Texte intégral
Monsieur le ministre, mon cher Louis Besson,
Monsieur le Président,
Mesdames et messieurs les parlementaires,
Mesdames, messieurs,
Le Premier ministre, Monsieur Lionel JOSPIN, devait clôturer ces Etats Généraux du fret ferroviaire. Empêché, il m'a demandé de bien vouloir vous présenter ses excuses et de conclure en son nom ces Etats généraux.
Depuis 25 ans, la part du fret ferroviaire n'a cessé de décroître par rapport au transport routier : Représentant en 1970, 32% des transports de marchandises effectués dans les quinze Etats membres, la part du fret ferroviaire a aujourd'hui diminué de moitié. Certes, cette situation s'explique avec la forte baisse des trafics lourds comme les minerais ou le charbon, ou encore avec la technique du "juste à temps", largement favorable au transport routier.
Mais l'hypertrophie du mode routier, dans un contexte de croissance des besoins de déplacement, de transport de mondialisation des échanges, est de moins en moins acceptée par les populations. Elle peut même contredire à terme les qualités de souplesse et de rapidité, notamment pour les courtes distance, qui sont celles du transport routier.
La prise de conscience des dangers résultant de l'effet de serre, les crises pétrolières successives, la saturation des axes routiers, posent aujourd'hui avec force et de façon légitime la nécessité d'un rééquilibrage rail-route, ainsi qu'une prise en compte des coûts environnementaux et sociaux réels pour chaque mode de transport. Ma collègue Dominique VOYNET, Ministre de l'Aménagement du Territoire et de l'Environnement a eu largement l'occasion de l'évoquer ce matin même devant vous.
Cette évolution de l'opinion publique s'est accélérée après des catastrophes comme celles qui ont eu lieu au tunnel du MONT - BLANC et au tunnel de TAUERN en Autriche. Plus largement, le refus des risques encourus en matière de sécurité ou de santé conduit à se tourner vers des modes de transport les prenant mieux en considération. Ainsi par exemple la question de la réouverture du tunnel du Mont - Blanc aux poids lourds ne se posera plus comme avant. Elle ne pourra se faire que dans des conditions de sécurité maximale avec une régulation efficace des trafics, et surtout, avec une volonté politique, affirmée clairement, de tout mettre en uvre pour opérer des transferts de trafic sur le rail. Notre gouvernement a cette volonté. Celle - ci trouvera très bientôt à s'exprimer, pour le franchissement des Alpes.
En résumé - et cela a été particulièrement illustré au cours de ces Etats Généraux - il existe un très fort consensus en France et en Europe, sur la nécessité de mieux tirer partie des atouts du mode ferroviaire, de le développer, d'inverser les tendances du passé.
Il y a quelques semaines, le 22 novembre dernier, nous nous sommes mis d'accord, le Parlement, la Commission et les ministres des transports, sur les principes et les principales orientations d'un ensemble de directives européennes, appelées " paquet ferroviaire ", à l'issue d'une période de conciliation à la fois difficile et constructive.
Il s'agit donc aujourd'hui, dans un cadre désormais clairement fixé pour les années à venir, d'utiliser au mieux cette période de stabilité juridique pour conforter des stratégies, promouvoir et mettre au point les actions nécessaires au développement du fret ferroviaire international et, par là même conforter nos entreprises ferroviaires dans l'espace économique européen.
L'outil majeur adopté dans le " paquet ferroviaire " pour assurer le développement du trafic - outil technique mais aussi outil politique qui a permis l'émergence d'un accord - est le réseau transeuropéen de fret ferroviaire (le RTEFF dans le jargon communautaire), qui sera étendu à l'ensemble du réseau dans quelques années. Sur ce RTEFF, toute entreprise ferroviaire titulaire d'une licence pourra offrir des services de fret international, tout en laissant à chaque pays le choix de son mode d'exploitation et de son organisation ferroviaire. La garantie d'accès sera assurée.
Je suis très attaché, comme vous le voyez, à la pleine mise en uvre du Réseau Transeuropéen de Fret Ferroviaire, dont la création a été décidée à l'initiative de la France lors du conseil des ministres des transports de décembre 1999 sous Présidence finlandaise.
L'objectif est de concentrer sur ce réseau les moyens financiers de chaque Etat et de l'Europe ainsi que les actions qui permettent d'améliorer la qualité, la sécurité et la fiabilité des trafics.
L'accord sur le "paquet ferroviaire", obtenu le 22 novembre dernier, est bien une condition essentielle, une étape décisive pour mieux organiser le fret ferroviaire à l'échelle européenne. Et cela, à partir de quelques repères de qualité et d'efficacité : interopérabilité, sécurité, harmonisation tarifaire et sociale.
Ainsi, nous devons continuer à améliorer ensemble l'interopérabilité technique, organisationnelle et administrative, par de nouvelles procédures associant mieux les cheminots des différents Etats entre eux; par de nouveaux matériels à l'image des premières locomotives interopérables qui circulent entre la France et l'Italie. Et cela, en nous appuyant sur la prochaine directive en cours de mise au point.
Nous devons aussi impérativement poursuivre notre travail sur l'harmonisation des redevances d'infrastructures, à partir des premiers échanges qui ont eu lieu à propos du "paquet ferroviaire", en faveur d'une tarification au coût marginal, adaptée à la situation de concurrence.
Enfin et surtout, la mise en uvre de ce réseau européen ne pourra se faire au détriment de la sécurité ou des conditions de travail. Nous devons définir un label européen de sécurité ferroviaire, auquel devraient adhérer les entreprises assurant des trafics internationaux. Nous attendons avec intérêt le projet de directive de la Commission.
Je souhaite aussi que nous puissions examiner l'évolution des conditions sociales d'exercice des opérateurs ferroviaires, comme nous en avions convenu en décembre 1999. Ne recommençons pas l'erreur faite dans les transports routiers, où, comme nous le reprochent aujourd'hui aussi bien les salariés que les entrepreneurs, l'ouverture du trafic s'est faite sans harmonisation préalable des règles sociales. Nous attendons sur ce point une initiative de la Commission.
Si l'on veut continuer à légiférer, il y a donc de la matière, avec la sécurité, l'harmonisation sociale et tarifaire ou l'interopérabilité. C'est même une condition - nous l'avions dit il y a un an - de l'application du "paquet ferroviaire".
J'en viens maintenant au rôle de chacun des acteurs dans le développement du fret ferroviaire.
Les entreprises ferroviaires, tout d'abord, doivent corriger l'image de dynamisme insuffisant qui leur est souvent reprochée en matière de fret.
La question de la qualité des acheminements fret, de la régularité et de la fiabilité des trains fret, est apparue au cours de ces Etats Généraux comme une question centrale. Une amélioration dans ce domaine est impérative faute de quoi la portée des autres mesures envisagées serait très fortement amoindrie, voire réduite à néant. Nous attendons des entreprises ferroviaires, et de la SNCF pour ce qui concerne la France, qu'elles améliorent leurs prestations. La SNCF doit devenir un des opérateurs logistiques multimodal de référence en France et en Europe, la France étant, du fait de sa situation géographique et l'importance de son réseau, parmi les pays les plus attendus pour réussir.
Il faut s'attaquer aux causes de l'irrégularité. Permettez-moi d'en citer deux :
La première, c'est la vétusté ou l'insuffisance des matériels pour répondre aux sollicitations du trafic. A cet égard le gouvernement français soutient pleinement la SNCF lorsqu'elle s'engage à renouveler ou renforcer son parc de matériel. Il l'a fait en autorisant l'entreprise à prendre les décisions nécessaires à l'acquisition de plus de 600 locomotives dédiées au fret.
La seconde cause, ce sont les goulets d'étranglement du réseau ferroviaire qui produisent la congestion du trafic. Le plus souvent, la solution passe par des investissements de modernisation et de capacité des infrastructures. C'est, pour la France, l'exemple de Nîmes ou Montpellier, ou encore le noeud lyonnais, qu'il faudra bien résorber. Cette question est aussi celle des financements. J'y viendrai dans quelques instants.
Bien entendu, tout n'est pas qu'affaire d'investissements, nous le savons tous. De multiples aléas ou incidents d'exploitation peuvent provoquer des retards qui, même modestes initialement, finissent, notamment dans les zones saturées, par provoquer des perturbations plus importantes. Tout en ayant conscience qu'on ne supprimera pas par un coup de baguette magique ces aléas ou incidents d'exploitation, il est néanmoins possible de beaucoup progresser. Chaque retard, chaque événement facteur de dysfonctionnement, doivent être l'occasion de disséquer les procédures, de valider ou de changer les habitudes, en un mot de se remettre en cause pour gagner en qualité et en fiabilité des délais.
Après les entreprises ferroviaires, les gestionnaires d'infrastructure ont aussi un rôle majeur à jouer. Il s'agit, en effet, pour ces entités de fournir aux entreprises des sillons de qualité, entretenus et sécurisés, permettant de garantir la fiabilité des acheminements. Il s'agit également de gérer aux mieux les capacités des infrastructures existantes afin de dégager le plus grand nombre de sillons. Il faut en effet être conscient que les programmes de modernisation et d'adaptation de l'infrastructure ne donneront leurs pleins effets qu'à moyen terme. Or, c'est dès aujourd'hui qu'il faut agir pour développer le fret.
Il s'agit enfin de se coordonner au niveau international pour assurer la continuité des itinéraires, et surtout de se coordonner en matière de redevances d'infrastructures afin d'éviter que le niveau de redevances et les disparités d'un pays à l'autre ne constituent une barrière au développement du trafic. Nous avons - me semble - t - il progressé sur ce point lors de la conciliation sur le "paquet ferroviaire".
On le sait bien, l'international constitue incontestablement le champ de développement privilégié du mode ferroviaire. Il représente d'ailleurs 50% de l'activité fret de la SNCF. C'est pourquoi, cette démarche volontariste de la France doit s'inscrire dans un cadre résolument européen. La France s'est fixée l'objectif ambitieux de doubler son activité fret en dix ans. Pourquoi ne pas faire de cet objectif un principe d'action européen ?
J'avoue que comme Dominique Voynet, je ne comprends pas la décision de la Poste qui consiste à supprimer du trafic actuellement sur rail, le train postal Paris-Besançon.
Mais, je l'ai souvent répété, l'ouverture systématique à la concurrence intramodale ne me paraît pas la bonne solution. Au contraire j'ai toujours parié sur un développement commun, fondé sur une parfaite coopération entre les gestionnaires d'infrastructures et les entreprises ferroviaires, s'appuyant sur l'expérience, le savoir-faire et les initiatives des entreprises du secteur.
En ce sens, nous pouvons nous féliciter des initiatives prises par différentes sociétés de chemins de fer, les chemins de fer belges, luxembourgeois, italiens, la SNCF et RFF pour mettre en service au début de l'année 1998 un corridor de fret entre Anvers, Lyon, Marseille avec des prolongements vers le sud de l'Italie. D'une capacité d'une trentaine de sillons quotidiens, ce corridor baptisé "BELLIFRET" constitue la référence en la matière. Nous avons d'ailleurs profité du passage du 2000ème train en gare de Luxembourg en mai dernier pour saluer cette initiative qui contribue à développer le fret ferroviaire en Europe. Ces réalisations ont, selon moi, vocation à se généraliser. Les choses vont plus vite quand on coopère, ... parce que tout le monde y trouve son compte.
Après les entreprises ferroviaires et les gestionnaires d'infrastructures, les pouvoirs publics ont également leur part de responsabilité dans l'objectif de rééquilibrage intermodal.
Permettez moi sur ce point d'insister sur les dispositions déjà prises par notre gouvernement. La France va bientôt disposer de schémas de services collectifs de transport de marchandises et de voyageurs. C'est l'expression d'une politique des transports en nette rupture par rapport aux dispositions antérieures. Son ambition est en effet d'anticiper les réponses aux besoins de transport et de déplacement à l'horizon de 20 ans, dans des conditions compatibles avec les exigences économiques, sociales et environnementales d'un développement durable. Si l'on sait qu'il faudra des capacités supplémentaires, on sait aussi que les études, la concertation et la réalisation d'un projet fret demanderont plusieurs années.
L'une des priorités défendues au travers de la politique du gouvernement depuis 1997, inscrite dans les schémas de service, est, je l'ai dit, l'objectif de doublement du fret ferroviaire en dix ans. Mais il faudra aller plus loin.
A plus court terme, l'engagement de l'Etat et des collectivités publiques se traduit, dans le cadre des contrats de plan Etat/Régions pour la période 2000/2006, par un véritable changement d'échelle. Au total, les projets ferroviaires inscrits dans le cadre de ces contrats de plan, et destinés à développer et moderniser les infrastructures existantes, représentent un programme d'investissements de l'ordre de 33 milliards F, près de dix fois supérieur au plan précédent.
De plus, des orientations et décisions ont été prises en matière de poursuite du programme de lignes à grande vitesse. Ces projets bénéficieront directement à l'acheminement du fret en libérant de la capacité sur le réseau des lignes classiques. Ce sera le cas de la première phase du TGV EST EUROPEEN, dont les travaux seront lancés en 2001 pour une mise en service en 2OO6.
Ce sera le cas également de la ligne nouvelle mixte voyageurs et fret Perpignan - Figueras - Barcelone. Au sommet de Santander, avec mon collègue, M. ALVAREZ CASCOS, nous avions convenu que l'utilité publique de la partie française du projet serait acquise en juin 2001. Le calendrier de l'enquête publique, achevée il y a 2 mois, le permet. Nous avions aussi convenu de choisir les modalités de réalisation de la liaison. Ce sera fait à la Commission Inter-Gouvernementale (CIG) du 20 décembre, ce qui devrait permettre une mise en service de la section internationale dans des délais raisonnables, avant 2005. Cette section constituera une avancée exemplaire en matière d'interopérabilité, puisqu'elle permettra d'assurer une continuité entre les réseaux espagnols, français et italiens sur la façade méditerranéenne.
(source http://www.equipement.gouv.fr, le 14 décembre 2000)
Je voudrais maintenant aborder un sujet qui a été au cur de ces Etats généraux. Dans la perspective d'un rééquilibrage entre le rail et la route pour la traversée des Alpes, la saturation des itinéraires routiers et ferroviaires va conduire le Gouvernement à aller plus loin dans la politique de modernisation et de renfort des axes de circulation.
Je veux parler en priorité de la liaison ferroviaire transalpine Lyon-Turin, sur laquelle le gouvernement prendra très prochainement, avec le gouvernement italien, des décisions très importantes, engageant cette partie de l'Europe pour un quart de siècle. Pour ma part, j'y suis très favorable. Mon collègue, Monsieur BERSANI, que j'ai rencontré hier dans une réunion de travail l'est également. Je puis même vous indiquer que les autorités italiennes ont déjà adopté le programme des dépenses 2001-2006.
Néanmoins, dans la mesure où il s'agit de décisions bilatérales, je vous donne rendez-vous au prochain sommet franco-italien le 29 janvier prochain, ainsi qu'il en a été convenu lors des précédents sommets de Chambéry et Nîmes.
Afin d'accélérer le transfert vers le rail et de préparer les conditions d'acheminement du fret qui seront celles de la décennie future, il est nécessaire de franchir une étape technologique significative, équivalente, pour le fret ferroviaire, à ce que le TGV a représenté pour les voyageurs. Le Gouvernement a décidé de promouvoir la réalisation d'autoroutes ferroviaires permettant d'acheminer sur les trains des ensembles routiers complets : tracteurs et remorques de tout gabarit. Cette réalisation devrait être effectuée en priorité sur le franchissement des zones sensibles comme les Alpes et les Pyrénées et sur les lignes susceptibles de soulager les axes de transit autoroutiers les plus chargés.
Face aux attentes croissantes de l'opinion publique et à la volonté du gouvernement d'opérer un rééquilibrage routes / rail, face aux demandes des professionnels et de la SNCF en particulier, il est temps de franchir une étape. L'autoroute ferroviaire doit devenir une réalité. J'ai cru comprendre qu'un wagon à plateau pivotant, (exposé à proximité), est pour beaucoup dans cette évolution.
Des projets existent. Après en avoir discuté avec RFF et la SNCF, je puis vous annoncer
- comme me l'a demandé le Premier ministre - que nous allons concrètement procéder au lancement d'une politique de ferroutage dans les Alpes.
En 2002, une ou deux navettes quotidiennes pourront circuler sous le gabarit actuel de la ligne existante entre la Vallée de la Maurienne et Bussolino en Italie. La mise en place d'un service complet et cadencé interviendra dès que la ligne sera mise en gabarit B + soit vers 2005-2006. Bien entendu, les performances de ce service seront considérablement améliorées avec le franchissement en tunnel du Massif de la Chartreuse, qui pourrait préfigurer une liaison quasi dédiée au fret ferroviaire. Je suis d'avis qu'il faudrait rapidement enclencher les études d'APS du premier tube de la Chartreuse.
Je voudrais ici, préciser que la politique de ferroutage, contrairement à ce que j'ai pu lire dans la presse, n'est pas le substitut de la nouvelle liaison ferroviaire, qui sera bien à l'ordre du jour du Sommet Franco-Italien. Au contraire, c'est dans la perspective de cette nouvelle liaison que nous devons anticiper un mode d'exploitation performant.
D'autres liaisons ont aussi été évoquées, notamment par le Conseil supérieur du Service Public Ferroviaire, organisateur de cette journée. Pourquoi pas ? Toutes les initiatives sont à étudier. Ainsi le tunnel sous la Manche permet de relier le nord de l'Angleterre et le continent. Pourquoi les poids lourds quittent - ils les navettes du tunnel pour reprendre la route alors qu'ils pourraient rester sur une navette pour poursuivre leur chemin ? Pourquoi ne pas étudier un lien fret à haute performance entre les régions les plus actives du Royaume Uni et le Nord-Pas de Calais, pour faire de cette région le portail d'accès aux échanges avec les îles britanniques ?
Tout n'est pas réglé, loin s'en faut. Des questions aussi importantes que la sécurité ou les conditions d'exploitation doivent encore recevoir des réponses. C'est pourquoi j'ai décidé de mettre en place, à l'instar de ce qui existe pour les TGV, un comité de pilotage, chargé de suivre ce dossier, d'évaluer les projets et de faire des propositions, en insistant tout particulièrement sur la sécurité.
Je souhaite que tous les professionnels soient associés à la démarche qui va s'engager, les entreprises du secteur ferroviaire, et les transporteurs routiers notamment.
Je voudrais particulièrement insister sur un aspect qui n'apparaît pas forcément encore à la lecture des cartes. En y ajoutant la mise en service dès juin prochain de la ligne TGV Méditerranée et, à un horizon plus lointain, de la branche sud du TGV Rhin-Rhône, l'ensemble les projets que je viens d'évoquer constitueront la liaison ferroviaire la plus performante entre le nord et le sud de l'Europe. Ce projet, phasé au rythme de la montée en puissance du trafic, que nous avons baptisé " Magistrale Eco-Fret " constitue un bon exemple de ce qu'il conviendrait de réaliser partout en Europe, pour que le RTEFF soit en mesure de répondre aux exigences des opérateurs et des chargeurs.
Je ne voudrais pas terminer l'évocation de toutes ces opérations d'investissements sans rappeler qu'il s'agit aussi de tirer parti des infrastructures que l'histoire des chemins de fer de ces dernières décennies a oubliées. Il faut remettre en service et moderniser des lignes désaffectées ou peu utilisées, pouvant bénéficier, pour le fret, d'une réduction tarifaire, suite à la position commune adoptée en conseil des ministres transport en décembre 1999. Je citerai à cet égard la ligne Clermont - Béziers, en cours de modernisation et d'électrification pour accueillir du fret permettant de délester la vallée du Rhône. Je citerai encore la ligne Bourg - Genève, dite "ligne des Carpathes", qui sera remise en service dans le cadre du protocole Franco-Suisse sur les transports. Je citerai enfin la ligne Pau-Canfranc, à la frontière Pyrénéenne, qui devrait prochainement être remise en service avec l'objectif d'y faire passer 2 millions de tonnes de fret. Des décisions seront prises sur le scénario de réouverture de cette liaison au séminaire franco - espagnol de février prochain, tandis que des études se poursuivent sur la perspective d'une traversée centrale supplémentaire des Pyrénées, à un horizon plus éloigné.
Je veux également souligner avec force que la France est un pays de transit, souvent incontournable pour grand nombre de transporteurs internationaux. Elle est, à ce titre, soucieuse de ses responsabilités. Nous savons que la France doit investir et créer les conditions d'une plus grande fluidité du trafic, pour que le principe de libre circulation des marchandises et des voyageurs puisse trouver à s'appliquer. Mais nous ne pouvons le faire seul. Les efforts que consent la France et qu'elle va consentir dans les années à venir doivent être partagés. Par les autres Etats et par l'Union Européenne et la Commission. Sans cela, les droits d'accès ne resteraient que théoriques. Il en va de la responsabilité des Etats mais aussi de la Commission européenne.
Il est souhaitable que tous puissent participer à la réalisation d'un réseau transeuropéen de fret ferroviaire, performant, sûr et interopérable sans remettre en cause les services voyageurs existants, y compris les services régionaux. Nos concitoyens ne comprendraient ou n'admettraient pas que le développement du transport fret se fasse par suppression ou dégradation des services voyageurs. Le développement du transport ferroviaire ne vaut que s'il est partagé ainsi qu'on le proclame à la SNCF -. Tous les trafics ont vocation à se développer aux bénéfices des chargeurs, des usagers, de la cohésion des territoires et de l'environnement.
La seule réponse qui vaille est donc d'engager sans délai un programme massif d'investissements ferroviaires partout en Europe afin de rattraper le retard pris. Progressivement, la plupart des grandes agglomérations européennes bénéficient de contournements autoroutiers. Je crois qu'il est indispensable de se fixer le même objectif pour le réseau ferroviaire si l'on veut supprimer les nombreux goulets d'étranglement présents sur le réseau actuel. C'est le seul moyen de concilier les intérêts des voyageurs et ceux du fret, notamment en milieu urbain et périurbain.
Je prends acte avec intérêt du montant des crédits que la Commission va consacrer à la désaturation (750 millions d'Euros sur 5 ans). C'est effectivement très important.
Or, la programmation pluriannuelle indicative des financements européens RTE, en cours de préparation dans les services de la Commission pour la période 2001 - 2006, m'inquiète. Alors que la Commission, soutenue en cela par le Conseil, avait affiché sa volonté d'accélérer la réalisation des projets jugés prioritaires à Essen et d'encourager la résorption des goulets d'étranglement ferroviaire par une enveloppe de crédits significative, les premières propositions manifestent un certain décalage par rapport à ces objectifs.
Pour ma part, je suis convaincu que la concertation entre la Commission et les Etats membres permettra des ajustements susceptibles de mieux prendre en considération les priorités qui ont été dégagées dans les différentes instances européennes ainsi que dans ces Etats généraux. C'est à ce prix que les contraintes particulières des pays de transit pourront trouver des solutions.
Après la question des financements européens, je souhaite réagir aux travaux de l'une de vos tables rondes consacrée aux financements. C'est effectivement une grande question.
Hier matin, lorsque j'ai ouvert ces Etats Généraux, j'ai rappelé qu'un de mes principaux objectifs, en arrivant au gouvernement, avait été la recherche d'une solution durable au surendettement hérité du passé. Le gouvernement a fait alors un effort très important en désendettant la SNCF de 28 milliards F., et en s'engageant à apporter 37 milliards F. à RFF entre 1999 et 2001.
Pour autant, la question de l'apurement du passé n'est pas réglée. RFF porte encore une dette héritée de la SNCF de 120 milliards F environ. De plus, RFF doit entretenir et moderniser son patrimoine et investir de l'ordre de 7 à 8 milliards F par an sur fonds propres. Or, sa capacité d'autofinancement est négative. C'est donc à nouveau une dette qui s'accumule, de la "bonne dette", certes, quand celle-ci finance des investissements dynamiques favorisant le développement, mais de la "mauvaise dette" aussi quand il s'agit de financer les investissements de régénération qui devraient être autofinancés.
Je suis d'accord avec Jean Jacques FILLEUL. Il faut sortir de ce déséquilibre permanent, pour que RFF devienne un outil efficace de gestion et de développement du patrimoine ferroviaire.
Je sais que cela sera difficile car les sommes sont considérables. Ainsi, pour améliorer un peu la situation, il faudrait, selon les calculs des experts auditionnés par les Etats-Généraux réduire la dette de 80 à 90 Milliards F. L'ordre de grandeur est bien celui - là. Je ne saurais dire quelle est la bonne approche. Certains parlent de dotation en capital, d'autre, Jean Jacques Filleul notamment, d'une affectation des recettes attendues de l'attribution des licences de téléphonie mobile UMTS. D'autres encore évoquent un rachat d'une partie de la dette! Mais ce qui semble désormais évident à beaucoup d'entre vous, c'est cela : on ne peut plus continuer au rythme d'une dotation annuelle de 10 à 12 milliards F qui ne permettra pas d'atteindre le fond du désendettement.
Nous disposerons bientôt d'un rapport du Comité des investissements à caractère économique et sociaux sur cette question. Il faudra donc que des décisions soient prises.
Pour poursuivre sur la question du financement des investissements, la SNCF également
- vous le savez - doit beaucoup investir dans le matériel roulant. Plus de 600 locomotives seront acquises dans les 4 à 5 prochaines années, ce qui représente un volume d'achats de 8 à 9 milliards de F. Comment aider cette entreprise à financer le renouvellement de son matériel, en augmentant ses capacités d'investissement ? Certains ont évoqué la possibilité de mettre en place une aide fiscale permettant d'alléger les charges d'exploitation de l'activité fret. D'autres ont souhaité désendetter à nouveau la SNCF. Ce problème du financement des nouveaux matériels SNCF se pose dès 2002, tout comme se pose la question de l'équilibre de RFF. Pour beaucoup des acteurs du monde ferroviaire. Il est donc urgent que des solutions soient proposées.
Ce n'est qu'à partir du moment où on aura réglé le passé et restauré l'équilibre de RFF que pourra être clarifiée la difficile question des relations financières entre les 3 partenaires que sont l'Etat, RFF et la SNCF. Que ce soit le montant des péages versés par la SNCF à RFF, le montant de la contribution aux charges d'infrastructure versée par l'Etat à RFF ou celui de la convention de gestion rémunérant les services rendus à RFF par la SNCF, des règles du jeu pourront être établies de manière plus apaisée. Alors que les péages constituent un des outils de la réforme ferroviaire, ils sont aujourd'hui vécus par les uns comme un prélèvement indu sur l'amélioration de la situation de la SNCF, par d'autres comme le moyen d'atteindre un jour l'équilibre, par d'autres encore comme une recette aux vertus anti-maastrichtiennes. Ils ont perdu toute lisibilité et toute signification économique. Il est donc grand temps qu'une solution durable soit apportée au règlement financier du passé.
Pour en terminer avec les responsabilités des pouvoirs publics, mon propos sera aussi celui d'un responsable d'administration. Les inflexions apportées à la politique des transports constituent, pour le ministère de l'équipement, une petite révolution culturelle. Depuis 2 siècles, ce ministère et ses ingénieurs ont façonné le réseau routier puis autoroutier de la France. Et ce n'est que plus récemment que les autres modes de transport, notamment le ferroviaire, sont entrés dans la sphère publique. Aujourd'hui, le gouvernement a décidé - parce que la société et les élus le demandent - de rééquilibrer les modes de transports. Avec les contrats de plan entre l'Etat et les régions, l'Etat et ses services doivent se mobiliser pour accompagner le changement vers un rééquilibrage modal significatif. Cela signifie qu'il faut dégager et former des personnels pour piloter la conduite des études et l'avancement des procédures, et qu'il faut en préserver le financement.
C'est la raison pour laquelle il me semble nécessaire de mobiliser mon administration autour de cet enjeu. Je sais combien ce souci est partagé par la SNCF et ses personnels. Je sais combien les élus et les associations s'inquiètent du rythme auquel vont progresser les opérations ferroviaires des contrats de plan.
C'est pourquoi, j'ai décidé de mettre en place un délégué ministériel à l'intermodalité dans les transports. En matière de programmation des infrastructures, il sera en quelque sorte le gardien des priorités du gouvernement, le garant de leur avancée et de leur réalisation, afin que le rééquilibrage modal - dans l'affectation des ressources humaines ou financières - se fasse bien dans le sens décidé par le gouvernement.
Je voudrais conclure ces Etats-Généraux par un retour à l'Europe. La Commission prépare un projet de livre blanc sur la nouvelle politique de transport, vivement attendu. Le Conseil des ministres des transports n'aura pas l'occasion d'en débattre lors de la Présidence française. Ce serait pourtant l'occasion de poser quelques principes sur la régulation dans les zones sensibles en particulier et sur le rééquilibrage intermodal. Je forme néanmoins un voeu : que la Commission remette enfin en chantier la directive Eurovignette qui détermine la taxation applicable aux poids lourds, de manière à commencer à prendre en compte les coûts externes et à permettre - au niveau du financement aussi - ce rééquilibrage intermodal.
Je renouvelle mes remerciements et mes félicitations à M. Jean Jacques Filleul et, à travers lui, à tous les organisateurs de ces Etats Généraux particulièrement réussis. Je veux aussi remercier l'ensemble des participants, dont les nombreux ministres européens qui ont participé avec moi à la table ronde sur l'Europe, Mme Dominique VOYNET qui a clairement illustré le soutien qu'elle apportait au rééquilibrage intermodal, et Mme De PALACCIO, vice présidente de la Commission européenne qui a conclu la journée d'hier.
Suite à la suggestion que j'avais faite hier, et qui - je crois - a intéressé un grand nombre d'entre vous, je demande à Mme de Palaccio de reprendre le flambeau de ces Etats Généraux pour que ceux - ci puissent avoir une suite d'ici un an dans un pays assurant la Présidence européenne, afin que soit poursuivie la démarche entreprise par la France.
Permettez-moi également d'adresser mes remerciements aux membres du Conseil Supérieur du service public ferroviaire présidé par monsieur Jean Jacques Filleul ainsi que mes félicitations pour le travail engagé.
Nous sommes à l'aube d'une période nouvelle où le trafic ferroviaire marchandise sera synonyme de modernité, d'efficacité, et de qualité. Qualité de service, qualité de vie, qualité de civilisation !
Merci de votre attention et à bientôt !
(source http://www.equipement.gouv.fr, le 14 décembre 2000)
Monsieur le Président,
Mesdames et messieurs les parlementaires,
Mesdames, messieurs,
Le Premier ministre, Monsieur Lionel JOSPIN, devait clôturer ces Etats Généraux du fret ferroviaire. Empêché, il m'a demandé de bien vouloir vous présenter ses excuses et de conclure en son nom ces Etats généraux.
Depuis 25 ans, la part du fret ferroviaire n'a cessé de décroître par rapport au transport routier : Représentant en 1970, 32% des transports de marchandises effectués dans les quinze Etats membres, la part du fret ferroviaire a aujourd'hui diminué de moitié. Certes, cette situation s'explique avec la forte baisse des trafics lourds comme les minerais ou le charbon, ou encore avec la technique du "juste à temps", largement favorable au transport routier.
Mais l'hypertrophie du mode routier, dans un contexte de croissance des besoins de déplacement, de transport de mondialisation des échanges, est de moins en moins acceptée par les populations. Elle peut même contredire à terme les qualités de souplesse et de rapidité, notamment pour les courtes distance, qui sont celles du transport routier.
La prise de conscience des dangers résultant de l'effet de serre, les crises pétrolières successives, la saturation des axes routiers, posent aujourd'hui avec force et de façon légitime la nécessité d'un rééquilibrage rail-route, ainsi qu'une prise en compte des coûts environnementaux et sociaux réels pour chaque mode de transport. Ma collègue Dominique VOYNET, Ministre de l'Aménagement du Territoire et de l'Environnement a eu largement l'occasion de l'évoquer ce matin même devant vous.
Cette évolution de l'opinion publique s'est accélérée après des catastrophes comme celles qui ont eu lieu au tunnel du MONT - BLANC et au tunnel de TAUERN en Autriche. Plus largement, le refus des risques encourus en matière de sécurité ou de santé conduit à se tourner vers des modes de transport les prenant mieux en considération. Ainsi par exemple la question de la réouverture du tunnel du Mont - Blanc aux poids lourds ne se posera plus comme avant. Elle ne pourra se faire que dans des conditions de sécurité maximale avec une régulation efficace des trafics, et surtout, avec une volonté politique, affirmée clairement, de tout mettre en uvre pour opérer des transferts de trafic sur le rail. Notre gouvernement a cette volonté. Celle - ci trouvera très bientôt à s'exprimer, pour le franchissement des Alpes.
En résumé - et cela a été particulièrement illustré au cours de ces Etats Généraux - il existe un très fort consensus en France et en Europe, sur la nécessité de mieux tirer partie des atouts du mode ferroviaire, de le développer, d'inverser les tendances du passé.
Il y a quelques semaines, le 22 novembre dernier, nous nous sommes mis d'accord, le Parlement, la Commission et les ministres des transports, sur les principes et les principales orientations d'un ensemble de directives européennes, appelées " paquet ferroviaire ", à l'issue d'une période de conciliation à la fois difficile et constructive.
Il s'agit donc aujourd'hui, dans un cadre désormais clairement fixé pour les années à venir, d'utiliser au mieux cette période de stabilité juridique pour conforter des stratégies, promouvoir et mettre au point les actions nécessaires au développement du fret ferroviaire international et, par là même conforter nos entreprises ferroviaires dans l'espace économique européen.
L'outil majeur adopté dans le " paquet ferroviaire " pour assurer le développement du trafic - outil technique mais aussi outil politique qui a permis l'émergence d'un accord - est le réseau transeuropéen de fret ferroviaire (le RTEFF dans le jargon communautaire), qui sera étendu à l'ensemble du réseau dans quelques années. Sur ce RTEFF, toute entreprise ferroviaire titulaire d'une licence pourra offrir des services de fret international, tout en laissant à chaque pays le choix de son mode d'exploitation et de son organisation ferroviaire. La garantie d'accès sera assurée.
Je suis très attaché, comme vous le voyez, à la pleine mise en uvre du Réseau Transeuropéen de Fret Ferroviaire, dont la création a été décidée à l'initiative de la France lors du conseil des ministres des transports de décembre 1999 sous Présidence finlandaise.
L'objectif est de concentrer sur ce réseau les moyens financiers de chaque Etat et de l'Europe ainsi que les actions qui permettent d'améliorer la qualité, la sécurité et la fiabilité des trafics.
L'accord sur le "paquet ferroviaire", obtenu le 22 novembre dernier, est bien une condition essentielle, une étape décisive pour mieux organiser le fret ferroviaire à l'échelle européenne. Et cela, à partir de quelques repères de qualité et d'efficacité : interopérabilité, sécurité, harmonisation tarifaire et sociale.
Ainsi, nous devons continuer à améliorer ensemble l'interopérabilité technique, organisationnelle et administrative, par de nouvelles procédures associant mieux les cheminots des différents Etats entre eux; par de nouveaux matériels à l'image des premières locomotives interopérables qui circulent entre la France et l'Italie. Et cela, en nous appuyant sur la prochaine directive en cours de mise au point.
Nous devons aussi impérativement poursuivre notre travail sur l'harmonisation des redevances d'infrastructures, à partir des premiers échanges qui ont eu lieu à propos du "paquet ferroviaire", en faveur d'une tarification au coût marginal, adaptée à la situation de concurrence.
Enfin et surtout, la mise en uvre de ce réseau européen ne pourra se faire au détriment de la sécurité ou des conditions de travail. Nous devons définir un label européen de sécurité ferroviaire, auquel devraient adhérer les entreprises assurant des trafics internationaux. Nous attendons avec intérêt le projet de directive de la Commission.
Je souhaite aussi que nous puissions examiner l'évolution des conditions sociales d'exercice des opérateurs ferroviaires, comme nous en avions convenu en décembre 1999. Ne recommençons pas l'erreur faite dans les transports routiers, où, comme nous le reprochent aujourd'hui aussi bien les salariés que les entrepreneurs, l'ouverture du trafic s'est faite sans harmonisation préalable des règles sociales. Nous attendons sur ce point une initiative de la Commission.
Si l'on veut continuer à légiférer, il y a donc de la matière, avec la sécurité, l'harmonisation sociale et tarifaire ou l'interopérabilité. C'est même une condition - nous l'avions dit il y a un an - de l'application du "paquet ferroviaire".
J'en viens maintenant au rôle de chacun des acteurs dans le développement du fret ferroviaire.
Les entreprises ferroviaires, tout d'abord, doivent corriger l'image de dynamisme insuffisant qui leur est souvent reprochée en matière de fret.
La question de la qualité des acheminements fret, de la régularité et de la fiabilité des trains fret, est apparue au cours de ces Etats Généraux comme une question centrale. Une amélioration dans ce domaine est impérative faute de quoi la portée des autres mesures envisagées serait très fortement amoindrie, voire réduite à néant. Nous attendons des entreprises ferroviaires, et de la SNCF pour ce qui concerne la France, qu'elles améliorent leurs prestations. La SNCF doit devenir un des opérateurs logistiques multimodal de référence en France et en Europe, la France étant, du fait de sa situation géographique et l'importance de son réseau, parmi les pays les plus attendus pour réussir.
Il faut s'attaquer aux causes de l'irrégularité. Permettez-moi d'en citer deux :
La première, c'est la vétusté ou l'insuffisance des matériels pour répondre aux sollicitations du trafic. A cet égard le gouvernement français soutient pleinement la SNCF lorsqu'elle s'engage à renouveler ou renforcer son parc de matériel. Il l'a fait en autorisant l'entreprise à prendre les décisions nécessaires à l'acquisition de plus de 600 locomotives dédiées au fret.
La seconde cause, ce sont les goulets d'étranglement du réseau ferroviaire qui produisent la congestion du trafic. Le plus souvent, la solution passe par des investissements de modernisation et de capacité des infrastructures. C'est, pour la France, l'exemple de Nîmes ou Montpellier, ou encore le noeud lyonnais, qu'il faudra bien résorber. Cette question est aussi celle des financements. J'y viendrai dans quelques instants.
Bien entendu, tout n'est pas qu'affaire d'investissements, nous le savons tous. De multiples aléas ou incidents d'exploitation peuvent provoquer des retards qui, même modestes initialement, finissent, notamment dans les zones saturées, par provoquer des perturbations plus importantes. Tout en ayant conscience qu'on ne supprimera pas par un coup de baguette magique ces aléas ou incidents d'exploitation, il est néanmoins possible de beaucoup progresser. Chaque retard, chaque événement facteur de dysfonctionnement, doivent être l'occasion de disséquer les procédures, de valider ou de changer les habitudes, en un mot de se remettre en cause pour gagner en qualité et en fiabilité des délais.
Après les entreprises ferroviaires, les gestionnaires d'infrastructure ont aussi un rôle majeur à jouer. Il s'agit, en effet, pour ces entités de fournir aux entreprises des sillons de qualité, entretenus et sécurisés, permettant de garantir la fiabilité des acheminements. Il s'agit également de gérer aux mieux les capacités des infrastructures existantes afin de dégager le plus grand nombre de sillons. Il faut en effet être conscient que les programmes de modernisation et d'adaptation de l'infrastructure ne donneront leurs pleins effets qu'à moyen terme. Or, c'est dès aujourd'hui qu'il faut agir pour développer le fret.
Il s'agit enfin de se coordonner au niveau international pour assurer la continuité des itinéraires, et surtout de se coordonner en matière de redevances d'infrastructures afin d'éviter que le niveau de redevances et les disparités d'un pays à l'autre ne constituent une barrière au développement du trafic. Nous avons - me semble - t - il progressé sur ce point lors de la conciliation sur le "paquet ferroviaire".
On le sait bien, l'international constitue incontestablement le champ de développement privilégié du mode ferroviaire. Il représente d'ailleurs 50% de l'activité fret de la SNCF. C'est pourquoi, cette démarche volontariste de la France doit s'inscrire dans un cadre résolument européen. La France s'est fixée l'objectif ambitieux de doubler son activité fret en dix ans. Pourquoi ne pas faire de cet objectif un principe d'action européen ?
J'avoue que comme Dominique Voynet, je ne comprends pas la décision de la Poste qui consiste à supprimer du trafic actuellement sur rail, le train postal Paris-Besançon.
Mais, je l'ai souvent répété, l'ouverture systématique à la concurrence intramodale ne me paraît pas la bonne solution. Au contraire j'ai toujours parié sur un développement commun, fondé sur une parfaite coopération entre les gestionnaires d'infrastructures et les entreprises ferroviaires, s'appuyant sur l'expérience, le savoir-faire et les initiatives des entreprises du secteur.
En ce sens, nous pouvons nous féliciter des initiatives prises par différentes sociétés de chemins de fer, les chemins de fer belges, luxembourgeois, italiens, la SNCF et RFF pour mettre en service au début de l'année 1998 un corridor de fret entre Anvers, Lyon, Marseille avec des prolongements vers le sud de l'Italie. D'une capacité d'une trentaine de sillons quotidiens, ce corridor baptisé "BELLIFRET" constitue la référence en la matière. Nous avons d'ailleurs profité du passage du 2000ème train en gare de Luxembourg en mai dernier pour saluer cette initiative qui contribue à développer le fret ferroviaire en Europe. Ces réalisations ont, selon moi, vocation à se généraliser. Les choses vont plus vite quand on coopère, ... parce que tout le monde y trouve son compte.
Après les entreprises ferroviaires et les gestionnaires d'infrastructures, les pouvoirs publics ont également leur part de responsabilité dans l'objectif de rééquilibrage intermodal.
Permettez moi sur ce point d'insister sur les dispositions déjà prises par notre gouvernement. La France va bientôt disposer de schémas de services collectifs de transport de marchandises et de voyageurs. C'est l'expression d'une politique des transports en nette rupture par rapport aux dispositions antérieures. Son ambition est en effet d'anticiper les réponses aux besoins de transport et de déplacement à l'horizon de 20 ans, dans des conditions compatibles avec les exigences économiques, sociales et environnementales d'un développement durable. Si l'on sait qu'il faudra des capacités supplémentaires, on sait aussi que les études, la concertation et la réalisation d'un projet fret demanderont plusieurs années.
L'une des priorités défendues au travers de la politique du gouvernement depuis 1997, inscrite dans les schémas de service, est, je l'ai dit, l'objectif de doublement du fret ferroviaire en dix ans. Mais il faudra aller plus loin.
A plus court terme, l'engagement de l'Etat et des collectivités publiques se traduit, dans le cadre des contrats de plan Etat/Régions pour la période 2000/2006, par un véritable changement d'échelle. Au total, les projets ferroviaires inscrits dans le cadre de ces contrats de plan, et destinés à développer et moderniser les infrastructures existantes, représentent un programme d'investissements de l'ordre de 33 milliards F, près de dix fois supérieur au plan précédent.
De plus, des orientations et décisions ont été prises en matière de poursuite du programme de lignes à grande vitesse. Ces projets bénéficieront directement à l'acheminement du fret en libérant de la capacité sur le réseau des lignes classiques. Ce sera le cas de la première phase du TGV EST EUROPEEN, dont les travaux seront lancés en 2001 pour une mise en service en 2OO6.
Ce sera le cas également de la ligne nouvelle mixte voyageurs et fret Perpignan - Figueras - Barcelone. Au sommet de Santander, avec mon collègue, M. ALVAREZ CASCOS, nous avions convenu que l'utilité publique de la partie française du projet serait acquise en juin 2001. Le calendrier de l'enquête publique, achevée il y a 2 mois, le permet. Nous avions aussi convenu de choisir les modalités de réalisation de la liaison. Ce sera fait à la Commission Inter-Gouvernementale (CIG) du 20 décembre, ce qui devrait permettre une mise en service de la section internationale dans des délais raisonnables, avant 2005. Cette section constituera une avancée exemplaire en matière d'interopérabilité, puisqu'elle permettra d'assurer une continuité entre les réseaux espagnols, français et italiens sur la façade méditerranéenne.
(source http://www.equipement.gouv.fr, le 14 décembre 2000)
Je voudrais maintenant aborder un sujet qui a été au cur de ces Etats généraux. Dans la perspective d'un rééquilibrage entre le rail et la route pour la traversée des Alpes, la saturation des itinéraires routiers et ferroviaires va conduire le Gouvernement à aller plus loin dans la politique de modernisation et de renfort des axes de circulation.
Je veux parler en priorité de la liaison ferroviaire transalpine Lyon-Turin, sur laquelle le gouvernement prendra très prochainement, avec le gouvernement italien, des décisions très importantes, engageant cette partie de l'Europe pour un quart de siècle. Pour ma part, j'y suis très favorable. Mon collègue, Monsieur BERSANI, que j'ai rencontré hier dans une réunion de travail l'est également. Je puis même vous indiquer que les autorités italiennes ont déjà adopté le programme des dépenses 2001-2006.
Néanmoins, dans la mesure où il s'agit de décisions bilatérales, je vous donne rendez-vous au prochain sommet franco-italien le 29 janvier prochain, ainsi qu'il en a été convenu lors des précédents sommets de Chambéry et Nîmes.
Afin d'accélérer le transfert vers le rail et de préparer les conditions d'acheminement du fret qui seront celles de la décennie future, il est nécessaire de franchir une étape technologique significative, équivalente, pour le fret ferroviaire, à ce que le TGV a représenté pour les voyageurs. Le Gouvernement a décidé de promouvoir la réalisation d'autoroutes ferroviaires permettant d'acheminer sur les trains des ensembles routiers complets : tracteurs et remorques de tout gabarit. Cette réalisation devrait être effectuée en priorité sur le franchissement des zones sensibles comme les Alpes et les Pyrénées et sur les lignes susceptibles de soulager les axes de transit autoroutiers les plus chargés.
Face aux attentes croissantes de l'opinion publique et à la volonté du gouvernement d'opérer un rééquilibrage routes / rail, face aux demandes des professionnels et de la SNCF en particulier, il est temps de franchir une étape. L'autoroute ferroviaire doit devenir une réalité. J'ai cru comprendre qu'un wagon à plateau pivotant, (exposé à proximité), est pour beaucoup dans cette évolution.
Des projets existent. Après en avoir discuté avec RFF et la SNCF, je puis vous annoncer
- comme me l'a demandé le Premier ministre - que nous allons concrètement procéder au lancement d'une politique de ferroutage dans les Alpes.
En 2002, une ou deux navettes quotidiennes pourront circuler sous le gabarit actuel de la ligne existante entre la Vallée de la Maurienne et Bussolino en Italie. La mise en place d'un service complet et cadencé interviendra dès que la ligne sera mise en gabarit B + soit vers 2005-2006. Bien entendu, les performances de ce service seront considérablement améliorées avec le franchissement en tunnel du Massif de la Chartreuse, qui pourrait préfigurer une liaison quasi dédiée au fret ferroviaire. Je suis d'avis qu'il faudrait rapidement enclencher les études d'APS du premier tube de la Chartreuse.
Je voudrais ici, préciser que la politique de ferroutage, contrairement à ce que j'ai pu lire dans la presse, n'est pas le substitut de la nouvelle liaison ferroviaire, qui sera bien à l'ordre du jour du Sommet Franco-Italien. Au contraire, c'est dans la perspective de cette nouvelle liaison que nous devons anticiper un mode d'exploitation performant.
D'autres liaisons ont aussi été évoquées, notamment par le Conseil supérieur du Service Public Ferroviaire, organisateur de cette journée. Pourquoi pas ? Toutes les initiatives sont à étudier. Ainsi le tunnel sous la Manche permet de relier le nord de l'Angleterre et le continent. Pourquoi les poids lourds quittent - ils les navettes du tunnel pour reprendre la route alors qu'ils pourraient rester sur une navette pour poursuivre leur chemin ? Pourquoi ne pas étudier un lien fret à haute performance entre les régions les plus actives du Royaume Uni et le Nord-Pas de Calais, pour faire de cette région le portail d'accès aux échanges avec les îles britanniques ?
Tout n'est pas réglé, loin s'en faut. Des questions aussi importantes que la sécurité ou les conditions d'exploitation doivent encore recevoir des réponses. C'est pourquoi j'ai décidé de mettre en place, à l'instar de ce qui existe pour les TGV, un comité de pilotage, chargé de suivre ce dossier, d'évaluer les projets et de faire des propositions, en insistant tout particulièrement sur la sécurité.
Je souhaite que tous les professionnels soient associés à la démarche qui va s'engager, les entreprises du secteur ferroviaire, et les transporteurs routiers notamment.
Je voudrais particulièrement insister sur un aspect qui n'apparaît pas forcément encore à la lecture des cartes. En y ajoutant la mise en service dès juin prochain de la ligne TGV Méditerranée et, à un horizon plus lointain, de la branche sud du TGV Rhin-Rhône, l'ensemble les projets que je viens d'évoquer constitueront la liaison ferroviaire la plus performante entre le nord et le sud de l'Europe. Ce projet, phasé au rythme de la montée en puissance du trafic, que nous avons baptisé " Magistrale Eco-Fret " constitue un bon exemple de ce qu'il conviendrait de réaliser partout en Europe, pour que le RTEFF soit en mesure de répondre aux exigences des opérateurs et des chargeurs.
Je ne voudrais pas terminer l'évocation de toutes ces opérations d'investissements sans rappeler qu'il s'agit aussi de tirer parti des infrastructures que l'histoire des chemins de fer de ces dernières décennies a oubliées. Il faut remettre en service et moderniser des lignes désaffectées ou peu utilisées, pouvant bénéficier, pour le fret, d'une réduction tarifaire, suite à la position commune adoptée en conseil des ministres transport en décembre 1999. Je citerai à cet égard la ligne Clermont - Béziers, en cours de modernisation et d'électrification pour accueillir du fret permettant de délester la vallée du Rhône. Je citerai encore la ligne Bourg - Genève, dite "ligne des Carpathes", qui sera remise en service dans le cadre du protocole Franco-Suisse sur les transports. Je citerai enfin la ligne Pau-Canfranc, à la frontière Pyrénéenne, qui devrait prochainement être remise en service avec l'objectif d'y faire passer 2 millions de tonnes de fret. Des décisions seront prises sur le scénario de réouverture de cette liaison au séminaire franco - espagnol de février prochain, tandis que des études se poursuivent sur la perspective d'une traversée centrale supplémentaire des Pyrénées, à un horizon plus éloigné.
Je veux également souligner avec force que la France est un pays de transit, souvent incontournable pour grand nombre de transporteurs internationaux. Elle est, à ce titre, soucieuse de ses responsabilités. Nous savons que la France doit investir et créer les conditions d'une plus grande fluidité du trafic, pour que le principe de libre circulation des marchandises et des voyageurs puisse trouver à s'appliquer. Mais nous ne pouvons le faire seul. Les efforts que consent la France et qu'elle va consentir dans les années à venir doivent être partagés. Par les autres Etats et par l'Union Européenne et la Commission. Sans cela, les droits d'accès ne resteraient que théoriques. Il en va de la responsabilité des Etats mais aussi de la Commission européenne.
Il est souhaitable que tous puissent participer à la réalisation d'un réseau transeuropéen de fret ferroviaire, performant, sûr et interopérable sans remettre en cause les services voyageurs existants, y compris les services régionaux. Nos concitoyens ne comprendraient ou n'admettraient pas que le développement du transport fret se fasse par suppression ou dégradation des services voyageurs. Le développement du transport ferroviaire ne vaut que s'il est partagé ainsi qu'on le proclame à la SNCF -. Tous les trafics ont vocation à se développer aux bénéfices des chargeurs, des usagers, de la cohésion des territoires et de l'environnement.
La seule réponse qui vaille est donc d'engager sans délai un programme massif d'investissements ferroviaires partout en Europe afin de rattraper le retard pris. Progressivement, la plupart des grandes agglomérations européennes bénéficient de contournements autoroutiers. Je crois qu'il est indispensable de se fixer le même objectif pour le réseau ferroviaire si l'on veut supprimer les nombreux goulets d'étranglement présents sur le réseau actuel. C'est le seul moyen de concilier les intérêts des voyageurs et ceux du fret, notamment en milieu urbain et périurbain.
Je prends acte avec intérêt du montant des crédits que la Commission va consacrer à la désaturation (750 millions d'Euros sur 5 ans). C'est effectivement très important.
Or, la programmation pluriannuelle indicative des financements européens RTE, en cours de préparation dans les services de la Commission pour la période 2001 - 2006, m'inquiète. Alors que la Commission, soutenue en cela par le Conseil, avait affiché sa volonté d'accélérer la réalisation des projets jugés prioritaires à Essen et d'encourager la résorption des goulets d'étranglement ferroviaire par une enveloppe de crédits significative, les premières propositions manifestent un certain décalage par rapport à ces objectifs.
Pour ma part, je suis convaincu que la concertation entre la Commission et les Etats membres permettra des ajustements susceptibles de mieux prendre en considération les priorités qui ont été dégagées dans les différentes instances européennes ainsi que dans ces Etats généraux. C'est à ce prix que les contraintes particulières des pays de transit pourront trouver des solutions.
Après la question des financements européens, je souhaite réagir aux travaux de l'une de vos tables rondes consacrée aux financements. C'est effectivement une grande question.
Hier matin, lorsque j'ai ouvert ces Etats Généraux, j'ai rappelé qu'un de mes principaux objectifs, en arrivant au gouvernement, avait été la recherche d'une solution durable au surendettement hérité du passé. Le gouvernement a fait alors un effort très important en désendettant la SNCF de 28 milliards F., et en s'engageant à apporter 37 milliards F. à RFF entre 1999 et 2001.
Pour autant, la question de l'apurement du passé n'est pas réglée. RFF porte encore une dette héritée de la SNCF de 120 milliards F environ. De plus, RFF doit entretenir et moderniser son patrimoine et investir de l'ordre de 7 à 8 milliards F par an sur fonds propres. Or, sa capacité d'autofinancement est négative. C'est donc à nouveau une dette qui s'accumule, de la "bonne dette", certes, quand celle-ci finance des investissements dynamiques favorisant le développement, mais de la "mauvaise dette" aussi quand il s'agit de financer les investissements de régénération qui devraient être autofinancés.
Je suis d'accord avec Jean Jacques FILLEUL. Il faut sortir de ce déséquilibre permanent, pour que RFF devienne un outil efficace de gestion et de développement du patrimoine ferroviaire.
Je sais que cela sera difficile car les sommes sont considérables. Ainsi, pour améliorer un peu la situation, il faudrait, selon les calculs des experts auditionnés par les Etats-Généraux réduire la dette de 80 à 90 Milliards F. L'ordre de grandeur est bien celui - là. Je ne saurais dire quelle est la bonne approche. Certains parlent de dotation en capital, d'autre, Jean Jacques Filleul notamment, d'une affectation des recettes attendues de l'attribution des licences de téléphonie mobile UMTS. D'autres encore évoquent un rachat d'une partie de la dette! Mais ce qui semble désormais évident à beaucoup d'entre vous, c'est cela : on ne peut plus continuer au rythme d'une dotation annuelle de 10 à 12 milliards F qui ne permettra pas d'atteindre le fond du désendettement.
Nous disposerons bientôt d'un rapport du Comité des investissements à caractère économique et sociaux sur cette question. Il faudra donc que des décisions soient prises.
Pour poursuivre sur la question du financement des investissements, la SNCF également
- vous le savez - doit beaucoup investir dans le matériel roulant. Plus de 600 locomotives seront acquises dans les 4 à 5 prochaines années, ce qui représente un volume d'achats de 8 à 9 milliards de F. Comment aider cette entreprise à financer le renouvellement de son matériel, en augmentant ses capacités d'investissement ? Certains ont évoqué la possibilité de mettre en place une aide fiscale permettant d'alléger les charges d'exploitation de l'activité fret. D'autres ont souhaité désendetter à nouveau la SNCF. Ce problème du financement des nouveaux matériels SNCF se pose dès 2002, tout comme se pose la question de l'équilibre de RFF. Pour beaucoup des acteurs du monde ferroviaire. Il est donc urgent que des solutions soient proposées.
Ce n'est qu'à partir du moment où on aura réglé le passé et restauré l'équilibre de RFF que pourra être clarifiée la difficile question des relations financières entre les 3 partenaires que sont l'Etat, RFF et la SNCF. Que ce soit le montant des péages versés par la SNCF à RFF, le montant de la contribution aux charges d'infrastructure versée par l'Etat à RFF ou celui de la convention de gestion rémunérant les services rendus à RFF par la SNCF, des règles du jeu pourront être établies de manière plus apaisée. Alors que les péages constituent un des outils de la réforme ferroviaire, ils sont aujourd'hui vécus par les uns comme un prélèvement indu sur l'amélioration de la situation de la SNCF, par d'autres comme le moyen d'atteindre un jour l'équilibre, par d'autres encore comme une recette aux vertus anti-maastrichtiennes. Ils ont perdu toute lisibilité et toute signification économique. Il est donc grand temps qu'une solution durable soit apportée au règlement financier du passé.
Pour en terminer avec les responsabilités des pouvoirs publics, mon propos sera aussi celui d'un responsable d'administration. Les inflexions apportées à la politique des transports constituent, pour le ministère de l'équipement, une petite révolution culturelle. Depuis 2 siècles, ce ministère et ses ingénieurs ont façonné le réseau routier puis autoroutier de la France. Et ce n'est que plus récemment que les autres modes de transport, notamment le ferroviaire, sont entrés dans la sphère publique. Aujourd'hui, le gouvernement a décidé - parce que la société et les élus le demandent - de rééquilibrer les modes de transports. Avec les contrats de plan entre l'Etat et les régions, l'Etat et ses services doivent se mobiliser pour accompagner le changement vers un rééquilibrage modal significatif. Cela signifie qu'il faut dégager et former des personnels pour piloter la conduite des études et l'avancement des procédures, et qu'il faut en préserver le financement.
C'est la raison pour laquelle il me semble nécessaire de mobiliser mon administration autour de cet enjeu. Je sais combien ce souci est partagé par la SNCF et ses personnels. Je sais combien les élus et les associations s'inquiètent du rythme auquel vont progresser les opérations ferroviaires des contrats de plan.
C'est pourquoi, j'ai décidé de mettre en place un délégué ministériel à l'intermodalité dans les transports. En matière de programmation des infrastructures, il sera en quelque sorte le gardien des priorités du gouvernement, le garant de leur avancée et de leur réalisation, afin que le rééquilibrage modal - dans l'affectation des ressources humaines ou financières - se fasse bien dans le sens décidé par le gouvernement.
Je voudrais conclure ces Etats-Généraux par un retour à l'Europe. La Commission prépare un projet de livre blanc sur la nouvelle politique de transport, vivement attendu. Le Conseil des ministres des transports n'aura pas l'occasion d'en débattre lors de la Présidence française. Ce serait pourtant l'occasion de poser quelques principes sur la régulation dans les zones sensibles en particulier et sur le rééquilibrage intermodal. Je forme néanmoins un voeu : que la Commission remette enfin en chantier la directive Eurovignette qui détermine la taxation applicable aux poids lourds, de manière à commencer à prendre en compte les coûts externes et à permettre - au niveau du financement aussi - ce rééquilibrage intermodal.
Je renouvelle mes remerciements et mes félicitations à M. Jean Jacques Filleul et, à travers lui, à tous les organisateurs de ces Etats Généraux particulièrement réussis. Je veux aussi remercier l'ensemble des participants, dont les nombreux ministres européens qui ont participé avec moi à la table ronde sur l'Europe, Mme Dominique VOYNET qui a clairement illustré le soutien qu'elle apportait au rééquilibrage intermodal, et Mme De PALACCIO, vice présidente de la Commission européenne qui a conclu la journée d'hier.
Suite à la suggestion que j'avais faite hier, et qui - je crois - a intéressé un grand nombre d'entre vous, je demande à Mme de Palaccio de reprendre le flambeau de ces Etats Généraux pour que ceux - ci puissent avoir une suite d'ici un an dans un pays assurant la Présidence européenne, afin que soit poursuivie la démarche entreprise par la France.
Permettez-moi également d'adresser mes remerciements aux membres du Conseil Supérieur du service public ferroviaire présidé par monsieur Jean Jacques Filleul ainsi que mes félicitations pour le travail engagé.
Nous sommes à l'aube d'une période nouvelle où le trafic ferroviaire marchandise sera synonyme de modernité, d'efficacité, et de qualité. Qualité de service, qualité de vie, qualité de civilisation !
Merci de votre attention et à bientôt !
(source http://www.equipement.gouv.fr, le 14 décembre 2000)