Déclaration de M. Jean-François Copé, ministre délégué au budget et à la réforme de l'Etat, porte-parole du gouvernement, sur la nécessité d'associer les usagers à la réforme de l'Etat, sur les mesures de simplifications administratives déjà prises en faveur des entreprises, à Paris le 8 septembre 2005.

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Circonstance : Réunion du comité de pilotage de l'évaluation du coût de la réglementation pour les entreprises, à Paris le 8 septembre 2005

Texte intégral

Mesdames, Messieurs,
Je vous remercie d'être présent aujourd'hui, à cette heure matinale, pour parler de réforme de l'Etat, et pour traiter en profondeur de la complexité des procédures administratives, et la charge financière qu'elle induit pour les entreprises que vous représentez.
I Votre comité est exemplaire. Je veux que les usagers soient systématiquement associés à la réforme de l'Etat
1. C'est aujourd'hui la sixième réunion du comité depuis sa création il y a un an, et je suis impressionné par la qualité et l'ampleur des progrès accomplis.
- Je suis convaincu que la participation active des entreprises est un facteur essentiel de succès. Nous ne moderniserons l'Etat au profit des usagers que si nous dialoguons et que tout le monde s'implique ;
- Je considère que la présence de Joeren NIJLAND qui nous fait bénéficier de l'expérience des Pays-Bas en matière de modernisation est une chance pour nous. Je le remercie de l'aide qu'il apporte. Chaque pays a ses spécificités, mais les modèles étrangers sont une source d'inspiration, et démontrent comment la réforme de l'Etat peut réussir.
- Enfin, le professeur Bernard COLASSE apporte un soutien scientifique. Je considère également cet aspect comme fondamental, la réussite de la réforme de l'Etat exige une réflexion de fond, dans la durée.
- Enfin, le travail en réseau des administrations a été exemplaire lui aussi.
2. Je viens de proposer à l'assemblée permanente des chambres d'agriculture de nous rejoindre, et je salue son représentant. Les régimes que nous étudions portent pour une bonne part sur le secteur agricole, et il est indispensable que les entreprises concernées soient associées en tant que telles.
3. Ce que j'attends maintenant de notre comité, c'est de poursuivre les travaux sur la complexité des procédures administratives pour les entreprises, dans le cadre de la nouvelle impulsion que j'ai décidé de donner à la réforme de l'Etat.
- Je souhaite que chacun, tant les entreprises que les administrations, continue à participer au projet, dans un constant esprit de dialogue ;
- Je demande aux représentants des entreprises de relayer au maximum les enjeux de la réforme de l'Etat auprès des milieux économiques, car il s'agit d'un sujet politique essentiel et qui doit être traité comme tel.
4. Mais j'ai décidé d'aller beaucoup plus loin. Mon objectif est d'étendre les méthodes qui marchent à tous les domaines où elles peuvent s'appliquer.
- Je veux que les usagers soient au centre du processus de réforme de l'Etat, et participent systématiquement aux travaux qui les concernent.
- Le chantier que j'ai décidé de lancer sur la complexité des procédures à l'égard des particuliers associera les usagers dans un comité semblable.
II Le cadre d'ensemble a changé. J'ai décidé de donner une nouvelle impulsion à la réforme de l'Etat
A Nous ne partons pas de rien. Beaucoup a été fait ces 3 dernières années
1. Nous avons, pour la première fois, les moyens de progresser, et nous le devons à l'action conduite par le gouvernement. Les leviers du changement sont en place.
- Le gouvernement sera au rendez-vous de la LOLF le 1er janvier 2006. La conséquence fondamentale, au-delà des aspects budgétaires, est que la performance devient la pierre de touche de l'ensemble de l'action publique. Les administrations ont engagé dans le cadre des stratégies ministérielles de réforme une démarche de recherche de productivité.
- L'administration territoriale connaît sa plus importante réforme depuis la décentralisation de 1982. La gestion des ressources humaines a fait l'objet de premières évolutions.
2. Mais les actions sont jusqu'à présent dispersées, et insuffisamment lisibles. Or nous sommes en situation d'urgence.
- La situation des finances publiques nous oblige plus que jamais à rechercher l'efficacité. Chaque euro que dépense l'Etat doit désormais l'être de la manière la plus utile.
- Je suis conscient que l'attente du public est très forte. Car les usagers, quels qu'ils soient, n'acceptent pas que l'Etat soit difficile à comprendre, que l'argent de leurs impôts soit mal utilisé, que les démarches administratives leur fassent perdre du temps.
- Moderniser l'Etat, je suis convaincu que c'est le seul moyen de ne pas se retrouver enfermé dans une alternative inacceptable : augmenter sans fin la dépense publique et les prélèvements obligatoires ; ou bien sinon laisser se dégrader la qualité du service aux usagers.
B Je veux aller plus loin et lancer une dynamique concrète et massive
1. Nous ne pouvons pas en rester là : il faut passer du prototype à la production en série. C'est bien, par exemple, que certains services mettent en place des numéros verts. Mais je veux qu'il y en ait partout où il y a besoin.
2. C'est le sens que je donne au rapprochement du budget et de la réforme de l'Etat. Je veux profiter de l'occasion pour lui donner une nouvelle ambition.
- Ce n'est pas le budget qui a absorbé la réforme de l'Etat, mais au contraire la réforme de l'Etat qui a absorbé le budget. Cela signifie que je n'ai qu'un seul objectif, d'améliorer la performance et la qualité du service public ;
- Je suis convaincu que c'est par cette démarche que nous pourrons réduire dans les prochaines années les effectifs de la fonction publique, les évolutions d'effectifs résultant des actions de modernisation conduites.
3. Le partage des responsabilités est clair. La réforme de l'Etat ne va pas faire le travail à la place des autres ministères.
- Chaque ministre est son propre ministre de la réforme de l'Etat : c'est lui qui prend les initiatives, et qui est responsable.
- Ma responsabilité à moi, c'est de définir et de piloter la stratégie de modernisation de l'Etat, en assurant qu'elle est lisible et cohérente. En outre, je fournis un appui méthodologique aux administrations qui en ont besoin, et j'assure la mutualisation des expériences.
4. Je veux que la réforme de l'Etat ne soit plus un objet technocratique, mais un projet politique qui recueille l'adhésion de nos concitoyens, car sinon nous n'arriverons à rien. Je vous le dis très simplement : j'ai besoin de votre soutien et de celui des entreprises que vous représentez.
C Je me suis donné les moyens de mettre tout l'Etat en mouvement
1. Au conseil des ministres du 27 juillet dernier, j'ai présenté les orientations opérationnelles du gouvernement en matière de réforme de l'Etat. Elles se résument en 3 mots : un Etat plus efficace, plus simple, et systématiquement au service du public.
2. Un Etat plus efficace, cela implique que l'administration rende le meilleur service au meilleur coût en évaluant et transformant la façon dont elle travaille.
- J'ai décidé de lancer, tous les 2 mois, un audit sur une grande fonction ou procédure de chaque ministère, pour tirer des propositions opérationnelles de modernisation. Les missions comprendront des consultants privés. Lancement le 1er octobre prochain.
- Je veux aussi que l'Etat améliore ses politiques de soutien, comme n'importe quelle entreprise quand elle veut réduire ses charges.
- La gestion des immeubles est un enjeu prioritaire. L'objectif en 2005 est de 600 millions d'euros de ventes. J'ai fixé ce montant à 400 millions d'euros pour 2006 si bien que nous aurons cédé au total pour 1 milliard d'euros d'immeubles sur 2 ans. Mais je veux aller plus loin et donner durablement à l'Etat les moyens de mieux gérer son patrimoine.
3. Un Etat plus simple, c'est moins de textes, des lois et des règlements simples et lisibles. Je veux mettre un frein à la prolifération des normes.
- S'agissant des textes existants, j'ai décidé de présenter au conseil des ministres une troisième loi de simplification, à la fin de l'année, avec des réformes concrètes en faveur tant des entreprises que des particuliers.
- Elle comportera également la loi anti-lois. J'ai demandé à chaque ministre d'y faire figurer des suppressions effectives, en faisant le tri entre les règles qui sont utiles et celles qui ne servent à rien.
- Mais je veux aussi en parallèle maîtriser l'augmentation constante du flux des nouvelles normes qui sont prises chaque année. J'ai décidé de marquer un coup d'arrêt très fort à cette inflation législative.
4. Un Etat systématiquement au service de l'usager, c'est faciliter la vie des gens. Je ne trouve pas normal que nos concitoyens doivent prendre des demijournées de RTT pour faire la queue devant les guichets des administrations.
- J'ai décidé de développer la certification progressive, par un organisme tiers, des services de l'Etat en contact avec le public. Une entreprise qui veut améliorer la qualité de ses prestations se fait certifier. Je ne vois pas pourquoi l'Etat n'utiliserait pas cet outil.
- Je suis convaincu que l'administration en ligne est un outil essentiel pour révolutionner les relations avec les usagers. La télédéclaration de l'impôt sur le revenu a été pour moi la révélation du potentiel énorme de cette démarche : on est passé en l'espace d'une année de 1,2 à 3,7 millions de télédéclarants. La réforme de l'Etat, c'est internet à tous les étages.
5. Afin de piloter ces projets, et d'identifier la réforme de l'Etat au sein des structures de l'administration, j'ai créé à Bercy la direction générale de la modernisation de l'Etat.
- Elle regroupe quatre entités préexistantes : la délégation aux usagers et aux simplifications administratives, la direction de la modernisation de la gestion publique et des structures de l'Etat, l'agence de développement de l'administration électronique, la direction de la réforme budgétaire dans ses attributions qui ne relèvent pas du budget.
- Mon objectif n'est pas seulement de mettre en oeuvre des synergies. La réforme de l'Etat est une priorité essentielle du gouvernement, et je veux lui assurer durablement une visibilité et une force de frappe administrative suffisante.
III S'agissant des entreprises, j'ai décidé de franchir une nouvelle étape en créant un indicateur de complexité
A Là encore, nous ne partons pas de rien. L'acquis de ces dernières années est important
1. Les lois de simplification ont permis de régler certains problèmes posés aux entreprises par la complexité inacceptable de notre droit. Je cite par exemple la modernisation du régime des SARL, la suppression d'autorisations qui faisaient obstacle à la création d'activités, la simplification de professions réglementées et du secteur du transport routier, l'allègement des pièces justificatives en matière de formation professionnelle, les mesures relatives au droit financier.
2. Dans le cadre du programme ADELE lancé en 2004 de nombreuses téléprocédures ont été mises à la disposition des entreprises.
- Dès leur création, elles peuvent retirer leur numéro SIREN sur internet.
- En matière fiscale, le compte des professionnels est un progrès essentiel : tous les documents sont accessibles en ligne et le télépaiement est généralisé pour l'impôt sur les société et la taxe sur les salaires.
- Une procédure de dédouanement à distance a été mise en place.
3. Mais je veux aller plus loin que ces mesures ponctuelles, en lançant une véritable dynamique de changement. Et j'ai décidé de placer les entreprises au centre de ma démarche, autant que les particuliers.
- D'abord, les entreprises sont usagers du service public. Or les usagers du service public, lorsqu'ils ont payé leurs impôts, sont des clients. Et les clients sont rois. Ensuite, les entreprises sont des contribuables, et elles ont le droit que chaque euro qu'elles acquittent soit utilisé au mieux.
- Enfin, et c'est fondamental, à travers les entreprises, ce sont des emplois qui sont en jeu, à cause de la concurrence internationale. On ne peut pas admettre que nos entreprises soient handicapées ou que des investisseurs renoncent à s'implanter à cause de la lourdeur de l'administration.
B J'ai décidé de passer à la vitesse supérieure, en m'appuyant sur vos travaux
Ø Vos travaux sont un chantier pilote de la réforme de l'Etat
1. Les travaux que vous conduisez depuis 2004 sur le coût des régimes d'autorisation sont un aspect essentiel de la réforme de l'Etat.
- Les procédures administratives entraînent des charges pour les entreprises, qui se retrouvent dans leurs comptes et dans leurs résultats. Je souhaite que l'Etat soit en mesure d'évaluer et d'analyser ce prélèvement caché, pour le réduire et devenir plus compétitifs.
- Evidemment, il ne s'agit pas de faire table rase de ce qui existe, et les entreprises elles-mêmes considèrent que les réglementations sont utiles. Mais je veux faire le tri, moderniser les dispositifs, et supprimer les contraintes qui ne sont pas absolument indispensables.
2. Vous aurez expérimenté la méthodologie sur 140 procédures à la fin de l'année, avec 3 expérimentateurs différents. Je considère donc que nous serons au point.
- La première batterie de 30 régimes que vous avez examinée a permis de mettre en place une méthodologie, et l'Etat dispose maintenant de l'outil pour connaître le coût de ses régimes d'autorisation pour les entreprises ;
- Le consultant Ernst & Young va nous présenter aujourd'hui son application à une nouvelle série de 41 dispositifs, représentant au total plus de 70 000 autorisations annuelles. Une dernière tranche de 50 est en cours d'étude pour la fin de l'année.
- En parallèle, la chambre de commerce et d'industrie de Paris a accepté de traiter dix régimes, et je vous en remercie. C'est très important que vous vous soyez approprié l'exercice.
Ø Nous devons tirer les leçons de ce qui a été fait pour aller plus loin
3. Nous en sommes au stade des premiers résultats. Voici les leçons de méthode que je tire de ce qui a été fait jusqu'à présent.
- D'abord, certaines des procédures sélectionnées pour les études n'avaient jamais été appliquées, ou très rarement. Nous devons utiliser ces constatations pour prendre des mesures de simplification.
- Ensuite, certains dispositifs mettent en jeu des informations confidentielles, en particulier dans le domaine fiscal. Le fait que des solutions pragmatiques aient pu être trouvées, en lien avec les entreprises concernées, me semble très encourageant.
- Cela suppose que chacun joue le jeu. Je ne peux pas accepter que certaines administrations refusent de transmettre les données. Nous devons nous placer dans une logique de transparence, et je m'impliquerai personnellement pour qu'elle soit totale.
- En parallèle, la participation des entreprises est indispensable, dans l'intérêt de tous. Je sais que plus de 120 d'entre elles ont apporté leur concours actif. Je veux absolument poursuivre ce partenariat, car je suis convaincu que c'est la seule manière de faire avancer la réforme de l'Etat.
Ø J'ai décidé d'appliquer votre méthode de manière industrielle, pour créer un véritable indicateur de complexité.
4. Je suis convaincu que nous ne pouvons pas en rester là, en nous limitant à faire des expérimentations sur certains régimes, mais nous devons en tirer de réformes de fond en faveur des entreprises.
- Les réformes qui ont été faites aux Pays-Bas nous montrent les applications très concrètes qui résultent de vos travaux. Je vous rappelle que le gouvernement néerlandais s'est fixé comme objectif de réduire le fardeau administratif de 25 % en 4 ans.
- Je constate une très grande hétérogénéité des procédures étudiées, tant en termes de coût unitaire (de 1 euro à plus de 100 000 euros) que de nombres de demandes. Et, les dispositifs les plus chers sont aussi les plus complexes. C'est à eux qu'il faut s'attacher en priorité.
5. Je veux passer du prototype à la production en série, en luttant contre la complexité sous toutes ses formes.
- Nous ne pouvons pas nous limiter à expérimenter l'évaluation du coût des procédures pour les entreprises sur 140 autorisations. Maintenant que l'outil existe, je veux l'appliquer de manière industrielle.
- Je vous annonce donc que j'ai décidé de le généraliser en 2006 à l'ensemble des autorisations, au nombre de 1 500 à peu près, et l'année d'après aux déclarations. Nous continuerons par la suite à l'étendre à la totalité des procédures de l'Etat à l'égard des entreprises.
- J'ai décidé aussi que ce test serait adapté pour être également applicable à partir de 2007 aux mesures nouvelles. Nous ne serons crédibles que si nous travaillons en parallèle tant sur le flux que sur le stock.
- La méthode sera la suivante : la réforme de l'Etat assurera le pilotage, et fournira l'appui méthodologique. Chaque ministre sera responsable pour son département, et devra s'approprier la démarche.
6. Mon objectif est de mettre en place un véritable indicateur de complexité qui mesurera systématiquement le poids de l'ensemble des procédures administratives auxquelles sont soumis les Français.
- En parallèle, j'ai décidé qu'une méthode serait définie d'ici la fin de l'année pour évaluer les formalités imposées aux particuliers, en tenant compte de la masse de documentation et de la durée des démarches.
- Je veux que ces travaux ne nous permettent pas seulement de procéder à des constats. Mon objectif est de développer un système d'incitation pour les ministères, que les efforts de simplification soient récompensés, car je suis convaincu que c'est le seul moyen de créer dans la durée un mouvement d'ensemble, qui concernera tout l'Etat.
7. Nous ne réussirons que si nous faisons de la complexité une question politique, ce qui suppose le soutien indéfectible des usagers que vous représentez, et l'implication totale des agents publics. J'ai absolument besoin de votre adhésion à chacun.
Ø Le comité de pilotage que nous tenons aujourd'hui nous donne l'occasion d'échanger en toute simplicité sur la manière dont nous voyons la réforme de l'Etat, et en particulier la simplification. Je vous propose de consacrer un temps à cet échange, qui est essentiel pour moi, puis de discuter des évaluations qui nous sont soumises.
Ø Je suis malheureusement obligé de vous quitter. Je laisse la présidence de cette réunion à Pierre SEGUIN, délégué adjoint aux usagers et aux simplifications administratives, que vous connaissez bien.Source http://www.dusa.gouv.fr, le 17 janvier 2006