Déclaration de M. Hervé Novelli, secrétaire d'Etat chargé des entreprises et du commerce extérieur, sur les enjeux de la lutte contre la contrefaçon ainsi que sur la ratification de l'accord de Londres par le gouvernement, Paris le 19 septembre 2007.

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Circonstance : Discussion générale sur le projet de loi de lutte contre la contrefaçon au Sénat le 19 septembre 2007

Texte intégral

Monsieur le Président,
Monsieur le Président de la Commission des lois, (Jean-Jacques Hyest)
Monsieur le Rapporteur, (Laurent Béteille)
Mesdames et Messieurs les Sénateurs,
Je souhaite saluer le remarquable travail effectué par le Sénat, et tout particulièrement par la Commission des Lois et le Rapporteur, sur ce projet de loi. Je remercie le Rapporteur pour avoir posé clairement les enjeux de notre débat d'aujourd'hui. Je salue également la qualité des propos des différents intervenants, quelle que soit d'ailleurs la partie de l'hémicycle dont ils proviennent.
Je vais répondre dans quelques instants aux différents points qui viennent d'être soulevés.
Toutefois, permettez moi de vous rappeler tout d'abord en quelques mots pourquoi cet impératif de lutte contre la contrefaçon dont nous discutons aujourd'hui constitue également un élément essentiel de notre politique plus globale de promotion de l'innovation.
Car ce qui aujourd'hui fait la différence, c'est l'innovation, c'est la capacité de créer des produits et des services nouveaux, qui vont permettre de conquérir de nouveaux marchés, dans des conditions de compétitivité améliorée.
Dans ce contexte, le rôle de la propriété industrielle se renforce : elle permet de protéger et de valoriser les avantages compétitifs des entreprises innovantes, elle favorise les partenariats technologiques, et elle représente également la plus grande partie des actifs immatériels des entreprises.
La protection de la propriété intellectuelle est bel et bien la clé de voûte de l'innovation : elle constitue un facteur essentiel du développement des entreprises, de création de valeurs et d'emplois. Or, la contrefaçon ralentit l'innovation en privant les entreprises de la valorisation de leur créativité.
La contrefaçon constitue en effet une spoliation des titulaires de droits des fruits de leurs efforts pour développer de nouveaux produits ou services et, par voie de conséquence, un frein majeur à l'innovation et par conséquent à la croissance et à l'emploi qualifié.
Dans une économie de la connaissance où l'innovation représente une source majeure de différenciation, toutes les atteintes portées aux titulaires de droits ne peuvent que réduire leurs capacités à mettre en oeuvre des plans de croissance et amputer leurs moyens d'investissement et de recrutement. Pour les entreprises, ce phénomène entraîne une perte de chiffres d'affaires, de parts de marchés et des diminutions de bénéfices. Il est également synonyme de préjudice moral ainsi que d'atteinte à l'image et à la réputation de l'entreprise victime. La contrefaçon engendre enfin des coûts en matière de défense des droits et constitue une barrière à l'export.
Pour preuve, un récent rapport de l'OCDE sur ce sujet a montré que la Chine elle-même voit son potentiel d'innovation amputé par l'importance de la contrefaçon sur son propre territoire, qui crée un environnement peu propice aux efforts de recherche des entreprises chinoises.
Avec ce projet de loi qui améliore le cadre législatif de lutte contre la contrefaçon, le gouvernement assure aux entreprises la nécessaire sécurité juridique dans la défense de leurs titres de propriété industrielle, il assure la confiance des entreprises dans la défense de leurs innovations. Il s'inscrit d'ailleurs dans la lignée de la loi Longuet de 1994 qui a posé les principaux jalons dans ce domaine.
Ce projet de loi s'insère dans un ensemble de mesures plus générales que nous mettons en oeuvre en matière d'innovation : à titre d'exemple, réforme ambitieuse du crédit d'impôt recherche, fusion d'Oseo et de l'Agence de l'innovation et renforcement de notre soutien aux entreprises moyennes, assouplissement de la fiscalité des brevets qu'évoquait tout à l'heure Christine Lagarde, ou encore ratification de l'Accord de Londres.
C'est cela le message que je voulais vous adresser aujourd'hui : tout autant que de la lutte contre la contrefaçon, c'est de la promotion de l'innovation et donc de la croissance que traite, à mon sens, ce projet de loi. Car lutter contre la contrefaçon, c'est favoriser l'effort de recherche et d'innovation de notre pays.
J'en viens maintenant aux éléments que vous avez soulevé lors de vos interventions.
Monsieur le Rapporteur, vous avez en particulier évoqué une spécialisation accrue des juridictions en charge de la propriété intellectuelle. Nous allons y revenir dans la discussion des articles, mais celle-ci me paraît de nature à permettre un règlement plus rapide et plus efficace des litiges au bénéfice des opérateurs économiques. Nous y sommes favorables.
Monsieur le Rapporteur, vous avez également défendu dans votre intervention la création d'une circonstance aggravante au délit de contrefaçon, lorsque les produits contrefaisants présentent un risque pour la santé ou la sécurité de l'homme ou de l'animal. Cette proposition permet de souligner que les produits contrefaisants, de mauvaise qualité voire défectueux, peuvent présenter de réels dangers pour l'homme et pour l'animal. Votre proposition est donc opportune car elle durcit les peines en cas d'atteinte à la santé humaine. Bien évidemment, le principe, tout à fait essentiel, selon lequel toute contrefaçon, quel que soit son objet, quel que soit le secteur d'activité concerné, est intrinsèquement néfaste et doit être combattu, doit être maintenu.
Monsieur le Sénateur Cambon, vous avez évoqué à juste titre la question de la coopération internationale. Comme l'a indiqué Christine Lagarde, l'action internationale en matière de contrefaçons du Gouvernement se décline à travers des actions bilatérales concrètes : la France réunit régulièrement des comités bilatéraux de lutte contre la contrefaçon avec des Etats particulièrement concernés, la Russie, l'Italie. J'espère d'ailleurs que le comité franco-italien de lutte contre la contrefaçon pourra se réunir de nouveau prochainement.
Pour répondre à la Sénatrice Demessine sur la question des emplois, Christine Lagarde vous a indiqué que l'on pouvait considérer que la contrefaçon est responsable de la perte de 30 000 emplois par an en France. La lutte contre la contrefaçon ne peut donc que s'inscrire dans la politique plus générale du gouvernement en faveur de l'emploi. Accroître l'efficacité du dispositif de lutte contre la contrefaçon, c'est lutter pour la compétitivité des entreprises françaises, c'est assurer la création et le maintien des emplois dans des secteurs essentiels pour l'économie française. Le gouvernement ne peut donc que partager la volonté que vous exprimez sur ce point.
Sur l'Accord de Londres, dont a parlé M. Yung, la discussion parlementaire au fond aura bien évidemment lieu lors de l'examen du projet de loi autorisant la ratification de cet accord, à l'Assemblée nationale le 26 septembre prochain, puis au Sénat.
Vous savez que le gouvernement est favorable à la ratification de l'Accord de Londres : cet accord renforce, en effet, la place de la langue française comme langue officielle au sein du système européen des brevets et surtout favorise l'accès des entreprises au brevet européen en opérant une réduction de son coût d'obtention. Cet accord est donc favorable aux entreprises et à la compétitivité de notre économie.
Source http://www.minefi.gouv.fr, le 24 septembre 2007