à ces enjeux, l'action sur la ville doit être ambitieuse et volontariste. Elle doit combiner stratégie d'une part, action opérationnelle d'autre part. Enfin elle doit articuler les différentes échelles, de l'aire urbaine au quartier. La multiplication des schémas de cohérence territoriale, les SCOT, traduit une véritable et spectaculaire renaissance de la planification stratégique. Ces démarches sont bien évidemment portées par les communes et les intercommunalités, mais l'Etat doit en être partie prenante à un double titre :
- En assurant là où il y a des enjeux, un rôle de régulation et de mise en cohérence aux échelles de territoires dépassant les aires des SCOT ou regroupant plusieurs SCOT. L'élaboration des directives territoriales d'aménagement (DTA) relève de cette fonction. Des démarches de ce type, mais avec des processus associant pleinement les acteurs locaux et ne débouchant pas nécessairement sur des documents à portée juridique, méritent d'être impulsées sur d'autres territoires que ceux des actuelles DTA.
- En faisant pleinement valoir dans le cadre de son association à l'élaboration des SCOT les enjeux dont il est le garant et notamment ceux du développement durable. L'Etat doit veiller également à ce que les SCOT soient suffisamment ambitieux pour permettre les évolutions démographiques et économiques de la décennie à venir.
Au delà, je crois qu'il faut lancer deux chantiers essentiels :
1- Il nous faut repenser la manière dont nous organisons le développement urbain pour prendre en compte le coût pour les citoyens et la collectivités. Pour les ménages, le budget transport + logement peut représenter, actuellement, près de la moitié des ressources. Avec la hausse du pétrole, cela ne sera plus tenable très longtemps. De même, pour le coût induit pour la collectivité des différentes formes urbaines doit être réfléchi. Il me semble que les urbanistes devront travailler sur cette question et proposer aux élus des solutions innovantes dont les coûts de fonctionnement soient économiquement viables pour les habitants et les communes.
A titre d'exemple, certains communes ont montré comment allier densité urbaine, qualité architecturale et maison individuelle, conciliant ainsi l'exigence économique d'une plus grande compacité, qualité de vie et le désir profond de nos concitoyens pour une vie en habitat individuel. Il faut continuer dans cette voie et l'Etat fera tout pour promouvoir ces pratiques.
2- Second chantier : L'appréhension de la question des métropoles. Mon ministère doit mieux travailler avec vous sur cet objet singulier qu'est la fabrique, le fonctionnement et la régénération des grands métropoles. Il nous faut bâtir de nouveaux concepts, de nouveaux outils sur les structurations de ces territoires entièrement urbanisés. Je crois, ici aussi, que l'approche économique doit être creusée. Le marché de l'immobilier tertiaire est mal connu. Nous anticipons mal l'impact des grands équipements structurants (infrastructures, hôpitaux, grands centres de bureaux) sur le tissus urbain et la valorisation des espaces. Or, l'implantation des grands équipements est un outils essentiel de politique urbains. Je crois que ce travail important et difficile sur la question métropolitaine servira également aux agglomérations moyennes pour forger de nouveaux concepts de planification territoriale. Je souhaite que mon ministère s'y attelle.
Puisque nous sommes à Montpellier, j'insisterai plus particulièrement sur l'importance qui s'attache, dans les espaces littoraux, à une planification stratégique de qualité. Plus qu'ailleurs, l'acuité des problèmes nécessite une mise en cohérence volontariste des politiques de transport et de déplacement, d'habitat, de protection et d'aménagement de l'espace et de développement économique. C'est le sens des dynamiques enclenchées à l'occasion des DTA et des SCOT littoraux. Elles sont aussi l'occasion de renouer avec l'esprit et l'ambition de la loi littoral que le chef de l'Etat mentionnait, il y a peu, comme je l'ai précédemment rappelé.
Je demanderai aux DDE et aux DRE concernées d'en faire une priorité de leur action. Par ailleurs une plaquette à destination des élus sera diffusée sous peu, pour les sensibiliser sur ces sujets.
En ce qui concerne l'action opérationnelle les démarches de projets urbains, souvent de très grande qualité, se généralisent et témoignent de la capacité des élus, des concepteurs et des opérateurs à mener des opérations parfois complexes dont certaines servent de référence au-delà de nos frontières.
La création de quartiers périphériques et l'aménagement des centres historiques ont longtemps été les modes de faire privilégiés de l'action opérationnelle sur la ville. Mais ces modes de faire ne suffisent plus à répondre aux besoins contemporains. La réponse passe souvent aujourd'hui par la recomposition du territoire urbain à la frange des centres, pour en faire des lieux attractifs en termes de développement économique, universitaire et culturel. Ces "nouveaux centres" constituent la nouvelle frontière de nos grandes villes. On peut citer ainsi Euralille, Lyon Confluences, l'Ile Beaulieu à Nantes, l'opération "entre Meurthe et Canal" à Nancy ou la reconquête des rives de la Gironde à Bordeaux.
Exceptionnellement l'Etat participe à des projets de ce type lorsqu'ils représentent un enjeu national d'aménagement du territoire. C'est le cas d'Euro méditerranée à Marseille. Ce sera le cas à Saint Etienne où le gouvernement a récemment décidé de lancer une grande opération
d'urbanisme soutenue par l'Etat.
Les quartiers de la "politique de la ville" sont un autre lieu où une action et un projet fort sont indispensables. Par le biais de l'ANRU, l'Etat y a insufflé une ambition et une dynamique nouvelle à hauteur des défis sociaux auxquels ces quartiers sont confrontés. La qualité, urbaine, architecturale et sociale des projets est pour ces quartiers un enjeu essentiel. Nombre d'entre vous ont à cet égard un rôle important à jouer auprès des élus et des opérateurs.
Sur le moyen terme un des facteurs essentiels de succès de l'action sur la ville et de la nécessaire relance de la construction réside dans le développement des politiques d'action foncière. L'action foncière est de la responsabilité première et de la compétence des communes; mais elle nécessite souvent de mutualiser des outils et des financements à des échelles plus vastes, sur lesquelles l'intervention de l'Etat est légitime voire indispensable. Je vais, dans les tous prochains jours, saisir les préfets de région pour relancer des réflexions avec les collectivités, réflexions qui pourraient se concrétiser, là où cela se justifie, par la création de nouveaux établissements publics fonciers.
Par ailleurs il est de la responsabilité de l'Etat de faire évoluer le cadre
juridique dans lequel s'exerce l'action des collectivités locales, pour le
simplifier, et leur apporter à elle et à l'ensemble des acteurs, la sécurité
nécessaire pour empêcher que le contentieux ne prospère à l'excès.
Je souhaite à cet égard évoquer deux chantiers :
- Après la réforme des documents d'urbanisme qui a été parachevée par Gilles de ROBIEN avec la loi "Urbanisme et Habitat", je compte mener à bien dans les prochains mois la réforme des autorisations d'urbanisme, et tout particulièrement du permis de construire. L'ordonnance correspondante sera publiée avant la fin de l'année et le décret en début d'année prochaine.
- Deuxième chantier : celui de la réforme des concessions d'aménagement, pour laquelle des dispositions législatives viennent d'être votées. Au-delà de la mise en conformité avec le droit européen, la loi introduit une nouvelle manière de penser l'intervention des aménageurs. Elle conduit à donner plus de poids à la définition préalable des objectifs d'aménagement avant mise en concurrence des aménageurs et mise au point des traités de concession. Elle induit ainsi un renforcement des études préalables.
Pour être à la hauteur des enjeux que je viens de rappeler, nous avons besoin d'une ingénierie territoriale et urbaine de qualité. Or on constate aujourd'hui un réel déficit.
Les modes d'exercice de cette ingénierie sont pluriels. Il y a besoin de davantage d'urbanistes au sein des services des communes et des intercommunalités, mais aussi dans les différents outils publics ou para publics qui interviennent auprès des collectivités locales. Je pense notamment à cet égard aux agences d'urbanisme qui jouent un rôle essentiel pour l'élaboration des politiques d'urbaines à toutes les échelles de territoire et que mon ministère continuera de soutenir activement.
Enfin et bien sûr nous avons également besoin d'un secteur libéral actif et imaginatif, assis sur des bases économiques viables.
Or, à cet égard, il faut bien le dire, les études en aménagement et en urbanisme ne sont pas toujours payées aujourd'hui à leur juste prix, freinant ainsi le développement d'un milieu professionnel à hauteur des enjeux. Ce n'est évidemment pas à vous que je vais démontrer que le coût des études urbaines est sans rapport avec le coût des erreurs qu'elles évitent ou des économies collectives qu'elles procurent. Mais comptez sur moi pour porter fermement ce message.
Vous avez su prendre un certain nombre d'initiative pour promouvoir et structurer votre profession mais aussi pour la rendre plus lisible aux yeux des donneurs d'ordre.
Je pense notamment aux actions entreprises pour structurer des réseaux régionaux ouverts aux différents modes d'exercice professionnel comme aux différentes professions.
Je pense également à l'Office Professionnel de Qualification des Urbanistes que mon ministère continuera à soutenir afin de permettre la montée en puissance du nombre d'urbanistes qualifiés. C'est à mon sens un moyen puissant de donner de la lisibilité à la profession. Je pense aussi que l'élaboration d'un référentiel métiers par cet office, va dans le bon sens .
En troisième point je voudrais parler de formation. Car qu'elle soit initiale ou continue, la formation est à la fois un vecteur de transmission des savoirs, d'acquisition de méthodes, mais aussi un facteur puissant pour permettre de constituer l'identité d'une profession.
Nos lieux de formation en urbanisme doivent acquérir une visibilité plus grande pour exister au niveau européen et être à même de constituer des pôles de ressource, de réflexion, et de croisement avec la recherche.
Pour éclairer ces questions une mission de réflexion avait été confiée par le précédent gouvernement à Jean FREBAULT et Bernard POUYET. Elle a été menée dans une large concertation. Je sais que vous avez participé à cette réflexion de façon constructive et que ces universités dans le cadre des forums professionnels vont permettre de préciser les modalités d'une rencontre plus forte entre les questions de formation, de reconnaissance et de professionnalisation des métiers de votre champ.
Le rapport me sera remis prochainement. En concertation avec le milieu professionnel, j'en examinerai les suites à donner avec le ministre chargé de l'Education Nationale et de l'Enseignement Supérieur. Je ne doute pas que nous pourrons ainsi avancer dans la voie d'une meilleure adaptation de l'offre de formation en urbanisme, aux besoins de la société et des employeurs.
Enfin promouvoir l'urbanisme c'est aussi mettre en lumière le travail des urbanistes. Le grand prix de l'Urbanisme participe depuis longtemps à cet objectif en donnant à voir de grands professionnels reconnus. Mon Ministère a lancé au côté de ce prix un palmarès qui a plus vocation à mettre en lumière la diversité des modes d'exercices, la pluralité des démarches innovantes et la pratique quotidienne des urbanistes en aidant de jeunes professionnels de talent à être reconnus.
L'élaboration de ce palmarès des jeunes urbanistes a permis une grande concertation autour de la définition des catégories et des objectifs. Elle a aussi permis de nourrir des relations plus resserrées entre professionnels de tous horizons au niveau régional et national. Elle a surtout permis de mettre au cur des questionnements la nature spécifique des compétences à mobiliser pour la conduite des projets et politiques au service des territoires.
Plus de 110 dossiers de bonne qualité nous sont parvenus démontrant la vitalité de votre profession. Le jury qui se tiendra à l'automne désignera les lauréats et j'aurai le plaisir d'annoncer les résultats à ces jeunes talents lors de la cérémonie de remise du grand prix de l'urbanisme.
Pour conclure, je me référerai à Christian de PORTZAMPARC, grand prix de l'Urbanisme 2004, qui définit l'urbanisme comme une action politique qui exige beaucoup d'intelligence partagée. Face aux défis nombreux et souvent redoutables auxquels sont confrontés nos villes et leurs élus, je ne doute pas que vous saurez apporter et partager cette intelligence.
(Source http://www.equipement.gouv.fr, le 1e septembre 2005)