Texte intégral
Monsieur le Président, Monsieur le Député et Maire de Nancy,
Madame le Député,
Mesdames, Messieurs,
Je suis très heureux de clore cette Conférence européenne sur les forêts et la filière bois. Je remercie Madame le Député européen Véronique MATHIEU et Monsieur le Président André ROSSINOT de leur invitation, et me félicite de votre initiative.
Organiser, ici à Nancy, une telle manifestation est bienvenue tant la forêt en Lorraine et dans l'ensemble du Grand-Est de la France est riche et diverse. C'est un socle important pour les industries du bois présentes, qui profitent de l'abondance de la ressource, des facilités de communication et du carrefour européen de votre région. Votre conférence illustre l'intérêt de l'Europe tout entière pour sa forêt et la filière-bois. Celles-ci bénéficient d'une image positive qui doit être utile pour valoriser plus uniformément la forêt sur notre continent.
Votre rencontre m'offre l'occasion de tracer des perspectives pour la forêt européenne et de souligner une conception, que je crois aujourd'hui partagée, sur l'importance de la forêt et du bois dans le développement durable et dans l'équilibre des territoires ruraux. La filière forêt-bois doit jouer un rôle important dans l'activité économique tout en participant aux objectifs ambitieux de respect de l'environnement. Ces deux aspects sont complémentaires : un adage forestier ne dit-il pas « imiter la nature, hâter son oeuvre ».
A la lumière de vos travaux, dont je salue la qualité et la densité, j'aborderai trois défis :
- la valorisation de la forêt, source de croissance et d'emplois,
- la contribution de la forêt à la lutte contre l'effet de serre,
- enfin, l'articulation au niveau communautaire de ces enjeux.
I - Valoriser toute notre ressource forestière pour créer de l'activité et de l'emploi
Les forêts ont incontestablement une grande place sur le territoire européen en occupant 36% de sa surface. En France, chaque année, notre forêt produit naturellement 90 millions de m3 de bois. Cette ressource naturelle renouvelable, utilisable comme matière première ou comme source d'énergie, constitue une chance pour notre pays et notre continent. Or, votre Conférence l'a rappelé : seule une partie de l'accroissement de la forêt est exploitée chaque année, 70% pour la forêt européenne, moins encore pour la forêt française.
En fait, la filière forêt-bois, au niveau national comme au niveau communautaire, doit satisfaire à un certain nombre de critères économiques pour construire son avenir.
I - 1 Deux facteurs d'offre sont essentiels pour la compétitivité de la filière : l'organisation de l'offre et la diminution des coûts de transport
S'agissant de la France, je me félicite que la nouvelle inter-profession nationale France-Bois-Forêt, reconnue par arrêté en date du 27 mai dernier, se soit fixée des objectifs ambitieux au service de la filière. L'un de nos objectifs prioritaires pour la filière bois est d'assurer des circuits de commercialisation efficaces. Toutes les conditions sont aujourd'hui réunies pour faire évoluer les modes de vente et donner les moyens à l'Office national des forêts de sécuriser les approvisionnements. Avec la loi sur le développement des territoires ruraux, nous nous sommes donnés les moyens de permettre la contractualisation et la mutualisation de coupes issues de forêt domaniales et communales. Il s'agit d'assurer aux industriels, un approvisionnement de qualité et fiable dans la durée et, aux propriétaires, un financement pour leurs travaux sylvicoles.
Le regroupement de l'offre est primordial. Je tiens à saluer le travail des coopératives forestières, qui ont su développer en ce domaine des stratégies offensives pour aller de l'avant.
Plus largement, il faut souligner les efforts déployés par les propriétaires forestiers pour mobiliser davantage les bois grâce aux plans de développement de massif. Une démarche concertée et ciblée sur un massif forestier donné, associée à un travail d'animation, m'apparaît être une initiative pragmatique et efficace.
Les démarches de type charte forestière de territoire, associant propriétaires, les industriels de la filière et les collectivités territoriales, sont aussi de nature à atteindre cet objectif et sont soutenues financièrement par l'Etat.
La compétitivité de la filière nécessite également des conditions de transport optimisées entre les différents modes rail-route-fer. C'est un défi national mais je suis certains que nos partenaires européens rencontrent ces mêmes enjeux. Pour adapter le réseau national français, mon collègue Ministre des Transports, Monsieur Dominique PERBEN, et moi-même avons confié aux Préfets la tâche d'assurer les connections entre départements des itinéraires de desserte des massifs forestiers. Une carte actualisée du réseau sera dans les prochains jours sur le site internet du Ministère de l'agriculture.
I - 2 Pour préparer l'avenir et soutenir les investissements, la loi d'orientation agricole, en France, prévoit deux types de dispositif :
- un soutien fiscal pour les travaux, indispensables à une meilleure mobilisation des bois, comme la desserte, et les coupes et travaux de renouvellement et d'entretien des peuplements ;
- la déductibilité des cotisations aux associations syndicales autorisées de l'assiette de l'impôt sur le revenu pour les investissements de nature à prévenir les incendies. Ainsi, les propriétaires dynamiques qui se regroupent et s'engagent collectivement dans cette voie, recevront un soutien favorable à l'entretien de la forêt.
A cet égard, la protection des forêts contre les risques naturels constitue une priorité. Nous devons améliorer notre capacité d'anticipation et de réaction, mais également créer les outils permettant de mieux prévenir et réparer les dégâts liés à ces risques naturels. La forêt lorraine, dont 30% de la surface a été touchée, a trop souffert pour ne pas en mesurer les enjeux. Au niveau national, le plan chablis consacre 62 millions d'euros à la reconstitution des forêts, dont 17,3 millions pour la forêt lorraine. Après 6 ans de fonctionnement de ce programme, 660 millions d'euros ont été consommés sur les 915 millions prévus, soit 72% du total. L'engagement de l'Etat sera tenu jusqu'au terme du plan, en 2009 : 55 000 ha bénéficieront encore d'une aide au nettoyage ainsi que 193 000 ha pour la reconstitution de la forêt.
D'ores et déjà, sur ces aspects de protection contre les risques naturels, les fonds communautaires complètent l'intervention des Etats nationaux. Une mission du Parlement européen est prévue fin février en Aquitaine et dans le Sud-Est pour prendre connaissance des actions mises en oeuvre en France en matière de prévention des risques naturels.
La compétitivité de la filière bois-forêt européenne est décisive pour près de 3,4 millions d'emplois qui lui sont directement ou indirectement liés. C'est pourquoi nous devons nous mobiliser.
D'autres enjeux encore lui sont attachés.
II - Saisir l'opportunité des énergies renouvelables et de la lutte contre l'effet de serre
La valorisation de la biomasse, une de mes priorités pour 2006, dépasse le strict enjeu économique de la filière et répond pour partie au défi du changement climatique. C'est pourquoi je me félicite, comme je l'ai indiqué lors du Conseil Agriculture du 23 janvier, du plan d'action pour la biomasse que la Commission européenne a présenté en décembre dernier. Il laisse une large place à la sylviculture et aux forêts.
II - 1 Promouvoir des énergies renouvelables
La ressource forestière peut également se substituer au carbone fossile et contribuer aux économies d'énergies dans des proportions plus significatives qu'aujourd'hui. De multiples usages nouveaux apparaissent, qui offrent de réelles opportunités pour la compétitivité de la filière, pour autant qu'ils se développent en parfaite synergie avec les usages actuels. Nous devons trouver les moyens d'une mobilisation de la ressource disponible en harmonie avec les circuits existants. L'utilisation du bois non récolté, faute d'approvisionnement suffisamment organisé et adapté ou d'un accès approprié, peut, à cet égard, être encouragée.
Pour promouvoir l'utilisation de bois-énergie, le Gouvernement a, par exemple, décidé d'abaisser à 5,5 % le taux de TVA pour la fourniture de bois à usage non domestique. De même, je soutiens, dans le cadre des négociations communautaires engagées par la France, la diminution de la TVA sur les réseaux de chaleur à partir de biomasse. Je souhaite que l'Union européenne prenne la mesure d'une telle disposition pour l'avenir d'un secteur stratégique pour notre continent, la forêt et la préservation de l'environnement. Nous devrons, bien entendu, nous soumettre à la règle de l'unanimité dans cette matière.
II - 2 Derrière le bois énergie et la gestion durable : les « crédits carbone »
Aspect essentiel du bois-énergie, le bilan des émissions de gaz à effet de serre lui est très favorable. La forêt et le bois exercent un rôle prépondérant dans la séquestration du carbone et le CO2 stocké en forêt contribue significativement à la maîtrise des gaz à effet de serre.
Par ailleurs, l'utilisation de la biomasse forestière récoltée à des fins énergétiques (chaleur, bioélectricité, biocarburant, etc) se substitue à des énergies fossiles.
Ainsi, l'utilisation des produits de la forêt contribue à faciliter la réalisation de nos engagements dans le cadre du Protocole de Kyoto.
C'est pourquoi la loi d'orientation agricole publiée le 6 janvier dernier, affirme la nécessité de reconnaître l'apport du bois-forêt dans les mécanismes financiers à l'étude dans le cadre de la mise en oeuvre du protocole de Kyoto. L'intégration de la gestion forestière et de l'utilisation du bois dans les mécanismes de marché apporteront une réponse concrète à la valorisation des fonctions actuellement non marchandes de la forêt.
Le développement de la part des produits à base de bois sur notre marché intérieur est tout aussi primordial. Un effort de communication doit permettre l'accroissement de l'utilisation du bois dans la construction. Dans cette perspective, j'ai demandé au coordonnateur interministériel pour la valorisation de la biomasse, Claude ROY, de mettre en place un dispositif de suivi et d'évaluation de l'accord-cadre signé en 2001 par les Pouvoirs Publics et les professionnels.
En outre, le décret de la loi sur l'air rendant obligatoire un usage minimum de bois dans les constructions est signé et devrait être publié tout prochainement. Avec l'objectif de 400 000 logements à réaliser chaque année la consommation de bois dans les constructions représentera un minimum de 15 à 17 millions de m3 de grume.
J'ajoute qu'en matière d'environnement, la protection de la biodiversité implique une attention particulière pour les forêts tropicales et la lutte contre l'exploitation illégale des forêts. Je me félicite des avancées récentes du processus FLEGT sur l'application des réglementations forestières, la gouvernance et le commerce et en particulier l'adoption d'un règlement communautaire en décembre dernier.
Voilà les lignes forces du plan d'action de la France pour sa forêt ; il sera présenté au Conseil supérieur de la forêt et du bois, après une consultation du public qui démarre ce mois de février. Vous observerez combien les axes retenus rencontrent un écho au niveau communautaire.
III - Un défi : définir une politique communautaire articulée aux programmes nationaux
III - 1 Le Plan d'action de l'Union européenne
La conférence, qui s'achève, s'inscrit parfaitement dans l'agenda de l'actualité européenne sur la forêt. Au-delà des compétences propres à chaque Etat membre, les enjeux liés à la forêt et au bois dépassent très largement les frontières, qu'il s'agisse d'enjeux économiques, sociaux ou environnementaux.
C'est pourquoi le Conseil de l'Union européenne a invité en mai 2005 la Commission à lui proposer un plan d'action mi-2006. Ce plan est préparé en étroite collaboration avec les Etats membres et en consultation de toutes les parties concernées. Le Parlement européen adoptera dans les prochains jours un rapport très attendu en la matière.
Vos tables-rondes ont très certainement identifié les thèmes clés qui structureront ce plan : la convergence des logiques économique et écologique, la compétitivité de la filière et les nouveaux marchés, et la question cruciale d'une gouvernance forestière communautaire.
Ce plan d'action européen doit être un grand projet, ambitieux et porteur d'avenir pour la filière des forêts et du bois. Il s'appuiera sur la mobilisation des instruments financiers européens et mettra en oeuvre :
- une plate-forme technologique « forêt ». Cette démarche collective, que je soutiens, rassemble industriels, instituts de recherche et une vingtaine de pays européens. La compétition avec les plates-formes des autres secteurs sera rude. Mais je suis convaincu que l'extraordinaire mobilisation et la qualité du projet assureront à la plate-forme technologique forêt-bois-papier sa place dans le 7ème programme cadre de recherche et de développement (PCRD) 2007-2013.
- un observatoire européen des forêts, dont votre déclaration publique à l'issue de cette conférence défend avec justesse les enjeux.
III - 2 En effet, une gouvernance améliorée nécessite un outil comme l'observatoire européen des forêts
Les décisions communautaires en matière industrielle ou énergétiques créent un impact sur la filière bois. C'est pourquoi une coordination et une intégration des décisions prises sont nécessaires et appellent la mise en oeuvre d'une véritable gouvernance européenne pour la filière.
Outre la mobilisation des instruments financiers européens, une telle gouvernance a vocation à identifier les différentes politiques communautaires énergétiques ou industrielles qui concernent la filière bois.
La mise en oeuvre de cette politique forestière ambitieuse appelle une information précise fondée sur des critères et indicateurs reconnus par l'Europe tout entière. La création d'un observatoire européen des forêts apporterait sans conteste une valeur ajoutée indispensable, permettant d'éclairer les choix politiques. Cet observatoire constituerait, avec la plate-forme technologique, la première action concrète du plan européen.
La ville de Nancy possède une tradition forestière internationalement reconnue et le succès de cette conférence aujourd'hui en témoigne. Elle doit sa réputation fort légitime à de solides et sérieux atouts. Je pense notamment à ses compétences remarquables en recherche, en formation, et à la longue pratique de gestion des forêts dans sa région qui lui ont valu le label « pôle de compétence » pour la forêt. Je suis convaincu que si le principe de la création d'un observatoire européen pour les forêts était retenu, les qualités uniques de la ville de Nancy seraient unanimement reconnues et joueraient certainement en sa faveur pour déterminer son implantation.
CONCLUSION
Monsieur le Président, Monsieur le Député et Maire de Nancy,
Madame le Député européen,
Mesdames et Messieurs,
J'ai abordé des sujets d'avenir et dessiné des perspectives favorables pour le secteur forestier européen. Les atouts de notre continent sont en effet nombreux pour assurer un développement durable de la filière bois.
La forêt constitue la meilleure illustration de l'objectif assigné par le Président de la République à l'agriculture : être « économiquement efficace, écologiquement responsable ». Préserver l'environnement - nous en sommes ici tous convaincus -, c'est aussi le façonner, définir une action et une orientation pour notre cadre de vie. Ma vision, je vous l'ai présentée : valorisation économique et environnementale. Je souhaite que tous les Européens la partagent et que nous travaillions à sa mise en oeuvre. Ensemble, nous serons en mesure de mieux valoriser nos forêts et d'en assurer une gestion durable.
Dès le mois prochain, le Comité permanent forestier de la Commission présentera un premier projet du plan d'action pour les forêts européennes qui sera finalisé d'ici avril. Il reviendra au Conseil des Ministres de se prononcer en juin 2006.
Je vous remercie de votre attention et de votre soutien à un projet ambitieux pour les forêts et la filière bois européennes.
Source http://www.agriculture.gouv.fr, le 8 février 2006
Madame le Député,
Mesdames, Messieurs,
Je suis très heureux de clore cette Conférence européenne sur les forêts et la filière bois. Je remercie Madame le Député européen Véronique MATHIEU et Monsieur le Président André ROSSINOT de leur invitation, et me félicite de votre initiative.
Organiser, ici à Nancy, une telle manifestation est bienvenue tant la forêt en Lorraine et dans l'ensemble du Grand-Est de la France est riche et diverse. C'est un socle important pour les industries du bois présentes, qui profitent de l'abondance de la ressource, des facilités de communication et du carrefour européen de votre région. Votre conférence illustre l'intérêt de l'Europe tout entière pour sa forêt et la filière-bois. Celles-ci bénéficient d'une image positive qui doit être utile pour valoriser plus uniformément la forêt sur notre continent.
Votre rencontre m'offre l'occasion de tracer des perspectives pour la forêt européenne et de souligner une conception, que je crois aujourd'hui partagée, sur l'importance de la forêt et du bois dans le développement durable et dans l'équilibre des territoires ruraux. La filière forêt-bois doit jouer un rôle important dans l'activité économique tout en participant aux objectifs ambitieux de respect de l'environnement. Ces deux aspects sont complémentaires : un adage forestier ne dit-il pas « imiter la nature, hâter son oeuvre ».
A la lumière de vos travaux, dont je salue la qualité et la densité, j'aborderai trois défis :
- la valorisation de la forêt, source de croissance et d'emplois,
- la contribution de la forêt à la lutte contre l'effet de serre,
- enfin, l'articulation au niveau communautaire de ces enjeux.
I - Valoriser toute notre ressource forestière pour créer de l'activité et de l'emploi
Les forêts ont incontestablement une grande place sur le territoire européen en occupant 36% de sa surface. En France, chaque année, notre forêt produit naturellement 90 millions de m3 de bois. Cette ressource naturelle renouvelable, utilisable comme matière première ou comme source d'énergie, constitue une chance pour notre pays et notre continent. Or, votre Conférence l'a rappelé : seule une partie de l'accroissement de la forêt est exploitée chaque année, 70% pour la forêt européenne, moins encore pour la forêt française.
En fait, la filière forêt-bois, au niveau national comme au niveau communautaire, doit satisfaire à un certain nombre de critères économiques pour construire son avenir.
I - 1 Deux facteurs d'offre sont essentiels pour la compétitivité de la filière : l'organisation de l'offre et la diminution des coûts de transport
S'agissant de la France, je me félicite que la nouvelle inter-profession nationale France-Bois-Forêt, reconnue par arrêté en date du 27 mai dernier, se soit fixée des objectifs ambitieux au service de la filière. L'un de nos objectifs prioritaires pour la filière bois est d'assurer des circuits de commercialisation efficaces. Toutes les conditions sont aujourd'hui réunies pour faire évoluer les modes de vente et donner les moyens à l'Office national des forêts de sécuriser les approvisionnements. Avec la loi sur le développement des territoires ruraux, nous nous sommes donnés les moyens de permettre la contractualisation et la mutualisation de coupes issues de forêt domaniales et communales. Il s'agit d'assurer aux industriels, un approvisionnement de qualité et fiable dans la durée et, aux propriétaires, un financement pour leurs travaux sylvicoles.
Le regroupement de l'offre est primordial. Je tiens à saluer le travail des coopératives forestières, qui ont su développer en ce domaine des stratégies offensives pour aller de l'avant.
Plus largement, il faut souligner les efforts déployés par les propriétaires forestiers pour mobiliser davantage les bois grâce aux plans de développement de massif. Une démarche concertée et ciblée sur un massif forestier donné, associée à un travail d'animation, m'apparaît être une initiative pragmatique et efficace.
Les démarches de type charte forestière de territoire, associant propriétaires, les industriels de la filière et les collectivités territoriales, sont aussi de nature à atteindre cet objectif et sont soutenues financièrement par l'Etat.
La compétitivité de la filière nécessite également des conditions de transport optimisées entre les différents modes rail-route-fer. C'est un défi national mais je suis certains que nos partenaires européens rencontrent ces mêmes enjeux. Pour adapter le réseau national français, mon collègue Ministre des Transports, Monsieur Dominique PERBEN, et moi-même avons confié aux Préfets la tâche d'assurer les connections entre départements des itinéraires de desserte des massifs forestiers. Une carte actualisée du réseau sera dans les prochains jours sur le site internet du Ministère de l'agriculture.
I - 2 Pour préparer l'avenir et soutenir les investissements, la loi d'orientation agricole, en France, prévoit deux types de dispositif :
- un soutien fiscal pour les travaux, indispensables à une meilleure mobilisation des bois, comme la desserte, et les coupes et travaux de renouvellement et d'entretien des peuplements ;
- la déductibilité des cotisations aux associations syndicales autorisées de l'assiette de l'impôt sur le revenu pour les investissements de nature à prévenir les incendies. Ainsi, les propriétaires dynamiques qui se regroupent et s'engagent collectivement dans cette voie, recevront un soutien favorable à l'entretien de la forêt.
A cet égard, la protection des forêts contre les risques naturels constitue une priorité. Nous devons améliorer notre capacité d'anticipation et de réaction, mais également créer les outils permettant de mieux prévenir et réparer les dégâts liés à ces risques naturels. La forêt lorraine, dont 30% de la surface a été touchée, a trop souffert pour ne pas en mesurer les enjeux. Au niveau national, le plan chablis consacre 62 millions d'euros à la reconstitution des forêts, dont 17,3 millions pour la forêt lorraine. Après 6 ans de fonctionnement de ce programme, 660 millions d'euros ont été consommés sur les 915 millions prévus, soit 72% du total. L'engagement de l'Etat sera tenu jusqu'au terme du plan, en 2009 : 55 000 ha bénéficieront encore d'une aide au nettoyage ainsi que 193 000 ha pour la reconstitution de la forêt.
D'ores et déjà, sur ces aspects de protection contre les risques naturels, les fonds communautaires complètent l'intervention des Etats nationaux. Une mission du Parlement européen est prévue fin février en Aquitaine et dans le Sud-Est pour prendre connaissance des actions mises en oeuvre en France en matière de prévention des risques naturels.
La compétitivité de la filière bois-forêt européenne est décisive pour près de 3,4 millions d'emplois qui lui sont directement ou indirectement liés. C'est pourquoi nous devons nous mobiliser.
D'autres enjeux encore lui sont attachés.
II - Saisir l'opportunité des énergies renouvelables et de la lutte contre l'effet de serre
La valorisation de la biomasse, une de mes priorités pour 2006, dépasse le strict enjeu économique de la filière et répond pour partie au défi du changement climatique. C'est pourquoi je me félicite, comme je l'ai indiqué lors du Conseil Agriculture du 23 janvier, du plan d'action pour la biomasse que la Commission européenne a présenté en décembre dernier. Il laisse une large place à la sylviculture et aux forêts.
II - 1 Promouvoir des énergies renouvelables
La ressource forestière peut également se substituer au carbone fossile et contribuer aux économies d'énergies dans des proportions plus significatives qu'aujourd'hui. De multiples usages nouveaux apparaissent, qui offrent de réelles opportunités pour la compétitivité de la filière, pour autant qu'ils se développent en parfaite synergie avec les usages actuels. Nous devons trouver les moyens d'une mobilisation de la ressource disponible en harmonie avec les circuits existants. L'utilisation du bois non récolté, faute d'approvisionnement suffisamment organisé et adapté ou d'un accès approprié, peut, à cet égard, être encouragée.
Pour promouvoir l'utilisation de bois-énergie, le Gouvernement a, par exemple, décidé d'abaisser à 5,5 % le taux de TVA pour la fourniture de bois à usage non domestique. De même, je soutiens, dans le cadre des négociations communautaires engagées par la France, la diminution de la TVA sur les réseaux de chaleur à partir de biomasse. Je souhaite que l'Union européenne prenne la mesure d'une telle disposition pour l'avenir d'un secteur stratégique pour notre continent, la forêt et la préservation de l'environnement. Nous devrons, bien entendu, nous soumettre à la règle de l'unanimité dans cette matière.
II - 2 Derrière le bois énergie et la gestion durable : les « crédits carbone »
Aspect essentiel du bois-énergie, le bilan des émissions de gaz à effet de serre lui est très favorable. La forêt et le bois exercent un rôle prépondérant dans la séquestration du carbone et le CO2 stocké en forêt contribue significativement à la maîtrise des gaz à effet de serre.
Par ailleurs, l'utilisation de la biomasse forestière récoltée à des fins énergétiques (chaleur, bioélectricité, biocarburant, etc) se substitue à des énergies fossiles.
Ainsi, l'utilisation des produits de la forêt contribue à faciliter la réalisation de nos engagements dans le cadre du Protocole de Kyoto.
C'est pourquoi la loi d'orientation agricole publiée le 6 janvier dernier, affirme la nécessité de reconnaître l'apport du bois-forêt dans les mécanismes financiers à l'étude dans le cadre de la mise en oeuvre du protocole de Kyoto. L'intégration de la gestion forestière et de l'utilisation du bois dans les mécanismes de marché apporteront une réponse concrète à la valorisation des fonctions actuellement non marchandes de la forêt.
Le développement de la part des produits à base de bois sur notre marché intérieur est tout aussi primordial. Un effort de communication doit permettre l'accroissement de l'utilisation du bois dans la construction. Dans cette perspective, j'ai demandé au coordonnateur interministériel pour la valorisation de la biomasse, Claude ROY, de mettre en place un dispositif de suivi et d'évaluation de l'accord-cadre signé en 2001 par les Pouvoirs Publics et les professionnels.
En outre, le décret de la loi sur l'air rendant obligatoire un usage minimum de bois dans les constructions est signé et devrait être publié tout prochainement. Avec l'objectif de 400 000 logements à réaliser chaque année la consommation de bois dans les constructions représentera un minimum de 15 à 17 millions de m3 de grume.
J'ajoute qu'en matière d'environnement, la protection de la biodiversité implique une attention particulière pour les forêts tropicales et la lutte contre l'exploitation illégale des forêts. Je me félicite des avancées récentes du processus FLEGT sur l'application des réglementations forestières, la gouvernance et le commerce et en particulier l'adoption d'un règlement communautaire en décembre dernier.
Voilà les lignes forces du plan d'action de la France pour sa forêt ; il sera présenté au Conseil supérieur de la forêt et du bois, après une consultation du public qui démarre ce mois de février. Vous observerez combien les axes retenus rencontrent un écho au niveau communautaire.
III - Un défi : définir une politique communautaire articulée aux programmes nationaux
III - 1 Le Plan d'action de l'Union européenne
La conférence, qui s'achève, s'inscrit parfaitement dans l'agenda de l'actualité européenne sur la forêt. Au-delà des compétences propres à chaque Etat membre, les enjeux liés à la forêt et au bois dépassent très largement les frontières, qu'il s'agisse d'enjeux économiques, sociaux ou environnementaux.
C'est pourquoi le Conseil de l'Union européenne a invité en mai 2005 la Commission à lui proposer un plan d'action mi-2006. Ce plan est préparé en étroite collaboration avec les Etats membres et en consultation de toutes les parties concernées. Le Parlement européen adoptera dans les prochains jours un rapport très attendu en la matière.
Vos tables-rondes ont très certainement identifié les thèmes clés qui structureront ce plan : la convergence des logiques économique et écologique, la compétitivité de la filière et les nouveaux marchés, et la question cruciale d'une gouvernance forestière communautaire.
Ce plan d'action européen doit être un grand projet, ambitieux et porteur d'avenir pour la filière des forêts et du bois. Il s'appuiera sur la mobilisation des instruments financiers européens et mettra en oeuvre :
- une plate-forme technologique « forêt ». Cette démarche collective, que je soutiens, rassemble industriels, instituts de recherche et une vingtaine de pays européens. La compétition avec les plates-formes des autres secteurs sera rude. Mais je suis convaincu que l'extraordinaire mobilisation et la qualité du projet assureront à la plate-forme technologique forêt-bois-papier sa place dans le 7ème programme cadre de recherche et de développement (PCRD) 2007-2013.
- un observatoire européen des forêts, dont votre déclaration publique à l'issue de cette conférence défend avec justesse les enjeux.
III - 2 En effet, une gouvernance améliorée nécessite un outil comme l'observatoire européen des forêts
Les décisions communautaires en matière industrielle ou énergétiques créent un impact sur la filière bois. C'est pourquoi une coordination et une intégration des décisions prises sont nécessaires et appellent la mise en oeuvre d'une véritable gouvernance européenne pour la filière.
Outre la mobilisation des instruments financiers européens, une telle gouvernance a vocation à identifier les différentes politiques communautaires énergétiques ou industrielles qui concernent la filière bois.
La mise en oeuvre de cette politique forestière ambitieuse appelle une information précise fondée sur des critères et indicateurs reconnus par l'Europe tout entière. La création d'un observatoire européen des forêts apporterait sans conteste une valeur ajoutée indispensable, permettant d'éclairer les choix politiques. Cet observatoire constituerait, avec la plate-forme technologique, la première action concrète du plan européen.
La ville de Nancy possède une tradition forestière internationalement reconnue et le succès de cette conférence aujourd'hui en témoigne. Elle doit sa réputation fort légitime à de solides et sérieux atouts. Je pense notamment à ses compétences remarquables en recherche, en formation, et à la longue pratique de gestion des forêts dans sa région qui lui ont valu le label « pôle de compétence » pour la forêt. Je suis convaincu que si le principe de la création d'un observatoire européen pour les forêts était retenu, les qualités uniques de la ville de Nancy seraient unanimement reconnues et joueraient certainement en sa faveur pour déterminer son implantation.
CONCLUSION
Monsieur le Président, Monsieur le Député et Maire de Nancy,
Madame le Député européen,
Mesdames et Messieurs,
J'ai abordé des sujets d'avenir et dessiné des perspectives favorables pour le secteur forestier européen. Les atouts de notre continent sont en effet nombreux pour assurer un développement durable de la filière bois.
La forêt constitue la meilleure illustration de l'objectif assigné par le Président de la République à l'agriculture : être « économiquement efficace, écologiquement responsable ». Préserver l'environnement - nous en sommes ici tous convaincus -, c'est aussi le façonner, définir une action et une orientation pour notre cadre de vie. Ma vision, je vous l'ai présentée : valorisation économique et environnementale. Je souhaite que tous les Européens la partagent et que nous travaillions à sa mise en oeuvre. Ensemble, nous serons en mesure de mieux valoriser nos forêts et d'en assurer une gestion durable.
Dès le mois prochain, le Comité permanent forestier de la Commission présentera un premier projet du plan d'action pour les forêts européennes qui sera finalisé d'ici avril. Il reviendra au Conseil des Ministres de se prononcer en juin 2006.
Je vous remercie de votre attention et de votre soutien à un projet ambitieux pour les forêts et la filière bois européennes.
Source http://www.agriculture.gouv.fr, le 8 février 2006