Texte intégral
Le grand perdant des tractations à rebondissements que nous venons de connaître sur la TVA risque fort d'être l'idéal européen. Car c'est bien l'idée européenne qui semble elle-même menacée dans les opinions publiques. Les demandes des uns apparaissent d'autant plus fortes et légitimes que chacun voit bien ce qu'il peut y gagner, sans comprendre ce que l'Europe peut y perdre. Dès lors le refus opposé aux demandes françaises comme aux demandes de certains nouveaux Etats membres, apparaît pire qu'un malentendu, pire qu'un échec, comme une profonde injustice.
On peut bien entendu ressasser les occasions manquées de la construction européenne. Si le projet de Constitution avait été approuvé, nous pourrions nous rappeler qu'il comportait une clause « passerelle » permettant, si le Conseil européen le décidait à l'unanimité après l'approbation d'une majorité des membres du Parlement européen, de basculer d'une règle de décision à l'unanimité vers un choix à la majorité qualifiée. De même, si tous les Etats membres avaient accepté le passage de l'unanimité à la majorité qualifiée au sujet de la fiscalité, comme le propose la France, les atermoiements actuels ne se seraient jamais produits. Mais l'importance des enjeux économiques et sociaux liés au taux réduit de TVA nous impose d'être pragmatiques et d'agir rapidement, dans le cadre institutionnel d'aujourd'hui.
Ma conviction profonde a toujours été que l'Europe devait justement évoluer pour retrouver le sens de la subsidiarité et de l'efficacité, les deux termes étant indissociablement liés. L'Europe doit ainsi se donner davantage d'ambitions et de moyens dans les domaines où elle peut agir de manière beaucoup plus efficace que les Etats membres chacun de leur côté. Humaniser la mondialisation, à l'occasion notamment des négociations de l'OMC, constitue une véritable perspective d'action pour l'Europe, dont elle doit se saisir. De même, promouvoir une politique industrielle ambitieuse permettant la constitution de grandes entreprises dont le développement passe, aujourd'hui et demain, par l'Europe doit également être un axe fort de mobilisation de l'Union européenne. Nous découvrons hélas trop souvent la fragilité de nos entreprises au moment même où elles sont la proie de prises de contrôle hostiles.
En revanche, il convient de revenir sur certains dispositions qui contraignent inutilement la capacité d'initiative des Etats, parfois même contre l'esprit et contre la lettre des Traités. Je crois que l'harmonisation de la TVA pour des prestations locales comme la restauration ou la rénovation de logements est l'un de ces sujets.
Il ne s'agit absolument pas de contester que l'harmonisation fiscale doive progresser encore sur nombre de sujets où la concurrence fiscale entre les Etats membres est aujourd'hui devenue déloyale, comme en matière d'impôt sur les sociétés ou de droits sur les cigarettes et les produits pétroliers. Il ne s'agit pas davantage de remettre en cause les grandes orientations prises jusqu'à présent, souvent sur l'initiative de notre pays, pour harmoniser la fiscalité en Europe. Cependant, l'harmonisation fiscale, qui a permis la constitution d'un grand marché intérieur, ne peut méconnaître le principe de subsidiarité. C'est d'autant plus essentiel, à mes yeux, que ce principe est parfaitement compatible avec le maintien et le renforcement de l'acquis communautaire en matière d'impositions directes et indirectes.
Le Traité instituant la Communauté européenne n'a pas fixé un objectif d'harmonisation générale et inconditionnelle en matière de TVA, mais de lutte contre les distorsions de concurrence. L'article 93 du Traité définit très précisément l'objectif attribué à la Communauté ; « le Conseil, statuant à l'unanimité (?) arrête les dispositions touchant à l'harmonisation des législations relatives aux taxes sur le chiffre d'affaires (?) dans la mesure où cette harmonisation est nécessaire pour assurer l'établissement et le fonctionnement du marché intérieur ». L'action de la communauté doit être proportionnée strictement à cet objectif.
Nous devons en tirer toutes les conséquences en réformant dès que possible un système de décision qui, à l'évidence, aboutit aujourd'hui à des blocages inutiles. A mes yeux, la subsidiarité impose de mieux distinguer entre, d'une part, les biens et services échangeables d'un pays à l'autre, dont la taxation est susceptible d'affecter le fonctionnement du marché intérieur et, d'autres part, des prestations de services locales, qui peuvent être taxées différemment dans chaque Etat membre sans affecter en quoi que ce soit les échanges au sein de l'Union. S'agissant des premiers, l'acquis communautaire doit être intégralement préservé afin de pérenniser le marché unique, qui constitue désormais un débouché vital pour les entreprises françaises.
Au contraire, concernant les prestations locales, je suis convaincu que la décision de fixation des taux de TVA devrait appartenir aux seuls Etats membres. Appliquer en France un taux réduit de TVA sur la restauration, ce que par ailleurs 12 autres pays européens font déjà depuis 1992, ne conduira pas davantage d'allemands ou de Danois à venir se restaurer dans notre pays. Il en va de même pour la rénovation de logements.
Je souhaite que la France et ses partenaires prennent très rapidement l'initiative auprès de la Commission européenne, gardienne des Traités, afin de demander l'application du principe de subsidiarité à l'objectif de l'harmonisation de la TVA ainsi qu'aux différentes directives prises sur son fondement. Il ne s'agit ici, somme toute, que de revenir à la philosophie et à la lettre du Traité dans ce domaine.
Une fois le principe de subsidiarité réaffirmé, il appartiendra à chaque gouvernement de déterminer le taux de TVA applicable aux prestations locales. En France, des engagements forts ont été pris à l'égard de la restauration et du bâtiment. Ces engagements pourront alors être tenus. Le Gouvernement contribuera ainsi ? c'est là la seule justification du taux réduit de TVA ? à améliorer le pouvoir d'achat des consommateurs bénéficiant de prix moins élevés et à stimuler l'emploi dans deux secteurs économiques majeurs. Source http://www.u-m-p.org, le 3 février 2006
On peut bien entendu ressasser les occasions manquées de la construction européenne. Si le projet de Constitution avait été approuvé, nous pourrions nous rappeler qu'il comportait une clause « passerelle » permettant, si le Conseil européen le décidait à l'unanimité après l'approbation d'une majorité des membres du Parlement européen, de basculer d'une règle de décision à l'unanimité vers un choix à la majorité qualifiée. De même, si tous les Etats membres avaient accepté le passage de l'unanimité à la majorité qualifiée au sujet de la fiscalité, comme le propose la France, les atermoiements actuels ne se seraient jamais produits. Mais l'importance des enjeux économiques et sociaux liés au taux réduit de TVA nous impose d'être pragmatiques et d'agir rapidement, dans le cadre institutionnel d'aujourd'hui.
Ma conviction profonde a toujours été que l'Europe devait justement évoluer pour retrouver le sens de la subsidiarité et de l'efficacité, les deux termes étant indissociablement liés. L'Europe doit ainsi se donner davantage d'ambitions et de moyens dans les domaines où elle peut agir de manière beaucoup plus efficace que les Etats membres chacun de leur côté. Humaniser la mondialisation, à l'occasion notamment des négociations de l'OMC, constitue une véritable perspective d'action pour l'Europe, dont elle doit se saisir. De même, promouvoir une politique industrielle ambitieuse permettant la constitution de grandes entreprises dont le développement passe, aujourd'hui et demain, par l'Europe doit également être un axe fort de mobilisation de l'Union européenne. Nous découvrons hélas trop souvent la fragilité de nos entreprises au moment même où elles sont la proie de prises de contrôle hostiles.
En revanche, il convient de revenir sur certains dispositions qui contraignent inutilement la capacité d'initiative des Etats, parfois même contre l'esprit et contre la lettre des Traités. Je crois que l'harmonisation de la TVA pour des prestations locales comme la restauration ou la rénovation de logements est l'un de ces sujets.
Il ne s'agit absolument pas de contester que l'harmonisation fiscale doive progresser encore sur nombre de sujets où la concurrence fiscale entre les Etats membres est aujourd'hui devenue déloyale, comme en matière d'impôt sur les sociétés ou de droits sur les cigarettes et les produits pétroliers. Il ne s'agit pas davantage de remettre en cause les grandes orientations prises jusqu'à présent, souvent sur l'initiative de notre pays, pour harmoniser la fiscalité en Europe. Cependant, l'harmonisation fiscale, qui a permis la constitution d'un grand marché intérieur, ne peut méconnaître le principe de subsidiarité. C'est d'autant plus essentiel, à mes yeux, que ce principe est parfaitement compatible avec le maintien et le renforcement de l'acquis communautaire en matière d'impositions directes et indirectes.
Le Traité instituant la Communauté européenne n'a pas fixé un objectif d'harmonisation générale et inconditionnelle en matière de TVA, mais de lutte contre les distorsions de concurrence. L'article 93 du Traité définit très précisément l'objectif attribué à la Communauté ; « le Conseil, statuant à l'unanimité (?) arrête les dispositions touchant à l'harmonisation des législations relatives aux taxes sur le chiffre d'affaires (?) dans la mesure où cette harmonisation est nécessaire pour assurer l'établissement et le fonctionnement du marché intérieur ». L'action de la communauté doit être proportionnée strictement à cet objectif.
Nous devons en tirer toutes les conséquences en réformant dès que possible un système de décision qui, à l'évidence, aboutit aujourd'hui à des blocages inutiles. A mes yeux, la subsidiarité impose de mieux distinguer entre, d'une part, les biens et services échangeables d'un pays à l'autre, dont la taxation est susceptible d'affecter le fonctionnement du marché intérieur et, d'autres part, des prestations de services locales, qui peuvent être taxées différemment dans chaque Etat membre sans affecter en quoi que ce soit les échanges au sein de l'Union. S'agissant des premiers, l'acquis communautaire doit être intégralement préservé afin de pérenniser le marché unique, qui constitue désormais un débouché vital pour les entreprises françaises.
Au contraire, concernant les prestations locales, je suis convaincu que la décision de fixation des taux de TVA devrait appartenir aux seuls Etats membres. Appliquer en France un taux réduit de TVA sur la restauration, ce que par ailleurs 12 autres pays européens font déjà depuis 1992, ne conduira pas davantage d'allemands ou de Danois à venir se restaurer dans notre pays. Il en va de même pour la rénovation de logements.
Je souhaite que la France et ses partenaires prennent très rapidement l'initiative auprès de la Commission européenne, gardienne des Traités, afin de demander l'application du principe de subsidiarité à l'objectif de l'harmonisation de la TVA ainsi qu'aux différentes directives prises sur son fondement. Il ne s'agit ici, somme toute, que de revenir à la philosophie et à la lettre du Traité dans ce domaine.
Une fois le principe de subsidiarité réaffirmé, il appartiendra à chaque gouvernement de déterminer le taux de TVA applicable aux prestations locales. En France, des engagements forts ont été pris à l'égard de la restauration et du bâtiment. Ces engagements pourront alors être tenus. Le Gouvernement contribuera ainsi ? c'est là la seule justification du taux réduit de TVA ? à améliorer le pouvoir d'achat des consommateurs bénéficiant de prix moins élevés et à stimuler l'emploi dans deux secteurs économiques majeurs. Source http://www.u-m-p.org, le 3 février 2006